Exposé du cas clinique

Exposé du cas clinique

Reanim Urgences 2000 ; 9 : 26-41 Article special ©2000 I~ditions scientifiques et medicales Elsevier SAS, Tous droits r6serves C as cli n iq ue d e...

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Reanim Urgences 2000 ; 9 : 26-41

Article special

©2000 I~ditions scientifiques et medicales Elsevier SAS, Tous droits r6serves

C as cli n iq ue d e 1a session 6thique du c0ngr s de la SRLF 1999 O

epuis quelques ann6es, la Soci6t6 de r6animation de langue franqaise ( S R L F ) inscrit au programme de son congrbs annuel la discussion d'un cas clinique soulevant des questions d'dthique, Ces discussions n'ont pas pour objectif de d6finir dans chaque cas une conduite plus particuli~rement recommandable au regard de l'6thique, I1 s'agit en effet toujours de cas difficiles off une conduite ne s'impose absolument, ni ~ l'6vidence, ni en conclusion d'une r6flexion 61abor6e. Le but des discussions 6thiques ~ propos de cas cliniques est plut6t de contribuer ~ bien cerner les probl~mes soulev6s, de les aborder sous tous

Exp0s6 du

eas

leurs aspects, d'en faire une analyse aussi complete que possible. I1 est 6galement de les 6clairer par le rappel des principes de l'6thique qu'ils mettent ~t l'6preuve et de tracer, pour finir, les voies qui permettent de leur trouver une solution acceptable. Dans tous les cas, celle-ci doit 6viter aussi bien la pr6cipitation que l'irr6solution, le dogmatisme que le scepticisme int6gral, En r6gle g6n6rale, les discussions 6thiques h propos de cas cliniques pr6sent6s ~t la SRLF sont pluridisciplinaires. Pour les expos6s qui introduisent la discussion, il est fait appel h des m6decins r6animateurs, ~ des infirmibres, ~ des juristes, ~

clinique

E. Azoulay Service de reanimation medicale, hOpital Saint-Louis, 1, avenue Glaude-Vellefaux, 75475 Paris cedex 10, France.

onsieur X, 38 ans, a 6t6 hospitalis6 en r6animation pour insuffisance resp i r a t o i r e aiguE. I1 n ' a v a i t aucun ant6c6dent m6dical ou chirurgical. I1 6tait mari~ depuis quatre ans et avait

M

un enfant de 18 mois. Dbs l'admission, l'ensemble des 616ments cliniques, biologiques et radiographiques dtaient compatibles avec le diagnostic de pneumocystose pulmonaire du sujet infect6 par le VIH ;

desphilosophes,

th6ologiens.

parfoishdes

Les contributions des intervenants invit6s h commenter l e c a s clinique d'6thique pr6sent6 au congr6s de la ~.~ ~ . 1999, et la synthbse q u i a paru pouvoir ~tre esquiss6e h l'issue de la discussion font l'objet des textes qui suivent : - ~ Expos6 du cas clinique ~, E. Azoulay, m6decin r6animateur ; - ~ L'avis du m6decin r6animateur ,~, O. Pourrat, m6decin r6animateur ; - ~ Le point de vue du juriste : les fronti6res du secret m6dical ~, V. Rachet-Darfeuille, juriste ; - ~< L' analyse du p h i l o s o p h e ~, S. Rameix, philosophe ; -~< t~clairer le pr6sent par le pass6 ? ~, J.C. Besanceney, th6ologien catholique ; - ~ Aspects relationnels ~, E Pochard, m6decin psychiatre ; -~>, E Nicolas, mddecin rdanimateur.

une s6rologie a dt6 demand6e en urgence avec l'accord du patient. Tr6s rapidement, l'~tat respiratoire du patient s'est d6grad6 e t a ndcessit6 intubation et ventilation mdcanique sous s6dation profonde. Les r6sultats des diff6rentes investigations rdalis6es ont confirm6 le diagnostic pr6sumd de pneumocystose et de s~ropositivit6 pour le VIH. Le patient 6tant profond6ment endormi, il n'a pas 6td mis au courant de ces r6sultats. L'6pousedemonsieurXn'6taitpas une professionnelle de santE. Elle a 6t6 inform6e du diagnostic de <
Cas clinique de la session ~thique du eongr~s de la SRLF 1999

monie >>, de la gravit6 et du risque d'6volution d6favorable ainsi que d ' u n traitement par antibiotiques (Bactrim ®) et anti-inflammatoires (cortico'ides). Elle nous a fait part de son inquietude liEe au fait que leur en-

fantavaitdelafi~vredepuisdixjours, et avait eu plusieurs 6pisodes d'infection ORL l'ann6e pr6c6dente, Fallait-il lui annoncer le diagnostic de monsieur X pour la sEropositivitE VIH ? I

L'avis du m decin r animateur O. Pourrat Service de r6animation m~dicale, CHU, 350, avenue Jacques-Cceur, BP 577,

86021 Poitiers cedex, France.

L

e rEanimateur peut trouver des arguments p o u r et des atguments contre l'annonce de la sEropositivitE VIH ~ l'Epouse du patient, Les arguments amenanthenvisager l'annonce de la sEropositivitE sont avant tout le risque de faire courir une perte de chances ~t l'Epouse en raison du danger que reprEsenterait l'existence d'une positivitE VIH chez elle et/ou chez son enfant. I1 serait en effet possible d'envisager, en cas de positivitE VIH, un traitement antiviral pouvant permettre de diminuer le risque de l'Evolution vers un sida authentique. Ce risque de perte de chances est d'autant plus ~ Evoquer que l'enfant a des infections rEcidivantes pouvant rEvEler une immunodepression, notamment par des germes opportunistes qui pourraient releverdetraitements spEcifiques. On peut imaginer que l'Epouse pourrait finalement porter plainte contre le rEanimateur qui ne lui aurait pas rEvE1Ela sEropositivitE VIH de son mari, pour non-assistance h personne en peril, La dimension collective du r61e du mEdecin dans l'intEr~t de la santE pu-

blique reprEsente un autre argument pour annoncer la sEropositivitE, d'autant que cette dimension mEdicale a toujours EtE affirmEe pour les maladies contagieuses comme les maladies sexuellement transmissibles (MST), notamment pour la syphilis, On peut se poser la question de savoir si, en cas de tuberculose pulmonaire du patient, le mEdecin refuserait de communiquer le diagnostic ~t son Epouse, et s'il ne lui demanderait pas de passer un cliche thoracique, ainsi qu'h son enfant ? D'autres arguments pour annoncer la sfropositivitE peuvent ~tre reprEsentEs par le fait que l'Epouse, qui n'est pas d'un milieu medical ou paramEdical, n'a pas les connaissances suffisantes pour deviner le diagnostic, que son mari n'est pas en Etat de lui rEvEler sa sEropositivitE et que le mEdecin peut donc le faire ~t sa place. Cela est d'autant plus vrai que le patient n'a pas refus6 qu'on pratique chez lui la serologic VIH et qu'il n' a pas exprimE ~ ce moment 1~ son refus que le rEsultat de cet examen soit donne ~ son Epouse en cas de sEropositivitE. Le transfert Eventuel de la tfiche de rEvEler la sEropo-

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sitivit6 au m6decin de famille, par exemple, serait un manque de responsabilit6 du mEdecin hospitalier et une hypocrisie. Un autre argument pour annoncer la sEropositivitE h l'Epouse de ce patient est que celle-ci ne serait pas en mesure de comprendre les precautions particuli~res d'hygi6ne prises par le personnel soignant si on ne lui rEvElait pas que son mari a une maladie infectieuse contagieuse. Puisqu'on serait oblige de demander ~ l'Epouse de prendre les precautions d'hygi~ne particulibres h ce type de situation, il serait difficile de ne pas aller plus loin dans cette information en lui disant pourquoi ces precautions sont indispensables et ce, d'autant plus que le patient n'a pas exprimE le refus d'une divulgation du diagnostic en cas de sEropositivitE. Un dernier argument pourrait &re que le patient est engage par le mariage dans une c o m m u n a u t E de confiance qui donne ~t chacun des Epoux des droits mais Egalement des devoirs civils. A l'opposE, les arguments amenant ~t refuser l'annonce de la sEropositivitE ~ l'Epouse de ce patient sont en premier lieu d'ordre dEontologique : le mEdecin est lie par le secret mEdical dans le cadre du <>. Le caract~re g6nEral et absolu du secret medical doit Etre rappelE. Un argument d'ordre juridique est reprEsentE par le fait que le mEdecin ne peut ~tre dEliE du secret medical que par la volontE du malade lui-m~me (sauf si la loi l'impose ou l'autorise). SilemEdecindivulguait~ l'entourage une information faisant partie du contrat le liant ~ lui et incluant le secret medical, le malade pourrait ultErieurement se retourner contre le mEdecin n'ayant pas respectE le secret medical. De plus, on peut remarquer qu'il n'existe aucune obligation 16gale de traitement pour