Description du statut vaccinal de la population adulte française

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Médecine et maladies infectieuses 32 (2002) 678–688 www.elsevier.com/locate/medmal

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Description du statut vaccinal de la population adulte française Vaccinal status of the adult french population J. Beytout a,*, F. Denis b, F.A. Allaert c a Service de maladies infectieuses, Hôtel Dieu, centre hospitalier universitaire, Clermont-Ferrand, France Laboratoire de bactériologie virologie hygiène, centre hospitalier universitaire Dupuytren, Limoges, France c Centre d’évaluation des biotechnologies cenbiotech, CHRU du Bocage, Dijon. Département santé publique et d’épidémiologie, McGill université, Montréal, Canada b

Résumé Objectif : Décrire le statut vaccinal des adultes consultant en médecine générale et identifier les raisons motivant l’absence et/ou le retard des rappels, du point de vue du patient et du médecin. Méthode : Enquête épidémiologique transversale portant sur les 3 premiers patients vus en consultation (cabinet ou visite) pour une vaccination contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. Résultats : Six milles deux-cent soixante-neuf patients d’âge moyen 44 ± 15 ans ont été inclus par 2122 médecins constituant un échantillon représentatif de la profession. L’enquête a montré que les médecins connaissaient bien le statut vaccinal de leurs patients et avaient une bonne estimation de la couverture vaccinale nationale. Les résultats font apparaître que respectivement 90,5 %, 94,4 % et 92,6 % des patients ont été vaccinés contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, mais que seuls 58,4 %, 66,1 % et 63,4% étaient à jour de leurs rappels, ce qui signifie que 40 % de la population adulte n’est pas actuellement correctement protégée. Les déficits concernaient surtout les catégories sociales les plus défavorisées et les populations les plus âgées Cette situation semble plutôt due à une négligence dans la mise à jour des vaccinations qu’à une crainte à l’égard de l’injection (seulement redoutée par 4,3 %). Conclusion : Ces résultats montrent ainsi les limites des campagnes d’information et de prévention face à des groupes de personnes qui y sont peu sensibles et soulignent l’importance d’instituer une démarche proactive mobilisant les relais de la médecine sociale et surtout les médecins généralistes. © 2002 E´ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Objective: The aim of the study was to describe the vaccinal status of adult French patients consulting general practitioners and to identify the reasons justifying the absence and/or the delay of a booster injection from both patient and physician’s point of view. Methodology: A cross sectional epidemiological study was made on the first 3 patients consulting for vaccination against diphtheria, tetanus, and poliomyelitis. Results: Six thousand and two hundred sixty nine patients, 44 ± 15 years of age, were included in the study by 2,122 general practitioners, a representative sample 90,5%, 94,4%, and 92,6% of their patients had been vaccinated against diphtheria, tetanus, and poliomyelitis but only 58,4%, 66,1%, and 63,4% had received the required booster injection. This means that 40% of the adult French population is not properly protected. This situation appears essentially linked to negligence rather than to reluctance: only 3,6% of the patients were really reluctant. The low coverage rate was greater among underprivileged classes and the elderly. Conclusion: These results show the limits of prevention campaigns and underline the necessity of a better involvement of occupational medicine and general practitioners. © 2002 E´ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. Mots clés: Vaccination de l’adulte; Tétanos; Poliomyélite; Diphtérie Keywords: Adult vaccination; Diphtheria; Tetanus; Poliomyelitis

* Auteur correspondant. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. PII: S 0 3 9 9 - 0 7 7 X ( 0 2 ) 0 0 4 5 5 - 9

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1. Introduction L’épidémie de diphtérie d’Europe de l’Est avec, pour la seule année 1995, plus de 50 000 cas et des taux de mortalité de 9,6 % chez les enfants et de 3,4 % chez les adultes a fait craindre la possibilité d’une épidémie en France si la protection vaccinale de la population de notre pays diminuait [1]. Cette situation a conduit les autorités sanitaires françaises à recommander désormais la mise à jour vaccinale des populations vis-à-vis de la diphtérie non seulement avant tout séjour en Russie, Ukraine et dans les autres républiques de l’ex-URSS mais de manière générale dans toute zone d’endémie [2]. Elle a amené aussi à s’interroger sur le statut vaccinal des adultes français même en dehors de tout voyage du fait des possibilités d’importation de diphtérie par des ressortissants en provenance des pays d’endémie [3] : pour être assuré d’éviter la survenue d’une épidémie en France, il convient que 90 % des enfants soient immunisés et au moins 75 % des adultes [4]. En effet, conséquence paradoxale du programme de vaccination des nouveau-nés et des enfants qui a permis une véritable élimination de la maladie et une diminution drastique des porteurs asymptomatiques de C. diphtheriae, on constate actuellement une diminution de l’immunité des adultes vaccinés dans l’enfance : leur immunité n’est plus entretenue par des contacts répétés avec le bacille diphtérique [3]. Des études conduites dans ce domaine montrent que moins de la moitié des patients âgés de 40 à 65 ans sont protégés, moins d’un tiers au-delà de 65 ans [5] et que les femmes sont moins protégées que les hommes du fait de l’absence de revaccination à l’occasion du service militaire. Les chiffres sont comparables pour ce qui concerne la protection antitétanique qui également décroît de manière très importante en fonction de l’âge [6]. Il existe certes une diminution appréciable du nombre de cas observés ces dernières années, mais leur existence n’est pas acceptable pour une toxi–infection qui peut parfaitement être évitée par une vaccination régulière. L’immunité poliomyélitique enfin mérite d’être entretenue. La poliomyélite semble aujourd’hui éliminée de notre pays mais une réimportation ou surtout les possibilités de contracter cette maladie à l’occasion d’un séjour en pays tropical n’est pas exclue. En attendant le jour que l’on peut espérer prochain où la poliomyélite sera définitivement éradiquée, il est recommandé d’entretenir l’immunité assurée par le vaccin inactivé plus sûr que le vaccin oral. En terme de santé publique, la revaccination de l’adulte constitue un enjeu essentiel qui repose essentiellement sur l’action des médecins généralistes en sa faveur mais aucune donnée n’est actuellement disponible pour apprécier le travail accompli et les difficultés rencontrées en pratique

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quotidienne. Quels sont les profils sociodémographiques et cliniques des patients qui se font revacciner, quelle est la proportion de ceux qui sont spontanément demandeurs et quelles sont leurs motivations, quelles sont les réticences des autres patients, quel est leur degré d’information sur le sujet ? Pour apporter des réponses à ces interrogations et élaborer des outils de communication favorisant la revaccination du sujet adulte, les laboratoires Aventis Pasteur MSD ont initié au printemps 2001 un « observatoire national de la revaccination chez l’adulte » dont les résultats sont présentés dans cet article.

2. Matériel et méthodes 2.1. Objectifs de l’observatoire national de la vaccination chez l’adulte L’objectif principal de l’observatoire était de décrire le statut vaccinal des adultes vus en consultation de médecine générale et d’identifier les raisons motivant l’absence ou le retard des rappels tant du point de vue du patient que du médecin. Une meilleure connaissance de ces informations est nécessaire à l’optimisation de campagnes de sensibilisation en faveur de la vaccination contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. 2.2. Nature de l’enquête Les données de cet observatoire ont été recueillies par une enquête épidémiologique transversale nationale : du 1er février au 30 avril 2001, chaque médecin acceptant de participer à l’enquête devait remplir un « questionnaire patient » strictement anonyme pour les 3 premiers patients pour lesquels il effectuait une revaccination contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. Ce questionnaire décrivait les caractéristiques démographiques des patients, leurs antécédents vaccinaux à partir des documents disponibles (dossier médical, carnet de suivi, carnet de vaccination), le caractère spontané ou non de la vaccination et ses motivations, leurs réticences, leur degré d’information dans ce domaine. Il devait en outre compléter un « questionnaire médecin » où il faisait figurer son estimation de la proportion des adultes revaccinés et où il décrivait les éléments qui pourraient contribuer à faciliter la pratique vaccinale. Ce questionnaire comportait également une description de leurs caractéristiques d’exercice afin de juger de la représentativité de l’échantillon des médecins participant à l’enquête et de pratiquer les éventuels ajustements statistiques nécessaires.

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Fig. 1.

Les données recueillies étaient transmises en conformité avec les exigences de la CNIL et en particulier ne permettaient pas de remonter ni directement ni indirectement à l’identité des patients qui n’apparaissait pas sur les fiches d’enquête.

ont été réalisés sur le logiciel SAS de SAS Institute implanté sur des stations de travail Sun Ultra 1.

3. Résultats

2.3. Analyse statistique L’analyse statistique décrit les situations vaccinales des patients, les motifs de l’absence ou du retard éventuel de leurs rappels de vaccination, leurs positions à l’égard de la vaccination et compare ces éléments en fonction des caractéristiques sociodémographiques et cliniques. Cette description utilise les tests classiques : moyennes, écarts types et extremum pour les variables quantitatives ; fréquences absolues et histogrammes pour les variables qualitatives. Les comparaisons sont effectuées à l’aide des tests du Chi2 pour les variables qualitatives et par des analyses de variance pour celles quantitatives. Le risque de première espèce était fixé à alpha = 0,05. Les traitements statistiques

Deux mille cent vingt-deux médecins généralistes répartis sur l’ensemble du territoire français métropolitain ont participé à l’enquête. Leurs caractéristiques reflètent celles de la population des médecins généralistes français. Ils sont âgés en moyenne de 45 ans (± 15) et exercent depuis 17 ± 8 ans. Plus de la moitié d’entre eux travaillent en cabinet de groupe (53,4 %). Leur répartition géographique est représentée sur la Fig. 1. Par mois, ils voient en moyenne 486 ± 185 patients et effectuent 28 ± 19 vaccinations. Un tiers (9 ± 8) des vaccinations sont effectuées chez l’adulte et la plupart contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. Ces médecins ont inclus dans l’enquête 6269 patients pour lesquels une revaccination contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite a été réalisée.

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Fig. 2.

3.1. Caractéristiques sociodémographiques des patients

3.3. Situation vaccinale de l’adulte

Les patients étaient âgés de 44 ± 15 ans, hommes et femmes en proportions égales. La description de leurs professions (Fig. 2) montre une sur-représentation significative des catégories des « artisans, commerçants, chef d’entreprise » et « cadre et profession libérale » par rapport à la population française avec à l’inverse une sousreprésentation des catégories « ouvriers » et « chômeurs ».

Actuellement, les informations disponibles sur la vaccination de l’adulte sont essentiellement consignées dans le carnet de vaccination (58 %) et dans le carnet de santé (40,8 %). On relève que le dossier médical informatisé commence à prendre de l’importance dans ce domaine (28,1 %) ; il existe, en effet une zone prévue pour le recueil des informations vaccinales dans de nombreux logiciels alors qu’elle n’est enregistrée que dans 15,9 % des dossiers médicaux traditionnels. Il apparaît que 90,5 % des adultes ont été vaccinés contre la diphtérie, 94,4 % contre le tétanos et 92,6 % contre la poliomyélite. Le délai depuis le dernier rappel est pratiquement identique pour ces trois vaccinations et se situe entre 5 et 10 ans pour un peu plus de la moitié d’entre eux et entre 10 et 20 ans pour un quart d’entre eux (Fig. 5). La proportion de personnes vaccinées diminue statistiquement avec l’âge et n’est plus pour les trois pathologies sus-citées que 81,5 %, 91,8 % et 84,7 % après 70 ans.

3.2. Motifs des vaccinations Le vaccin de rappel du patient a été proposé à l’initiative du médecin 6 fois sur 10 (60,5 % des cas). C’était essentiellement dans le cadre de l’application normale du calendrier vaccinal (46,5 %) ou à l’occasion d’une plaie à risque tétanigène (20,5 %) ou d’un futur déplacement à l’étranger (13,1 %) ; viennent ensuite les situations où l’adulte se fait vacciner lors d’une consultation pour un de ses enfants (9 %) et celles où le médecin estime que le patient a un mode de vie ou une activité à risque (7,4 %). Les autres motifs ont une fréquence inférieure à 5 % (Fig. 3). Lorsque la vaccination a été spontanément demandée par le patient (39,5 % des cas), il s’agissait dans la moitié des cas (52,8 %) de patients suivant régulièrement leur calendrier vaccinal, dans 20,6 % à l’occasion d’un déplacement prochain à l’étranger, dans 13,6 % d’un conseil formulé par la médecine du travail, dans 5,3 % lors de la vaccination d’un proche et dans 6,6 % de la survenue d’une plaie tétanigène (Fig. 4).

Par ailleurs, il apparaît que 89,5 % des adultes ont reçu le BCG, 57 % ont été vaccinés contre l’hépatite B, 39,4 % contre la rubéole, 35,8 % contre la grippe, 34,8 % contre la rougeole, 34,2 % contre les oreillons, 19,8 % contre la fièvre typhoïde, 17 % contre l’hépatite A, 15,3 % contre la fièvre jaune ; 4,9 % contre le pneumocoque, 3,8 % contre le méningocoque (Fig. 6). Derrière ces pourcentages se dissimule une importante disparité en fonction de l’âge et notamment pour l’hépatite B et la rubéole comme le montre la Fig. 7.

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Fig. 3.

Fig. 4.

On constate que 73 % des hommes ont effectué leur service militaire il y a 25 ± 13 ans en moyenne et que 88,9 % d’entre eux ont été revaccinés à cette occasion ce qui confirme l’importance que le service militaire avait dans ce domaine. 3.4. Motif de retard des rappels de la vaccination et attitude des patients à leur égard Lorsque le patient n’était pas correctement vacciné, les principaux motifs sont l’oubli de la vaccination (24,2 %), la négligence (15,2 %) et l’idée qu’à son âge, ce n’était plus la

peine (9,5 %). Dans plus d’un tiers des cas (36,9 %) aucun motif n’est évoqué. On relève également que la peur des piqûres est citée par 4,3 % des patients, que la crainte de devoir tout refaire est évoquée par 3 %, que 2,7 % pensent que ces maladies sont devenues trop rares pour s’en préoccuper et que 1,4 % sont en faveur des méthodes « naturelles ». Seulement 0,9 % d’entre eux expriment la crainte d’un effet secondaire et 0,4 % celle de contracter la maladie elle-même. Au total, pour des raisons diverses précédemment citées, seuls 3,6 % des patients sont globalement réticents à se faire revacciner.

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Fig. 5.

Fig. 6.

3.5. Information du patient vis-à-vis de la vaccination de rappel Un patient sur deux (56,1 %) est considéré par le médecin comme relativement bien informé sur les vaccinations de rappel. Cette information a été donnée à 66,9 % des patients par le médecin lui-même et à 20,7 % par la médecine du travail. Les médias et les campagnes de

vaccination ont contribué à l’information respectivement de 11 % et 13,7 % des patients. 13,4 % seulement des patients savaient que de nouvelles épidémies de diphtérie avaient fait leur apparition dans les pays de l’Est ; dès lors qu’ils en étaient informés, l’existence de ces épidémies constituait un argument facilitant l’acceptation d’une vaccination de rappel pour 60,2 % d’entre eux. Interrogés par ailleurs sur l’intérêt des brochures d’information sur les vaccinations de

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Fig. 7.

rappel, les médecins répondent qu’elles permettraient de susciter plus facilement le dialogue sur ce sujet chez 69,4 % des patients.

4. Discussion Ces observations de 6269 patients d’âge moyen 44 ± 15 ans ont été recueillies par 2122 médecins généralistes qui constituent un échantillon représentatif de la profession par leur exercice et donnent une bonne idée de la pratique vaccinale libérale. L’enquête montre que les médecins connaissent bien le statut vaccinal de leurs patients et ont une bonne estimation de la couverture vaccinale nationale. Ces vaccinations sont consignées sur des documents très divers : carnet de santé, carnet de vaccination, dossier médical, etc. Cette diversité des supports ne facilite pas la transmission de l’information vaccinale lorsque le patient est amené à changer de médecin et constitue une entrave aux évaluations de la couverture vaccinale. Dans le cadre d’un meilleur suivi des vaccinations, tant au plan individuel qu’au niveau épidémiologique, un effort d’harmonisation et de cohérence devrait être réalisé dans ce domaine. Sur le plan épidémiologique plusieurs résultats doivent attirer l’attention. Par rapport à la répartition de la population française, certaines catégories socioprofessionnelles des « artisans, commerçants, chef d’entreprise » et « cadre, profession libérale » sont sur–représentées ; à l’inverse les catégories

« ouvriers » et « chômeurs » sont sous-représentées. Cela traduit une inégalité des personnes face à la vaccination et amène à reconsidérer les orientations des campagnes d’information ; il conviendrait de les cibler sur ces catégories socioprofessionnelles en s’appuyant sur les médecins généralistes et les dispositifs de médecine sociale. Respectivement 90,5 %, 94,4 % et 92,6 % des patients ont été vaccinés contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, mais seuls 58,4 %, 66,1 % et 63,4 % sont à jour de leurs rappels. Cela signifie que 40 % de la population adulte n’est pas actuellement correctement protégée. Ces chiffres recouvrent ceux de l’étude conduite en 1997 par l’ORS de Franche-Comté sur un échantillon représentatif de 1000 patients qui montre que la couverture vaccinale chez les patients de 50 ans s’effondre et ne concerne qu’un patient sur deux [7]. L’insuffisance de la couverture vaccinale avec l’âge concerne la plupart des vaccinations mais est particulièrement sensible pour certaines vaccinations comme celle contre l’hépatite B. La chute de la couverture vaccinale observée dans cette enquête est à rapprocher de celle de l’enquête Sofres médical qui faisait état de taux de couverture pour la vaccination contre l’hépatite B de 51 % pour les 21–24 ans, de 30 % pour les 25–34 ans, de 22 % pour les 35–44 ans, de 16 % pour les 45–54 ans et de 5 % au-delà. Les chiffres issus de l’enquête conduite par l’ORS de Franche-Comté montrent des taux de 40 % pour les 25–34 ans, de 24 % pour les 35–54 ans et de 8 % pour les 55 ans et plus [7].

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Dans cette étude, 73 % des hommes ont été revaccinés au cours de leur service militaire ; cela confirme l’importance de ce « rendez-vous civique et social » sur le plan sanitaire. Sa disparition risque d’avoir des conséquences graves pour la couverture vaccinale de la population masculine adulte. Certains avaient suggéré de faire du « rendez-vous citoyens » un rendez-vous médical obligatoire pour les deux sexes avec bilan et mise à jour du calendrier vaccinal. Ce fut une occasion manquée. Les carences de la couverture vaccinale semblent plutôt dues à un déficit d’information et de motivation dans la mise à jour des vaccinations qu’à une crainte à l’égard de la vaccination. Les principaux motifs sont l’oubli de la vaccination (24,2 %), la négligence (15,2 %), l’idée qu’à son âge ce n’est plus la peine (9,5 %), mais surtout pour la plus grande partie des patients(36,9 %), aucun motif n’est évoqué. À l’inverse seulement 3,6 % des patients l’acceptent avec réticence. Cela suggère les limites des campagnes d’information en faveur de la vaccination et la nécessité d’une démarche plus active dans ce domaine. Il faut sans doute, surtout chez l’adulte jeune qui consulte peu souvent son médecin, instaurer des « rendez-vous santé » à âge fixe et mettre en place des structures et des actions incitant les adultes aux vaccinations et aux rappels. Certaines étapes de la vie (embauche, changement de fonctions, départ à la retraite), certains événements (voyage, accident, vaccination d’un proche) doivent être utilisés pour mettre à jour les vaccinations [8]. Cela implique aussi, surtout chez les patients âgés, une très forte implication des médecins généralistes qui les prennent en charge au quotidien. Le fait que 56,1 % des médecins pensent que leurs patients sont bien informés traduit une sous-estimation de la réalité : des démarches actives de leur part seraient d’autant plus nécessaires que la personne âgée vit le plus souvent dans un relatif isolement social. Enfin cette base de données obtenues à partir de la pratique quotidienne en médecine générale ayant ainsi montré sa pertinence pourra être utilisée dans l’avenir pour d’autres exploitations statistiques telle que l’étude des variations régionales des couvertures vaccinales. Certaines données épidémiologiques pourront être affinées : celles concernant la couverture vaccinale en fonction de l’âge, l’appréciation de l’impact qu’avait le service militaire sur la couverture vaccinale des patients masculins adultes ou la quantification des différences de couverture vaccinale entre les villes et les campagnes, entre les statuts professionnels. Ce type d’étude constitue par ailleurs un bon observatoire : sa reconduction pourra notamment servir à l’évaluation des mesures mises en œuvre en faveur de la vaccination de l’adulte. 5. Conclusion Les données issues de cette enquête épidémiologique transversale portant sur l’état vaccinal de la population

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adulte constituent une base d’évaluation qui précise les déficits de couverture vaccinale des adultes. Les carences apparaissent être importantes et portent essentiellement sur les catégories sociales les plus défavorisées et sur les populations les plus âgées. Ces résultats montrent ainsi les limites des campagnes d’informations et de prévention face à des groupes de personnes qui y sont peu sensibles et soulignent la nécessité d’envisager une démarche proactive mobilisant les relais de la médecine sociale et surtout les médecins généralistes.

ENGLISH TEXT 1. Introduction The diphtheria epidemic in Eastern Europe, with more than 50,000 cases in 1995, for a death rate of 9.6% in children and 3.4% in adults, has led to fearing such an epidemic in France if the vaccinal protection of the population in our country were to decrease [1]. This situation induced French health authorities to recommend vaccinal updating of populations for diphtheria, not only before traveling to Russia, Ukraine, and other ex-USSR republics but to any endemic zone [2]. It also led to questions on the vaccinal status of French adults, even outside of traveling, because of the possible importation of diphtheria by residents of endemic countries [3]: To prevent the onset of an epidemic in France, 90% of the children should be immunized and at least 75% of the adults [4]. Indeed, the paradoxical consequence of the vaccination program for neonates and children, which has brought about the eradication of the disease in France and a drastic diminution of asymptomatic C. diphtheriae carriers, is that today the immunity of adults vaccinated in their childhood is no longer maintained by repeated contacts with the C. diphteriae [3]. Studies made in this field show that half of the patients between 40 and 65 years of age were protected, less than a third after 65 years of age [5], and that women were less protected than men because they had not been revaccinated during their military service. The figures were the same concerning antitetanus protection which also decreased very significantly with age [6]. There was, of course, a considerable decrease of the number of cases reported in recent years, but this could not be acceptable for a toxi-infection which may be fully prevented with a regular vaccination. The polio virus immunity also deserves to be maintained. Today, poliomyelitis seems to be eradicated in our country but re-importation or the possibility to contract this disease during a stay in a tropical country is not excluded. As long as poliomyelitis is not completely eradicated, it will be

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recommended to maintain the immunity offered by the inactivated vaccine, safer than the oral vaccine. From the public health point of view, revaccination of the adult is essential and relies mainly on the action of general practitioners favorable for this policy, but no data is currently available to assess the work done and the problems met in daily practice. What are the sociodemographic and clinical profiles of patients who are revaccinated? What is the proportion of those who are spontaneously candidate and what are their motivations? Why are other patients reluctant and how well informed are they on the subject? The Aventis Pasteur MSD laboratories initiated a “national observatory for revaccination of the adult” in the Spring 2001 to bring answers to these questions and to set communication tools supporting the revaccination of adults. The results are reported in this article. 2. Material and methods 2.1. Objectives of the national observatory for vaccination of the adult The main objective of the observatory was to describe the vaccinal status of adults consulting a general practitioner and to identify the reasons for the lack of or the delay before booster injection, both from the patient’s and the physician’s point of view. A better understanding of this data is necessary for the optimization of information campaigns supporting vaccination against diphtheria, tetanus, and poliomyelitis. 2.2. Nature of the study The observatory data was collected through a cross sectional epidemiological study: from February 1 to April 30, 2001, each physician having accepted to participate in the study had to fill out a strictly anonymous “patient questionnaire” for the first 3 patients he revaccinated against diphtheria, tetanus, and poliomyelitis. This questionnaire documented the demographic features of patients, their vaccinal history from available documents (medical file, follow-up notebook, vaccination notebook), the spontaneous aspect of vaccination or not, the patients’ motivations, their reluctance, the degree of information on the subject. He also had to complete a “physician questionnaire” on which he described his estimation of the proportion of revaccinated adults and the elements which could contribute to promoting vaccinal practice. The questionnaire also included a description of the practice so as to judge the representativeness of the physician sample in the study and to make necessary statistical adjustments if needed. The collected data was transmitted according to CNIL requirements and did not allow to find directly or indirectly

the identity of patients which was not mentioned on the study’s files. 2.3. Statistical analysis The statistical analysis described the vaccinal status of patients, the reasons for leave or being late for work, booster injections if any, their positions as to vaccination, and compared these elements according to sociodemographic and clinical features. This description was made after using the usual tests: means, standard deviation, and extremes for quantitative variables, absolute frequencies and histograms for qualitative variables. Comparisons were made using the Chi2 test for qualitative variables and by variance analyses for quantitative ones. Risk α was set at 0.05. Statistical processing was made using the SAS software by SAS Institute Sun Ultra 1 work stations. 3. Results Two thousand and one hundred twenty two general practitioners, distributed across continental France, took part in the study. Their features were typical of French general practitioners. They were 45 years of age (± 15) on average and had been practicing for 17 ± 8 years. Over half of them were working with associates (53.4%). Their geographic distribution is reported on map 1. They saw an average of 486 ± 185 patients and performed 28 ± 19 vaccinations. A third of the vaccinations (9 ± 8) were made on adults and most were targeted against diphtheria, tetanus, and poliomyelitis. These physicians included 6269 patients for who were revaccinated against diphtheria, tetanus, and poliomyelitis. 3.1. Sociodemographic features of patients The patients were an average of 44 ± 15 years of age, with an even sex-ratio. The description of their occupations (Fig. 2) showed a significant over-representation of the “craftsmen, dealers, managers” and “liberal professions (non civil-servants)” categories compared to the French population and a sub-representation of “workers” and “jobless” categories. 3.2. Reasons for vaccination The patient’s booster shot had been suggested by the physician 6 times out of 10 (60.5% of the cases). It was essentially in the context of a normal application of the vaccinal calendar (46.5%), or in the presence of a wound presenting a risk of tetanus (20.5%), or for a future trip

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abroad (13.1%). Then there were the situations in which an adult was vaccinated during a consultation for one of his children (9%) and those in which the le physician estimated that the patient presented with a lifestyle or activity presenting risks (7.4%). The frequency of other reasons was inferior to 5% (Fig. 3). When vaccination was spontaneously required by the patient (39.5% des cases), it was in half of the cases (52.8%) patients regularly following their vaccinal status, for 20.6% a future trip abroad, for 13.6% advice given by occupational medicine, for 5.3% when a relative was vaccinated, and for 6.6% for a wound presenting a risk of tetanus (Fig. 4). 3.3. Vaccinal status of the adult Currently, available data on adult vaccination is mostly noted as vaccination certificates (58%) and in the patient’s personal medical file (40.8%). But the computerized medical file is becoming increasingly important in this domain (28.1%). Indeed a lot of software leaves room for the collection of vaccinal data whereas this data is recorded in only 15.9% of the traditional medical files. It seems that 90.5% of the adults were vaccinated against diphtheria, 94.4% against tetanus, and 92.6% against poliomyelitis. The delay since the last booster injection was almost identical for these 3 vaccinations and ranged between 5 and 10 years for a little more than half of them, and between 10 and 20 years for a quarter of them (Fig. 5). The proportion of vaccinated patients statistically decreased with age and only reached 81.5%, 91.8%, and 84.7% for the above mentioned diseases, after 70 years of age. Furthermore, it was found that 89.5% of the adults were vaccinated with BCG, 57% were vaccinated against hepatitis B, 39.4% against rubella, 35.8% against the flu, 34.8% against measles, 34.2% against the mumps, 19.8% against typhoid fever, 17% against hepatitis A, 15.3% against yellow fever, 4.9% against S. pneumoniae, and 3.8% against N. meningitidis (Fig. 6). These percentages hide an important discrepancy according to age, especially for hepatitis B and rubella as reported in Fig. 7. It was noted that 73% of male patients had gone through military service an average of 25 ± 13 years ago and that 88.9% of these had been revaccinated on that occasion, which confirms the importance of military service in that domain. 3.4. Reasons for delay in vaccination booster injections and attitude of patients concerning these booster injections The main reasons for inadequate vaccination of patients were: forgetting vaccination (24.2%), negligence (15,2%), and the notion that at the patient’s age, it was no longer

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necessary (9.5%). In over a third of the cases (36.9%) no reason was mentioned. It was also reported that the fear of shots was mentioned by 4.3% of the patients, that the fear of going through a whole program was mentioned by 3%, that 2.7% thought that these diseases had become too rare to be a problem, and that 1.4% were in favor of “natural” methods. Only 0.9% of the patients were afraid of adverse effects, and 0.4% of contracting the disease. Finally, for various reasons, previously mentioned, only 3.6% of the patients were reluctant to undergo revaccination. 3.5. Information of the patient concerning booster vaccination One patient out of 2 (56.1%) was considered by the physician as relatively well informed on booster vaccinations. This information was given to 66.9% of the patients by the physician, and to 20.7% by occupational medicine. Medias and vaccination campaigns contributed to the information respectively of 11% and 13.7% of the patients. Only 13.4% of the patients knew that new diphtheria epidemics had developed in Eastern countries. Being told about these epidemics made acceptation of booster vaccination easier for 60.2% of the patients. When questioned on the value of information brochures for booster vaccinations, physicians answered that they made it easier to initiate a dialogue on the subject for 69.4% of the patients.

4. Discussion These observations of 6269 patients, 44 ± 15 years on average, were collected by 2122 general practitioners, a representative sample of the profession by their practice, and gave a good notion of vaccinal habits in private practice. The study showed that physicians had a good notion of their patients’ vaccinal status and of the national vaccinal coverage. These vaccinations were recorded on various documents: patient’s personal medical file, vaccination certificates, medical file… This diversity of recording does not facilitate the transmission of vaccinal information when the patient changes physician and is an obstacle for the evaluation of vaccinal coverage. In the context of a better follow-up of vaccinations, both on the individual level and on the epidemiologic level, efforts should be made for harmonization and coherence in this domain. Several epidemiologic results were significant. The description of their occupations (Fig. 2) showed a significant over-representation of the “craftsmen, dealers, managers” and “liberal professions” categories compared to the French population and a sub-representation of “workers” and “jobless” categories.

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This shows the inequality of people in front of vaccination and brings to reconsidering the orientation of information campaigns. The latter should target these socioprofessionnal categories with the help of general practitioners and public health services concerning all the population. Respectively 90.5%, 94.4%, and 92.6% of the patients were vaccinated against diphtheria, tetanus, and poliomyelitis, but only 58.4%, 66.1%, and 63.4% had up to date booster injections. This means that 40% of the adult population is not adequately protected currently. These figures correlate with those of a study made in 1997 by the Franche-Comté RHO (Regional Health Observatory) on a representative sample of 1000 patients, showing that the vaccinal coverage in 50 year-old patients sharply decreases protecting only 1 patient out of 2 [7]. The insufficiency of vaccinal coverage increasing with age concerns most vaccinations but is especially strong for some vaccinations such as the one against hepatitis B. The decrease of vaccinal coverage observed in this study should be compared to the Medical Sofres enquiry which reported coverage rates for vaccination against hepatitis B of 51% between 21 and 24 years of age, 30% between 25 and 34, of 22% between 35 and 44, of 16% between 45 and 54, and of 5% beyond. The figures reported by the Franche-Comté RHO give rates of 40% between 25 and 34 years of age, 24% between 35 and 54, and 8% between 55 and more [7]. In this study, 73% of male patients were revaccinated during their military service, which confirms the importance of this mandatory event from the sanitary point of view. Its suppression may have severe consequences on vaccinal coverage of the adult male population. Some people suggested using the new “civil service” as a mandatory medical rendez-vous for both sexes, including the assessment and updating of the vaccinal coverage. But this opportunity was not taken advantage of. The inadequacy of vaccinal coverage seems due more to a lack of information and motivation in updating vaccinations than to fear of vaccination. The main reasons given for lack of coverage were: forgetting vaccination (24.2%), negligence (15.2%), the idea that at a certain age it was no longer necessary (9.5%), but for the larger percentage of patients (36.9%) no reason was given. But only 3.6% of the patients had accepted vaccination with reluctance. This suggests that information campaigns for vaccination were too limited, and that it is necessary to be more active in this field. It seems mandatory to install “health–care rendezvous” at a determined age for young adults who do not consult their physician often, and to set up structures and actions inciting adults to undergo vaccinations and booster injections. Some steps in life (hiring, changing job, retirement), some events (traveling, accident, vaccination for a relative) must be used to up-date vaccinations [8]. This also

implies, especially in elderly patients, a very strong implication of general practitioners who care for them les daily. The fact that 56.1% of physicians think that their patients are well informed shows an under-estimation of the problem: active involvement on their part is all the more necessary that the elderly patient often lives in a relatively isolated social context. Finally, the data base built from daily general medical practice, having proved its validity, could be used in the future for other statistical purposes such as the study of regional vaccinal coverage variations. Some epidemiologic data could be better assessed: that concerning vaccinal coverage according to age, determining the impact military service had on the vaccinal coverage of adult male patients, or assessing the difference between vaccinal coverage in the city and outside, or among various professions. This kind of study is also a good observatory: using it again will help to evaluate the measures set up in favor of adult vaccination.

5. Conclusion The data collected by this cross sectional epidemiological study on the vaccinal status of the adult population makes up a good evaluation base for the deficit of vaccinal coverage in adults. The inadequate coverage seems to be important and concerns essentially the lowest social categories and the oldest populations. These results show that information campaigns and prevention are insufficient for a group of people little concerned by the issue and stresses the need for a more active action relying on public health services and especially general practitioners.

Références [1]

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