Enjeux psychiques de la chirurgie bariatrique

Enjeux psychiques de la chirurgie bariatrique

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AMEPSY-2313; No. of Pages 6 Annales Me´dico-Psychologiques xxx (2017) xxx–xxx

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

Me´moire

Enjeux psychiques de la chirurgie bariatrique Psychical stakes of bariatric surgery Caroline Leduc a,*, Caroline Gault a, Charles Gheorghiev b a b

Service de psychiatrie de l’HIA Be´gin, hoˆpital d’instruction des arme´es Be´gin, 69, avenue de Paris, 94163 Saint-Mande´ cedex, France Service de psychiatrie de l’HIA Sainte-Anne, 83000 Toulon, France

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Historique de l’article : Rec¸u le 2 juin 2016 Accepte´ le 2 novembre 2016

Les consultations d’e´valuation psychologique pre´-chirurgie bariatrique et le suivi apre`s la chirurgie re´alise´s au sein de notre e´tablissement se conforment aux recommandations actuelles. Il s’agit en amont d’e´valuer un risque de de´se´quilibre psychique et de proposer apre`s-coup un espace de parole pour aider le patient a` subjectiver les conse´quences de la chirurgie. Celle-ci entraıˆne une transformation physique importante et rapide, particulie`rement dans les cas d’ope´ration de bypass gastrique. L’oralite´ et le rapport au corps, souvent centraux dans la logique subjective des patients, se retrouvent dans leurs pre´occupations une fois ope´re´s. Ce sont les capacite´s du sujet a` subjectiver une perte et a` assumer une nouvelle image de son corps, ainsi que ses implications dans le lien a` l’autre, qui semblent de´cisives. L’analyse des interactions entre ces changements physiques et leur impact psychique est re´alise´e ici a` partir d’exemples cliniques pre´cis, indiquant l’importance du suivi psychologique dans ces prises en charge.

C 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´ serve´s.

Mots cle´s : Accompagnement the´rapeutique Chirurgie Gastroente´rologie Image du corps Obe´site´ Oralite´ Pathologie psychiatrique Psychologue Subjectivation

A B S T R A C T

Keywords: Body image Gastroenterology Obesity Orality Psychiatric pathology Psychological counseling Subjectivation Surgery Therapeutic accompaniment

Our practice in our hospital of the psychological evaluation in preoperative consultations and of the follow up of patients after bariatric surgery is based on the consensus of the national recommendations (HAS). Beforehand, the aim is to evaluate a risk, particularly of acting out, and afterwards, to propose therapy to help the patient make subjective the effects of surgery. Addictive disorders, serious eating disorders or unstabilized psychiatric symptoms can constitute a contraindication. Body-image, motivation and an ability of understanding are also very important to consider. The decision is made during a multi-disciplinary meeting with surgeons, endocrinologists and dietitians. Since 2012, 128 patients have entered the bariatric surgery protocol and 62 have been operated. We have received 43 of them in consultations after surgery. Seven of them have encountered psychological problems after surgery. Bariatric surgery leads to an important and fast physical transformation, particularly after gastric bypass. Orality and the body are often central for these patients regarding to their subjective issue. We note that they are still preoccupied by these questions after surgery. Even though surgery provides a physical limit to eating, patients still have to subjectivate a loss and this limit afterwards. This can be understood thanks to the stakes highlighted by S. Freud about oral phase, and J. Lacan about ‘‘sevrage complex’’, and to some cases of patients of our practice. It is also a new body image that the subject will have to assume and its implications in its relationship with others. Some difficulties related to body image can commonly appear after surgery. Furthermore, recent studies and literature have also emphasized the increase of suicides after surgery, even if the operation has been successful, and the importance to understand its causes. We did not encountered such cases in our small practice, but the analysis of interactions between physical changes and their psychic impact underlines the importance of psychological follow-up of

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Leduc). http://dx.doi.org/10.1016/j.amp.2016.11.014 C 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´ serve´s. 0003-4487/

Pour citer cet article : Leduc C, et al. Enjeux psychiques de la chirurgie bariatrique. Ann Med Psychol (Paris) (2017), http://dx.doi.org/ 10.1016/j.amp.2016.11.014

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these patients. Either physical changes can accompany psychical changes in some cases or it can be more complex in other cases. The relationship to the Other, an ability to limit oral jouissance and to accept a loss are important aspects to reckon when it comes to bariatric surgery.

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1. Introduction La chirurgie bariatrique a des conse´quences sur le corps et l’alimentation du sujet. Le rapport du sujet a` son corps se trouve convoque´ par des interventions chirurgicales qui induisent souvent un changement physique majeur et rapide. Il est a posteriori inte´ressant d’observer les effets psychiques d’une telle chirurgie et d’en analyser les causes et la nature, a` partir des fonctions subjectives qui sont en jeu dans de tels cas. Dans l’e´tablissement hospitalier ou` nous exerc¸ons, un protocole de chirurgie bariatrique a e´te´ mis en place en 2012. Les patients candidats a` cette chirurgie sont rec¸us par une psychologue avant et apre`s l’intervention, quand elle a e´te´ juge´e pertinente. Si les consultations pre´ope´ratoires n’ont pas de dessein pre´dictif, il est ne´anmoins demande´ au psychologue d’e´valuer un risque que pourrait de´clencher l’ope´ration sur le plan psychique, et de poser une e´ventuelle contre-indication [1]. La chirurgie s’est inscrite dans une de´marche ou` ont coı¨ncide´ des changements physiques et psychiques. L’ope´ration peut avoir une fonction d’amorc¸age d’une dynamique subjective qui a ne´anmoins semble-t-il toujours ses sources dans une mobilisation ante´rieure des enjeux de vie du patient. Ainsi, le complexe de sevrage a e´te´ identifie´ par Lacan comme jouant un roˆle organisateur de la vie psychique. La premie`re relation de nourrissage a permis au sujet de forger une imago maternelle, qui est une premie`re se´paration du sujet et de l’autre. Mais le sevrage a pu eˆtre traumatique ou ne pas eˆtre re´alise´. C’est a` partir de ce ressort the´orique que nous de´plierons notre proble´matique. Aussi, qu’en est-il de la place de la nourriture pour le sujet, la` ou` elle e´tait parfois centrale dans son fonctionnement psychique en mettant en jeu l’objet oral et les possibilite´s plus ou moins dialectiques de s’en se´parer ? Quelles sont les conse´quences subjectives de la perte de la sensation de faim ? Comment les patients vivent-ils les transformations de leur corps ? Si les patients ope´re´s ne pre´sentent pas de troubles du comportement alimentaire grave, la question de l’oralite´ est souvent au cœur de leur logique subjective, tout comme celle de leur corps. Nous nous proposons d’illustrer nos questionnements par des vignettes cliniques. 2. Me´thode 2.1. Place du psychologue dans le protocole Les consultations d’e´valuation psychologique qui ont lieu avant l’ope´ration visent a` e´liminer d’e´ventuelles contre-indications d’ordre psychologique, principalement l’actualite´ de troubles addictifs, et la pre´sence de troubles du comportement alimentaire graves, de troubles psychotiques de´clenche´s et non stabilise´s, de troubles cognitifs se´ve`res, selon les recommandations de la Haute Autorite´ de sante´ [9]. Nous sommes aussi particulie`rement attentifs aux troubles majeurs de l’image du corps. Les contreindications sont aussi pose´es en fonction d’une e´valuation de la motivation et des capacite´s de compre´hension du sujet [7,8]. Les cas sont ensuite discute´s en re´union de concertation pluridisciplinaire avec l’ensemble des professionnels implique´s dans la prise en charge (endocrinologues, chirurgiens, die´te´ticiennes, psychologues). Le protocole pre´voit que les patients revoient les

psychologues en consultation un mois et trois mois apre`s l’ope´ration, dans le but de proposer un espace de parole permettant au patient de subjectiver la transformation, mais aussi d’e´valuer son impact psychologique, et d’orienter sur une psychothe´rapie, voire une prise en charge psychiatrique si cela s’ave´rait ne´cessaire. Quand cela n’a pas e´te´ possible, nous les avons rencontre´s syste´matiquement lors d’un bilan somatique qui a lieu un an apre`s. Par ailleurs, il nous est arrive´ de revoir plus souvent les patients a` leur demande, ou encore a` celle de l’e´quipe me´dicale et parame´dicale. Parfois pour repre´ciser l’e´valuation pre´ope´ratoire, dans d’autres cas pour apporter un e´clairage sur des phe´nome`nes qui inquie`tent l’e´quipe a` la suite de l’ope´ration (difficulte´s d’observance de traitements vitaminiques par exemple ou e´carts de re´gime). 2.2. Constat chiffre´ Depuis 2012, sur les 128 patients inclus dans le protocole, 62 ont e´te´ ope´re´s jusqu’a` pre´sent, pour la plupart d’un bypass gastrique, c’est-a`-dire d’une intervention qui est a` la fois restrictive et malabsorptive : elle re´duit la taille de l’estomac, et diminue l’assimilation de ces aliments par l’organisme avec de´rivation biliopancre´atique. Quinze sont encore en attente de la de´cision de la re´union de concertation pluri-disciplinaire et 39 sont sortis du protocole, dont 11 du fait de contre-indications d’ordre psychologique : cinq pour des troubles de´pressifs majeurs (dont certains te´moignaient d’ante´ce´dents de tentative de suicide), cinq pour des troubles psychiatriques non stabilise´s, et dans un cas pour une de´pendance se´ve`re a` l’alcool. Des troubles boulimiques et une difficulte´ a` suivre les mesures me´dicales et die´te´tiques pouvaient y eˆtre associe´s. Il est a` pre´ciser que la plupart de ceux pour lesquels la chirurgie a e´te´ refuse´e pour une raison psychologique ont e´te´ oriente´s pour un suivi. Nous avons revu 43 d’entre eux en consultations post-chirurgie. Pour 9 de ces patients, un suivi aupre`s d’un psychologue a e´te´ mis en place sur l’hoˆpital ou en externe. Sur les 62 patients ope´re´s, 7 ont rencontre´ des difficulte´s d’origine psychologique dans les suites de la chirurgie. Pour une seule patiente, il s’agissait d’une difficulte´ a` respecter les restrictions, la patiente ne pouvant s’abstenir de boire des sodas. Une autre, au contraire, avait comple`tement cesse´ de manger plusieurs jours durant. Dans deux cas, il s’agissait de proble`mes en lien avec l’image du corps, pour une autre l’ope´ration avait provoque´ un effondrement de´pressif et dans le dernier cas, le patient avait de son propre chef arreˆte´ de prendre toute supple´mentation vitaminique. De fac¸on ge´ne´rale, nous retenons de notre clinique que l’ope´ration prend pour chaque patient un enjeu psychique particulier. Nous allons ne´anmoins essayer d’expliciter lesquels apparaissent re´currents, et a` quelles spe´cificite´s de cette chirurgie ils peuvent eˆtre corre´le´s, notamment au regard des modifications du corps qu’elle entraıˆne. 3. Re´sultats Les proble´matiques de l’oralite´ sont au cœur des logiques subjectives des patients que nous rencontrons dans le cadre du protocole de chirurgie bariatrique. La chirurgie, notamment le

Pour citer cet article : Leduc C, et al. Enjeux psychiques de la chirurgie bariatrique. Ann Med Psychol (Paris) (2017), http://dx.doi.org/ 10.1016/j.amp.2016.11.014

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bypass, par la limite qu’elle impose au corps, va de fait faire limite a` la jouissance et a` la pulsion orale, qui est mortife`re dans certains cas. Les patients sont en demande de cette limite qui viendra de l’« exte´rieur », disent-ils. Mais une subjectivation de cette limite et de la perte, perte de poids notamment, perte de jouissance, perte de satisfaction, s’ave`re dans tous les cas ne´cessaire. Ainsi pour Mme A., l’ope´ration d’une sleeve peut apparaıˆtre en partie un e´chec avec des pertes de poids fluctuantes et une perte globale de seulement 25 kg sur un an : la patiente ne pouvait se retenir de boire des sodas, interdits dans son nouveau re´gime alimentaire. 3.1. Le stade oral et le complexe de sevrage Pour comprendre les enjeux psychiques a` l’œuvre pour nos patients, nous souhaitons ici rappeler le roˆle organisateur pour le psychisme du stade oral et de la premie`re relation de nourrissage. Freud a souligne´, dans les Trois essais sur la the´orie de la sexualite´, le caracte`re d’organisation sexuelle du stade oral : « Une premie`re organisation sexuelle pre´ge´nitale est celle que nous appellerons orale ou, si vous voulez, cannibale. L’activite´ sexuelle, dans cette phase, n’est pas se´pare´e de l’ingestion des aliments, la diffe´renciation de deux courants n’apparaissant pas encore. Les deux activite´s ont le meˆme objet et le but sexuel est constitue´ par l’incorporation de l’objet, prototype de ce qui sera plus tard l’identification appele´e a` jouer un roˆle important dans le de´veloppement psychique » [5]. Cette activite´ d’incorporation de l’objet implique pour le sujet a` l’e´tat naissant une premie`re repre´sentation de l’Autre sur fond d’une relation ve´cue comme fusionnelle, dans un rapport de re´ciprocite´ imaginaire. Sur un plan clinique, il va s’agir de comprendre comment, pour chaque sujet, cette re´ciprocite´ peut eˆtre ou non rompue, donnant alors a` l’objet oral valeur ou non d’eˆtre cessible. C’est ce que permet de saisir le « complexe de sevrage » de´gage´ par Jacques Lacan. Lacan a de´veloppe´ ce concept dans Les complexes familiaux [11] et insiste´ sur son roˆle organisateur de la vie psychique en tant qu’il « fixe dans le psychisme la relation de nourrissage ». Il est selon lui « le complexe le plus primitif du de´veloppement psychique ». A` la diffe´rence de l’animal, souligne Lacan, chez l’homme l’instinct maternel perdure au-dela` du nourrissage, « c’est une re´gulation culturelle qui conditionne le sevrage ». Il s’agit d’une re´gulation d’une fonction sociale. La relation de nourrissage produit la forme primordiale de l’imago maternelle qui a une fonction organisatrice inconsciente, puis « l’imago doit eˆtre sublime´e pour que de nouveaux rapports s’introduisent avec le groupe social ». Ce complexe organisateur n’est pas sans lien avec le processus de reconnaissance du corps propre, au sens ou` le rapport a` la re´alite´ repose sur l’imago maternelle, meˆme si ce processus est plus tardif. Winnicott a aussi explicite´ le passage de l’excitation et de la satisfaction orale aux phe´nome`nes transitionnels, et leur importance pour la constitution psychique [12]. Aussi, si le sevrage est traumatique en tant que tel, il peut aussi ne pas s’eˆtre re´alise´ et eˆtre la cause de certaines pathologies telles que l’anorexie ou la toxicomanie. Lacan a souligne´ la fonction causale des complexes dans les symptoˆmes de certaines pathologies, comme dans celles qu’il nomme « orales ou digestives » ou` la consommation peut s’apparenter a` un « suicide non violent ». 3.2. Le cas particulier de la boulimie Le symptoˆme boulimique te´moigne de fac¸on exemplaire de la pulsion mortife`re a` l’œuvre dans les pathologies ou` l’oralite´ est centrale. Le caracte`re non cessible de l’objet oral, s’il n’est pas syste´matique, y apparaıˆt parfois avec une grande clarte´. Ainsi pour Mme H., pour laquelle une contre-indication psychologique a` l’ope´ration a e´te´ pose´e. Les troubles de la conduite alimentaire sont chez elle massifs depuis l’enfance. Envahie de pulsions voraces qui

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la font manger tout ce qui se trouve a` sa porte´e, elle est prise ensuite d’irre´pressibles envies de vomir. Elle en situe l’origine a` l’abandon par sa me`re lorsqu’elle avait huit ans, la laissant en garde a` un pe`re alcoolique et violent. Elle n’a revu sa me`re qu’a` l’aˆge adulte sur son lit de mort, quelques anne´es avant l’entretien. Elle me dit, tre`s e´mue, a` propos de cet e´pisode : « J’ai retrouve´ cette sensation de me`re. J’e´tais bloque´e pour lui parler mais le regard veut tout dire. Tout se disait entre nous par les yeux » ; e´voquant le contact œil a` œil entre le be´be´ et sa me`re lors du nourrissage, bien avant l’apparition du langage. A` la suite de ce de´ce`s, Mme H. a e´te´ prise en charge pour « une grosse de´pression » accompagne´e d’une recrudescence du symptoˆme boulimique qui s’est interrompu depuis deux ans quand nous la rencontrons. Meˆme la pose d’un anneau gastrique n’a alors pas pu le freiner – elle suc¸ait des ˆ eˆtre retire´ assez rapidement. Mme H. bonbons en masse – et il a du reconnaıˆt que « c¸a peut revenir sans pre´venir ». Elle indique que ses crises peuvent alors eˆtre si violentes que son conjoint doit descendre en urgence faire des courses « pour la calmer ». 3.3. La fonction de la perte : l’exemple de la perte de la sensation de faim La fonction de la perte est fortement mobilise´e dans les contextes de chirurgie bariatrique, tout comme la capacite´ a` subjectiver la perte. Il y a un avant et un apre`s l’e´ve´nement de l’ope´ration, tant les pertes de poids sont importantes. Le bypass entraıˆne notamment une perte de poids tre`s rapide dans les semaines qui suivent l’ope´ration. Ceci est concomitant avec de nouvelles re`gles d’alimentation tre`s restrictives, entraıˆnant un sevrage force´. La perte totale de la sensation de faim est aussi une conse´quence de la chirurgie de type bypass, qui peut avoir des conse´quences tre`s diffe´rentes selon les sujets. Les cellules productrices de l’hormone ghreline qui stimule l’appe´tit sont en effet dans une partie de l’estomac que la nourriture n’atteint plus apre`s un bypass notamment (d’autres hormones sont e´galement implique´es dans ce processus : GLP 1, etc). ˆ ge´ de Ressentir la faim e´tait inconnue de M. avant l’ope´ration. A 30 ans, il est revu un an et demi apre`s la chirurgie, il a perdu pre`s de 60 kg en dix mois, il pe`se de´sormais 68 kg contre 125 initialement. Le changement est majeur, il est difficilement reconnaissable physiquement. Son ope´ration, suite a` une de´cision de sa part ˆ rie, est une re´ussite et a e´te´ porte´e par un de´sir de affirme´e et mu changement de vie, qu’il avait formule´ a` l’entretien pre´ope´ratoire ; il indiquera notamment un autre changement de sa nouvelle vie, il est de´sormais en couple. Il y a dans son cas une coı¨ncidence des changements physiques et psychiques. L’ope´ration a eu cette fonction de relance par rapport a` l’image, au travail, a` la vie sentimentale, comme pour bien des patients. M. explique aussi qu’il a compris ce qu’est la sensation de faim du fait de son absence. Comme beaucoup de patients ope´re´s, il ne ressent plus la faim. Il distingue la faim de l’envie de manger qui existait chez lui auparavant et n’en est pas affecte´. L’insatisfaction dans la premie`re relation de nourrissage entraıˆne en effet la possibilite´ de se repre´senter l’objet comme se´pare´. L’objet est sinon perc¸u comme fusionnel. La limite impose´e par la chirurgie n’est pas toujours simple a` subjectiver. En effet, pour Mme B., revue dans les mois qui ont suivi la chirurgie, la perte de la sensation de faim, qui l’oblige a` mettre un re´veil pour se rappeler de manger, a coupe´ toute libido. Elle fait un lien entre le fait qu’elle ne ressent plus la faim et le fait qu’elle n’a plus d’envie de fac¸on ge´ne´rale. La satisfaction orale avait une place particulie`re pour elle. Sans eˆtre en proie a` des crises de boulimie, elle est d’habitude une femme hyperactive, « boulimique d’activite´s » selon ses termes. Sa « boulimie d’activite´s » « a disparu », cela constituait « son sas a` elle, sa bulle », au regard d’une anxie´te´ ponctuelle. Un suivi psychologique lui est propose´ qui lui

Pour citer cet article : Leduc C, et al. Enjeux psychiques de la chirurgie bariatrique. Ann Med Psychol (Paris) (2017), http://dx.doi.org/ 10.1016/j.amp.2016.11.014

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permet de de´ployer son questionnement et l’ame`ne a` se demander si c’est vraiment la chirurgie qui en est la cause, et pas son aˆge, charnie`re dans son parcours de vie, ou encore son corps. Elle a pu consentir a` la perte de satisfaction orale en partie graˆce au be´ne´fice de l’ope´ration sur l’image de soi. 4. Discussion Les comportements boulimiques, souvent corre´le´s a` un isolement social important, te´moignent par ailleurs d’une fixation auto-e´rotique a` l’objet oral, objet qui est par ailleurs en lien avec une demande d’amour [10], et donc implique´ dans une adresse a` l’autre. La chirurgie n’est ainsi jamais anodine puisqu’elle convoque ces deux dimensions cruciales pour chaque sujet. Subjectiver une limite et se se´parer de l’objet sont des enjeux psychiques majeurs pour les candidats a` la chirurgie et les patients ope´re´s. Si le patient n’en est pas capable, l’ope´ration peut eˆtre contre-indique´e ou reporte´e. 4.1. De possibles dysfonctionnements Des dysfonctionnements temporaires se produisent parfois. Le cas de craintes fantasmatiques traduit la plupart du temps la mise au travail de l’inconscient par rapport a` la question de la perte, comme dans le cas de cette femme d’une quarantaine d’anne´es. Elle est au choˆmage depuis deux ans suite a` un licenciement, elle est tre`s isole´e, et la perspective d’une chirurgie est un peu ide´alise´e a` l’entretien d’e´valuation. Sa prise de poids a e´te´ majore´e de fac¸on importante depuis trois ans suite a` une hyste´rectomie, et l’apparition d’e´le´ments de´pressifs est concomitante. Un suivi psychothe´rapeutique lui est conseille´. La de´cision de chirurgie est repousse´e pour une raison me´dicale, un entretien de re´e´valuation est donc organise´ quelques mois plus tard. A` cette occasion, elle fait part d’une crainte relative a` l’image de son corps apre`s la chirurgie si elle venait a` perdre beaucoup de poids : elle raconte avoir achete´ chez son boucher 50 kg de viande pour se repre´senter « qu’est-ce que c¸a fait ». Au regard de ces appre´hensions tre`s fortes, il lui est demande´ de re´fle´chir et de recontacter le chirurgien pour avoir plus d’informations. Elle sera finalement ope´re´e apre`s que sa ˆ rie (six mois apre`s le premier entretien). de´cision a e´te´ mu Les craintes par rapport a` la « transformation » sont ainsi fre´quentes, ce fut aussi le cas pour cette femme qui craignait que ses filles ne la voient plus comme la meˆme femme apre`s l’ope´ration. Il est inte´ressant d’identifier leur statut : sont-elles d’ordre fantasmatique ? Ou de´lirantes ? La de´stabilisation de l’image du corps que produit la perte de poids massive apre`s l’ope´ration peut aussi produire certains troubles de l’image du corps, non pre´visibles lors de l’entretien pre´ope´ratoire, et le plus souvent transitoires. Mme B., malgre´ une perte de 19 kg, e´nonce ainsi a` l’entretien a` +1 mois ne pas percevoir de diffe´rence de poids dans le miroir. Elle perc¸oit ne´anmoins la diffe´rence de poids sur les photos. Pour Mme A., jeune femme de vingt ans en obe´site´ morbide qui n’avait jamais entrepris de re´gime se´rieux, il avait e´te´ conseille´ devant l’immaturite´ de sa demande de l’orienter d’abord sur un suivi die´te´tique, mais sans contreindication formelle a` la chirurgie, celle-ci avait quand meˆme e´te´ re´alise´e. Lors d’un entretien postope´ratoire, il apparut que malgre´ les 25 kg perdus, Mme A. ne constatait aucun changement dans le miroir. Elle se trouvait meˆme plus grosse qu’auparavant, et alors que son poids n’avait eu jusqu’ici aucune incidence sur sa vie sociale, voila` qu’elle s’interdisait toute sortie, en particulier au restaurant : elle avait l’impression que tout le monde la regardait manger en la jugeant coupable de cette jouissance orale. Ces modifications du corps et leur perception par le sujet peuvent ainsi avoir une incidence importante sur leur vie sociale.

4.2. Subjectiver une limite Les paroles de Mme C., candidate a` la chirurgie, illustrent bien cette modalite´ de la se´paration en lien avec l’objet oral : des conflits importants avec son fre`re et le reste de sa famille la rongent et l’envahissent, elle rapporte a` ce sujet : « il me mange », « c¸a me bouffe ». Le recours a` la nourriture via des crises d’« hyperphagie » apaise son stress (elle pe`se plus de 140 kg). L’utilisation d’un vocabulaire alimentaire pour qualifier ses relations avec sa famille indique a` quel point la dimension orale est omnipre´sente dans sa proble´matique. Dans son cas, une re´e´valuation a` quelques mois sera demande´e, afin d’e´valuer si elle est en mesure de poser une premie`re limite avec la nourriture par elle-meˆme, car la chirurgie seule ne semblerait pas y suffire. Un suivi psychothe´rapique sera aussi engage´, afin de lui proposer de trouver une autre modalite´ que celle de la nourriture pour se se´parer de l’autre. Dans le cas de Mme R., la recherche d’une se´paration via une coupure re´elle contre-indiquera la chirurgie. Elle entreprend cette de´marche alors qu’elle vient de perdre son emploi et de se se´parer du pe`re de son second enfant, une fillette de quelques mois. Ce n’est pas le pe`re du fils aıˆne´ de trois ans, dont elle s’e´tait se´pare´e e´galement juste apre`s la naissance. Le lien a` l’Autre semble gouverne´ par une alternance de fusions et de ruptures radicales. Elle a ainsi perdu le contact avec la plupart des membres de sa famille suite a` des conflits. « La` ou` c¸a ne va pas, je coupe, j’enle`ve », dit-elle, parlant comme d’une hygie`ne de vie de « couper les relations toxiques a` la racine ». Sa demande de sleeve – technique qui implique de couper un bout de l’estomac – montre que cette farouche volonte´ d’extraction porte aussi sur son propre corps. Une premie`re perte insubjectivable semble avoir fonde´ chez elle cette dynamique : celle de sa me`re, de´ce´de´e quand elle avait 16 ans. Elle a alors « tout perdu », la me`re faisant jusque-la` barrage entre elle et un pe`re qui la de´teste. Cet e´ve´nement de´clencha l’apparition de crises boulimiques encore d’actualite´, maintenues meˆme lors de ses grossesses. Elle ne manifeste aucune prise de recul sur ce symptoˆme qu’elle tient pour acquis : « Je suis comme c¸a parce que petite, on me gavait. » C’est de ce gavage de l’Autre qu’elle tente vainement de se se´parer. La satisfaction orale qui a pre´valu avant l’ope´ration ne peut plus se maintenir apre`s telle quelle. L’ope´ration a introduit une limite physique, exte´rieure au de´sir de manger du sujet. C’est la possibilite´ de subjectiver une autre limite, interne celle-ci, et donc propre a` l’histoire de chaque sujet, qui est cruciale. Cela nous apparaıˆt possible a` partir de la mise en fonction de la perte dans l’e´conomie orale du sujet. Il s’agit pour le psychologue de mesurer cette capacite´ de subjectivation du patient en repe´rant la consistance de la dynamique de changement, ses ressources subjectives pour supporter une perte de satisfaction habituelle (la nourriture) et pour investir d’autres objets de satisfaction, l’anticipation par le sujet des modifications de l’image corporelle et leurs conse´quences dans la relation a` l’autre. Par ailleurs, l’ide´alisation des re´sultats de l’ope´ration (cense´e par exemple re´gler tous les proble`mes du sujet), de meˆme que la minimisation des risques de celle-ci paraissent eˆtre des e´le´ments freinant l’inclusion dans le protocole. Meˆme si ce ne sont pas des e´le´ments formels de contreindication, ils ajoutent des nuances importantes au tableau clinique. Dans ces cas, la temporisation de l’intervention chirurgicale et un nouvel entretien clinique sont requis. En effet, cette fonction de la perte est aussi a` resituer dans une dynamique, propre a` chaque patient. Il est d’ailleurs souvent de´cide´ en re´union de concertation pluridisciplinaire de faire patienter certains candidats a` la chirurgie bariatrique dont la de´cision nous paraıˆt pre´cipite´e, sans pour autant pre´senter de contre-indications formelles. Il peut s’agir de patients ayant traverse´ un e´pisode de´pressif relativement re´cent,

Pour citer cet article : Leduc C, et al. Enjeux psychiques de la chirurgie bariatrique. Ann Med Psychol (Paris) (2017), http://dx.doi.org/ 10.1016/j.amp.2016.11.014

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pour lesquels il paraıˆt raisonnable de confirmer la stabilisation thymique, ou de patients dont la de´marche paraıˆt peu aboutie, relevant strictement de l’axe imaginaire (par exemple, de´cision de la chirurgie strictement prise a` l’imitation d’un proche, anticipations ide´alise´es de ses effets sans prise en compte des risques et des limites de l’ope´ration). Dans la plupart des cas, l’interruption de la modalite´ habituelle de la fonction orale a pu eˆtre suffisamment pre´pare´e et accompagne´e sur le plan subjectif pour ne pas pre´cipiter le sujet dans une impasse. Cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas eu de perturbation dans l’organisation psychique ante´rieure. Bien au contraire, de`s avant l’ope´ration, la de´cision de l’ope´ration et l’anticipation de ses effets ont pris alors pour le sujet une fonction d’amorce ou de relance d’une dynamique subjective trouvant son de´ploiement dans tous les registres de sa vie, professionnels et relationnels en particulier. Apre`s l’ope´ration, cette dynamique subjective trouve bien souvent a` se confirmer par la coı¨ncidence des bouleversements psychiques et des changements physiques, avec ses conse´quences sur le plan de l’image du corps, l’amaigrissement e´tant tre`s rapide. Ainsi, tel patient s’engage dans une reconversion professionnelle, tandis que tel autre se re´sout a` de´me´nager la famille dans un appartement plus vaste, ou que telle autre fait une rencontre amoureuse apre`s des anne´es de ce´libat ; beaucoup re´investissent leur corps en reprenant une activite´ physique et dans le renouvellement de leur garde-robe. Si la dynamique en cause trouve sa source avant l’ope´ration chirurgicale proprement dite, c’est l’effet re´el, dans le corps, de celle-ci qui va e´ventuellement en fixer le statut d’e´ve´nement pour le sujet. 4.3. Ante´ce´dents psychiatriques et consultation pre´ope´ratoire Les vignettes pre´ce´dentes montrent l’importance du suivi postope´ratoire comme d’une e´valuation psychologique fine lors de l’entretien pre´ope´ratoire. L’importance des consultations postope´ratoires a e´te´ souligne´e par de nombreux auteurs [2]. Certes, l’apparition de troubles transitoires de l’image du corps ou de la fonction orale est pre´visible, voire attendue, manifestant la ne´cessite´ d’une e´laboration psychique des changements introduits par la chirurgie. Ne´anmoins, la revue de la litte´rature re´cente sur la question exige une grande prudence lors de la consultation pre´ope´ratoire, puisqu’il a e´te´ note´ une augmentation significative du risque de suicide chez les patients ope´re´s d’un bypass gastrique (58 % de surmortalite´ par accidents et suicides par rapport aux obe`ses non ope´re´s, en e´cartant les complications postope´ratoires et les comorbidite´s somatiques) [4]. Une e´tude plus re´cente encore chiffre a` 50 % la probabilite´ supple´mentaire de faire une tentative de suicide qu’avant l’intervention [6]. Les auteurs notent que la majorite´ de ces tentatives de suicide apparaissent eˆtre le fait de personnes ayant souffert de troubles psychiatriques ante´rieurs. Ainsi, poser une contre-indication se re´fle´chit particulie`rement pour les patients ayant des ante´ce´dents psychiatriques ou des e´tats de´pressifs majeurs [3]. Cependant, le releve´ des ante´ce´dents psychiatriques reste insuffisant pour au moins deux raisons : d’abord, les ante´ce´dents psychiatriques et notamment les tentatives de suicides ante´rieures, qui sont un facteur de risque supple´mentaire, sont cense´s avoir e´te´ releve´s lors de l’e´valuation pre´ope´ratoire, selon les recommandations de bonne pratique [9]. Par ailleurs, la perte ponde´rale qui suit l’ope´ration conduit a` une meilleure qualite´ de vie, tant sur le plan social que psychologique (e´tats de´pressifs ou anxieux, image de soi, etc), qui, selon diffe´rents auteurs, se prolonge au moins les deux anne´es qui suivent l’intervention chirurgicale [4]. On pourrait faire l’hypothe`se qu’au contraire, il devrait y avoir moins de suicides et de tentatives de suicide du fait de cette ame´lioration. De meˆme, l’e´chec de l’intervention a` plus ou moins long terme ne peut eˆtre un facteur suffisant a` rendre compte

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de ce phe´nome`ne, puisque certaines e´tudes rele`vent une surmortalite´ par suicide meˆme chez ceux pour qui l’intervention a permis une perte ponde´rale satisfaisante [4]. On ne peut donc minimiser l’impact qu’a pu avoir la chirurgie sur certains patients ayant commis une tentative de suicide, meˆme si l’ope´ration a e´te´ une re´ussite. De`s lors, on doit faire l’hypothe`se que cette augmentation du risque suicidaire peut eˆtre directement lie´e aux conse´quences de l’ope´ration chirurgicale, notamment la perte de la sensation de faim re´voquant le fonctionnement alimentaire pre´ce´dent et les transformations de l’image corporelle et ses conse´quences. Dans le droit fil de notre principale hypothe`se de travail, il pourrait eˆtre pertinent d’interroger dans ces cas si l’ope´ration chirurgicale n’a pas supprime´ une de´fense primordiale du sujet incapable de subjectiver une perte ou de de´placer sur d’autres objets d’investissement libidinal la satisfaction orale qui e´tait initialement la sienne, ou encore de faire face aux conse´quences de l’intervention sur l’image corporelle. Il est par exemple tre`s difficile pour certains sujets d’affronter l’e´ventuelle position d’objet de de´sir pour l’autre que leur nouvelle image renvoie. L’ope´ration aurait, dans cette perspective, profonde´ment bouleverse´ l’e´conomie psychique du sujet sans qu’il ait les ressources psychiques d’en modifier le fonctionnement. Il s’agirait ainsi lors de l’entretien d’e´valuation pre´ope´ratoire, au-dela` des ante´ce´dents psychiatriques stricto sensu, de repe´rer plus finement la pre´sence ou l’absence d’une telle dynamique, meˆme s’il ne s’agit pas pour autant d’une garantie. Il semble donc crucial de distinguer le statut des troubles psychopathologiques lie´s a` l’obe´site´ dans le fonctionnement et l’e´conomie psychique des patients concerne´s : il s’agit de bien distinguer le statut des troubles psychopathologiques lie´s a` l’obe´site´ dans le fonctionnement et l’e´conomie psychique des patients concerne´s : il y a d’un coˆte´ les troubles conse´cutifs a` l’obe´site´ – et donc susceptibles d’eˆtre ame´liore´s par la chirurgie bariatrique – et d’un autre coˆte´ les troubles inhe´rents au fait de devenir obe`se, l’un n’excluant e´videmment pas l’autre. Enfin, cette augmentation du risque suicidaire implique, comme l’ont recommande´ notamment Fournis et al. [4], la ne´cessite´ de mettre en place un suivi psychiatrique ou psychologique postope´ratoire plus strict. Au sein de notre groupe de patients, nous avons pu observer que 10 % des patients ope´re´s ont rencontre´ des difficulte´s psychologiques dans les suites de la chirurgie, sans jamais constater l’apparition d’ide´es suicidaires. Ne´anmoins, dans le cas d’une patiente e´voque´e pre´ce´demment, nous avions note´ l’apparition d’ide´es a` tonalite´ me´lancolique, dans les mois suivant la chirurgie, en lien avec sa perte de poids massive apre`s l’ope´ration (bien que ses capacite´s de subjectivation lui aient permis de s’en de´partir). Le suivi psychologique ou psychiatrique de ces patients dans les suites imme´diates de la chirurgie mais aussi sur le long terme apparaıˆt en ce sens indispensable. 5. Conclusion Pour conclure, chez les patients ope´re´s, les entretiens poste´rieurs a` l’ope´ration n’ont pas de´cele´ d’effets subjectifs significativement de´le´te`res. Une dynamique subjective de´plac¸ant le rapport a` l’objet oral s’est mobilise´e. Dans les cas pour lesquels notre e´valuation a conclu a` une contre-indication, c’est une impossibilite´ radicale du sujet a` faire porter une limite a` la jouissance orale qui sera de´cisive. Au-dela` donc des recommandations purement symptomatiques de la HAS, c’est cette capacite´ d’assomption subjective d’une perte qui oriente les crite`res de notre e´valuation, et cela selon des hypothe`ses cliniques qui portent sur trois modalite´s principales : les caracte´ristiques actuelles et anticipe´es de l’image du corps du sujet, le type de rapport a` l’autre

Pour citer cet article : Leduc C, et al. Enjeux psychiques de la chirurgie bariatrique. Ann Med Psychol (Paris) (2017), http://dx.doi.org/ 10.1016/j.amp.2016.11.014

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que l’obe´site´ lui a permis d’instituer et la place de l’objet oral dans cette organisation. De´claration de liens d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de liens d’inte´reˆts. Re´fe´rences [1] Brittner M, Courtet P, Guillaume S. Roˆle du psychiatre dans la chirurgie bariatrique. Let Psychiatre 2012;3:1. [2] Claudon P, Roche´-Bauchet G, Guirkinger B, Lighezzolo-Alnot J, Ziegler O. Repre´sentation de soi et ve´cu de l’espace corporel chez des sujets obe`ses se´ve`res en attente de chirurgie bariatrique. Ann Med Psychol 2012;170:628–35. [3] Dalu A. Profil psychologique et social du patient obe`se candidat a` une chirurgie de l’obe´site´. The`se pour le doctorat en me´decine soutenue le 5/11/09, Universite´ de Me´decine de Paris Descartes.

[4] Fournis G, Dene`s D, Mesu C, Brie`re M, Garre´ JB, Gohier B. Obe´site´ et bypass gastrique, impact sur la qualite´ de vie et le risque suicidaire : revue de la litte´rature. Ann Med Psychol 2014;172:721–6. [5] Freud S. Trois essais sur la the´orie sexuelle. Paris: Folio Essais; 1905. p. 1998. [6] Ghaferi A, Lindsay-Westphal C. Bariatric Surgery. More Than Just an Operation, JAMA Surgery, publie´ initialement en ligne le 7 octobre 2015. Available from: URL: http://archsurg.jamanetwork.com/article.aspx?articleid=2448910. [7] Gohier B, Ritz P, Becouarn G, Richard S, Ricalens E, Garre´ JB. Psychiatrie de liaison et obe´site´ : l’expe´rience d’un travail en re´seau. Ann Med Psychol 2005;163:701–6. [8] Gohier B, Richard-Devantoy S, Dene`s D, Salle´ A, Becouarn G, Topart P, et al. Le psychiatre et la chirugie bariatrique. Ann Med Psychol 2010;168:220–3. [9] Haute Autorite´ de sante´. Recommandations de bonne pratique. In: Obe´site´ : prise en charge chirurgicale chez l’adulte; 2009. [10] Hiltenbrandt JP. « A` bouche que veux-tu. . . ». Clin Lacanienne 2010;2:11–23. [11] Lacan J. « Les complexes familiaux » in autres e´crits. Paris: Le Seuil; 1938. p. 2001. [12] Winnicott DW. De la pe´diatrie a` la psychanalyse. Paris: Petite Bibliothe`que Payot; 1983.

Pour citer cet article : Leduc C, et al. Enjeux psychiques de la chirurgie bariatrique. Ann Med Psychol (Paris) (2017), http://dx.doi.org/ 10.1016/j.amp.2016.11.014