Faut-il proposer un examen TDM avec synchronisation ECG dans les urgences thoraciques ?

Faut-il proposer un examen TDM avec synchronisation ECG dans les urgences thoraciques ?

J Radiol 2007;88:1130-1 © Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2007 Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés analyse commentée Faut-...

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J Radiol 2007;88:1130-1 © Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2007 Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

analyse commentée

Faut-il proposer un examen TDM avec synchronisation ECG dans les urgences thoraciques ? JP Laissy Analyse de l’article « Usefulness of 64-Slice Cardiac Computed Tomographic Angiography for Diagnosing Acute Coronary Syndromes and Predicting Clinical Outcome in Emergency Department Patients With Chest Pain of Uncertain Origin ». Circulation 2007;115:1762-8. ême si de nombreux centres sont à même de faire de l’imagerie cardiaque, la première réponse à cette question est restrictive : il faut disposer d’un appareil 64 coupes (1), car les appareils 16 coupes sont insuffisants (2) et les temps d’apnée avec un 40 coupes trop longs (1). La deuxième réponse repose sur les données d’une étude publiée cette année dans Circulation (3). Dans cette étude avec un suivi de 15 mois, les auteurs ont étudié prospectivement 58 patients avec douleur thoracique et probabilité intermédiaire de maladie coronarienne. Cette étude a examiné les performances diagnostiques de la TDM 64 coupes (TDM64C) pour diagnostiquer ou exclure un syndrome coronaire aigu (SCA) chez les patients admis au service des Urgences (SAU) avec douleur thoracique ischémique potentielle, et examiné la relation à l’évolution clinique pendant une période de suivi de 15 mois. L’étude était une analyse prospective des données de TDM64C rassemblées pendant une période de trois mois, où des patients consécutifs avec douleur thoracique ischémique potentielle se présentant aux Urgences aux heures ouvrables ont été inclus. Le protocole standard aux Urgences de sélection des patients présentant des symptômes suggestifs de SCA sur la base des recommandations de l’ACC/AHA (4) reposait sur 3 catégories en fonction de la présentation clinique, de l’ECG (sus-décalage du segment ST ≥ 0,5 millimètre), et des marqueurs sériques à l’arrivée aux Urgences (si négatifs répétés 6 à 9 heures plus tard) (troponine cardiaque T anormale au-dessus de 0,1 ng/mL) L’étude a inclus des patients avec risque intermédiaire (voir ci-dessous) et sans symptômes médicalement définis parce que les patients à haut risque ou ayant un SCA évident étaient hospitalisés et traités directement, tandis que ceux à faible risque (symptômes non cardiaques ou plaintes non ischémiques) n’ont pas été admis. Les patients avec risque intermédiaire qui étaient éligibles (spécifiquement ceux avec ECG normal et aucun critère d’exclusion tel que suspicion clinique d’embolie pulmonaire, de dissection aortique, ou de péricardite) ont eu un exercice sur tapis roulant avant d’avoir l’examen TDM64C. Ceci a été réalisé chez 26 (45 %) des 58 patients étudiés et l’essai de tapis roulant n’a pas apporté de diagnostic d’une manière concluante positive ou négative. La corrélation entre les résultats de la TDM64C aux Urgences et le diagnostic définitif de SCA a été établie sur la base des tests de diagnostic standard. Le diagnostic de SCA était porté sur la base de biomarqueurs cardiaques élevés dans les 7 jours

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Service d’Imagerie médicale, Hôpital Bichat, 46, rue Henri Huchard, 75018 Paris. Correspondance : JP Laissy E-mail : [email protected]

suivant la TDM64C, des défects myocardiques de perfusion sur la tomoscintigraphie monophotonique, ou de sténoses coronaires > 50 % à la coronarographie. Dans cette population, 17 patients TDM64C-positifs ont eu une indication de coronarographie, et 6 autres patients TDM64C-positifs ont été examinés par scintigraphie myocardique de perfusion de stress. Chez les patients non admis, le suivi par téléphone avait lieu le jour suivant, 1 semaine après, et à 6, 12, et 15 mois. Les événements cardiovasculaires majeurs définis comme le décès, un infarctus du myocarde, une revascularisation coronaire non planifiée, ou un nouveau déplacement aux urgences pour angor instable étaient colligés. En TDM64C, seulement 4,6 % de tous les segments coronaires ont été considérés de qualité insuffisante, typiquement au niveau des segments distaux. La qualité d’image était d’autant meilleure que les segments étaient peu calcifiés. Chez 35 patients, on ne notait pas d’athérome ou un athérome non obstructif, alors qu’une obstruction coronaire était présente chez 23. La TDM64C était positive chez 23 (40 %) des 58 patients. Parmi les 35 patients TDM64C-négatifs, 2 avaient un diagnostic alternatif de douleur thoracique (une dissection aortique chronique, une tumeur pancréatique). Un diagnostic définitif de SCA a été fait chez 20 des 23 patients TDM64C-positifs. La coronarographie a été faite chez 17 patients (74 %) et a confirmé la maladie coronaire obstructive chez 16 de ces patients, avec un faux-positif en TDM64C (surestimation d’une lésion coronaire droite moyenne). Parmi 6 autres patients TDM64C-positifs ayant eu une scintigraphie, 4 avaient un défaut de perfusion suggestif d’ischémie myocardique, tandis que la scintigraphie était normale ou presque normale chez 2. Globalement, la sensibilité de la TDM64C pour le diagnostic de SCA était de 100 % (20/20 patients), la spécificité de 92 % (35/38), la valeur positive prédictive de 87 % (20/23), et la valeur prédictive négative de 100 % (35/35). Une angioplastie a été faite chez 7 patients, un pontage chez 3, une angioplastie de la sous-clavière en amont d’un pontage chez un, et un traitement médical seul chez les 5 restants. Chez les 35 patients qui n’avaient pas été admis initialement, aucun décès ou infarctus du myocarde ne s’est produit pendant le suivi. Chez un patient, une sténose de 70 % d’une branche distale de l’artère circonflexe a été dilatée (à 13 mois), représentant un faux-négatif ou une progression de la maladie. Pendant le suivi, 3 autres patients retournés au domicile sans diagnostic définitif (8,6 %) sont revenus aux Urgences, un SCA étant éliminé. De façon générale, 13 des 58 patients inclus dans l’étude ont eu un événement : 7 angioplasties coronaires, 3 pontages (dont un avec infarctus), une angioplastie sous-clavière, un infarctus du myocarde traité médicalement après angioplastie coronaire, et une angio-

JP Laissy et al.

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plastie pendant le suivi. La sensibilité de la TDM64C pour prédire l’évolution coronarienne globale (à l’hôpital et pendant le suivi) était de 92 % (12/13), la spécificité de 76 % (34/45), la valeur prédictive positive de 52 % (12/23), et la valeur prédictive négative de 97 % (34/35). Les résultats de cette étude, qui ne repose que sur un nombre limité de patients, sont mitigés. L’avantage principal présenté par le TDM64C aux urgences est sa capacité de fournir une information diagnostique et prédictive de façon non invasive (4, 5). Plusieurs études récentes ont démontré l’efficacité de la TDM64C pour éliminer un SCA aux urgences (6-8). Ces résultats s’accordent avec ceux de l’équipe de Lille qui démontre la faisabilité de la synchronisation ECG à l’examen du thorax, avec un tri diagnostique fiabilisé des patients. Cette équipe a en effet testé la faisabilité de la synchronisation ECG pour étudier les coronaires simultanément au cours d’un examen TDM thoracique avec un appareil 64 coupes, sans utiliser de β-bloquants. Les examens étaient diagnostiques dans 92 % des cas à la fois pour apprécier la maladie pulmonaire et l’état cardiaque et coronarien (9). Le pourcentage de segments analysables restait faible, de l’ordre de 70 % si l’on considérait tous les segments (10). Les recommandations ACC/AHA proposent d’ailleurs comme test approprié l’examen TDM chez des patients avec un risque intermédiaire de maladie coronarienne (11). L’étude citée en référence confirme ces résultats avec une plus longue période de suivi. Les causes extracardiaques de douleur thoracique, telles que l’embolie pulmonaire, la péricardite et la dissection aortique, peuvent être exclues au cours de cet examen. Le problème de l’étendue de l’acquisition hélicoïdale pour couvrir les artères pulmonaires et l’aorte devrait être considéré par une évaluation du rapport bénéfice-risque en termes de dose de rayonnement et de contraste chez un patient donné (12, 13). Les évolutions technologiques telles que l’arrivée des appareils bitube, de même que l’analyse automatisée de post-traitement sont également de plus en plus cruciaux dans ce domaine.

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Références 1.

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J Radiol 2007;88

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