Cas clinique n° 6 Myopathie inflammatoire

Cas clinique n° 6 Myopathie inflammatoire

Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2014) 6, 40-46 ISSN 1877-1203 Revue des Maladies Respiratoires Organe Officiel de la Société de Pneumol...

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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2014) 6, 40-46 ISSN 1877-1203

Revue des

Maladies

Respiratoires Organe Officiel de la Société de Pneumologie de Langue Française

Actualités

Séminaire d’Approfondissement et de Perfectionnement en Pneumologie (SAPP)

Disponible en ligne sur

Édition 2014 Interactions Muscles et Respiration Paris, 21 et 22 mars 2014 Coordonnation : B. Maître, F. Chabot

Respiration

Amplitude respiratoire

www.sciencedirect.com

Ventilation alvéolaire

Mécanorécepteurs des poumons et des mucles respiratoires

84569

Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires

www.splf.org

mars

Vol 6 2014



1

Cas clinique n° 6 Myopathie inÁammatoire J. Cadranel*, P. Créquit, H. Ferrand, J.-M. Naccache Service de Pneumologie, Centre de Compétences Maladies pulmonaires rares, Hôpital Tenon, 4 rue de la Chine, 75020 Paris

Commentaires Dans quel cadre nosologique classeriez-vous la pneumopathie inÀltrante diffuse présentée par la patiente ? Cette question fait référence à deux cadres nosologiques. Tout d’abord celui de la maladie inÁammatoire chronique responsable de l’ensemble du tableau clinique, ensuite celui du type de la pneumopathie inÀltrante diffuse (PID) observée au cours de cette maladie. On peut retenir que la patiente présente une dermato-polymyosite (DPM) probable selon les critères de Bohan et Peter (Tableau 1) [1]. Elle présente des lésions dermatologiques typiques et des signes de myosite (déÀcit musculaire proximal symétrique, élévation modérée des LDH – mais qui pourrait être expliquée par la PID, et des ASAT/ALAT, aspect électromyographique compatible). Le dosage des autres enzymes musculaires (CPK et aldolase) avait bien été réalisé et les résultats étaient normaux. Une biopsie neuromusculaire aurait permis de faire passer le diagnostic de DPM probable à celui de certain. La place de l’IRM des masses musculaires dans les critères diagnostiques de myopathies chroniques inÁammatoires reste à conÀrmer [2]. Le déÀcit musculaire qui est au second plan du tableau clinique, de même que l’absence d’élévation des aldolases en présence d’une PID peuvent faire discuter le concept de DPM hypomyopathique chez cette malade. La DPM amyopathique est quant à elle déÀnie par la présence d’une éruption cutanée en l’absence de signes cliniques, biologiques et EMG de myosite pendant les 2 ans suivant le diagnostic [3]. Le concept de DM amyo/hypomyopathique a été développé avant l’avènement des anticorps spéciÀque des myosites (ASAM) (Tableau 2) [2,3] chez des malades qui développaient d’autres manifestations systémiques comme des PID précédant la survenue d’un tableau de PM ou de DPM. Depuis, un grand nombre de ces malades sont classés en syndrome des anti-synthétases (Tableau 3) ou PID avec ASAM [1,4,5].

*Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J. Cadranel)

© 2014 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Cas clinique n° 6 — Myopathie inÁammatoire

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Tableau 1. Diagnostic d’une polymyosite (PM) ou d’une dermato-polymyosite (DPM) selon les critères de Bohan et Peter. 1. Faiblesse musculaire proximale symétrique à l’examen physique 2. Élévation des enzymes musculaires (en particulier des CPK et des aldolases), des ASAT, des ALAT et des LDH 3. Triade électromyographique : potentiels d’unités motrices courts, de faibles amplitudes et polyphasiques ; Àbrillations, bouffées de potentiels ; décharges répétées à haute fréquence 4. Anomalies sur la biopsie musculaire incluant : signes de dégénération/régénération, nécrose, phagocytose des Àbres musculaires et inÀltrat interstitiel de cellules mononucléées 5. Éruption cutanée caractéristique de DPM avec érythème lilliacé des paupières, signe et papules de Gottron En fonction de la présence de ces anomalies, le diagnostic de PM est considéré comme certain (critères 1 à 4 présents), probable (3 des 4 premiers critères présents) ou possible (2 des 4 premiers critères présents) Le diagnostic de DPM inclut la présence des signes cutanés

Tableau 2. Anticorps spéciÀques associés aux myopathies inÁammatoires chroniques idiopathiques. Auto-anticorps

Cible antigénique

AAN

Caractéristiques cliniques

Fréquence

Anticorps anti-aminoacyl-tRNA synthétase Syndrome des anti-synthétases

30-40 %

Anti-Jo-1

Histidyl-

C

PM/DPM, PID (70 %), PID inaugurale

20 %

Anti-PL-7

Thréonyl-

C

PM/DPM, PID inaugurale, plus fréquente et sévère que Jo-1 (?)

<5%

Anti-PL-12

Alanyl-

C

DPM amyopathique, PID plus fréquente et sévère que Jo-1

<5%

Anti-OJ

Isoleucyl-

C

PID

<5%

Anti-EJ

Glycyl-

C

PM/DPM, PID inaugurale

<5%

Anti-KS

Asparaginyl-

C

PID

<5%

Anti-Ha

Tyrosyl-

C

<1%

Anti-Zo

Phenylalanyl-

C

<1%

Autres auto-anticorps spéciÀques des myosites Anti-P155/140

TIF1gamma (?)

N

DPM associée au cancer (70 %)

13-30 %

Anti-CADM-140

MDA-5

N

PID sévère chez Asiatiques DPM amyopathique

50-70 %

Anti-Mi-2alpha et bêta

Hélicase nucléaire

N

DPM, réponse au traitement

15-20 %

Anti-SRP

Signal Recognition Particle

C

Myosite nécrosante, myocardiopathie, résistance au traitement

5-10 %

Anti-200/100

HMG-CoA réductase

C

Myosite nécrosante

AAN : anticorps anti-nucléaire ; C : Áuorescence cytoplasmique, N : Áuorescence nucléaire.

Tableau 3. Caractéristiques cliniques du syndrome des anti-synthétases. Myosite, polymyosite ou dermato-polymyosite Polyarthrite, non destructrice des doigts, des poignets, des coudes et des genoux Fièvre (80 %) Hyperkératose Àssuraires du bout des doigts (face et bord) (« mains de mécanicien ») Pneumopathie inÀltrante diffuse (70 %) Phénomène de Raynaud (60 %)

60 %

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J. Cadranel et al.

La PID présentée par la patiente se caractérise par l’association de lésions en verre dépoli avec par endroits des aspects de renforcement alvéolaire et des lignes irrégulières. Ces anomalies sont diffuses et bilatérales mais prédominent aux bases et ne sont pas particulièrement de topographie périphérique. Il n’y a pas d’éléments faisant évoquer un processus Àbrosant (pas de distorsion, dilatation des bronches ou bronchiolectasie par traction, ni de réticulation intralobulaire de type « rayon de miel »). L’aspect observé n’est pas celui d’une pneumopathie interstitielle commune (PIC, UIP des Anglo-Saxons), mais plutôt celui d’une pneumopathie interstitielle non spéciÀque (PINS) dans la classiÀcation ERS/ATS [6]. Les résultats du LBA retrouvant une alvéolite lymphocytaire sont également compatibles avec ce diagnostic. L’aspect de PINS au TDM est celui qui est le plus souvent retrouvé dans les séries de PID de PM/DPM [1,5,7,8]. C’est également le diagnostic le plus souvent porté dans les séries de malades chez lesquels une biopsie pulmonaire a été réalisée (Tableau 4) [1,5,8].

Quels autres examens paracliniques étiologiques auriez-vous éventuellement proposés ? JustiÀer votre réponse Cette question permet de remettre en perspective les étiologies des myopathies en général, des myopathies inÁammatoires chroniques en particulier et de séparer les myopathies inÁammatoires idiopathiques de celles de causes connues [2,3,9] (Tableau 5). Elle permet également d’évoquer la question des DPM paranéoplasiques [2,3,9]. La réalisation d’une biopsie neuromusculaire aurait probablement apporté des arguments supplémentaires en faveur d’une DP et aurait permis d’exclure un certain nombre d’autres myopathies [2,3,9]. En revanche, dans le contexte d’un diagnostic de DPM probable et dans la mesure où les données de la TDM thoracique et du LBA concordent, la réalisation d’une biopsie pulmonaire par

Tableau 4. Caractéristiques anatomopathologiques des pneumopathies interstitielles diffuses associées aux myopathies inÁammatoires chroniques idiopathiques. Auteurs, date, n

PINS

PIC

POC

DAD

PIL

Inclassables

Fujisawa, 2005, 10

7

3

0

0

0

0

Cottin, 2003, 17

11

2

2

0

1

1

Tansey, 2004, 13

7

1

5

0

0

0

Shi, 2008, 26

14

1

4

5

2

0

Fathi, 2004, 11

4

5

2

0

0

0

Won Huh, 2007, 9

4

4

0

1

0

0

Marie, 2011, 41

25

7

9







72 (56,6 %)

23 (17,9 %)

22 (25,5 %)

6/86 (6,9 %)

3/86 (3,4 %)

1/86 (1,2%)

Total = 127

PINS : pneumopathie interstitielle non spéciÀque ; PIC : pneumopathie interstitielle commune, UIP des Anglo-saxons ; POC : pneumonie organisée chronique ; DAD : dommage alvéolaire diffus ; PIL : pneumopathie interstitielle lymphoïde.

Tableau 5. ClassiÀcation des atteintes musculaires. Myopathies inÁammatoires chroniques idiopathiques (impose la recherche d’un auto-anticorps spéciÀque associé aux myopathies inÁammatoires) Dermato-polymyosite Dermato-polymyosite juvénile Polymyosite Myosite à inclusions sporadique Myopathie nécrosante auto-immune (incluant myopathie nécrosante secondaire à la prise de statines) Myopathies inÁammatoires secondaires aux maladies systémiques Connectivites (Lupus, Sjögren, sclérodermie, polyarthrite rhumatoïde) et vascularites Granulomatoses (sarcoïdose, cirrhose biliaire primitive, maladie de Crohn, maladie cœliaque) Thyroidite, myasthénie… Dysglobulinémie/hypogammaglobulinémie GVH après allogreffe de moelle Dystrophies musculaires et myopathies métaboliques (familiales) Myopathies endocriniennes (hypo et hyperthyroïdie, hyperparathyroïdie, hypercorticisme…) Myopathies toxiques (corticoïdes, penicillamine, zidovudine, statines…) Myopathies infectieuses (HIV, HTLV1, maladie de Lyme…)

Cas clinique n° 6 — Myopathie inÁammatoire

vidéo-thoracoscopie n’aurait pas modiÀé le diagnostic étiologique, ni la prise en charge thérapeutique initiale [10]. Le diagnostic de myopathie inÁammatoire chronique idiopathique est un diagnostic d’exclusion [3]. Certaines dystrophies musculaires et myopathies mitochondriales peuvent constituer un diagnostic différentiel devant un déÀcit musculaire d’apparition progressive avec élévation des CPK. Le diagnostic est porté sur les données de l’interrogatoire familial et la biopsie neuromusculaire. Il sera conÀrmé par la réalisation des tests génétiques appropriés. Ces maladies ne se compliquent pas de PID. Des myopathies chroniques non inÁammatoires peuvent être secondaires à une pathologie endocrinienne, métabolique ou infectieuse. Un certain nombre de connectivites et maladies systémiques peuvent se compliquer d’une myopathie inÁammatoire secondaire (Tableau 5). Finalement, le cadre des myopathies inÁammatoires chroniques idiopathiques comporte la DPM et la DPM juvénile, la PM, la myopathie sporadique à inclusions et la myopathie nécrosante qui est fortement associée à la prise de statines et à la présence d’auto- anticorps anti- HMGCR (Tableau 5). Seules les DPM/PM se compliquent de pathologie interstitielle pulmonaire. Chez cette patiente, l’association d’une PID symptomatique associée à des arthralgies, un phénomène de Raynaud compliqué et une hyperkératose À ssuraire des doigts – qui se conÀrmera ultérieurement – doit faire suspecter la présence d’un ASAM et en particulier d’un anti-synthétase (Tableau 2) [1-3]. La recherche répétée de ces différents anticorps est restée négative chez cette malade. Le diagnostic de DPM chez une femme de 65 ans doit également conduire à évoquer la possibilité d’une DPM paranéoplasique [2,3]. Cette association est importante à considérer car le cancer peut être curable et son traitement permettre la guérison de la DPM. Elle est retrouvée d’emblée ou dans les 5 ans après le diagnostic de DPM dans environ 25 % des cas et dans moins de 15 % des PM [2,3]. Un âge avancé, l’absence d’auto-anticorps et la résistance de la DPM à la corticothérapie sont des éléments qui suggèrent le caractère paranéoplasique de la DPM. Cependant, il a été récemment démontré que la présence d’un anticorps anti- P55/140 (TIF1g) était associée à un cancer dans 70 % des cas, bien que sa recherche ne soit pas encore réalisée en routine [2,3]. Il peut s’agir de carcinome ou de lymphome non-hodgkinien. Un examen clinique soigneux doit être réalisé à la recherche d’un cancer du sein et de l’ovaire chez la femme et du poumon et de la prostate chez l’homme. Certains auteurs proposent la réalisation d’examens paracliniques systématiques, d’autres plutôt orientée par la clinique et d’autres enÀn suggèrent la réalisation d’une TEP-FDG. La patiente a bénéÀcié initialement d’un examen gynécologique et d’une mammographie ainsi que d’une TEP-FDG. L’apparition de douleurs abdominales et d’une anémie ont conduit à la réalisation d’une Àbroscopie gastrique et d’une coloscopie. Les résultats de ces examens étaient normaux et un cancer n’est pas apparu après 3 ans de surveillance.

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Quelles sont vos hypothèses diagnostiques ? Quels examens paracliniques étiologiques proposez-vous ? La malade présentait une évolution dissociée avec aggravation respiratoire, mais amélioration cutanée, articulaire et musculaire ; il existait également une aggravation du phénomène de Raynaud avec apparition de nécroses digitales. Cette aggravation survenait après 6 mois d’un traitement par prednisone et mycophénolate, alors que la malade ne recevait aucune prophylaxie anti-infectieuse. Cependant, le mycophénolate avait été introduit après deux mois de prednisone à plus de 1/2 mg/kg/j, du fait d’un non-contrôle de la DPM. La TDM montre une aggravation des lésions en verre dépoli. Les hypothèses diagnostiques retenues ont été une complication infectieuse – essentiellement pneumocystose – et une exacerbation de la PID. Une pneumopathie médicamenteuse avait été évoquée, mais l’analyse sur Pneumotox® de l’imputabilité extrinsèque des médicaments pris par la malade n’apportait aucun argument dans ce sens. L’importance des nécroses digitales a également fait évoquer un syndrome des anticorps antiphospholipides qui a été éliminé par les examens biologiques appropriés et une vascularite paranéoplasique dans le contexte de la DPM qui n’a pas été conÀrmée par le bilan d’imagerie. Une part cardiogénique avait été éliminée par un dosage de BNP et les résultats d’une échocardiographie. La malade a eu une Àbroscopie bronchique avec LBA pour analyse cytologique et microbiologique complète. Il n’avait été réalisé ni recherche préalable de Pneumocystis jiroveci par PCR sur expectoration induite ou rinçage de la bouche, ni dosage sérique du beta-D-glucan. Finalement, aucun agent infectieux n’avait été retrouvé et il a été conclu à une exacerbation de la PID de DPM sous corticoïdes et mycophénolate.

Quel traitement débuteriez-vous en fonction de ces hypothèses ? Le mycophénolate a été interrompu chez notre malade. Elle a initialement reçu un traitement curatif par cotrimoxazole associé à des bolus de méthylprednisolone (240 mg J1, 120 mg J2 et J3) relayés par la prednisone (1 mg/kg/j). Après récupération des résultats du LBA (colorations standards, immunoÁuorescence et PCR), le cotrimoxazole a été poursuivi à dose prophylactique et le cyclophosphamide a été introduit en perfusion à la dose de 600 mg/m2 associé à l’uromitexan à dose adaptée. Cette observation fait discuter, d’une part, l’indication du cotrimoxazole en prophylaxie primaire de la pneumocystose chez les malades immunodéprimés hors VIH, porteurs d’une PID dans le contexte d’une connectivite et, d’autre part, les

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J. Cadranel et al.

Tableau 6. Traitements proposés dans les polymyosites/dermato-polymyosites avec ou sans pneumopathie interstitielle diffuse (PID). Médicament/(Mode d’action)

PID/ Pneumotox®*

Dose

Commentaires

Corticoïdes (cortisone) • Prednisone/solone • Méthylprednisolone



1 mg/Kg/j 5 à 15 mg/Kg/j, 1 à 3 jours

Traitement de référence. Environ 50% de réponse. Nécessite traitements associés et régime hygiéno-diététique

Méthotrexate, oral/IM (inh. métabolisme folate et purine)

*****

15 à 25 mg/semaine + acide folique

En épargne ou en échec. Traitement de référence pour les atteintes musculaire et dermatologique. Moins efÀcace sur PID ( ?). Toxicité pulmonaire ( ?). Nécessite contraception.

Azathioprine (inh. prolifération Ly)

**

2 à 3 mg/Kg/j

En épargne ou en échec. Volontiers proposé à la place du méthotrexate en cas de PID. Risque de toxicité en cas de déÀcit en thiopurine transférase (polymorphisme génétique).

Cyclophosphamide (inh. Ly T mémoires) • Orale • IV

**

2 à 3 mg/Kg/j 600 à 800 mg/m2/3 à 4 semaines, 6 à 12 perfusions + urometixan

En échec ou d’emblée dans les formes graves avec PID. Voie IV privilégiée en France. Risque leucémogène et de cancer de vessie à long terme.

Ig IV (Ig G polyvalentes)

*

1 à 2 g/Kg/4 semaines, 6 à 12 perfusions

En échec. Traitement de référence pour les atteintes musculaires. Risque de choc. Risque d’insufÀsance rénale.

Traitements conventionnels

Traitements moins conventionnels Mycophénolate mofétil (inh. métabolisme purine)

*

2 à 3 g/j en deux prises

En épargne ou en échec. Traitement de référence pour les atteintes musculaires. Quelques données en cas de PID. Troubles digestifs, augmentation progressive.

Cyclosporine A (inh. calcineurine)



3 à 3,5 mg/Kg/j

En échec. Études essentiellement asiatiques. Traitement de référence pour les atteintes musculaires. Quelques données en cas de PID ± associée au cyclophosphamide. Risque d’insufÀsance rénale. Risque d’interactions médicamenteuses.

Tacrolimus (inh. calcineurine)

*

2 mg/j en deux prises

En échec. Atteintes musculaires et PID. Risque d’insufÀsance rénale. Risque d’interactions médicamenteuses.

LeÁunomide (inh. métabolisme pyrimidine)

**

20 mg/j

En échec. Atteintes musculaires. Demi-vie très longue. Hépatotoxicité.

Rituximab (anticorps antiCD20)

**

375 mg/semaine, 4 semaines ou 1 g à j1 et j15

En échec. Atteintes musculaires et PID. Risque de choc. Nécessite vaccinations avant traitement. VériÀcation des sérologies HBV et HBC.

*Dans cette colonne est donnée la fréquence relative (0 à 5 étoiles) des PID (quelle que soit leur présentation) rapportée par le site www.pneumotox.com pour chaque médicament (imputabilité extrinsèque).

Cas clinique n° 6 — Myopathie inÁammatoire

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PID

NON

OUI

Critères de sévérités Forme aiguë Hypoxémie, CV < 50%, DLCO < 35% Fibrose à la TDM PL7, PL12, MDA5 Atteinte diaphragmatique Troubles de la déglutition Méthylprednisolone (relais prednisone) Cyclophopshamide (× 6/3 à 4 semaines)

Prednisone*

Stabilité/amélioration Bonne tolérance

OUI

Prednisone (décroissance)

NON

Échec muscle • Méthotrexate • Ig-IV • Cyclosporine

Échec poumon • Azathioprine • Cyclophosphamide

NON

OUI

Échec poumon • Mycophénolate • Tacrolimus • Rituximab

Prednisone (décroissance) Azathioprine

*En cas de toxicité prévisible des corticoïdes, proposer d’emblée une épargne cortisonée par méthotrexate ou azathioprine

Figure 1. Algorithme simpliÀé de prise en charge thérapeutique d’une polymyosite (PM)/dermato-polymyosite (DPM) avec pneumopathie interstitielle diffuse (PID) associée.

options thérapeutiques pour le traitement des PID associées aux myopathies inÁammatoires chroniques idiopathiques. Le traitement des myopathies chroniques inÁammatoires idiopathiques ne fait pas l’objet d’un consensus et encore moins celui des PID associées aux PM/DPM [1-3,5,11]. Le mauvais pronostic des PID associées aux PM/DPM (> 40 % de mortalité) invite à intensiÀer le traitement habituel de la myopathie en cas de PID associée [1,5]. Cette attitude paraît encore plus justiÀée lorsque la PID est cliniquement symptomatique ou évolutive (< 3 mois), présente des critères de sévérité fonctionnelle (CVF < 50 %, DLCO < 35 %) ou TDM (signe de Àbrose) et s’associe à la présence de certains ASAM (anti-Jo1, PL7, PL12, CADM-140/MDA-5) [1,3,8,12-15]. Pour Ànir, il semble que certains traitements efÀcaces sur les atteintes musculaire, articulaire et cutanée le seraient moins sur l’atteinte pulmonaire (méthotrexate et Ig-IV) ou considérés comme à risque du fait de leur toxicité pulmonaire potentielle (méthotrexate) [1-3]. Le tableau 6 résume les principaux médicaments utilisés dans la PM/DPM et la Àgure 1 propose une gradation thérapeutique en cas de PID associée [1,3,4]. Les données de la méta-analyse Cochrane de 2012 sur le traitement des PM/DPM

permettent de souligner le faible nombre d’essais contrôlés et le faible effectif de malades par groupe [3,11]. Il ne semble pas y avoir de différence d’efÀcacité entre méthotrexate (oral ou IM) et azathioprine ou cyclosporine [3]. Les Ig-IV semblent avoir une efÀcacité sur les atteintes musculaires. La plupart des groupes considèrent la prednisone à la dose de 0,5 mg à 1 mg/kg comme le traitement de référence [1,3]. En l’absence d’amélioration après quelques semaines sous prednisone, il est le plus souvent proposé d’adjoindre un immunosuppresseur de type méthotrexate, associé ou non avec des Ig-IV. Le méthotrexate est également proposé comme épargne cortisonée en première intention [3]. Du fait d’une crainte quant au risque de toxicité pulmonaire du méthotrexate, celui-ci est remplacé par l’azathioprine en cas de PID associée à la PM/DPM [1] (Tableau 6). Cette attitude avait initialement été privilégiée chez notre malade. Dans les formes sévères (altération de l’état général, amaigrissement, déÀcit musculaire sévère et troubles de la déglutition) ou en cas de PID associée, la dose de prednisone est plutôt de 1 à 1,5 mg/kg [1]. Il est souvent proposé d’adjoindre d’emblée du méthotrexate éventuellement associé aux IgIV [3]. Lorsque la PID est au premier plan, évolutive et sévère,

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J. Cadranel et al.

la plupart des auteurs proposent de débuter la corticothérapie par des bolus de méthylprednisolone et d’adjoindre de manière systématique de l’azathioprine et plus récemment du mycophénolate mofétil (Tableau 6, Fig. 1) [1]. Dans les formes avec insufÀsance respiratoire aiguë ou en cas d’échec dans les premières semaines de traitement par prednisone et azathioprine, il est proposé de réaliser des bolus de cyclophosphamide (Tableau 6, Fig. 1), comme cela a été fait chez notre malade. En effet, plusieurs études de cas suggèrent cette attitude [1,8,15]. Deux études prospectives comportant très peu de malades semblent conÀrmer ces résultats [1]. Dans les formes musculaires réfractaires aux corticoïdes, méthotrexate et aux Ig-IV, il est proposé du cyclophosphamide, de la cyclosporine et plus récemment du rituximab [3]. Dans les formes pulmonaires réfractaires aux corticoïdes, azathioprine et au cyclophosphamide, il est proposé le mycophénolate, le tacrolimus et plus récemment le rituximab [1,4] (Tableau 6, Fig. 1). Finalement, la malade recevra deux perfusions de cyclophosphamide à 15 jours d’intervalle. Du fait d’une évolution favorable, quatre autres perfusions seront administrées à 3 semaines d’intervalle. La prednisone sera diminuée jusqu’au palier de 30 mg/j, avec introduction de l’azathioprine en relais du cyclophosphamide, sans récidive de l’hépatite. Après 3 ans d’évolution, la malade est actuellement asymptomatique avec un TDM quasi normalisé et des EFR normales (Tableau 1 p. 37, EFR3). Le traitement résiduel comporte 7 mg de prednisolone et 100 mg d’azathioprine.

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Liens d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun lien d’intérêts pour cet article.

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