Diagnostic de la maladie coronaire

Diagnostic de la maladie coronaire

Mise au point Feuillets de Radiologie, 2005, 45, n° 4, 241-250 © Masson, Paris 2005 Cardiovasculaire Diagnostic de la maladie coronaire Scanner des ...

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Mise au point

Feuillets de Radiologie, 2005, 45, n° 4, 241-250 © Masson, Paris 2005

Cardiovasculaire Diagnostic de la maladie coronaire Scanner des artères coronaires J.-L. SABLAYROLLES (1), O. VIGNAUX (2)

Dans ce numéro des Feuillets de Radiologie, nous inaugurons une nouvelle passerelle entre les publications périodiques et les ouvrages des Editions Masson. En effet, le lectorat n’est pas forcément identique et certains ouvrages peuvent être méconnus d’un grand nombre de lecteurs qui seraient pourtant intéressés au sujet. C’est pourquoi nous avons décidé d’inclure dans les Feuillets de Radiologie un extrait de certains nouveaux livres en choisissant, avec l’accord de leurs auteurs, des chapitres dont l’intérêt est assez large. Nous espérons que cette initiative intéressera un grand nombre de lecteurs et que pour certains elle leur donnera le goût de consulter de façon plus intensive ces nouveaux ouvrages. Article reproduit d’après l’ouvrage : Imagerie cardiaque : scanner et IRM. Collection : « Imagerie médicale et diagnostic », chapitre 10, pp. 83-96. © Masson 2005.

La principale indication de toute imagerie cardiaque est le bilan des cardiopathies ischémiques. Ce bilan doit permettre à la fois : — l’étude des coronaires à la recherche d’une occlusion ou d’une sténose ; — l’étude du myocarde à la recherche d’une lésion secondaire à une atteinte coronaire. Cette étude est morphologique mais aussi fonctionnelle. Elle doit préciser si l’atteinte myocardique est réversible (ischémie) ou irréversible (nécrose) et si le territoire concerné peut être revascularisé par angioplastie ou pontage. Pour l’étude des coronaires, la coronarographie est la technique d’imagerie de référence pour mettre en évidence la distribution et les anomalies de la lumière des artères coronaires. Le principal avantage de cette technique est sa haute résolution spatiale et temporelle. Néanmoins, elle présente un certain nombre de limitations : — son caractère invasif avec une morbi-mortalité voisine de 5 ‰ ; — son imagerie bi-dimensionnelle qui ne visualise que la lumière artérielle. Il en résulte une sous-estimation à la fois du (1) Radiologie, Centre Cardiologique du Nord, 32-36, avenue des Moulins-Gémeaux, 93207 Saint-Denis Cedex 01. (2) Service de Radiologie A, Groupe Hospitalier Cochin-Saint-Vincentde-Paul, Pavillon Achard, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75679 Paris Cedex 14. Correspondance : J.-L. Sablayrolles, à l’adresse ci-dessus.

degré de sténose et de l’extension de la maladie [1]. En effet, la plaque d’athérome reste longtemps purement intra-pariétale avant de subir un remodelage qui peut conduire tardivement à une sténose par bombement dans la lumière artérielle. Des études ont ainsi montré que si la valeur prédictive positive de la coronarographie était élevée, à l’inverse, une coronarographie normale ne permettait pas d’exclure un athérome coronarien. Ceci est d’autant plus important qu’une plaque peu ou pas sténosante présente un risque de rupture, donc de syndrome coronarien aigu au moins égal à celui d’une plaque très sténosante. Ces limitations de la coronarographie permettent à des techniques non invasives les plus récentes comme le scanner de trouver leur place dans le bilan des cardiopathies ischémiques. La nouvelle technologie scanographique multicoupe permet de visualiser en routine la lumière et la paroi des troncs coronaires épicardiques. Progressivement, les indications se précisent. Des études statistiques les plus récentes confirment l’intérêt clinique du scanner dans l’exploration des coronaires (tableau I). Ces études sont réalisées sur des scanners 4 ou 16 coupes. Chez ces 540 patients symptomatiques ou non, la sensibilité varie de 77 à 95 % et la spécificité de 76 à 98 %. La valeur prédictive négative élevée est particulièrement intéressante en pratique clinique (environ 40 % des coronarographies sont réalisées pour éliminer une maladie athéromateuse coronarienne et ne sont pas suivies d’un traitement endoluminal ou chirurgical). De nombreuses indications sont en cours de validation clinique par plusieurs équipes à travers le monde. Ce chapitre décrit les indications du scanner cardiaque dans l’étude des artères coronaires. ANOMALIES CONGÉNITALES Les variations importantes de l’anatomie des coronaires sont retrouvées : nombre, topographie, origine et distribution des artères. Les anomalies majeures sont présentes chez environ 1 à 2 % des patients. Elles sont isolées ou associées à des cardiopathies congénitales. Elles peuvent être à l’origine d’ischémie myocardique mais aussi de mort subite comme les fistules ou certaines anomalies d’implantation. Anomalies d’implantation La figure 1 montre les anomalies d’implantation les plus fréquentes. Les anomalies qui peuvent être responsa-

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J.-L. SABLAYROLLES, O. VIGNAUX

Tableau I. — Études statistiques les plus récentes sur les scanners multicoupes [3-7]. N Patients

Sensibilité (%)

Spécificité (%)

VPP (%)

VPN (%)

Segments non vus (%)

Nieman Lancet 2001 ; 357

35

77

97

81

97

27

Achenbach Circulation 2001 ; 103

64

85

76

59

98

32

Auteurs

Gerber Invest Radio 2003 ; 38

25

82

96

73

97

30

Knez Am J Cardiol 2001 ; 88

44

78

98

85

96

6

Kopp Eur Heart J 2002 ; 23

102

93

97

81

99

0-30

Giesler AJR 2002 ; 179

100

91

89

66

98

29

Nieman Circulation 2002 ; 106

59

95

86

80

97

Ropers Circulation 2003 ; 107

77

92

93

79

97

Dewey Invest Radio 2004 ; 39

34

88

91

88

95



VPP : valeur prédictive positive ; VPN : valeur prédictive négative.

bles d’atteinte ischémique sont des artères aberrantes cheminant entre le tronc de l’artère pulmonaire et l’aorte : — naissance de la coronaire gauche au niveau de l’artère pulmonaire ; — naissance de la coronaire gauche, de la droite ou du sinus droit ; — naissance de la coronaire droite, de la gauche ou du sinus gauche ; — naissance de l’IVA du sinus droit. On retrouve d’autres anomalies asymptomatiques telle que la circonflexe naissant de la droite ou du sinus droit. Le scanner permet la visualisation de ces naissances aberrantes et précise leur trajet et leur rapport avec les autres structures cardiaques, en particulier le tronc de l’artère pulmonaire qui n’est pas apprécié en coronarographie (fig. 2).

vient de la coronaire droite, les autres de l’IVA ou de la circonflexe, mais il existe de multiples origines. Elles se drainent dans le ventricule droit (41 %), l’oreillette droite (26 %), l’artère pulmonaire (17 %), le ventricule gauche (3 %) ou la veine cave supérieure (1 %). Le shunt gauche droit est le plus fréquent (> 90 %). Asymptomatique dans 50 % des cas, elles peuvent être responsables d’un accident ischémique, d’une endocardite, d’une insuffisance cardiaque ou d’une rupture sur fistule anévrismale.

Fistules Les fistules des artères coronaires sont de loin les anomalies les plus fréquentes (fig. 3). Environ la moitié proFig. 2. — Naissance de l’artère coronaire droite dans le sinus gauche. La circonflexe naît de la droite.

Fig. 1. — Schéma des différentes anomalies d’implantation des coronaires.

Fig. 3. — Fistule de la coronaire droite et coronaire gauche se drainant dans l’artère pulmonaire.

DIAGNOSTIC DE LA MALADIE CORONAIRE

Fig. 4. — Pont intra-myocardique sur l’interventriculaire antérieure segment II.

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Fig. 5. — Sténose ostiale du tronc commun mal vue à la coronarogaphie.

Ponts intra-myocardiques Les ponts intra-myocardiques ne sont pas toujours faciles à mettre en évidence (fig. 4). Les reconstructions 2D dans l’axe de l’artère ou en petit axe montrent la portion de l’artère intra myocardique. En mode ciné, on retrouve les modifications de calibre et le rétrécissement de l’artère en systole au moment de la contraction. Ces ponts se situent sur l’IVA.

ÉTUDE DES LÉSIONS DU TRONC COMMUN Fig. 6. — Contrôle après stenting en 2D et endoscopie virtuelle.

Les lésions en particulier ostiales sont souvent masquées ou difficiles à dégager à la coronarographie (et plus généralement, toutes les régions aveugles de cette technique). En coronarographie, les sténoses proximales du tronc commun sont les plus difficiles à apprécier du fait du cathétérisme sélectif des premiers centimètres du tronc commun. Le diagnostic est souvent posé par la chute importante des pressions lors du cathétérisme sélectif et la sténose est plus souvent suggérée que visualisée lors du retrait du cathéter. Le scanner confirme la sténose : topographie (par rapport à l’ostium et à la bifurcation de l’IVA et de la circonflexe), quantification, nature de la plaque (fig. 5). Il précise la longueur du tronc commun et guide la décision thérapeutique (traitement endoluminal avec stent ou traitement chirurgical par pontage). Le scanner est également indiqué dans la surveillance des sténoses intermédiaires ou après traitement endovasculaire : position du stent, perméabilité (fig. 6).

ÉTUDE DES LÉSIONS ATHÉROMATEUSES Dans l’étude des lésions athéromateuses des artères coronaires, le scanner cardiaque permet de préciser le nombre d’artères coronaires lésées, la sévérité et le type de lésion. Nombre d’artères coronaires lésées Une atteinte athéromateuse peut se traduire par des lésions d’une, deux ou trois artères ou par une atteinte diffuse à toutes les branches. Après repérage de chaque artère, l’évaluation des artères coronaires doit se faire de façon systématique segment par segment en imagerie 3D et 2D.

Le repérage des artères coronaires en imagerie 3D (MIP ou vue angiographique) et coupe 2D est indiqué dans les figures 7 à 9. La segmentation des artères coronaires en imagerie 3D (MIP ou vue angiographique et volume rendering) est indiquée : — par la figure 10 pour l’artère coronaire droite ; — par les figures 11 et 12 pour l’artère coronaire gauche. Les zones à surveiller sont les bifurcations artérielles pour lesquelles le risque de sténose ou de thrombose par dépôt d’athérome est d’autant plus accentué que la bifurcation se fait : — en deux ou plusieurs branches, de calibre identique (si le calibre n’est pas identique, le risque est moins important) ; — par un changement de direction à angle de plus en plus grand entre l’artère d’amont et les branches de division. C’est-à-dire si ce changement de direction est situé pour chaque branche dans un plan différent et dans une direction différente à 90° ou plus. Sévérité des lésions La quantification des sténoses se fait avec des logiciels qui permettent de mesurer automatiquement le diamètre ou la surface de la lumière du vaisseau (cf. chapitre 6). Le degré de sténose s’exprime en pourcentage (50, 75 ou 100 %) avec appréciation de la collatéralité et du lit d’aval. Le scanner (fig. 13) permet, en théorie, d’évaluer une sténose coronaire de façon précise en mesure surfacique mais il existe, comme nous le verrons, un certain nombre de limites dans l’évaluation des sténoses.

J.-L. SABLAYROLLES, O. VIGNAUX



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Fig. 7. — Repérage des coronaires en coupe axiale.



Fig. 8. — Repérage des coronaires en coupe petit axe.

Fig. 9. — Repérage des coronaires en coupe coronale oblique.

Fig. 10. — Segmentation de l’artère coronaire droite. À droite : artère coronaire droite dans son premier, deuxième et troisième segments, le trépied et la distalité (IVP : interventriculaire postérieure. RVG : rétro-ventriculaire gauche).

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Limites de la technique

Fig. 11. — Segmentation de l’artère coronaire gauche. À gauche : tronc commun, artère interventriculaire antérieure (proximale, moyenne et distale), les diagonales, artère circonflexe (proximale et distale) et ses branches (marginales du bord gauche).

Type des lésions Les altérations pariétales se caractérisent par : — infiltration des parois donnant un aspect rigide segmentaire ou diffus ; — inégalité des bords secondaire à des plaques athéromateuses avec ou sans calcification ; — ectasies globales ou segmentaires ; — anévrisme unique ou multiple (fig. 14). Pour les sténoses, on apprécie : — le degré en comparaison avec le diamètre de l’artère dans une portion saine (fig. 15) ; — la longueur ; — le rapport avec les collatérales ; — le lit d’aval. Les occlusions surviennent le plus souvent par thrombose sur des lésions athéromateuses. Il faut préciser la longueur de l’occlusion, l’état du lit d’aval et la collatéralité pour l’option thérapeutique (fig. 16). Les autres facteurs à rechercher sont : — la topographie, l’aspect concentrique ou excentré. La présence de thrombus ou d’une dissection (fig. 17) ; — le diamètre des artères lésées ; — la qualité du lit d’aval. Ces facteurs sont des éléments importants à préciser pour le choix thérapeutique.

▲ Fig. 12. — Segmentation de l’artère coronaire gauche.

Actuellement, elles dépendent de plusieurs paramètres : — les problèmes d’acquisition, en particulier la synchronisation à l’ECG, responsables d’artéfacts cinétiques. Une qualité d’image optimale est nécessaire ; — la résolution spatiale qui est encore insuffisante pour une étude précise des lésions sur les artères distales, en particulier le dernier segment de la circonflexe et l’IVP, d’autant plus que l’artère est infiltrée ; — l’effet « blooming », phénomène physique lié aux rayons X qui tend à majorer la taille des structures très denses (fig. 18). Cet effet est responsable d’une surestimation des sténoses. Une étude récente comparant scanner et coronarographie a montré que lorsque la lumière n’est pas dissociable de la plaque calcifiée, la probabilité d’une sténose supérieure à 75 % est importante. Ainsi pour la détection des sténoses calcifiées de haut grade au scanner, la sensibilité est de 89,7 %, la spécificité de 76,7 % et la VPN de 88,5 %.

ÉTUDE DE LA PLAQUE ATHÉROMATEUSE La composition cellulaire et biochimique de la plaque athéromateuse constitue un facteur de risque majeur quant à la survenue d’un syndrome coronarien aigu. Dans les artères coronaires, les plaques dites vulnérables ou à haut risque tendent à être de petite taille, mais leur contenu lipidique élevé les expose tout particulièrement à une rupture purement « passive ». De plus, des phénomènes « actifs » liés aux macrophages vont se mettre en place et faire évoluer les lésions vasculaires avec des facteurs favorisant la rupture et la thrombose. Le scanner permet de détecter facilement les plaques non visibles en coronarographie en raison du remodelage positif. Il est démontré que ces plaques ont une plus grande contenance en lipides avec une activité macrophagique supérieure à la plaque à développement endoluminal. Ces lésions à risque auraient de plus une bonne réponse aux statines. L’étude 2D est le seul moyen de dissocier la lumière de la plaque athéromateuse responsable de la sténose en précisant sa nature avec l’espoir d’apporter un élément dans la définition de la plaque à risque (cf. chapitre 6). À l’heure

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Fig. 14. — Anévrismes de l’interventriculaire antérieure et de la circonflexe.

Fig. 13. — Sténose 70 % sur plaque calcifiée de l’interventriculaire segment 2.

Fig. 16. — Occlusion de l’interventriculaire antérieure segment II et anévrisme apical du ventricule gauche. Fig. 15. — Sténose segment I de l’interventriculaire antérieure sur plaque molle.

Fig. 18. — Sténoses de l’interventriculaire antérieure sur plaques calcifiées. Fig. 17. — Dissection du tronc commun (2D curviligne).

DIAGNOSTIC DE LA MALADIE CORONAIRE

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A B C D

Fig. 19. — Quatre types de plaque B : Fibreuse. C : Mixte. D : Calcifié.

d’athérome.

A:

Molle.

actuelle, on peut définir 4 types de plaques [2] en fonction de leur morphologie et de leur densité (fig. 19).

BILAN CORONAIRE PRÉOPÉRATOIRE En un seul examen, le scanner étudie les lésions valvulaires [9, 10] et aortiques et contrôle la perméabilité des artères coronaires avant une intervention chirurgicale comme un remplacement valvulaire ou de l’aorte ascendante. La coronarographie préopératoire peut être évitée (fig. 20). Les données du scanner sont suffisantes pour décider d’un pontage complémentaire en un même temps chirurgical. De la même façon, un scanner coronaire peut être réalisé dans le bilan préopératoire de toute chirurgie en particulier vasculaire.

CONTRÔLE DES PONTAGES CORONAIRES C’est une des meilleures indications du scanner (fig. 21). Ce contrôle actuellement réalisé par voie angiographique peut s’avérer long et techniquement difficile avec injection d’une grande quantité de produit de contraste. Nous avons réalisé une étude de 289 pontages veineux ou mammaires chez 88 patients en contrôle postopératoire immédiat ou tardif. Dans 91 % des cas, le scanner peut répondre sur la perméabilité du pontage, la qualité de l’anastomose distale et du lit d’aval. Pour la réalisation du scanner, il est souhaitable de connaître le montage chirurgical : pontage veineux saphène, pontage artériel mammaire interne ou radial. En dehors d’une surveillance régulière, ces contrôles au scanner sont indiqués lors de l’apparition d’une nouvelle crise d’angor, d’une dissection ou de lésion de l’aorte thoracique, avant redux (chirurgie valvulaire ou aortique) ou après échec d’une coronarographie (fig. 22). On peut mettre en

Fig. 20. — Endocardite des valves aortiques. Au scanner : sténose de l’artère coronaire droite. Chirurgie valvulaire et pontage sans coronarographie.

évidence une hypoperfusion, une sténose, une occlusion du pontage, une complication anévrismale des pontages veineux, plus rarement une dissection au niveau de l’anastomose proximale. Le scanner est utile dans le bilan préopératoire avant monopontage par voie endoscopique et assistance robotique (fig. 23). Le scanner permet : — le repérage de l’artère mammaire interne gauche (MIG : topographie et diamètre), ses rapports avec l’IVA (distance, angle, obstacle ?) ; — le repérage de l’anastomose sur l’IVA (en aval de la lésion, diamètre > 2,5 mm) ; — la qualité du lit d’aval : calcifications, pont intra myocardique ; — le repérage de l’espace intercostal en regard de l’anastomose. CONTRÔLES POSTOPÉRATOIRES En postopératoire d’une chirurgie de l’aorte ascendante, le scanner contrôle le geste chirurgical et recherche des anomalies des réimplantations des coronaires (fuite anastomotique) et des lésions coronaires associées (fig. 24). CONTRÔLE DES STENTS Cette indication est plus controversée. En effet, la visualisation de la lumière intra stent est parfois délicate en fonction de la topographie, la taille et surtout la structure du stent (effet « blooming ») (fig. 25). Pour le moment, en dehors des contrôles systématiques, devant des signes de souffrance myocardique, on lui préfère d’emblée la coronarographie à la fois diagnostique et interventionnelle.

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Fig. 21. — Fig. 10-21 – Pontage mammaire interne gauche – interventriculaire antérieure, en Y sur la gauche, mammaire interne droit – marginale du bord gauche.

Fig. 22. — Occlusion d’un pontage artère mammaire interne gauche – interventriculaire antérieure segment II (1), anévrisme pontage veineux Ao-MBG (2).

Fig. 24. — Bentall pour dissection : angor récent, sténose tronc commun (1), fuite anastomose aorte coronaire gauche sur le tube (2).

plaques calcifiées sont par définition stables. C’est pourquoi l’application de ce score calcique comme marqueur coronaire reste discuté en pratique clinique, et peu utilisé en France [8]. Fig. 23. — Bilan préopératoire avant monopontage.

EXCLUSION DE LA MALADIE CORONAIRE On recherche des signes d’occlusion (fig. 26) ou de resténose par hyperplasie intimale qui se traduit par une hypodensité intrastent accolée à la paroi hyperdense du stent, responsable d’une lumière irrégulière et de petite taille. SCORE CALCIQUE Il est possible d’étudier sur des scanners sans injection la présence et l’extension des calcifications coronariennes. Quantifiées selon un score, elles sont considérées par certains auteurs comme un facteur de risque coronarien indépendant. Néanmoins, l’absence de calcifications ne permet pas d’exclure un athérome coronaire (plaque molle ou fibreuse) et à l’inverse la présence de nombreuses calcifications, bien que reflétant l’existence d’une maladie coronaire évoluée, n’est pas corrélée à un risque clinique aigu local (rupture de plaque). En effet, pour un individu donné, les

Le caractère non invasif, reproductible, rapide, réalisable en urgence et surtout la valeur prédictive négative élevée du scanner coronaire dans les différentes séries publiées [3, 7] permettent d’envisager des indications dans des circonstances cliniques où la coronarographie est souvent réalisée pour éliminer un athérome coronarien alors que le risque est faible ou moyen : — un tableau clinique atypique, insuffisant pour indiquer une coronarographie : douleurs thoraciques atypiques, avec ou sans facteurs de risque ou des antécédents familiaux, épreuve d’effort ou scintigraphie ininterprétable ou non contributive, etc. (fig. 27). En fonction des lésions, le scanner posera l’indication de la coronarographie souvent à visée thérapeutique ; — les cardiomyopathies de découverte récente et d’étiologie inconnue chez des patients à facteurs de risques faibles (patient jeune, sans antécédent familial et sans dysli-

DIAGNOSTIC DE LA MALADIE CORONAIRE

Fig. 25. — Stent de la circonflexe. 1. MIP. 2, 3. 2D curvilignes dans le grand et petit axes.

Fig. 27. — Patient à facteurs de risque – plaque molle non sténosante de l’interventriculaire segment I – scanner 64 coupes avec ECG – temps d’acquisition = 5 battements cardiaques (6 s).

pidémie). Un scanner normal permet d’éliminer une origine ischémique ; — en urgence, devant des douleurs thoraciques, les nouveaux scanners 64 coupes au lieu de 16 (fin 2004) vont permettre d’explorer en un seul examen la totalité des structures thoraciques : plèvre, poumons, artères pulmonaires, aorte, cœur et coronaires et d’en rechercher une étiologie en haute résolution synchronisé à l’ECG en moins de 12 s (fig. 28). Ainsi, le scanner cardiaque, pour certaines indications, est complémentaire aux techniques classiques comme la coronarographie et pour d’autres, il s’y substitue. Un scanner peut être indiqué : — après une coronarographie, devant une lésion atypique difficile à dégager, un infarctus sur coronaires normales, pour une caractérisation de la plaque sur une sténose intermédiaire ou à la suite d’une dissection postcoronarographie ;

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Fig. 26. — Stent IVA segment I : sténose ostiale interventriculaire antérieure et occlusion intrastent (2 stents).

Fig. 28. — Scanner 64 coupes – exploration avec ECG de la totalité du thorax en haute résolution – temps d’acquisition = 12 s – 4 pontages mammaires en Y normaux.

— en première intention, devant un contexte clinique insuffisant pour indiquer une coronarographie. Le tableau II résume les avantages du scanner comparés aux explorations habituelles.

CONCLUSION Dans le bilan des cardiopathies ischémiques, le scanner cardiaque est, à l’heure actuelle, la technique non invasive la plus performante pour l’exploration des artères coronaires. Par son acquisition volumique, le scanner s’affirme comme le moyen d’explorer en ambulatoire de façon reproductible non seulement les artères coronaires, mais aussi toutes les structures cardiaques. Depuis ces quatre dernières années, après une phase de mise au point technique, puis de validation clinique, le scanner devient un examen de routine

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J.-L. SABLAYROLLES, O. VIGNAUX

Tableau II. — Avantages du scanner par rapport aux autres techniques d’exploration. Applications Étude des Coronaires

Coronarographie

Échocardiographie

Scintigraphie

Scanner

IRM

++++





+++

WIP

Caractéristiques de la plaque



– (sauf endovasculaire)



++

WIP

Viabilité myocardique



++

+++

WIP

+++

Perfusion myocardique





+++

WIP

+++

Fonction ventriculaire

+

++

+

++

+++

Étude morphologique

+

++



+++

+++

WIP = Technique en cours de mise au point mais à fort potentiel évolutif.

et trouve progressivement sa place parmi les différentes explorations cardiaques. Les indications se précisent et s’élargissent au fur et à mesure de son utilisation. La dernière génération de scanner plus rapide, en haute résolution, recule les limites de cette exploration qui, souvent complémentaire, se substitue progressivement non seulement à la coronarographie mais aussi aux autres méthodes d’imagerie dans un nombre constamment croissant d’indications.

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