La varicelle au cours de la grossesse

La varicelle au cours de la grossesse

Archives de pédiatrie 10 (2003) 1113–1118 La varicelle au cours de la grossesse V. Mirlesse a,*, P. Lebon b a b Centre de diagnostic prénatal et de ...

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Archives de pédiatrie 10 (2003) 1113–1118

La varicelle au cours de la grossesse V. Mirlesse a,*, P. Lebon b a b

Centre de diagnostic prénatal et de médecine fœtale, institut de puériculture, 26, boulevard Brune, 75014 Paris, France Service de virologie, hôpital Cochin–Saint-Vincent-de-Paul, université René-Descartes, 82, avenue Denfert-Rochereau, 75014 Paris, France

Accepté le 22 septembre 2003

Résumé La survenue d’une varicelle clinique en cours de grossesse est une éventualité rare entraînant des risques de complications maternelle et fœtale. Les complications maternelles sont essentiellement pulmonaires (environ 10 % des cas) avec potentiellement une menace vitale. Les complications fœtales sont de deux types. Avant 24 semaines d’aménorrhée (SA), la transmission au fœtus est estimée à 6 % environ. Elle peut être responsable dans environ 2 % des cas d’un syndrome de varicelle congénitale (VC) associant des lésions cutanées et nerveuses périphériques et des lésions systémiques et nerveuses centrales. Environ 4 % des cas sont asymptomatiques à la naissance mais un zona (environ 3 % des cas) peut survenir dans la première année de vie. La varicelle maternelle périnatale entraîne dans 25 % des cas une varicelle néonatale potentiellement grave et parfois létale. Ce risque existe essentiellement dans les éruptions maternelles survenant cinq jours avant et deux jours après l’accouchement. Enfin, un zona en cours de grossesse n’entraîne pas d’augmentation du risque malformatif fœtal. © 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Abstract Varicella during pregnancy is a rare occurrence because of a high rate of spontaneous immunisation in the population. When a pregnant woman presents a typical rash, maternal complications, mainly respiratory distress, can occur and be life threatening. Fetal complications include two types of consequences. Before 24 weeks of gestation, transplacental transmission is estimated around 6%, with about one third of infected fetuses presenting clinical manifestations. Congenital varicella syndrome includes growth retardation, neurological effects as microcephaly, limbs malposition, lung or bowel hyperechogenicity. But most infected fetuses will not show any anomaly. A very few might develop shingles in the first year of life. Peripartum contamination brings a much higher risk of transmission (around 25%). Neonatal varicella infection can be life threatening for the new born baby, especially if premature. A specific treatment should be started as soon as the contamination is discovered. Zoster during pregnancy does not lead to a risk of fetal infection. © 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Mots clés : Varicelle pergravidique ; Diagnostic anténatal ; Infection néonatale Keywords: Varicella zoster virus; Pregnancy; Prenatal diagnosis; Nenoatal varicella

1. INTRODUCTION Le virus de la varicelle et du zona (VZV) appartient à la famille des Herpesviridae, virus à ADN bicaténaire inclus dans une nucléocapside à symétrie cubique entourée d’un tégu-

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (V. Mirlesse). © 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. doi:10.1016/S0929-693X(03)00547-5

ment et d’une enveloppe [3]. C’est un virus fragile, rapidement dégradé par la chaleur et perdant son pouvoir infectieux après un cycle de congélation–décongélation. Fondamentalement dermotrope, le virus possède néanmoins un neurotropisme comme le virus herpès simplex, il entre aussi en latence dans les ganglions sensoriels. La réactivation du virus conduit à des manifestations cliniques de type zona et parfois à une maladie disséminée chez le sujet immunodéficient.

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2. ÉPIDÉMIOLOGIE L’immunité pour le VZV est acquise chez 90 % des femmes en âge de procréer aux États-Unis et 94,8 % en Allemagne. Le risque de varicelle en cours de grossesse est de 0,7 pour 1000 grossesses. Cela laisse supposer pour la France environ 700 cas de varicelle pergravidique par an. Dans les pays en voie de développement et chez les immigrés récents, l’immunité pour la varicelle est moindre et le risque d’infection accru.

3. ASPECTS CLINIQUES DE L’INFECTION MATERNELLE

prématuré est augmenté dans les varicelles avant 20 SA (14,3 vs 5,6 % dans le groupe témoin) [16]. Cette augmentation se retrouve dans les formes sévères avec atteinte pulmonaire. 4. TRANSMISSION MATERNOFŒTALE Il existe deux types d’atteintes fœtales très différentes résultant de l’infection varicelleuse pergravidique : la varicelle congénitale de la première moitié de la grossesse et l’infection périnatale qui pose des problèmes spécifiques. 4.1. L’infection maternelle avant 24–25 SA Elle est responsable de plusieurs contaminations.

3.1. La transmission Elle se fait par l’intermédiaire d’un contact direct entre individus. La période d’incubation dure en moyenne 15 jours, durant lesquels surviennent deux épisodes de virémie ; la première est de courte durée, quant à la seconde, plus longue et plus intense, elle précède l’éruption. Le sujet infecté est contaminant deux jours avant l’éruption et jusqu’à cicatrisation de lésions cutanées. 3.2. L’éruption cutanée De type papulovésiculaire et à extension centrifuge, elle est caractéristique et débute par le cuir chevelu. Elle évolue par poussées en cinq à huit jours durant lesquelles les lésions cutanées se dessèchent petit à petit. L’apparition des croûtes signe la fin de la contagiosité. 3.3. La gravité maternelle La gravité de la varicelle pergravidique réside dans la survenue possible de la pneumopathie varicelleuse, complication la plus fréquente et sévère de la varicelle de l’adulte [5,7,10]. Sa fréquence chez l’adulte sain est difficile à apprécier. Elle a été estimée à 13 à 16 % avec seulement 2 % de formes à traduction clinique. Lors d’atteintes pulmonaires, la mortalité est d’environ 10 %. Le tabagisme est un facteur aggravant, augmentant d’un facteur 15 le risque de survenue de la pneumopathie. Les complications neurologiques de type artérite cérébrale à distance de la primo-infection ou d’une réactivation virale sont exceptionnelles, cependant un cas a été rapporté récemment chez une femme enceinte. 3.4. Conséquences pour la grossesse La fréquence de fausses couches spontanées n’est pas particulièrement augmentée par rapport à celle de populations témoins. Des cas de mort in utero ont été rapportés notamment dans les pneumopathies. Il a rarement été possible d’établir une preuve biologique de la responsabilité virale. Enfin, le taux d’accouchement

4.1.1. Varicelle congénitale Elle peut se présenter sous la forme d’une embryofœtopathie grave décrite initialement en 1947 par Laforêt et Lynch [12] chez un enfant né d’une femme ayant présenté une varicelle à huit SA. L’enfant avait un retard de croissance, une atrophie du membre inférieur droit avec pied bot varus équin et des lésions cutanées cicatricielles du même membre. Existaient aussi : une hydrocéphalie avec atrophie corticale, une aplasie cérébelleuse, une atrophie optique bilatérale et une atonie des sphincters anal et vésical. Depuis cette époque, d’autres anomalies ont été recensées et plus de 50 cas mondiaux de varicelle congénitale ont à présent été décrits après des varicelles maternelles entre huit et 24 SA. Higa [8] évoque comme mécanisme physiopathologique une infection fœtale initiale suivie d’épisodes de zona in utero, responsables de lésions secondaires. Les principales caractéristiques du syndrome sont rappelées dans le Tableau 1. Les fréquences de chaque type d’atteinte notées ressortent de la série de Alkalay [1] et ont été calculées à partir de 22 cas d’enfants nés après infection in utero. Depuis cette publication, plusieurs cas de varicelle congénitale sans atteinte cutanée ont été rapportés. Tableau 1 Principales caractéristiques du syndrome du VZV Type de manifestations enfants atteints (%) Retard de croissance et lésions diverses • Fibrose intestinale, pneumopathie 39 % Lésions cutanées • Cicatrices pigmentées, lésions vésiculaires 100 % Anomalies oculaires • Microphtalmie, opacité cornéenne, atrophie nerf optique 68 % • Cataracte congénitale, choriorétinite Anomalies neurologiques • Microcéphalie, paralysie phrénique ou bulbaire 77 % • Vessie neurologique, Claude-Bernard-Horner Atteinte squelettique • Hypoplasie d’un membre, contracture articulaire 68 % 77 Revue Française des Laboratoires, mai 2003, No 353. Article. Dossier scientifique. Diagnostic des infections virales et parasitaires transmissibles de la mère à l’enfant au cours de la grossesse

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4.1.2. Zona et varicelle pergravidique entre 12 et 22 SA Parfois, la contamination fœtale par le VZV est sans conséquence ou encore entraîne un zona dans la première année de vie [11]. Les patientes rapportent alors une varicelle pergravidique entre le 3e et le 7e mois de grossesse. L’éruption zostérienne chez l’enfant est souvent discrète sans signe systémique, toujours unilatérale. La localisation ophtalmique du zona semble exceptionnelle.

La varicelle chez le nouveau-né après transmission en toute fin de grossesse entraîne une éruption cutanéomuqueuse généralisée, avec de façon plus fréquente des lésions ulcéronécrotiques ou hémorragiques, et une atteinte pulmonaire ou viscérale. La mortalité est estimée de 0 à 30 % selon les études et les traitements utilisés. L’accès aux thérapeutiques antivirales a amélioré le pronostic de ces infections néonatales.

4.1.3. Risque de passage transplacentaire entre 8 et 24 SA Depuis 1973, plusieurs séries ont évalué le risque de passage transplacentaire entre huit et 24 semaines [2,4,6,9]. Nous n’avons retrouvé qu’un cas plus tardif après infection à 25 et demi SA avec naissance à 34 SA d’un enfant présentant un retard de croissance, une microcéphalie, des lésions cutanées typiques, une cataracte bilatérale et une hépatomégalie avec perturbations biologiques majeures. La confirmation virologique n’a cependant pas pu être obtenue dans ce cas, bien que le tableau clinique soit très évocateur. Les diverses études ont évalué : • le risque de varicelle congénitale à manifestation clinique ; • le risque de passage transplacentaire : simple contamination fœtale ; • le risque de survenue d’un zona post-natal. Leurs résultats sont rapportés Tableau 2.

5. DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE

4.2. La varicelle néonatale Elle concerne les cas de varicelle maternelle survenant dans les huit jours précédant l’accouchement (ce qui correspond à la période d’incubation maximale in utero) [17]. Le risque de transmission au nouveau-né se situe aux alentours de 25 %. L’enfant présente alors une varicelle néonatale dans les dix premiers jours de vie. La gravité de l’atteinte fœtale dépend précisément de la date de l’infection maternelle. L’enfant est contaminé par voie hématogène transplacentaire ; la transmission des anticorps maternels ne débutant que cinq à six jours après l’éruption maternelle, si l’accouchement précède le passage des anticorps, il n’y a pas de protection transmise à l’enfant. Le risque est donc maximum si l’éruption maternelle a lieu entre cinq jours avant et deux jours après l’accouchement. Tableau 2 Études de la fréquence de la contamination in utero par le VZV : résultats.

Contamination (%) Fœtopathie (%) Zona post-natal (%) 1 2

Enders 1994 [6] 1739 grossesses prospectifs post-natal 12 % 0,7 % 0,8 %

IPP : Institut de puériculture de Paris. DPN : diagnostic pré-natal.

IPP1 2000 258 grossesses DPN1/LA < 26 SA 5,6 % 1,4 % 1,1 %

5.1. Diagnostic de l’infection maternelle La survenue d’une varicelle clinique entraîne une double virémie. L’infection fœtale peut résulter de la première ou de la seconde virémie. L’apparition des anticorps spécifiques (IgG, IgM et IgA) se produit deux à cinq jours après le début de l’éruption atteignant un maximum d’une à deux semaines plus tard. Les IgG maternelles anti-VZV passent la barrière placentaire assurant, après les phases de virémie, une immunité passive au fœtus. Le diagnostic de l’infection maternelle peut se faire sur le contexte clinique, l’éruption est souvent typique, et peut dans les cas douteux être vérifié par les examens virologiques. Parmi ceux-ci, les méthodes sérologiques utilisées en routine et fondées sur les techniques immuno-enzymatiques de type Elisa permettent la confirmation du diagnostic par la mise en évidence des IgM spécifiques sur un sérum prélevé au moment de l’éruption ou au cours d’une séroconversion. La recherche d’une immunité spécifique (IgG) se fera par la même technique. Les résultats peuvent être rendus en deux à trois heures. 5.2. Le diagnostic prénatal de l’infection fœtale Le diagnostic de varicelle congénitale a longtemps été difficile, le spectre des anomalies rencontrées étant extrêmement large et le diagnostic le plus souvent rétrospectif. Aujourd’hui, nous disposons de plusieurs types d’outils pour le diagnostic en anténatal. L’échographie dépistera les malformations associées aux formes sévères d’embryofœtopathies. Le diagnostic de contamination (ou d’absence de contamination) fœtale repose sur l’analyse en biologie moléculaire du liquide amniotique obtenu après amniocentèse. 5.2.1. L’échographie Le retard de croissance intra-utérin et l’excès de liquide amniotique, les signes échographiques les plus fréquemment cités dans la littérature, sont toutefois peu spécifiques [19]. Les calcifications hépatiques fœtales peuvent être retrouvées comme dans d’autres types de pathologie fœtale infectieuse ou non. D’autres signes évoquent une embryofœtopathie tels l’atrophie d’un membre, la malposition des extrémités, et les anomalies cérébrales.

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Lecuru et al. [13] rapportent un cas de calcifications digestives diffuses chez un enfant dont l’évolution a par ailleurs été satisfaisante. L’étude de Mouly [15] rapporte un cas de microphtalmie bilatérale (infection maternelle à 19 SA) passée inaperçue malgré une surveillance échographique attentive. 5.2.2. La biologie L’amniocentèse : la biologie moléculaire avec les techniques de PCR a permis un progrès important dans le diagnostic des varicelles congénitales [18]. Dès 1991, son application au dépistage de la varicelle congénitale montre une meilleure sensibilité que l’inoculation de prélèvements à des cultures cellulaires. Le premier cas de diagnostic prénatal positif est rapporté en 1992. La mise en culture du liquide amniotique (LA) sur cellules de type fibroblastique doit être maintenue dans ce contexte pour deux raisons : • l’isolement du virus est possible si le LA est inoculé le jour du prélèvement sans avoir été congelé auparavant et le résultat sera corrélé à celui de la PCR ; • et dans trois cas de varicelle maternelle, nous avons isolé un cytomégalovirus issu d’une réactivation du virus ou d’une primo-infection asymptomatique. La technique de PCR doit être pratiquée en une seule étape pour diminuer le risque de contamination. La PCR spécifique doit être doublée d’une PCR faite sur un gène témoin bêtaglobine, albumine ou mieux encore sur un témoin interne positif qui vérifie l’absence d’inhibiteurs de la réaction de PCR, à l’origine de résultats faussement négatifs [15,18,19]. Il est prudent de vérifier l’absence de portage sanguin (virémie VZV négative) du génome viral chez la mère avant de pratiquer une amniocentèse. En effet, l’analyse d’un LA sanglant (contaminé par du sang maternel) peut alors entraîner un résultat faussement positif. Cela oblige à respecter le délai de cinq à six semaines entre l’éruption et l’amniocentèse, habituel dans les pathologies infectieuses.

5.3. Diagnostic post-natal de l’infection congénitale Il repose principalement sur le contexte clinique, éruption évocatrice, aidé si nécessaire par des examens sérologiques (IgM anti-VZV chez l’enfant, mais il faut savoir qu’elles sont inconstantes) ou bien sur d’autres examens, tels la recherche du génome viral dans les leucocytes et/ou le sérum par PCR ou la mise en culture (ou PCR) de prélèvement des lésions cutanées de l’enfant. En cas de signes neurologiques, une PCR à la recherche du génome viral doit être pratiquée sur le LCR.

6. STRATÉGIE DE DÉPISTAGE ET DE DIAGNOSTIC DE L’INFECTION MATERNOFŒTALE 6.1. Face à un contage maternel pergravidique Un contrôle sérologique immédiat est souhaitable. En cas de positivité (présence d’IgG anti-VZV), la patiente immunisée, peut être rassurée. Dans le cas contraire, le risque de contamination est élevé et un traitement prophylactique post-exposition peut être discuté. 6.2. Devant la survenue d’une éruption chez la femme enceinte Les consultations en maternité sont déconseillées, pour éviter la contamination des autres femmes et des nouveaunés. Les complications pulmonaires doivent être dépistées avec, au moindre doute, une radiographie pulmonaire. En fonction du terme de l’infection maternelle et du risque fœtal attendu, diverses attitudes sont envisageables. 6.2.1. Infection avant 24 SA Les modalités de diagnostic prénatal seront discutées. Deux types d’attitudes de prise en charge prénatales peuvent être discutés. 6.2.1.1. La surveillance échographique. Elle permet de reconnaître les embryofœtopathies sévères, mais ignore les situations de simple contamination fœtale. Elle doit être pratiquée par des échographistes expérimentés, informés de l’infection maternelle et connaissant les risques fœtaux qu’elle entraîne. Choisir de limiter le diagnostic prénatal à la surveillance échographique impose de surveiller attentivement et mensuellement toutes les grossesses exposées à la varicelle en prévenant les patientes du risque de faux négatifs. 6.2.1.2. Le recours à l’amniocentèse. Il permet le diagnostic de contamination fœtale. Il impose une information précise sur les risques du geste (entre 2 % et 3 pour 1000 fausses couches selon les équipes). Les résultats obtenus en 48 heures vont rassurer 94 % des femmes pour lesquels le fœtus n’est pas contaminé. Les 6 % restants doivent bénéficier d’une surveillance accrue : surveillance échographique mensuelle, examen du cerveau fœtal en résonance magnétique nucléaire, bilan néonatal sérologique et ophtalmologique. Le prélèvement de sang fœtal ne présente pas d’intérêt diagnostic. 6.2.1.3. La présence d’IgM dans le sang fœtal. Elle paraît très inconstante en cas de transmission virale. Elle ne dépasse pas 25 % des cas et varie selon le terme d’infection. Leur

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présence n’est par ailleurs pas corrélée à la sévérité du tableau clinique puisqu’ils sont présents à la naissance chez environ 12 % d’enfants totalement asymptomatiques. 6.2.2. Éruption chez une femme enceinte proche du terme de la grossesse Un traitement antiviral maternel doit être envisagé [14,20] et une prise en charge néonatale spécifique organisée. Il n’est pas nécessaire d’isoler l’enfant de sa mère, en revanche dans l’idéal, tous deux doivent être isolés du reste de la maternité, ou du service de néonatalogie.

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hormis ces deux indications particulières. Même si les évaluations cliniques restent à effectuer, leur intérêt théorique paraît certain. Le dosage per os nécessaire à l’obtention d’une concentration efficace sur le VZV est de 800 mg × 5 par jour. pour l’aciclovir. Des concentrations plus élevées sont plus facilement obtenues avec le valaciclovir (1000 mg × 3/jour.) qui n’a pas encore été agréé pour son utilisation pergravidique. La durée de traitement actuellement proposée en dehors de la grossesse est de sept à 15 jours. Si ce contage a lieu dans les trois semaines précédant l’accouchement, le traitement post-exposition est fortement recommandé.

7. TRAITEMENT ET CONDUITE À TENIR 7.3. En cas d’éruption chez la femme enceinte 7.1. Vaccination Aux États-Unis, depuis 1995, la vaccination anti-VZV par un virus vivant atténué est recommandée chez les enfants non immuns de plus d’un an. La protection obtenue serait de 98 %. En France, ce vaccin est actuellement disponible uniquement dans les pharmacies hospitalières et réservé aux sujets immunodéprimés en période de rémission. C’est un vaccin par virus vivant atténué. Son utilisation est déconseillée chez la femme enceinte. Un accès plus aisé au vaccin permettrait d’organiser une véritable prévention en vaccinant avant toute grossesse les femmes en âge de procréer se sachant séronégatives, et les professionnelles exposées à risque. 7.2. En cas de contage varicelleux Si la femme enceinte ignore son immunité vis-à-vis de la varicelle, une sérologie anti-VZV doit être rapidement réalisée. Jusqu’à l’obtention des résultats, la patiente se tiendra à l’écart de la maternité. Chez les patientes non immunisées se discute l’utilisation d’un traitement post-exposition. 7.2.1. Les gammaglobulines spécifiques Elles sont à nouveau disponibles en France sous autorisation temporaire d’utilisation à l’Agence du médicament (Varitec®). Tout pharmacien est en mesure de s’en procurer rapidement. Elles doivent être injectées dans les 48 heures suivant le contage. Elles proviennent de pool de sérums de personnes immunisées. 7.2.2. Les anti-herpétiques tel que l’aciclovir, sont discutés L’autorisation de mise sur le marché (AMM) leur a été accordée dans un but thérapeutique lors des varicelles périnatales ou compliquées. On sait que ces antiviraux passent la barrière placentaire. Le recueil des données sur les traitements in utero n’a pas révélé de risque tératogène particulier, mais ni la FDA, ni l’Agence du médicament n’ont à ce jour donné un accord d’utilisation chez la femme enceinte

7.3.1. Un traitement par antiviraux par voie veineuse est indiqué, quel que soit le terme de la grossesse en cas de complication maternelle (pneumopathie) Il n’existe pas encore d’étude prospective randomisée chez la femme enceinte mettant en évidence l’intérêt clinique d’un traitement antiviral (type aciclovir voire valaciclovir) dans la limitation de la mortalité maternelle. Cependant, de multiples séries soulignent son intérêt majeur in vitro et chez les patients immunodéprimés. Sa prescription en cours de grossesse est désormais possible au 3e trimestre et lors des complications. La moindre sensibilité du VZV à l’aciclovir comparée à l’herpès simplex impose l’utilisation d’une dose importante. En cas de pneumopathie maternelle, la voie veineuse s’impose (10 à 15 mg/kg toutes les huit heures) pour atteindre des concentrations efficaces. Un traitement par aciclovir n’empêche pas forcément la défaillance ventilatoire. Cependant, un début précoce pourrait apporter un bénéfice maternel voire fœtal, dont l’évaluation précise reste à réaliser. En l’absence de complications, le traitement antiviral sera discuté en fonction du terme (à éviter certainement au 1er trimestre) et de la sévérité de la symptomatologie maternelle. Il n’existe à l’heure actuelle aucun argument épidémiologique pour penser que ces traitements diminuent le risque de transmission maternofœtale ou leur gravité même si les arguments théoriques sont importants. 7.3.2. En cas d’éruption de fin de grossesse Il est souhaitable de traiter la femme et de retarder l’accouchement si possible. Une fois l’éruption terminée, l’enfant est protégé. De multiples publications suggèrent l’utilisation de traitement antiviral type aciclovir par voie veineuse chez les enfants nés avec un risque de varicelle néonatale sans attendre l’apparition de signes cliniques. Les doses conseillées sont de 20 mg/kg par huit heures. L’injection conjointe d’immunoglobulines spécifiques est à évaluer au cas par cas.

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8. PROPOSITION DE PRISE EN CHARGE EN CAS D’ÉRUPTION MATERNELLE AVANT 24 SA 8.1. Confirmation du diagnostic Confirmer le diagnostic de varicelle par l’examen clinique ou si besoin par une sérologie anti-VZV. On y associera une stricte surveillance pneumologique avec une radiographie de thorax au moindre signe d’appel. La mise en route d’un traitement antiviral sera discutée en fonction de la sévérité clinique et du terme de la grossesse. 8.2. Contre-indication Contre-indiquer aux patientes contagieuses la fréquentation des maternités, services de pédiatrie et autre contact avec les femmes enceintes.

et fœtales qu’elle occasionne justifient une prise en charge spécifique, médicale, obstétricale et virologique lors de suspicion de contage varicelleux et d’éruption cutanée évocatrice en cours de grossesse. RÉFÉRENCES [1] [2]

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8.3. Information Informer la femme enceinte infectée du risque fœtal lié à la transmission virale. 8.4. Réaliser une échographie à la recherche de signes évocateurs de varicelle congénitale

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Après cicatrisation des lésions cutanées, contrôler par PCR sur sang maternel l’absence de persistance de génome viral dans les lymphocytes. Ou devant tout signe échographique. 8.5. Pratiquer une ponction amniotique (par amniocentèse) et rechercher par PCR une infection fœtale • en cas de résultat négatif : reprise de la surveillance de grossesse régulière ; • en cas de résultat positif : évaluer la gravité du retentissement fœtal ; • échographie attentive ciblée ; • examen en résonance magnétique nucléaire avec une attention particulière prêtée au cerveau et à l’aspect oculaire ; • bilan post-natal notamment ophtalmologique et suivi pédiatrique attentif. 8.6. En cas d’infection fœtale avec signes échographiques patents Il est recommandé d’avoir une discussion avec le couple sur la suite à donner à la grossesse en fonction des signes échographiques.

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9. CONCLUSION [19]

La survenue d’une varicelle clinique reste une éventualité possible dans les pays où la vaccination n’est pas encore accessible à tous. Les risques de complications maternelles

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