Les pathologies de l’oreille chez le chien et le chat

Les pathologies de l’oreille chez le chien et le chat

Actualités pharmaceutiques • n° 488 • Septembre 2009 vétérinaire pratique 41 Les pathologies de l’oreille chez le chien et le chat Ayant de multipl...

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Actualités pharmaceutiques • n° 488 • Septembre 2009

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Les pathologies de l’oreille chez le chien et le chat Ayant de multiples origines, les affections de l’oreille touchant nos compagnons à quatre pattes font souvent l’objet d’une consultation vétérinaire. Des conseils de prévention et d’hygiène adaptés peuvent parfois éviter d’y avoir recours.

dre le tympan en nettoyant les oreilles de son petit compagnon et que les sécrétions, qui ne peuvent s’évacuer de façon naturelle, s’accumulent donc dans le conduit. Le cérumen est produit en permanence par les glandes cérumineuses et sudoripares apocrines modifiées dans le conduit auditif. Cette production est donc sous l’influence de la densité des glandes et de leur état d’inflammation.

Atteintes de l’oreille Les surdités, des pathologies congénitales

L

es otites sont des pathologies très fréquentes en médecine vétérinaire. Elles peuvent être détectées de façon fortuite par le vétérinaire lors d’une visite de contrôle ou constituer un motif de consultation : « Mon chien se gratte les oreilles », « Les oreilles de mon chien ne sentent pas bon », « Les oreilles de mon chat sont vraiment sales »... Dans tous les cas, un examen dermatologique complet devra être instauré car les otites externes sont souvent l’expression clinique localisée d’une dermatose sous-jacente. Après nettoyage, un examen approprié du conduit auditif externe sera entrepris à la recherche d’un éventuel corps étranger, d’une sténose du conduit ou encore d’une tumeur. Cet examen est nécessaire avant l’instauration d’un traitement topique afin de s’assurer de l’intégrité de la membrane tympanique.

La surdité congénitale provient d’une dégénérescence de certaines structures de l’oreille débutant rapidement après la naissance. Il s’agit d’une pathologie fréquente dans certaines races à robe blanche ou pie et aux yeux bleus (dalmatiens, setters anglais, bergers australiens, borders collies, bull terrier, dogue argentin...). Il existe une méthode de dépistage praticable dès le 30e jour de vie (mesure des potentiels évoqués auditifs, réalisée de manière identique chez les nourrissons au cours des examens postnataux dans les maternités françaises). Des surdités peuvent survenir chez des animaux adultes suite à un état inflammatoire chronique des différentes parties de l’oreille. Ces anomalies peuvent être consi-

L’oreille est divisée en trois parties : – l’oreille externe composée du pavillon auriculaire et du conduit auditif externe ; – l’oreille moyenne constituée de la bulle tympanique et des osselets auditifs ; – l’oreille interne située dans l’os temporal et impliquée à la fois dans l’interprétation des sons, la proprioception et l’équilibre. Le conduit auditif externe est en forme de L chez les carnivores domestiques. La première partie est verticale et la seconde, horizontale, aboutit au tympan (petite membrane qui sépare l’oreille externe de l’oreille moyenne). Cette forme particulière du conduit auditif fait qu’il est quasiment impossible d’attein-

© Fotolia.com/Ronny Nöller

Caractéristiques de l’oreille des chiens et des chats

dérablement améliorées par des nettoyages réguliers.

Les atteintes des pavillons auriculaires • Les traumatismes Un othématome (collection sanguine dans le pavillon auriculaire rendant l’oreille bombée et plus ou moins douloureuse) par rupture vasculaire peut survenir à la suite d’un grattage violent de la face. Le traitement est chirurgical, mais la cause “déclenchante” doit être identifiée pour éviter une récidive rapide. Des abcès situés à la base des pavillons peuvent être secondaires à des plaies de morsure, surtout chez le chat. • Les allergies L’atopie du chien se caractérise par une atteinte des pavillons auriculaires, avec initialement un érythème accompagné de papules, puis une extension rapide au conduit auditif externe est notée (stade otite). Dans un premier temps, il conviendra de conseiller une alimentation spécifique hypoallergénique (à base d’hydrolisats protéiques) pour abaisser le seuil allergène. Les allergies de contact touchent la face interne des pavillons auriculaires si des nettoyages fréquents avec des produits non adaptés ou non tolérés par l’animal sont effectués.

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• Les endocrinopathies Classiquement, les dysendocrinies se manifestent par une alopécie tronculaire symétrique et non prurigineuse, épargnant la face et les extrémités. Mais quelquefois (dans les cas graves), il est possible d’observer une alopécie des pavillons auriculaires, toujours accompagnée dans ce cas d’autres symptômes, dermatologiques ou non. • Les causes parasitaires La gale sarcoptique touche l’ensemble du corps avec des localisations préférentielles comme les pavillons auriculaires, le pli de l’aine, les jarrets... Des petits boutons crouteux (appelées boutons de gale) qui génèrent un prurit violent sont alors observés. Le diagnostic se fait par grattage et mise en évidence du parasite au microscope, le traitement étant un acaricide. La gale otodectique (ou gale des oreilles) est souvent présente chez les jeunes animaux. Le cérumen est abondant, noirâtre et friable, et un prurit important est noté avec présence d’un réflexe auditopodal (quand on touche l’intérieur du conduit auditif externe, l’animal fait un mouvement de grattage de la patte arrière). Cette gale est souvent responsable d’une otite externe qu’il convient de traiter par des nettoyages réguliers des oreilles et l’application d’un acaricide (Stronghold® ou Advocate spot on® entre les omoplates ; traitement répété 2 semaines plus tard +/- associé à un topique comme Oridermyl® utilisé tous les 2 jours jusqu’à guérison). La gale otodectique étant très contagieuse, tous les animaux en contact doivent être considérés comme potentiellement infectés et subir le même traitement. La démodécie peut avoir une expression sur les pavillons auriculaires : alopécie, comédons, erythème, squames. Le traitement passe par l’application de spot on d’Advocate® surdosé toutes les 3 semaines ou par un traitement voie orale à base d’Ivomec® ou de Cydectine® à 0,4 mg/kg/jour. Les dermatophytoses (ou teignes) peuvent se localiser uniquement aux pavillons auriculaires ou provoquer une atteinte générale. Un traitement antifongique général à base de kétoconazole ou de griséofulvine est souvent efficace. • Les tumeurs Le carcinome épidermoïde est une tumeur induite par les ultraviolets qui touche les zones

peu velues des animaux à robe claire (typique du chat blanc). Le traitement, uniquement chirurgical, consiste en l’ablation totale du pavillon auriculaire. Il s’agit d’une pathologie qui est loin d’être rare chez nos compagnons. • Autres affections La séborrhée du bord des pavillons : le bord des oreilles (et uniquement cet endroit) présente un état kératoséborrhéique avec des squames épais. Le traitement passe par un topique antiséborrhéique. La dermatite actinique constitue un stade précancéreux touchant les chats et chiens à pelage clair (voire blanc) et soumis aux rayonnements solaires. Les parties atteintes sont principalement les pavillons auriculaires, le nez et les paupières dans une moindre mesure. Les lésions débutent par un érythème et un état kératoséborrhéique et tendent à progresser au fils des ans avec apparition d’épaississements cutanés, d’érosions et de croûtes jusqu’à atteindre le stade du carcinome épidermoïde. En cas d’apparition de lésions, il est indispensable de consulter un vétérinaire très rapidement. Le pharmacien pourra conseiller à tout propriétaire d’un animal à robe blanche une protection solaire (écran total) à appliquer sur les zones peu velues (comme les pavillons auriculaires) et limiter au maximum l’exposition solaire chez ces animaux à risque. Des alopécies peuvent également survenir. Elles ne sont pas pathogènes et il n’existe pas de traitement.

Les otites • Otites externes Les otites externes regroupent toutes les atteintes inflammatoires du conduit auditif externe jusqu’à la membrane tympanique. Elles sont très fréquentes chez les carnivores domestiques du fait de la structure particulière en L de leur conduit auditif externe qui empêche l’évacuation naturelle des sécrétions et des débris cellulaires. Les chiens à oreilles tombantes, l’hypertrichose auriculaire et une tendance à la séborrhée sont autant de facteurs prédisposant (cas des caniches, bergers des Pyrénées, cockers ou labradors, par exemple), de même que les baignades régulières ou les nettoyages effectués avec des produits inappropriés.

L’otite externe peut être aiguë ou chronique. Dans le second cas, elle devra toujours être considérée comme une entité particulière d’une atteinte dermatologique sousjacente. Certains facteurs peuvent être responsables à eux seuls d’une otite ou contribuer à son développement. C’est le cas des corps étrangers (épillets de graminées notamment, qui peuvent provoquer une rupture tympanique s’ils ne sont pas retirés rapidement entraînant ainsi une otite moyenne chronique), des parasites tels que Otodectes cynotis (agent de la gale des oreilles), des phénomènes allergiques, des dysendocrinies (qui provoquent une production accrue de cérumen), des polypes, ou encore des poils en quantité trop importante. Peuvent s’y ajouter des facteurs secondaires qui contribuent, quant à eux, à l’installation d’une inflammation et donc d’une otite : il s’agit des bactéries et des levures (notamment Malassezia). Elles sont présentes en faible quantité à l’état normal dans le conduit auditif externe, mais toute inflammation de ce conduit va avoir comme conséquence la modification de la flore commensale et le développement d’agents pathogènes. Il existe également des facteurs perpétuants qui sont responsables du passage à la chronicité d’une otite : des altérations de la membrane tympanique, une otite moyenne, des remaniements secondaires à l’inflammation (notamment un épaississement cutané avec rétrécissement du diamètre du conduit auditif externe). Ils devront être dépistés et traités pour éviter l’échec du traitement. Les otites devront être traitées par des antibiotiques topiques appliqués une ou deux fois par jour selon le produit (Easotic ® , Otomax ® , Surolan ® ). Le choix de l’anti biotique sera fonction de l’intégrité ou non du tympan (pas de gentamycine sur un tympan rompu) et de la bactérie en cause (un antibiogramme étant indispensable en cas d’isolement de Pseudomonas, bactérie-bâtonnet la plus fréquemment retrouvée dans les otites chroniques). L’utilisation d’un antibiotique par voie systémique est uniquement nécessaire dans les otites moyennes ou internes (les topiques passant mal la membrane tympanique intacte).

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Lors de remaniement tissulaire avec rétrécissement du conduit auditif externe suite à une inflammation importante et chronique, il faut utiliser des corticoïdes par voie systémique, locale ou par infiltration intralésionnelle jusqu’à amélioration nette ; la ciclosporine a fait également preuve d’une bonne efficacité pour combattre ces inflammations. En cas d’échec de ces traitements, l’alternative chirurgicale sera proposée (abaissement du conduit auditif externe). • Otites moyennes Dans les otites moyennes, il y a eu contamination de la bulle tympanique après rupture de la membrane tympanique ou par contamination rétrograde à partir du pharynx ou encore par voie hématogène. Les otites moyennes sont des complications fréquentes des otites externes ; elles doivent être suspectées dès l’apparition d’une otite externe chronique et récidivante. Les topiques pénètrent mal la membrane tympanique, si celle-ci est intacte, et la chronicité s’installe rapidement. De plus, alors que dans les otites externes il est fréquent d’avoir une double contamination (bactérienne et fongique), dans le cadre d’une otite moyenne, il s’agit principalement d’une affection uniquement bactérienne (l’agent le plus souvent identifié étant Pseudomonas sp.).

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ser toutes les sécrétions au fond du conduit auditif (dans sa partie horizontale) et serait responsable dans un deuxième temps d’otite.

• Otites internes Une atteinte neurologique constitue généralement le motif de consultation.

Quelques questions/réponses à l’officine

Quels produits préconiser ?

Comment bien nettoyer l’oreille ?

De nombreux produits existent sur le marché pour nettoyer les oreilles des animaux de compagnie. Ils sont de base aqueuse (Otolane®, Epiotic ®...) ou de consistance plus épaisse associant des huiles essentielles et/ou du propylène glycol (Otifree®, Cleanaural®, Otoclean®, Soin des oreilles® de Clément-Thékan, Lait auriculaire® de Biocanina...). En cours de traitement, il conviendra de bien nettoyer le conduit auditif externe avant de commencer le traitement topique, puis tous les 2 jours (afin de lui permettre de sécher entre deux applications et d’éviter une lassitude de l’animal ou encore une infl ammation par irritation), un laps de temps d’environ 30 minutes devra être respecté avant l’application du traitement afin d’éviter de diluer ce dernier. Les produits nettoyants ont le plus souvent une action antiseptique qui permet de guérir près d’une otite sur deux sans avoir recours à un antibiotique topique. Attention, la plupart des nettoyants auriculaires contiennent des composants toxiques en cas de rupture tympanique. Dans ce cas, il faut privilégier un soluté isotonique ou bien le nettoyant habituel mais fortement dilué.

La démarche est la suivante : – privilégier un nettoyant auriculaire à embout souple qui évite les traumatismes du conduit auditif externe lors du traitement ; – tenir le pavillon auriculaire, enfoncer la canule de 2-3 cm au moins au fond du conduit auditif (le risque de lésion tympanique est minime du fait de la conformation en L du conduit) et presser une bonne fois le flacon pour instiller un volume conséquent (le liquide doit apparaître à la surface) ; – retirer la canule et masser la base de l’oreille (bruit de clapotis) ; – ôter l’excédent de cérumen et de débris cellulaires à l’aide d’une compresse propre et laisser l’animal secouer la tête (lui seul peut éliminer les débris situé au fond du conduit par cette action mécanique) ; – répéter l’opération jusqu’à récupérer une compresse propre. Surtout, il ne faut pas utiliser de coton-tige, ce qui aurait pour conséquence de pous-

• Après introduction du produit nettoyant et massage de l’oreille, il faut ôter l’excédent de cérumen et les débris cellulaires à l’aide d’une compresse propre.

Quelle hygiène conseiller ? Les propriétaires doivent toujours inspecter l’intérieur des oreilles de leur chien lors de la saison des épillets (avril-maijuin) au retour d’une balade dans les herbes. Ils doivent également les nettoyer régulièrement avec un produit adapté (une fois par semaine ou deux fois par mois en entretien). „

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Ségolène Courtin-Domas Docteur en pharmacie, docteur vétérinaire, Sainte-Foy-lès-Lyon (69) [email protected]