Interférons et maladies neurologiques

Interférons et maladies neurologiques

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la revue de m( decine interne ELSEVIER

Revue de mtdecine interne 23 Suppl. 4 (2002) 475s-480s www.elsevier.comflocate/revmed

Mise au point

Interftrons et maladies neurologiques Interferons and neurological diseases P. Vermersch *, J. de Seze, D. Ferriby, T. Stojkovic Clinique neurologique, hOpital R.-Salengro, CHU de Lille, 59037 Lille cedex, France

R6sum6

P r o p o s . - L'utilisation des interftrons (IFN) en neurologie se limite actuellement ~ la prise en charge thtrapeutique de la sc16r0se en plaques. Dans cette affection, seuls les IFN bSta sont utilisds. A c t u a l i t ~ s et p o i n t s f o r t s . - Les progr~s concernent essentiellement les formes rtmittentes de la maladie. Les IFN bSta constituent dans cette indication le traitement de premibre intention lorsque la prescription d'un traitement de fond parak justifit. De nombreux arguments ont dtmontr6 l'inttrSt d'un traitement prtcoce. De fa~on globale et dans cette indication, les IFN bSta diminuent d'environ un tiers la frtquence des pousstes ainsi que le risque de progression du handicap neurologique. Dans les formes secondairement progressives, l'indication d'un traitement par IFN bSta est discutte en raison de rtsultats plus mitigts. Les IFN bSta diminuent 6galement l'tvolution des 16sions ~t l'imagerie par rtsonance magnttique. La dose prescrite varie d'un IFN bata a l'autre. Si un effet dose existe probablement sur certains parambtres cliniques, il est d{fficile d'affirmer formellement que cette effet dose a une importance sur l'tvolution du handicap ~t moyen et ~t long terme. Les effets secondaires sont en r~gle modtrts malgr6 la survenue frdquente d'un syndrome pseudogrippal en dtbut de traitement. P e r s p e c t i v e s e t p r o j e t s . - Au vu des donntes rtcentes, il est possible que certains patients puissent btntficier d'un traitement par IFN bSta d~s la premiere pousste. En cas d'tchec thtrapeutique, outre la prescription de certains immunosuppresseurs, des espoirs sont fond& sur des combinaisons thtrapeutiques incluant un IFN bSta. Les IFN ont 6t6 6galement proposals avec des rtsultats peu convaincants dans d'autres indications notamment dans les polyradiculontvrites chroniques inflammatoires. © 2002 t~ditions scientifiques et mtdicales Elsevier SAS. Tous droits rtservfs.

Abstract

P u r p o s e s . - Therapeutic strategies using interferons in neurology are limited to multiple sclerosis. In this disease, only beta interferons are used and now considered as a first line treatment in the relapsing-remitting forms of the disease. M a i n p o i n t s . - Beta interferons have reduced the relapse rate by approximately 3% and also reduced the risk of disability progression. They have also favorably influenced the brain lesions on MRI. Numerous data have stressed the importance of starting treatment as early as possible. In the secondary form of the disease, the impact of beta interferons are still discussed. In some clinical endpoints, a dose-response has been demonstrated, probably related to the frequency of injections. Side effects are acceptable despite the high frequency of flu-like syndrome. P e r s p e c t i v e s . - Recent data argue for beta interferon treatment after the first demyelinating episode in subjects at risk for early new relapses. In some patients, in cases of treatment failure, combination strategies, including beta interferons, should be addressed in the near future. Interferons were also tested with disappointing results in other neuro-inflammatory disorders, such as chronic inflammatory demyelinating neuropathies. © 2002 t~ditions scientifiques et mtdicales Elsevier SAS. All rights reserved. Mots clds." Scltrose en plaques; Interftrons bSta Keywords." Multiple sclerosis; Beta interferons

* Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (E Vermersch).

© 2002 l~ditions scientifiques et mtdicales Elsevier SAS. Tous droits rtservts. PII: S 0 2 4 8 - 8 6 6 3 ( 0 2 ) 0 0 6 6 1 -6

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L'utilisation des interfrrons (IFN) b&a a transform6 la prise en charge de la sclrrose en plaques (SEP). Quelques essais pour l'instant peu concluants ont 6t6 prrsentrs dans d'autres pathologies o~ le syst~me immunitaire est en cause, notamment dans les polyradiculonrvrites chroniques inflammatoires. Alors que les principales descriptions cliniques datent du sibcle dernier, notamment grace h Charcot et Vulpian, l'histoire thrrapeutique de la SEP est rrcente, lire aux progrbs dans les domaines de 1' immunologie et de l'imagefie. En effet, m~me si les traitements symptomatiques et les drriv6s cortison6s 6talent utilisrs de longue date, la preuve formelle qu'un produit, un IFN bata pouvait modifier l'histoire naturelle de la SEP n'rtait obtenue qu'en 1993. L'efficacit6 des IFN b~ta ne peut plus atre remise en cause mais de nombreuses questions persistent quant ~ leur impact prrcis sur l'rvolution du handicap, la dose optimum prescrire ou la voie d'administration iddale. Mame si ils existent des arguments importants incitant ~ u n traitement prrcoce, peut-atre drs la premirre poussre, leur effet ~ long terme reste encore inconnu. 1. Structure et caract6ristiques des IFN b~ta ayant obtenu l'autorisation de mise sur le march6 dans la SEP L'IFN b&a naturel est produit par divers types de cellules dont les fibroblastes et les macrophages. C'est une glycoprotrine constiture de 166 acides aminrs. Les techniques de recombinaison grnrtique ont permis d'obtenir des IFN b~ta recombinants (Tableau 1), dont la similitude avec la protrine humaine est suprrieure car faisant appel aux cellules mammifrres et permettant d'obtenir des molrcules glycosylres. L'IFN b&a lb, commercialis6 sous le nom de B~tafrron ®, dos6 ~ 8 MUI/1 ml, a 6t6 le premier mrdicament disposant d'une AMM pour le traitement de la SEP rrmittente. Deux antres IFN b~ta la (Avonex ® et Rebif ®) ont 6galement obtenu une AMM similaire dans cette forme. Depuis 1998, le Batafdron ® a obtenu une extension d'AMM dans les formes secondairement progressives. Malgr6 quelques diffrrences, l'activit6 biologique et les effets cliniques sont proches quelque soit I'IFN b&a.

1.1. I m m u n o p a t h o l o g i e d e la S E P

De nombreux arguments indiquent qu'une rraction immunitaire sprcifique d'antigrne est responsable de l'initiation et/ou de l'entretien des 16sions de SEP. En effet, sur le plan histologique, la maladie est caractrrisre par l'infiltration de la substance blanche encrphalique et m6dullaire par des cellules inflammatoires mononuc166es; sur le plan biologique, les lymphocytes T et B, infiltrant le systrme nerveux central (SNC) prrsentent des signes d'activation ; sur le plan grnrtique, il existe une association et une liaison avec les g~nes de la rrgion HLA, et sur le plan th6rapeutique une action brnrfique de certains immunosuppresseurs (mitoxantrone) et immunomodulateurs (IFN b&a, acrtate de glatiramer) et drlrt~re d'autres cytoldnes comme I'IFN gamma. Par ailleurs il existe un certain nombre d'analogies entre les 16sions de SEP et certains modbles d'encrphalomyrlite auto-immune exprrimentale. Toutefois, les antigbnes (auto-antigrnes ou antig~nes exogrnes) qui initient et prrennisent cette rrponse immune dans le SNC ne sont pas connus. Au sein des plaques actives, on observe surtout des lymphocytes T et des macrophages mais aussi des plasmocytes et des lymphocytes B. Dans les 16sions rrcentes, ces cellules expriment des marqueurs d'activation, les astrocytes et les cellules endothrliales expriment par exemple des molrcules HLA de classe II et les lymphocytes T, les mol6cules CD25 (rrcepteur de l'interleukine 2) et le CD45RO. Des cellules srcrrtant diffrrentes cytokines anti(IL 4, IL 10, TGF b~ta) ou pro-inflammatoires (IL 2, IFN gamma, TNF alpha) ont 6t6 identifires. L'expression de ces cytokines semble corrrlre avec l'indice d'activit6 de la plaque. De mrme, les expressions de molrcules d'adhrsion intercellulaire, comme VCAM1, ou de chimiokines, comme MIP-1, jouant une rrle capital dans les phdnom~nes de migration des lymphocytes et des monocytes, sont corrrlres avec le degr6 d'activit6 de la maladie. MOme s'il n'existe pas de preuve formelle, cette rraction inflammatoire focalisre au SNC est trbs probablement l'origine de la drmyrlinisation. Une souffrance axonale accompagne ~t un stade prrcoce cette drmy61inisation.

Tableau 1 Structure des IFN b&a recombinantsutilisrs darts le traitement de la SEP IFN b~ta lb Batafrron®

IFN bata la

Avonex® Cellules mammifrresCHO (ovaires de hamster chinois) 165 acides aminrs 166 acides aminrs Absence de mrthionine en position N-terminale Encha~nement protrique identique ~ I'IFN b~ta Substitution en position 17 d'une cystrine par une srrine naturel Absence de glycosylation Glycosylation Eschericha coli

1FN b&a la Rebif® Cellules mammif~resCHO (ovaires de hamster chinois) 166 acides aminrs Enchatnementprotrique identique h I'IFN bata naturel Glycosylation

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1.2. M~canismes d'action et effets biologiques des IFN b~ta dans la SEP

1.3. Pharmacocin~tique et pharmacodynamie des IFN b~ta

Ni les prot6ines sp6cifiques induites par les IFN b&a dans la SEP, n i l e m6canisme d'action ne sont parfaitement connus ; celui-ci reposant probablement sur ces effets immunomodulateurs. Certains effets sont toutefois admis. Les IFN de type I comme les IFN b&a stimulent les cellules T suppressives non sp6cifiques [1] et inhibent l'expression du complexe majeur d'histocompatibilit6 (MHC) de classe II induite par I'IFN gamma dans certains types de cellules (par exemple les astrocytes), diminuant ainsi l'activation des lymphocytes T [2]. Les IFN de type I inhibent en outre la synth~se d'IFN gamma et donc indirectement diminuent l'activation macrophagique et la synth~se de TNF alpha. D'autres donn6es t6moignent que les IFN b&a peuvent induire la synth~se de cytokines anti-inflammatoires comme I'lL 10 et ainsi restaurer partiellement la balance TH 1/TH 2. Plus r6cemment, une augmentation de l'effet cytopathique des lymphocytes natural killer a 6t6 d6montr6e. Les IFN bSta exercent leurs effets biologiques en se fixant sur des r6cepteurs sp6cifiques aux IFN de type I. De tr~s nombreux g~nes sont surexprim6s. Certains de leurs produits sont connus et qui peuvent jouer le r61e de marqueur d'activit6 notamment le CMH de classe I, la prot6ine MxA, la 2'-5'-oligoad6nylate synth6tase, la bata 2-microglobuline et la n6opt6rine. Toutefois, comme la physiopathog6nie de la SEP reste en pattie inconnue, il est impossible de dire si le m6canisme d'action des IFN bata dans cette maladie repose sur les effets biologiques d6crits.

Les trois IFN b~ta ayant obtenu I'AMM ont des propri6t6s pharmacin6tiques 16g~rement diff6rentes tenant compte des diff6rences de structure, mais aussi de vole d'administration et de composition des produits (Tableau 2). Les 6tudes de pharmacocin6tique ont surtout 6t6 faites chez le volontaire sain. Les taux s6riques d'IFN b~ta ont 6t6 mesur6s indirectement, par les taux d'activit6 antivirale obtenus avec un test valid6 d'effet cytopathog6ne. Apr~s une injection IM de 60 ~tg d'IFN b&a la (Avonex ®) par voie intramusculaire (IM), l'activit6 antivirale dans le s6rum atteint son maximum au bout de cinq ~ dix heures, puis elle diminue ~ une vitesse correspondant ~ une demi-vie d'61iruination de dix heures. Avec Avonex ®, l'exposition syst6mique d6termin6e ~ partir des valeurs de l'aire sous la courbe et de la Cmax, est plus importante aprbs administration IM qu'aprbs injection sous-cutan6e, avec une biodisponibilit6 environ trois fois plus importante [3]. Les taux des marqueurs de la rdponse biologique (par exemple dosage de la n6opt6rine ou de la b~ta 2-microglobuline) augmentent dans les 12 heures suivant l'injection d'Avonex®et restent 61ev6s pendant quatre jours ~t une semaine. Ces donn6es ne sont pas transposables d'un IFN b&a ~ l'autre. Les 6tudes 6valuant les effets biologiques du Rebif ® ont par exemple montr6 que par vole sous-cutan6e, il 6tait n6cessaire d'injecter le Rebif® tousles deux jours pour maintenir un taux 61ev6 des m6mes marqueurs biologiques [4].

Tableau 2 Structure des trois IFN b~ta prescrits dans la SEP Nom d6pos6

B&af6ron ®

Pr6sentation Lyophilisat : flc contenant 9,6 MUI soit 0,3 mg Solvant : flacon de 2 ml Composition IFN b&a lb : 0,3 mg ; albumine humaine : 15 mg ; dextrose : 15 mg

Voie Dosage Posologie Laboratoire

Solvant : 2 ml NaC1 0,54% dont 1,2 ml sont utilis6s pour la reconstitution Sous-cutan6e 8 MUI 8 MUI, 1 jour/deux Schering SA

Avonex ®

Rebif®

Lyophilisat : ftc Contenant 6 MUI soit 30 ~tg* Solvant : seringue en verre pr6-remplie de lml IFN b&a la : 30 lag ; albumine hnmaine: 15 mg; NaCI: 5,8 mg Phosphate Na monobasique: 1,2 mg

Seringue pr6-remplie Contenant 6 MUI soit 22 lag*

Phosphate Na dibasique : 5,7 mg Solvant : eau PPI 1 ml IM 30 lag 30 ~tg, 1 lois/sere Biogen France SA

IFN b&a la : 22 ~tg et 44 lag Mannitol, sdrum albumine humaine, ac6tate de sodium, acide ac6tique, hydroxyde de sodium Solvant : eau PPI 0,5 ml

Sous-cutan6e 22 et 44 gg 22 ou 44 ~tg, 3 fois/sem Ares-Serono Ltd

* : mesur6e par bio-essai 6valuant les capacit6s d'inhibition de l'effet cytopathog~ne induit par un virus.

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2. Synth~se des 6tudes publi6es avee les IFN b6ta dans les formes r6mittentes de SEP

Les analyses comparatives des difftrentes 6tudes doivent ~tre faites avec prudence car les critbres d'inclusion, les voies d'administration et les objectifs primaires n ' t t a i e n t pas les mOmes. Les 6tudes ont utilis6 l'Expanded Disability Status Scale (EDSS) comme marqueur d ' t v o l u t i o n de la maladie. Cette 6chelle, bien q u ' a d m i s e par tous, ne refl~te qu'imparfaitement ce qui est d t n o m m 6 sous le terme de handicap. Les rtsultats des trois grandes 6tudes cliniques de phase III indtpendantes rtalisdes en double aveugle contre placebo permettent d'affirmer que ces IFN bata sont actifs dans les formes rdmittentes en diminuant le taux de pousstes et en diminuant le risque de progression du handicap [5-7]. Ces IFN bata diminuent 6galement l ' t v o l u t i o n de la charge ldsionnelle sur les sdquences ponddrdes en T2 et le nombre de nouvelles ldsions actives. Les principaux rtsultats de ces trois 6tudes sont rtsumds dans le Tableau 3. Considdrant les rdsultats des difftrentes 6tudes, I ' A M M a 6t6 donnde pour le B~tafdron ® et le Rebif ® lorsque les patients ont prtsent6 deux pousstes lors des deux derni~res anndes et pour Avonex ® lorsque les patients ont fait deux pousstes lors des trois derni~res anntes. Aucune 6tude en double aveugle et durant une d u r t e suffisante n ' a 6t6 p u b l i t e comparant les trois produits, ni un I F N b0ta 5 l ' a c t t a t e de glatiramer (Copaxone ®) ou des immunosuppresseurs non sptcifiques, prescrits hors A M M . I1 est donc impossible d'affirmer qu'un IFN bata est supdrieur ~ un autre m0me si des 6tudes rtcentes, non encore publides (ttudes t~VIDENCE, comparant Avonex ® et Rebif ® 44 pg et INCOMIN, comparant Avonex ® et B~taftron ®) ont apport6 quelques arguments en faveur d ' u n effet-dose notamment quant aux dtlais de survenue de la p o u s s t e suivante ou sur des donntes d'imagerie. L'dtude 6valuant l'inttr~t du Rebif ® a 6t6 poursuivie deux ans suppldmentaires, les patients du groupe placebo 6tant ~ nouveau randomisds dans les groupes 22 ~tg et 44 ~tg. Sur un certain hombre de parambtres (taux de pousstes, nombre de patients majorant leur handi-

cap apprtci6 par I'EDSS, donndes IRM...), la dose de 44 lag 6tait suptrieure ~ la dose de 22 ~tg [8]. I1 est tr~s probable qu'il existe un <> d'efficacit6 fi partir duquel l'augmentation des doses ou l'augmentation de frdquence des injections, ne sont plus utiles. Le choix repose donc sur les difftrences de prescription: frtquence des injections, p r t f t r e n c e de la voie sous-cutante par rapport ~ la voie IM, utilisation d ' u n stylo-injecteur pour le Rebif ® et le Bttaferon ®. De nombreux arguments existent en faveur d ' u n traitement pr6coce. Chez certains patients, ce traitement poulIait ~tre institu6 d6s la premibre pouss6e et une demande de modification de I ' A M M a 6t6 falte dans ce sens. En effet, les r6sultats de l'6tude C H A M P S [9] qui a inclus 383 patients ayant pr6sent6 un 6pisode inaugural et ayant des anomalies IRM compatibles avec le diagnostic de SEP ont montr6 que par rapport au groupe placebo, les patients qui avalent regu un traitement par Avonex ®, avaient une diminution de 44 % de la fr6quence de d6veloppement d ' u n e SEP, c'est-~-dire de la survenue d ' u n e deuxibme pouss6e, aprbs un suivi de deux ans. Ce r6sultat a 6t6 confirm6 par les donn6es de l'6tude ETOMS, dans laquelle les patients ont 6t6 trait6s dbs la premibre pouss6e, par le Rebif ® ~t la dose d ' u n e ampoule de 22 jag sous-cutan6e une lois par semalne [10]. 2.1. Utilisation des I F N b~ta darts Ies f o r m e s secondairement progressives de SEP / S ' i l est actuellement admis que les IFN b~ta sont efficaces dans les formes rtmittentes de SEE quelques incertitudes persistent quant fi leur effet dans la forme secondairement progressive. Les rtsultats de quatre 6tudes darts cette forme ont apport6 des rtsultats assez peu concordants. Apr6s la publication de l'European Study Group on interferon beta l b in secondary progressive multiple sclerosis [11], l ' e m p l o i du B~taftron ® a 6t6 6tendu h ces formes secondairement progressives. Sept cent dix-huit patients ont 6t6 inclus, randomisds en double aveugle contre placebo. Les rdsultats de cette 6tude 6taient tr6s positifs tant sur la

Tableau 3 Rtcapitulatif des difftrentes 6tndes de phase III dans la forme rtmittente de SEP IFN b~ta

B~tafdron®

Avonex®

Dose/voie N ° de patients Durte de l'ttude EDSS ~tl'inclusion Nombre de patients Au terme de l'ttude Crit~re principal Frtquence d'injection Poussdes # EDSS *

8MUI/SC 372 2 ans (ttendue ~t5 ans) 0-5.5 89 % (~t 2 ans)

30 lag/IM 301 2 ans 1-3.5 57 %

Rebif~ 22 gg et 44 ~tg/SC 560 2 ans 0-5 90 %

Taux annuel de pousstes 1 jour sur 2 - 31% 10 %

EDSS 1 fois/sem - 32 % 15 %

Taux annuel de pousstes 3 fois/sem - 33 % et-37 % 13 % et 14 %

# : rtduction du taux de pousstes par rapport au groupe placebo ; * : difftrence de taux de progression du handicap entre le groupe IFN b~ta et le groupe placebo mesur6 par le score EDSS.

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diminution de fr6quence des poussdes surajoutdes que sur la progression du handicap m~me chez les patients inclus ~ un stade o/1 les possibilitds de d6ambulation 6taient d6j~ fort limitdes. L'effet sur les patients incapables de marcher (EDSS > 6,5) n'a pas 6t6 6tudi6. Le B~taf6ron ® s'administre 6galement dans cette indication h la dose de 8 MUI un jour sur deux par vole sous-cutande. Trois autres 6tudes, 6valuant les diff6rents IFN b~ta, dont une seule a 6t6 pour l'instant publide [12] n'ont pas confirm6 ces r6sultats encourageants avec une absence d'efficacit6 sur la progression du handicap lorsqu'il 6tait mesur6 par l'6chelle EDSS. Par contre darts ces 6tudes, l'6volution du taux de pouss6es et des 16sions IRM 6tait favorablement influenc6e par le traitement. Une analyse d6taill6e des populations incluses dans ces diff6ren tes 6tudes permet d'expliquer ces r6sultats discordants. En effet, les patients inclus dans l'6tude positive 6talent, par rapport aux patients des autres 6tudes, plus jeunes, faisaient globalement davantage de pouss6es et 6taient entr6s dans la phase progressive depuis moins longtemps. Globalement, il est admis que l'impact des IFN b~ta dans cette forme secondairement progressive est modeste. Pour certains l'utilisation de I'IFN b~ta lb (B~taf6ron®), seul h avoir obtenu I'AMM dans cette forme, dolt atre rdserv6 aux patients faisant encore des poussdes surajout6es. Ces r6sultats corroborent les donndes d6montrant l'impact des IFN b~ta sur la composante inflammatoire de la maladie. 2.2. Effets secondaires et contre-indications des IFN b~ta dans la SEP Les effets secondaires ne sont pas sp6cifiques aux IFN b~ta prescrits dans la SEE Toutefois, les r6percussions li6s l'aggravation potentielle de certains sympt6mes de la maladie en ddbut de traitement doivent ~tre connues. Ils sont essentiellement rattach6s au syndrome pseudo-grippal trbs frdquent au cours des premi6res semaines durant 12 ~t 24 heures apr~s chaque injection, heureusement d'6volution r6gressive et souvent sensible aux antipyrdtiques. Ce syndrome pseudo-grippal majore parfois certains signes de la maladie notamment l'6tat de fatigue chronique, les troubles de vue ou la spasticit6, ce qui est parfois tr~s handicapant surtout dans les formes secondairement progressives. Une d6pression, d6jg frdquente dans la maladie, peut se majorer au cours d'un traitement par les IFN b~ta et imposer l'arr~t du traitement. Des complications cutandes, rares sont ddcrites avec les injections sous-cutandes pouvant aller jusqu'h la n6crose. Des modifications biologiques (diminution moddr6e des lign6es sanguines, principalement des lymphocytes et une augmentation des transaminases) jnstifient rarement l'arrat du traitement mais imposent des contr61es biologiques r6guliers. I1 semblerait que les IFN b~ta diminuent l'activit6 enzymatique ddpendant du cytochrome P450, r6duisant potentiellement l'efficacit6 de certains traitements

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concomitants (anti-dpileptiques, antid6presseurs) souvent prescrits dans la SEE Les contre-indications sont la grossesse, l'allaitement, l'6pilepsie non stabilis6e par un traitement, l'insuffisance h6patique ou les ant6c6dents d6pressifs graves ou la d6pression en cours d'dvolution. 2.3. Utilisation des IFN dans d' autres pathologies neurologiques Les IFN ont 6t6 test6s notamrnent dans les neuropathies inflammatoires. Dans les polyradiculon6vrites chroniques inflammatoires (CIDP), les cortico'fdes, les 6changes plasmatiques, les immnnosuppresseurs et les immunoglobulines intraveineuses ont fait la preuve de leur efficacit6 ~ court terme. Le b6n6fice potentiel des IFN darts les CIDP a fait l'objet de travaux r6cents. Darts une s6rie de 16 patients r6sistants aux thdrapeutiques conventionnelles, une am61ioration relativement modeste, a 6t6 observ6e sous IFN alpha dans plus de la moiti6 des cas [13]. Ces r6sultats doivent ~tre mis en balance avec les effets secondaires neurologiques, rares mais potentiellement graves de cet IFN (myasth6nie, polyn6vrites axonales, multin6vrites, syndrome de Parsonage et Turner, voire polyradiculon6vrites). De m~me, une 6tude en double aveugle contre placebo et en cross-over, n'a pas montr6 d'effets positifs d'un IFN bata (le Rebif ®) dans les CIDP r6sistantes aux traitements habituels [14].

3. Conclusion Les IFN b~ta ont transform6 la prise en charge th6rapeutique de la SEE I1 s'agit d'un traitement de premibre intention darts les formes 6voluant par pouss6es. De nombreux arguments plaident en faveur d'un traitement pr6coce. Les indications sont plus discut6es dans les formes secondairement progressives. Toutefois, nous ne disposons pas d'arguments formels pour affirmer que l'introduction de ces traitements modifie l'6volution ~ long terme du handicap neurologique. Seul le suivi fi long terme de cohortes importantes de patients pourra r6pondre ~ cette question. Les combinaisons th6rapeutiques associant un IFN b~ta et un immunosuppresseur constituent une des principales voles de recherche.

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