La vidéocapsule endoscopique : quel avenir ?

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en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/lpm www.sciencedirect.com Éditorial Presse Med. 2010; 39: 1119–1121 ß 2010 Elsevier Masson SAS. ...

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Éditorial

Presse Med. 2010; 39: 1119–1121 ß 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

La vidéocapsule endoscopique : quel avenir ? Marianne Gaudric

Hôpital Cochin, service de gastroentérologie, 75014 Paris, France

Correspondance : Disponible sur internet le : 23 août 2010

Marianne Gaudric, Hôpital Cochin, service de gastroentérologie, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France. [email protected]

Is there a future for wireless endoscopy?

E

n 1966 alors qu’apparaissait l’endoscopie moderne Georges Fleischer réalisait « Le Voyage Fantastique », premier film de science fiction à l’intérieur du corps humain. En 2000, la réalité a rejoint la fiction avec la mise au point en Israël de la première vidéocapsule endoscopique présentée par Given Imaging. La PillCamW est un endoscope miniaturisé comportant une puce électronique qui enregistre 2 images/ seconde transmises à un enregistreur télémétrique par des capteurs placés sur le malade, une source de lumière et des piles à l’oxyde d’argent. Tous les composants sont contenus dans une gélule à usage unique que le patient avale et élimine par les voies naturelles. Sa progression est assurée par le péristaltisme intestinal Les données sont transférées de l’enregistreur sur une station de travail équipée d’un logiciel spécifique permettant la lecture et la sauvegarde des images. La capsule a obtenu le marquage CE en 2001 et a été autorisée par la Food and Drug Administration (FDA) la même année. Sa facilité d’utilisation, la qualité des images, son innocuité, ont immédiatement suscité un vif intérêt, tant auprès des médecins que du public. Puis sont apparues la capsule oesophagienne en 2004 et colique en 2006. En même temps Olympus (EndocapsuleW) au Japon, Intromedic (MiroCamW) en Corée et Omom en Chine ont développé des capsules et se sont lancés dans le voyage fantastique.

La vidéocapsule : une révolution dans l’exploration de l’intestin grêle

tome 39 > n811 > novembre 2010 doi: 10.1016/j.lpm.2010.05.011

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De nombreuses publications ont démontré l’intérêt de la capsule (VCE) pour l’exploration du grêle. Elle est indiquée en première intention dans les hémorragies digestives ou les anémies par carence martiale lorsque la fibroscopie et la coloscopie sont normales. Sa rentabilité diagnostique est supérieure à l’entéroscopie poussée, équivalente à celle de l’entéroscopie peropératoire [1,2] sans la morbidité et la mortalité de cette dernière. En cas de saignement extériorisé, elle est plus souvent contributive lorsqu’elle est réalisée précocement, dans les 2 semaines suivant l’hémorragie. La VCE est également recommandée en cas de suspicion de maladie de Crohn [3], lorsque la

M Gaudric

fibroscopie et la coloscopie sont normales ou dans les colites indéterminées. Elle est supérieure au transit baryté, à l’entéroscopie et à l’entéro-tomodensitométrie (TDM) pour la mise en évidence des lésions inflammatoires du grêle, mais des ulcérations aphtoïdes peuvent s’observer chez des sujets sains et il n’y a aucun critère permettant de différencier les ulcérations de la maladie de Crohn de celles induites par les antiinflammatoires non stéroïdiens (AINS). Dans cette indication, le risque de rétention (5 %), voire d’occlusion nécessite une enquête clinique scrupuleuse pour chercher des arguments en faveur d’une éventuelle sténose du grêle que les autres examens morphologiques ne permettent pas d’écarter. Un examen préalable avec une capsule qui se dissout spontanément en cas de station prolongée dans le grêle semble diminuer le risque. Dans la polypose de Peutz-Jeghers, la VCE permet d’identifier la présence de polypes du grêle mais leur taille et leur topographie sont mal précisées. Dans les polyposes adénomateuses, certaines études suggèrent qu’elle pourrait avoir un intérêt dans les formes ou existe déjà une atteinte duodénale floride (Spiegelman III ou IV). Dans les autres maladies du grêle la place de la VCE n’est pas encore bien déterminée même si elle semble avoir un intérêt dans la maladie coeliaque, surtout si une sprue réfractaire est suspectée. Son intérêt n’a pas été démontré dans les syndromes de malabsorption, les diarrhées chroniques des immunodéprimés ou dans la surveillance après transplantation intestinale. La VCE est prise en charge par l’Assurance maladie depuis novembre 2008 dans ses indications validées (saignement inexpliqué et suspicion de maladie de Crohn) pour une somme de 612,47s incluant 500 s pour la capsule et 112,47 s d’honoraires médicaux. La capsule oesophagienne (VCO) est en cours d’évaluation. Si elle permet avec une sensibilité de 60 à 100 % de faire le diagnostic d’endobrachyoesophage elle n’a pas d’intérêt pour la surveillance et la mise en évidence de la dysplasie [4]. Une méta-analyse de 7 études [5] comparant la capsule à la gastroscopie a montré une sensibilité de 85,8 % et une spécificité de 80,5 % pour le diagnostic des varices oesophagiennes mais son coût en limite encore l’application.

Le côlon : un territoire à conquérir

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C’est maintenant la capsule colique (VCC) qui suscite le plus d’intérêt. La capsule Given Imaging comporte 2 cameras émettant 4 images par seconde. Elle s’active pendant 3 mn, puis se met en repos pendant 1 h 45 mn pour économiser l’énergie de la pile pendant le transit dans le grêle. La préparation doit être optimale et, une fois la capsule ingérée, la prescription de laxatifs permet d’accélérer sa progression dans le grêle et l’examen complet du côlon dans 90 % des cas. La VCC a été comparée à la coloscopie dans plusieurs publications. Une première étude israélienne [6] a rapporté chez 91 patients,

dont 84 cas seulement analysables, une sensibilité de la VCC de 63 % et une spécificité de 94 % pour les polypes  6 mm. Une étude européenne prospective, multicentrique [7], a montré chez 320 patients des résultats comparables avec une sensibilité de 64 % et une spécificité de 79 % mais, sur 19 cancers dans cette série, seuls 14 ont été détectés par la capsule. La qualité de la préparation est un point crucial puisqu’elle était considérée comme insuffisante pour 28 % des examens par la capsule contre seulement 13 % des coloscopies où l’insufflation, l’aspiration et le lavage peuvent compenser le défaut de préparation. Une autre étude multicentrique française dont seulement les résultats préliminaires ont été rapportés jusqu’à présent sous forme d’abstract [8] ont montré, chez 105 patients à risque moyen de polypes, des résultats comparables avec une sensibilité de 73 % et une spécificité de 91 % pour les lésions  6 mm. La qualité de la préparation paraissait aussi le facteur limitant cependant, en ne retenant que les 58 patients avec une préparation très satisfaisante, la sensibilité n’était toujours que de 76 %. Le dépistage des polypes, la surveillance des patients à haut risque de cancer du fait d’antécédents personnels ou familiaux de néoplasies colorectales est un champ d’application possible de la capsule colique auquel ces études ouvrent la voie. Il y a effectivement une place entre le test HémoccultW trop peu fiable et la coloscopie dont le caractère invasif limite l’acceptabilité. Malgré leur caractère très préliminaire et des résultats qui paraissent encore un peu décevants, ces études montrent la faisabilité de la technique, son excellente tolérance et sa sécurité d’emploi. Un certain nombre de limitations d’ordres technologiques pourraient être résolues par le développement de nouvelles capsules. La VCC Given Imaging de seconde génération a un champ plus large, une capture d’images variable de 4 à 35 images/seconde en fonction de sa vitesse de progression et un outil de mesure de la taille des polypes. Une première étude israélienne [9] a montré que la sensibilité pour la détection des polypes  6 mm avec cette capsule était de 89 %. Il reste deux points cruciaux qui sont la préparation et le coût. Si la préparation peut encore être améliorée c’est sans doute au détriment de son acceptabilité par les patients. Quant au coût, des études comparant la capsule aux autres méthodes de diagnostic non invasif et prenant en compte des analyses coût bénéfice sont nécessaires. L’examen du tube digestif par vidéocapsule représente un progrès technologique considérable. Le robot endoscopique a été inventé, il reste à le doter de fonctions pouvant en faire un outil incontournable : progression contrôlée et orientée, biopsies, libération de médicaments, embarquement d’outils de mesure ou de traitement. Conflits d’intérêts : aucun.

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Triester SL, Leighton JA, Leontiadis GI, Fleischer DE, Hara AK, Heigh RI et al. A meta-analysis of the yield of capsule endoscopy compared to other diagnostic modalities in patients with obscure gastrointestinal bleeding. Am J Gastroenterol 2005;100:2407-18. Hartmann D, Schmidt H, Bolz G, Schilling D, Kinzel F, Eickhoff A et al. A prospective two-center study comparing wireless capsule endoscopy with intraoperative enteroscopy in patients with obscure GI bleeding. Gastrointest Endosc 2005;61: 826-32. Dubcenco E, Jeejeebhoy KN, Petroniene R, Tang SJ, Zalev AH, Gardiner GW et al. Capsule endoscopy findings in patients with established and suspected small-bowel Crohn’s

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disease: correlation with radiologic, endoscopic, and histologic findings. Gastrointest Endosc 2005;62:538-44. Galmiche JP, Coron E, Sacher-Huvelin S. Recent developments in capsule endoscopy. Gut 2008;57:695-703. Lu Y, Gao R, Liao Z, Hu LH, Li ZS. Metaanalysis of capsule endoscopy 19 in patients diagnosed or suspected with esophageal varices. World J Gastroenterol 2009;15:12548. Eliakim R, Fireman Z, Gralnek IM, Yassin K, Waterman M, Kopelman Y et al. Evaluation of the PillCam Colon capsule in the detection of colonic pathology: results of the first multicenter, prospective, comparative study. Endoscopy 2006;38: 963-70.

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Références

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