Evolution et pronostic à long terme de 50 cas de dermatomyosites et polymyosites

Evolution et pronostic à long terme de 50 cas de dermatomyosites et polymyosites

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Tome I Numdro 1

Dermatomyosites et polymyosites

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Evolution et pronostic a long terme de 50 cas de dermatomyosites et polymyosites par P. GODEAU,S. HERSON*,G. HERREMAN,O. BLETRY,B. WECHSLER,L. GU1LLEVINet G. TUCAT

L'evolution de 50 dermatomyosites (DM) et polymyosites (PM) hospitalis6es entre 1966 et 1978 a et6 6tudi6e retrospectivement. La survie 6tudi6e par m6thode actuarielle a permis de d6gager trois 616ments de mauvais pronostic : le sexe masculin, l'absence de myalgies et la DM. Ces trois facteurs sont 6troitement li6s ~ la survenue ulterieure d'un cancer, qui est responsable de 11 des 17 d6c~s. Par contre, l'existence d'un deficit majeur et de fausses routes, s'ils augmentent statistiquement la dur6e du traitement, n'influencent pas la survie ~t long terme. Ceci grgtce ~t une surveillance precoce en milieu de r6animation des qu'existe une suspicion de fausse route. Cette am61ioration du pronostic par le traitement (corticoth6rapie ~t forte dose, plus ou moins m6thotrexate) s'est fait au pris d'une importance morbidit6 iatrog6ne. La recherche d'un cancer associ6 (26 p. cent des cas chez l'adulte) doit 6tre pr6coce et intense, en effet dans cette s6rie, aucun cancer n'a 6t6 d~couvert ~t un stade curable. La s6quelle majeure reste la survenue chez les enfants et adolescents d'une calcinose diffuse 6volutive invalidante.

L'6mde de l'6volution et du pronostic des dermatomyosites (DM) et polymyosites (PM) traitees par corticotherapie avec ou sans immunod6presseurs n'a suscite que peu de publications. I1 nous a paru utile de rapporter notre exp6rience 6tablie sur une s6rie homog~ne de 50 malades suivis dans un m6me service de m6decine interne.

I. MATERIEL ET MI~THODES Nous analysons r6trospectivement 50 observations de DM ou PM, hospitalis6s entre 1966 et 1978. (6). * Tirds ~ p a r t : S. Herson, Service de mddecine interne,

h6pital de la Pitig, bd de l'H6pital, 75013 Paris

Nous avons adopt6 les criteres d6finis par BOHAN,PETER (3).

diagnostiques

1. D6ficit moteur proximal progressif sym6trique, 2. E16vation des enzymes musculaires sOriques, notamment les phosphocrOatinekinases (CPK), mais aussi les transaminases, lacticodeshydrogOnase et aldolase, 3. Triade 61ectromyographique associant : - unitOs motrices de faible amplitude, breves, polyphasiques, - fibrillation de repos ou irritabilite membranaire lors de 1'insertion, dOcharges spontan6es de haute frOquence, -

4. Biopsie musculaire: nOcrose musculaire des fibres de type I et II, phagocytose, r6gOnOration avec basophilie, distribution pOrifasciculaire de l'atrophie et exsudats inflammatoires interstitiels.

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5. Lesions dermatologiques pr6cjses: erytheme palpebral lilac6, avec oed~me p6riorbitaire, 6ryth6me squameux de la face dorsale des articulations, notamment les doigts. Le diagnostic de D M est certain lorsqu'il existe les lesions cutanees et au moins 3 des 4 premiers crit~res, probable avec 2 et possible avec un seul. La PM est certaine avec 4 criteres, probable avec 3 et possible avec 2. Nous avons respect6 les n o m b r e u x criteres d'exclusion. Les myalgies et le deficit pharyng6, bien qu'ils nous semblent avoir une valeur diagnostique, n'ont pas 6te inclus darts les crit~res. Nous avons reparti les 50 malades selon 5 groupes (3): Groupe I : Polymyosite idiopathique de l'adulte : 13 malades, Groupe II : Dermatomyosite idiopathique de l'adulte : 13 malades, Groupe I I I : Polymyosite ou dermatomyosite associee/t une neoplasie : 11 malades, Groupe I V : Dermatomyosite de l'enfant et de l'adolescent de moins de 17 a n s : 8 malades, Groupe V : Polymyosite associee /t une autre collagenose: 5 malades (2 sclerodermies, 1 lupus, 2 periarterites noueuses). La recherche d'une eventuelle neoplasie associee a reguli~rement comport6 outre l'examen clinique, une electrophor~se des protides, une radiographie du thorax, une scintigraphie thyroidienne, une urographie intraveineuse, un lavement baryt6, un transit ceso-gastro-duodenal, un examen gynecologique avec parfois hysterographie ; enfm, plus recemment, une fibroscopie bronchique chez des fumeurs et un examen tomodensitom6trique abdominal et pelvien. Le traitement a consist6 en une corticotherapie/t la dose initiale de l m g / k g / j de prednisone. L'efficacit6 est jugee sur des arguments cliniques : disparition des myalgies (lorsque celles-ci existent), regression du deficit. En cas d'inefficacite, la dose de Prednisone est rapidement portee /t 1,5 m g / k g / j . C'est dans un troisieme temps que l'on adjoint les immunod@resseurs, lorsque les cortico[des seuls, sont insuffisamment efficaces ou lorsque le maintien prolong6 d'une corticotherapie s'av&e impossible. L'azathioprime, le cyclophosphamide et le serum antilymphocytaire ont 6te utilisds, mais c'est la methotrexate que nous employons regulierement depuis 1971, /t la dose moyenne atteinte progressivement de 40 mg tous les 7 /t 10 jours. La surveillance a et6 faite en reanimation, chaque fois que le deficit pharyng6 6tait majeur. La dose initiale de Prednisone est maintenue 1 fi 2 mois, puis progressivement diminuee, jusqu'/t l'arr& definitif en 8 /t 18 mois. La guerison est definie par l'absence d'evolutivit6 clinique et biologique apres l'arr& du traitement. La possibilit6 de rechutes tardives ne permet pas de fixer un recul minimal suffisant.

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Nous avons envisage les 616ments permettant de prejuger des l'examen i n i t i a l du pronostic de la maladie ; fige, sexe, importance du deficit, existence de troubles pharynges, myalgies, D M ou PM. Les malades ont tous ~te recontactes durant le deuxi~me trimestre 1979, soit par l'interrn~diaire de leur medecin traitant, soit par celui de l'~tat civil. Les cou~'bes actuarielles de survie et leur interpretation statistique par le test X 2 ont 6t6 effectuees apres informatisation des donndes ~. Nous avons choisi comme <> de la courbe la premiere manifestation clinique rattachee avec certitude fi la dermatomyosite. I1 nous a en effet sembl6 fallacieux de prendre comme debut de la maladie la date du diagnostic ou le m o m e n t off la symptomatologie devenait complete. La surveillance depuis le premier sympt6me de la maladie represente 238 ann~es-malades. La m o y e n n e de la surveillance est de 7,2 ans 'pour les malades vivants et de 1,5 an pour les malades decedes.

II. RE~SULTATS Le traitement a consist~ 29 lois en une corticotherapie isolee, 16 malades ont regu secondairement des immunodepresseurs et 5 front pas ete traites. La duree moyenne du traitement des malades gueris et v i v a n t s est de 30 mois. I1 n ' y a pas de difference signiflcative entre le groupe des enfants (26, 4 mois) et celui des adultes (38, 4 mois). - La duree du traitement du groupe de 10 malades avec deficit musculaire majeur et fausses routes (41, 1 rnois) est signiflcativement allongde par rapport au groupe de 9 malades sans deficit majeur, ni fausses routes (18, 2 mois). Le risque a est inferieur/t 0,1, par le test non parametrique de M a n n et Whithney. La prolongation du traitement est due s o i t / t la survenue de reprises evolutives lors de la decroissance des corticoides (3 patients ont dfi btre traites 5 fi 8 ans); soit a des rechutes franches 1 a 4 ans apres l'arr& des cortico~des (10 rechutes chez 6 malades). - La <~guerison ~>a ~t6 obtenue chez 38 malades (8 d'entre eux sont dec~des ulterieurement d'une autre affection). 9 malades sont ddcedes alors que la myosite n'etait pas contr61ee. - L'evolution est cyclique depuis 9 ans, chez une malade initialement figee de 15 ans, les <> restent toujours sensibles ~t de faibles doses de prednisone. Chez 3 femmes figees de 48 g 64 alas la maladie 6volue depuis 7 ans, sur un mode chronique peu influence par les traitements. - 17 malades sont decedes: 11 atteints d'un cancer, apres une evolution moyenne de 14 m o i s ; une association avec une vascularite incontr61~e ; 2 -

-

* Nous remercions les docteurs P. Degoulet et D. Bellet.

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Dermatomyosites el polymyosites

subitement (l'un d'entre eux avait u n bloc de b r a n c h e droit, u n h6mibloc anterieur gauche et u n espace PR /t 2 0 / 1 0 0 ) ; deux fois le traitement a favoris6 la m o r t (septicopyoh6mie et h6morragie digestive), enfin la cause du d~c~s n ' a p u 6tre pr6cis6e clans u n cas.

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TABLEAU I COMPLICATIONS IATROGENES

(45 malades traitds)

Les sequelles sont de gravite tres variable. -

• U n e calcinose diffuse est apparue chez 2 adolescents, 2 /i 5 ans apr6s le d6but de la dermatomyosite. Elle 6volue p o u r son propre c o m p t e e m r a i n a n t u n e invalidit6 majeure.

-

hypercorticisme constant insuffisance surrenale: -

-

• Malgr6 la r~cupdration d ' u n e b o n n e force musculaire, u n e fatigabilite excessive et u n e a m y o t r o p h i e n o t a m m e n t des delto[des, persistent s o u v e n t plusieurs annees. 2 malades gardent u n e dysphagie 7 a 12 ans apres la <>. L'6ryth~me periorbitaire persiste parfois, avec des variations d'intensite, sans que cela soit le t6moin d ' u n e 6volutivit6. I1 e n est de m ~ m e de la persistance des anomalies 61ectromyographiques.

2 transitoires, 1 persistante.

9 infections: -

1 zona, 2 septic6mies /t Gram n6gatif (1 d6c6s), - 2 tuberculoses pulmonaires, - 2 pneumopathies graves (virale et Candida), - 1 pleur6sie purulente, 1 infection urinaire grave. psychoses aigues, 1 defenestration, hypertensions arterielles, diab6tes, ulcere duodenal (1 ddc6s), ost6oporoses severes. -

-

-

La morbidit6 iatrog6ne due fi l'utilisation prolongee de fortes doses de corticoides et d ' i m m u n o suppresseurs est importante. Le tableau 1 r6sume les complications que n o u s avons rencontr6es dans le traitement de 45 malades.

2 4 3 1 2

-

• La survie fl 1 a n et /t 5 ans n'est pas corr61ee avec l'importance du deficit musculaire ou l'importance des troubles pharynges.

- La survie des 50 malades (figure 1) est de 82 p. 100 / t l an, 7 3 p . 100 / t 2 a n s e t 6 2 p . 100 / t 5 a n s . U n seul deces est s u r v e n u plus de 3 ans apres le ddbut de la maladie.

Selon le groupe, la s u r v i e / t 5 ans est de 63 p. 100 p o u r les 23 d~ficits m.od6r6s, 69 p. 100 p o u r les 27 deficits majeurs, 67 p. 100 p o u r les 16 patients sans troubles pharyng6s, 63 p. 100 p o u r les 34 dysphagiques et 60 p. 100 p o u r les 25 malades avec fausses routes patentes. (figure 2).

• Le biais de recrutement d ' u n service de m~decine adulte n o u s a interdit de c o m p a r e r le groupe des e n f a n t s / t celui des adultes. Les sousgroupes en fonction de l'fige 6taient trop r6duits p o u r 6tre compares.

• La survie est corr616e avec le sexe (P = 0,02) (figure 3). D a n s le groupe des h o m m e s (16 malades) la survie et de 68 p. 100 ~ 1 an,

%

loq

82

82

C

62 sans cancer

50 |

cancer associ6 50malades

1

2

3

! 4

! 5 ans

FIG. 1 Survie avec ou sans cancer associe. Survie de l'ensemble de 50 DM et PM.

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%

i00

5C femmes hc~mes

~

38

P = 0,02

I 1

| 2

! 3

I

! 4

5 arts

F1G. 2

Survie avec fausse route (25) ou sans dysphagie (16). %

i00

75 -~

75

~

,

67 I

t

0

0

6O

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routes

sans dysphagie

I

I

1

2

I 3

|

4

I

5 ans

F~G. 3 Survie selon le sexe : 34 Q, 16 d.

55 p. 100 /~2 a n s e t 38 p. 100 / t 5 ans. Dans celui des femmes (34 malades), elle est de 88 p. 100 ~tl an, 8 2 p . 100 / 1 2 a n s e t 7 3 p . 100 /t5 ans. • Chez les adultes, les polymyosites (18 malades) ont un meilleur pronostic que les dermatomyosites (24 malades) : 71 p. 100 comre 37 p. 100 5 ans (P = 0,02) (figure 4). • L'absence de myalgies lors de Fexamen initial est un facteur de mauvais pronostic (P = 0,03)

(figure 5). La survie des malades myalgiques (28 patients) est de 92 p. lO0/t 1 an et 74 p. 100 /t 5 ans, contre 68 p. 100 et 47 p. 100 pour les malades non myalgiques (22 patients). Les trois 616ments de pronostic p6joratifs que sont le sexe masculin, la dermatomyosite et l'absence de myalgies sont tous 6troitement li6s fi la survenue ult6rieure d'un cancer. La survie de ces sous-groupes redevient 6gale lorsque l'on exclut les associations avec le cancer.

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33

% iOO-

78 71

50

I

P.M.

I

37

37

D.M.

, I

2

I

I

3

5 ans

FJG. 4 Survie ou DM ou PM de l'adulte. % 1(9(

u

8O

74

68

58

48 !

avec m y a l g i e s |

sans m y a l g i e s

P = 0,03 I 1

I 2

I 3

I 4

| 5 ans

FIG. 5

Survie avec ou sans myalgies initiales.

- Des manifestations inhabituelles de la dermatomyosite se sont revelees de mauvais pronostics. Des ulc6rations cutanees n6crotiques primitives 6taient associees /t une fibrose pulmonaire (en l'absence de scl6rodermie ou de fausse route) chez 2 malades (5) La maladie est rest6e incontr61ee et les malades sont d6c6d~s dans les 2 cas. L'un d'entre eux avait un cancer bronchique associe. Une mort subite est survenue chez une PM ayant des troubles de conduction intracardiaque.

III. DISCUSSION

- Dans notre s6rie, selon les 5 crit6res adoptds (3), le diagnostic est certain chez 37 malades, probable chez 8 autres et possible chez les 5 derniers. La diagnostique est artificiellement abaiss6 car 12 des 13 malades qui n'ont pas le m a x i m u m de crit6res n'ont pas subi l'ensemble des examens.

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Les myalgies qui existent dans 62 p. 100 de nos cas et la dysphagie que l'on retrouve chez 68 p. 100 des malades, sont des signes tr~s 6vocateurs du diagnostic. - Les polymyosites d'evolution chronique survenant chez des femmes menopaus6es posent un difficile probl6me nosologique avec les myopathies tardives et m6me avec les myasth6nies. Nos 3 malades sont 3 femmes fig~es de 48 /~ 64 ans, le diagnostic est ~> selon les crit6res adoptes. 11 existe cependant des atypies: fatigabilit6 et ptosis bilat6rale chez l'une (test /t la prostigmine et recherche d'un bloc neuromusculaire sont negatifs) et predominance de l'atrophie sur les fibres de type II chez une autre (cet aspect est habituellement rencontr6 dans les atteintes neurogenes). L'6volution naturelle de la P.M. est mal connue. En 1940, O'Leary (12) rapporte 40 cas de D M et PM non traitees, la mortalite est de 50 p. cent . C'est en 1954 que Schuermann (16) signale l'action b6nefique de I'ACTH /t la phase initiale de la D M aigfie. Malaviya montre en 1968 (8) l'efficacite du M6thotrexate, cet immunod6presseur deviendra le traitement de seconde intention des D M r6sistantes aux cortico~des (10, 18). Les series retrospectives publi6es entre 1963 et 1971 refl6tent bien l'heterog6ndit6 de l'attitude th&apeutique (absence de traitement, corticoth&apie fi faibles ou fortes doses), il est impossible de d~gager de ces 6tudes un b6n6fice a long terme de la corticoth6rapie (2, 7, 9, 11, 13, 15, 22). La mortalit~ avoisine 30 p. 100; la cause majeure de deces est la pneumopathie-d'inhalatiori. Aussi, par voie de consequence, les facteurs de mauvais pronostic sont-ils les fausses routes et le deficit musculaire majeur ? D a n s ces 6tudes, le cancer associ6/t et6 inconstamment recherch& La seule s6rie homog6ne est celle de Bohan, Peter et Pearson (4). Elle porte sur 153 patients examin6s entre 1956 et 1971, trait6s pour la plupart par des corticoides g fortes doses avec ou sans immunodepresseurs. Le seul facteur pronostique p6joratif retrouv6 est l'association / t u n cancer. Dans notre serie de 50 malades trait6s, les dysphagies, les fausses routes, les associations de d6ficit musculaire majeur et de fausses routes n'aggravant pas le pronostic, aucun malade ne meurt de pneumopathie d'inhalation bien qu'initialement 68 p. 100 des patients soient dysphagiques et que 50 p. 100 aient fait des fausses routes. Ce resultat est obtenu au prix d'une surveillance en milieu de reanimation d~s qu'est soup?onnee la possibilit6 d'une fausse route. La dur6e du traitement a 6te de 41 mois pour les malades avec fausses routes et d6ficit majeur, contre 18 mois pour les malades sans troubles pharynges ni d6ficit majeur. L'efficacit6 du traitement a pour corollaire son agressivit6 dont t6moigne l'importante morbidite iatrog6ne (tableau I). Le traitement a 6t6 responsable du deces de deux malades : une hemorragie digestive et une septicdmie.

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Les trois, elements qui des l'examen initial pronostiquent une 6volution defavorable (sexe masculin, dermatomyosite et absence de myalgies) sont 6troitement li6s /t la survenue ult6rieurs d'un cancer. T o u s l e s malades atteints d'un cancer sont deced~s dans les 18 mois qui ont suivi l'apparition de la dermatomyosite. Le cancer est responsable de 65 p. 100 des d~c~s de notre s~rie. La survie des DM ou PM sans cancer est de 82 p. cent /t 5 ans (figure 1). La r6alit6 de la dermatomyosite-syndrome paran6oplasique a parfois 6t~ mise en doute (3, 21). Les revues gen6rales ulterieures (1, 4, 20) situent la fr6quence de l'association g u n cancer entre 15 et 25 p. 100. Dans notre population de D M et PM adulte, nous retrouvons 26 p. 100 de cancer. Ce groupe des associations avec le cancer a clans notre exp6rience des caract6res ,particuliers. I1 ne comporte que des adultes, le plus jeune a 33 ans. I1 S'agit de 10 D M et d'une seule PM, de 6 h o m m e s et de 5 femmes, alors que chez les adultes, sans cancer, il n'y a que 23 p. 100 de D M et 20 p. 100 d'hommes. Cette pr6ponderance de la D M et du sexe masculin avait 6t6 remarqu6e par d'autres auteurs (14, 15, 21, 22). Les myalgies sont plus rares : 27 p. 100, contre 69 p. 100 chez les malades sans cancer, ceci avait d6jg 6re remarqu6 (4). A l'inverse, l'importance du deficit musculaire, la fr6quence des fausses routes, la r6ponse /t la corticotherapie est comparable dans les populations avec ou sans cancer. Nous n'avons jamais decouvert de cancer / t u n stade curable, malgre une enqu6te syst6matique precoce et lourde. Ceci bien que 7 fois sur 11 les signes musculaires aient pr~c6d6 de 6 mois /t 2 ans les manifestations propres du cancer. Nous intensifions actuellement les examens de d6pistage en pratiquant systematiquement un scanner abdominal et pelvien, une m a m m o g r a p h i e bilaterale et une fibroscopie bronchique chez les fumeurs. Tous les types de cancers associes ont 6t~ d6crits (1). L'origine du cancer a pu 6tre pr6cis6e 9 fois, il s'agissait de 3 cancers du sein, 3 cancers bronchiques, 1 cancer gastrique, 1 ost6ocarcinome ovarien et d'un sarcome. Dans 2 cas, le si6ge primitif d'un adenocarcinome m~tastas6 n'a pu 6tre pr6cise. Les ulcerations cutanees n6crotiques primitives associ6s a une fibrose pulmonaire primitive chez 2 malades m6ritent d'etre individualis6es (5). II ne s'agissait jamais d'un syndrome de chevauchement avec un lupus ou une vascularite. I1 n'y avait pas de fausses routes, susceptibles d'expliquer les signes pulmonaires. Dans les 2 cas, l'6volution s'est faite vers la mort, la dermatomyosite n'6tant pas contr61~e, dans un cas elle 6tait associ6e/t un cancer bronchique. Dans la litt6rature nous avons retrouv6 (5) 7 observations off des ulcerations de ce type sont signalees, il s'agissait d'un s y n d r o m e paran6oplastique dans 70 p. 100 des cas. Les troubles conductifs intracardiaques au cours des PM sont de connaissance r6cente. En 1962, M. Siguier avait fait poser le premier stimulateur

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cardiaque p o u r un bloc auriculoventriculaire (BAV) complet au cours d'une PM (17). Les troubles de conduction sont signales dans 5 p. 100 des cas d'une s6rie r6cente (4); il s'agit gen6ralement de bloc de branche droit, d'h6mibloc ant~rieur gauche ou de BAV de degr6 variable. Six cas de bloc trifasciculaires ont et~ rapport6s. L'un des malades de cette s6rie qui avait un bloc fasciculaire/t fait une m o r t subite. I1 est certainement licite de mettre en place dans ces cas un pace-maker sentinelle /t titre pr~ventif. Une calcinose diffuse est apparues 2 et 5 ans apres le d6but de la maladie musculaire, chez des malades initialement ~g6s de 11 et 17 ans. Elle 6volue inexorablement apr6s la guerison de la DM. L'infiltration du tissu cellulaire sous-cutan6 notamment dans les rdgions p6riarticulaires, fair de ces 2 malades de grands invalides. L'ex6r6se de volumineuses concr6tions calcaires surinfect6es a pu 6tre utile au niveau d'un coude et du pli inter-fessier. Ces calcifications sont tr~s bien visibles sur les radiographies de parties molles ou sur une scintigraphie au pyrophosphate de tecnetium. A u c u n traitement de fond n'am61iore cette maladie ~volutive. Les reactions inflammatoires locales ou g6nerales extr6mement douloureuses sont par contre tr6s sensibles fi la Colchicine (19). Les 2 scl6rodermies associ6es ont eu des 6volutions tr6s diff6rentes. Dans un cas, la D M et la scl6rodermie sont apparues de fagon concomitante, la D M a gu6ri apres 12 mois de corticoides alors que la scl6rodermie continue d'6voluer depuis 9 ans. Dans l'autre cas, une PM survient un an apr6s le ddbut d'une scl6rodermie d6j/i 6volu6e. Le traitement de la PM entraine une remarquable retrocession de la scldrodermie, cette am61ioration se maintient apr6s 1 an.

IV. EN CONCLUSION Cette s6rie homogbne de 50 malades protlve l'efficacit6 de la th6rapeutique. La surveillance pr6coce en milieu de reanimation des troubles de la d6glutition la corticoth6raphie /t forte dose associ6e ou non au m&hotrexate ayant fair disparaitre la premi6re cause de mortalit6 qu'6tait la pneumopathie d'inhalation. La dermatomyosite de l'adulte est un syndrome paran6oplasique de mauvaise augure, aucun cancer n'ayant et6 d6pist6 a un stade curable. I1 faut intensifier les explorations precoces /~ la recherche de ce cancer.

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was studied retrospectively. Three poor prognostic factors were identified from actuarial survival rates : male sex, absence of myalgia and DM. They were closely related to the eventual developement of malignant disease, responsible for 11 out of the 17 deaths observed. On the other hart, although major nevrological deficit and inhalation of foreign body increased the duration of treatment significantly, they did not affect long-term survival, such patients being norsed at an garly stage in special care units. This improvement in the prognosis by high-dose corticosteroids with on without methotrexate was associated with increased iatrogenic morbidity. The search for malignant disease (26 % in adults) should be early and intensive. In this series, none of the cancers was detected at a curable stage. The main complication remains diffuse, progressive and invalidating calcinosis in children and adolescents.

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