Les responsabilités médicales dans les services d'urgences

Les responsabilités médicales dans les services d'urgences

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RBanim

Mise au point

0 2000 htions

scientifiques

Urgences

2000 ; 9 : 512-22

et mddicales Elsevier SAS. Tow droits r&etv&

Lesresponsabilithmbdicales dansles servicesd’urgences B. Ludes, S. Hauger

lnstitut de mbdecine Ibgale de Strasbourg, 11, rue Humann, 67085 Strasbourg cedex, France. Retpi le 14 juin 1999, accept6 le ler juin 2000.

L’acte medical n’est pas un acte ordinaire, mais une agression corporelle librement consentie, consentement don& &ant etabli un risque-benefice rappel6 par l’article 16-3 du code civil [l] qui dispose <>.De plus, les prog&s dans le domaine medical sont tels que l’espoir des patients est de plus en plus grand et l’echec d’une therapeutique n’apparait plus comme une fatalite. Le patient a alors tendance a confondre droit a la guerison et droit aux soins, ce dernier droit &ant au demeurant constitutionnellement reconnu [2]. Quant a la responsabilitt medicale, celle-ci peut &r-e envisagee sous l’angle de la sanctiorrdu medecin, responsabilites penale’ et ordinale, et sous l’angle de la reparation d’un dommage qui conduit alors a l’indemnisation de la victime. La juridiction devant 1aquelIe le patient devra presenter sa demande sera differente selon que le medecin exerce en secteur liberal, en clinique ou en cabinet, ou dans un Ctablissement public hospitalier ou equivalent. Dans le premier

cas, l’action doit Btre engagee devant une juridiction judiciaire, dans le second cas (activite hospitalibre nonprivee), l’action devra s’envisager devant une juridiction administrative. Le principe du contrat medical veut que le medecin soit debiteur d’une obligation de moyens, mais de nombreux amenagements existent. S’y ajoutera tantot une obligation de SCcurite (tout etablissement de soins est debitem d’une obligation de securitbmoyens), tantot une obligation de resultat (comme en mat&e d’information).

Utie responsabilitkcontra;ctuelie L’arret Mercier, rendu le 20 mai 1936 par la Cour de cassation (Cour de cassation, chambre civile, 20 mai 1936, Gazette du Palais, 1936.2, p- 41), pose les fondements du droit medical moderne en disposant qu’en mat&e civile <<111se forme entre le praticien et son patient, un veritable contrat comportant pour ‘le praticieh l’,engagement, sinon, bien e’videnii ment, de guCrir le malade..l du mains de lui donner des soins; ‘non pas quelc conques, ~mais consciencieux, attentifs et reserves faites de’circonstances exceptionnelles, conformes aux don trees actuelles de la science B. Ainsi, la relation de :soins ,passe du )domaine delictuel au ,domaine contractuel. 11 faut alors preciser que

Responsabilitk du mkdecin urgent&e

s’engage B rkgler les honoraires du mkdecin quand il en a les moyens et le medecin s’engage B donner des soins consciencieux et conformes aux donnkes de la science au moment de la prise en charge mkdicale [3].

Le principe : une obligation de moyens

la formation d’un contrat suppose la capacitk juridique, si bien que les minews et les personnes sous tutelles ne sont pas susceptibles de contracter. Ainsi, le contrat se forme entre le mtdecin et le reprksentant Ikgal du Datient. Dans ce contrat, le patient

Obligation pesant sur le mCdecin Aucun praticien ne promettrait B son patient de le guCrir, dans la mesure oti la gukrison est toujours altatoire. C’est pourquoi, en principe, le mkdecin est ddbiteur envers son patient d’une obligation de moyens, au sens de l’article 1137 du code civil qui renvoie ti la notion de K bon p&e de famille B, c’est-g-dire que I’on apprktie le comportement du mkdecin in abstract0 ; l’attitude de la personne incriminCe est cornparke B celle d’un mkdecin normalement diligent saris tenir compte de son degrk de capacitk personnelle. En pratique, les magistrats fondent leurs avis sur des rapports d’experts qui foumissent des indications sur les donnkes actuelles de la science et sur les pratiques et les usages professionnels. Toutefois, les juges ne sont pas tenus de suivre ces experts. Les fautes techniques peuvent Ctre constitukes d’erreurs de diagnostic, de fautes de prescription ou d’erreurs dans la rCalisation de gestes techniques, que ceux-ci soient complexes ou non. NCanmoins, toute erreur n’est pas nCcessairement fautive, notamment une erreur de diagnostic ne constitue pas B elle seule une faute, pourvu que le praticien ait mis en ceuvre les moyens nkessaires B la conduite du traitement et qu’il ait fait preuve d’une diligence suffisante. La tour d’appel de Paris a condamnk un mkdecin urgentiste qui avait diagnostiqud une maladie psychiatrique, alors que son patient &ait atteint d’une mkningite 5 pneumocoques. La iuridiction a

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reprochk B ce praticien de ne pas s’&tre suffisamment inform6 auprks de la compagne du patient qui prkentait une attitude hostile (tour d’appel de Paris, chambre correctionnelle, 19 nov. 1998 : Juris-Data no 023476). La tour d’appel de Paris a en fait condamnk sa diligence insufflsante. Le mkdecin doit done satisfaire B son obligation de moyens en mobilisant tous les pro&d& techniques, intellectuels et humains (non seulement une Cquipe mkdicale compktente, mais aussi les proches du patient qui peuvent fournir des renseignements primordiaux) & sa disposition pour tenter d’atteindre l’objectif de guk-ison du patient. En mat&e de soins, obligation principale du mkdecin, il s’agit, aux termes de la loi, d’une obligation de faire. En cas d’Cchec, le mCidecin verra sa responsabiliti engagke s’il n’a pas satisfait B cette obligation de moyens. IhCments de la responsabilitk civile Cette responsabilitk repose sur le triptyque comportant la mise en Cvidence d’une faute, l’existence d’un prdjudice et l’ktablissement d’vn lien de causalitk entre la faute etsle prijudice. Censemble de ces trois t51Cments doit &re prouvC par le patient, c’esth-dire que le demandeur supporte ‘la charge et le risque de la preuve. Ainsi; le patient, pour Ctre indemnisk, doit, @rower seul ces trois Uments et s?il h’y parvient pas, il succombe et ddit &re dkboutt. La faute, Ument gCn&ateur de responsabilitC, s’apprkcie done au regard des donnkes acquises de la science. La faute est le plus souvent un acte (positif ou n&gatif) du mCdecin, mais $eut aussi &tre reprochke B un tiers, une secrktaire, un pharmacien. Le praticien sera nkanmoins personnelkment poursuivi.

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La necessid d’une faute est exigee depuis bien longtemps puisque la jurisprudence n’a pas vatit! en la mat&e depuis un a&t de la Ire chambre civile de la Cour de cassation du 27 juin 1939 (Droit civil 1941, 53, Ire esp., note Nast.). A titre d’illustration, le choix d’une indication therapeutique fatale sera rarement fautif, du fait mCme de la liberte de prescription dont bkneficie le medecin. A contrario, la mauvaise execution d’un traitement et une prise de precautions insuffisantes bien que necessaires constitueront souvent une faute. Le prejudice invoque, doit presenter les caractkres suivants : personnel, certain, direct et previsible. 11 peut Ctre materiel (dommage corporel, atteinte a la vie...) et/au moral (atteinte au secret, a l’honneur, pretium doloi-is...). Le caractere certain b&rCficie d’une large acception. En effet, le prejudice n’est pas forcement deja realise, le dommage peut Ctre futur pourvu que sa r&.lisation soit certaine et pas seulement Cventuelle. Toutefois, les victimes peuvent invoquer la perte de chance [4]. Les magistrats usent parfois de cette notion pour qualifier le prejudice et permettre l’indernnisation des victimes. Ce concept est quelque peu critique juridiquement, mais il a le m&e de permettre aux victimes d’etre indemnisees, partiellement dans la majorite des cas [5]. De plus, l’article 1151 du code civil dispose que le debiteur ne doit reparer que les suites directes et immediates de l’inexecution ou de la mauvaise execution, mais il s’agit la du probleme du lien de causalite. Ainsi, la victime devra encore prouver qu’il existe un lien de causalite entre la faute et le dommage subi. Si le patient parvient a prouver ces trois elements, le praticien sera condamne a reparer tout le dommage, mais rien que le dommage dont sont rappelees ci-dessus les

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caractbristiques. Toutefois, le praticien, en cas de faute lourde (faute particulibrement grave mais non intentionnelle) ou de faute intentionnelle, devra indemniser le prejudice imprevisible Cgalement et ne pourra pas se prevaloir de toutes les causes exoneratoires de responsabilite qui ne seront que citees ici et qui sont la force maj,eure, comme une catastrophe naturelle, le cas fortuit, le fait de la victime ou le fait d’un tiers.

Lesexceptions auprincipe La pratique juridique souffre de nombreuses exceptions. Tout d’abord, il p&se a priori sur le m&kin une obligation de resultat en mat&e de soins benins, c’est-a-dire notamment les gestes qui ne sont pas 21proprement parler mklicaux comme une injection d’insuline ou le changement d’une tubulure. Par ailleurs, le praticien partage une obligation de s&trite avec le fabricant quant au materiel qu’il utilise. Cela signifie que le soignant doit s’assurer de la bonne qualite du produit, de son absence de vice, qu’il s’agit d’un materiel apte ?I rendre le service attendu et que le mkdecin et le fabricant peuvent etre solidairement responsables (responsabilite in solidum). A titre d’illustration, la responsabilid de l’urgentiste pourra Ctre recherthee si des sondes d’intubation se tordent ou se fissurent lors de leur utilisation. Force est de preciser que de tels problbmes sont CtudiCs au cas par cas par les tribunaux civils, et qu’il n’y a pas d’extension au plan administratif (c’est-a-dire pour le praticien du service public). Ces exceptions sont particulibrement contraignantes pour les debiteurs de ces obligations accessoires de resultat, d’autant qu’il est beaucoup plus aise pour les victimes de les mettre en oeuvre que lorsqu’il s’agit d’une obligation de moyens.

Renversement dela chargedela preuveenmatih d’information Le principe de la charge de la preuve incombant au demandeur subit Cgalement des temperaments. Effectivement, en mat&e d’information du patient (ou de son representant legal), il appartient au medecin, luimeme, de rapporter la preuve qu’il a bien informe son patient avant de pratiquer tel ou tel acte, du but recherche, des effets secondaires possibles et des risques encourus par le patient, et ce depuis l’arrbt HCdreulCousin du 25 fevrier 1997 ( 1” chambre civile de la Cour de cassation : bulletin des arr&s de la Cour de cassation I, no 75). S’il ne parvenait pas a prouver cette information, le praticien devrait succomber : sa responsabilite serait alors engagee [6-91. Force est de prkciser que la jurisprudence se montre relativement cl& mente attendu qu’il a suffi a un chirurgien de montrer qu’une patiente l’avait consuld plusieurs fois a quelques mois d’intervalle avant de se faire opkrer, pour rapporter que ladite patiente avait Cte parfaitement informee. Aussi, cela permet de montrer qu’il n’est pas necessairement utile de faire signer un formulaire presentant l’ensemble des risques a son patient, d’autant que l’ecrit n’est pas forcement une preuve parfaite en la matibre (cf. dans ce sens I’arrCt de la 1~ chambre civile de la Cour de cassation du 29 mai 1984 : recueil Dalloz, 1985,281,3eesp., note Bouvier) ; cependant, un &it correctement redigC dans un langage permettant au patient de comprendre l’ensemble des donnees qu’il contient permet de conserver une trace de l’information et peut Ctre tout B fait probant. 11faut souligner qu’il est souvent difficile de disposer d’ecrits dans le cadre de l’activite des services d’urgences. Pour l’urgentiste, il est necessaire de differencier deux situations, le cas

Respnnsabilitesdu mkdecin urgentiste

rare de I’urgence vitale et le second, plus frequent, de l’urgence relative, voire la consultation. Dans le premier cas, il apparait clairement que le praticien n’a pas le temps d’informer son patient, I’important &ant d’agir. Ainsi, la tour d’appel de Toulouse a refuse de condamner un confrere qui n’avait pas inform6 son patient des risques encourus (choc septique), dans la mesure ou il souffrait d’une occlusion intestinale necessitant un acte chirurgical rapidement (tour d’appel de Toulouse, ire chambre civile, 8 d&z. 1997 : Juris-Data no 047456). Dans le second cas (urgence relative), l’urgentiste est tenu aux mCmes obligations que tout praticien. Aussi, devra-t-i1 informer son patient des risques graves encourus, que ceux-ci se produisent de faGon exceptionnelle ou non. En effet, la jurisprudence civile de la Cour de cassation consacre le principe selon lequel un patient doit Se inform6 des risques courants et de l’ensemble des risques graves, que ceux-ci surviennent exceptionnellement ou pas. La jurisprudence a, en 1997, CvoluC en passant d’un critere quantitatif des risques (frequence de survenance), B un critbre qualitatif (gravite du risque encouru). La notion de risque grave semble encore floue, mais il apparait comme evident que la gravid est appreciee relativement B la pathologie traitee. Enfin, l’information doit porter sur les techniques et les therapeutiques preconides, ainsi que sur les effets secondaires courants. 11 est primordial que l’information dispensee soit adaptee a l’etat clinique du patient et a ses possibilites de comprehension. La reparation s’evalue en une somme d’argent et son versement est, en principe, pris en charge par I’assurance civile professionnelle. En mat&e d’exercice de la medetine, l’adhesion a une assurance

civile professionnelle est, en principe, facultative [lo]. Toutefois le bon sens recommande vivement d’en contracter une. En resume, nombre d’actions civiles n’aboutissent pas, car il est de plus en plus difficile pour le patient d’apporter la preuve d’une faute medicale en raison de la complexite des soins, notamment en milieu de r&+nimation et de deceler le lien entre la faute et le prejudice subi. De plus, ces actions sont fort cot&uses car le patient doit avancer tous les frais, notamment ceux d’expertise et ceux d’avocat dont le ministere est obligatoire au civil... c’est pourquoi, le demandeur s’oriente le plus souvent vers une action en responsabilite penale.

La responsabilit6p&ale Introduction La responsabilid penale resulte de l’application des textes du code penal [l l] et elle se fonde sur la constatation d’une infraction (contravention, delit ou crime). La recherche de la mise en cause de la responsabilite penale en mat&e medicale est souvent la consequence de deux types d’infractions. Le premier concerne les infractions contre les personnes, notamment les atteintes involontaires a la vie (articles 221-6 a 221-1 l), les atteintes involontaires B l’integrite physique (articles 222-19, 222-20) et les infractions aux obligations legales, le non-respect du secret professionuel (article 226-13, 226-14), l’abstention de porter secours (article 223-6) et les faux certificats et attestations (article 441-7, 441-8). Le second vise les atteintes volontaires a la vie (articles 221-8, 22 l-9) avec le probleme de I’euthanasie qui peut aller jusqu’a constituer un assassinat. Dans cette demiere hypothese, le consentement

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du patient ne lib&e pas le praticien de sa responsabilid attendu que le patient ne peut consentir a tout.

Lescertificafs La pratique de la medecine d’urgence invite frequemment l’urgentiste a foumir des certificats B ses patients comme un certificat de coups et blessures. L’attention des praticiens doit Qtre attiree sur le fait que de telles attestations seront produites en justice et pourront avoir des consequences graves pour l’auteur des coups, si bien que ces certificats medicaux initiaux doivent Ctre particulibrement circonstancies et objectifs.

Lanon-assistance Quant a la non-assistance a personne en peril qui constitue un de’lit, il faut, d’une part que la personne en &at de porter secours ait connu I’existence d’un peril immediat et constant rendant son intervention necessaire et, d’autre part, qu’elle se soit volontairement refusee a intervenir par les modes qu’il lui Ctait possible d’emplayer en vue de le conjurer. Des lors, le medecin dont le contours est demand& averti d’un PCril dont il est le seul a m&me d’appretier la gravite et qui refuse d’intervenir sans s’assurer de la situation exacte, tombe sous le coup de I’artitle 223-6 du code penal, meme s’il est e’tabli a posteriori que le peril n’etait pas si grave. Aussi, au tours d’une garde, le medecin du fond de sa chambre qui se contenterait d’un diagnostic favorable effectue par un membre du personnel soignant nonhabilite, comme une infirm&e ou un Ctudiant hospitalier, serait passible d’une telle sanction dans la mesure oti il avait connaissance d’un peril potentiel que seul un diagnostic medical pouvait ou non confirmer (Cour de cassation, chambre criminelle, 21 janvier 1954 : Juris-Classeur

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Periodique 54, II, 8050). A fortiori est passible d’une sanction penale le medecin qui refuse de se dbplacer, alors mCme qu’il a personnellement connaissance d’un danger (Tribunal correctionnel de Draguignan, 28 janvier 1983 : recueil Dalloz 1983, rubrique informations rapides 400).

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pour savoir si elle entre dans les clauses exclusives d’indemnisation. En aucun cas le medecin n’est autorise a communiquer des informations medicales B une compagnie d’assurances, car les causes de de&s constituent un diagnostic medical.

Lesatteintesinvolontaires B lavie Lesecretprofessionnel Pour les atteintes au secret professionnel (le secret medical entrant dans cette catkgorie), la jurisprudence est t&s stricte dans la mesure ou cette obligation au secret s’entend comme un devoir de leur fonction et de leur &at et, sauf les cas oh la loi la suspend, elle est g&r&ale et absolue et il n’appat-bent B persomre de les en affranchir (Cour de cassation, chambre criminelle 8 mai 1947 : bulletin de la chambre criminelle, no 124, jurisprudence constante). Le secret medical a CtC instaure dans l’interet mCme du patient et, a ce titre, il n’en existe, en principe, aucun entre le medecin et son patient et la loi permet de n’y deroger que dans des cas p&is. Dans la pratique de la rkmimation medicale, on peut Ctre amen6 notamment 9 prodiguer des soins B des personnes vulnerables (jeunes mineurs, personnes particulierement dgees par exemple) qui auraient CtC abusees au point qu’elles se retrouvent en service de reanimation ou transportees par le Samu. Dans un tel cas, l’article 22614 du code penal invite le medecin constatant de tels faits B avertir le procureur de la Republique. 11 faut aussi savoir que le d&s du patient ne delie pas pour autant le praticien du secret medical tant au regard du code penal que de la deontologie. Cette notion est d’importance dans les services d’urgence qui sont frkquemment appeles B porter secours a des suicidants, dans la mesure oti les compagnies d’assurances chercheront a connaitre la cause du de&s,

La jurisprudence criminelle use souvent de la qualification d’homitide involontaire pour sanctionner une erreur de diagnostic entrainant le d&s du patient. A titre d’illustration, la tour d’appel d’Aix-en-Provence a lourdement condamne un pediatreurgentiste a qui un enfant ayant ingere un haricot set est adresse par le medecin traitant qui suspecte un syndrome de penetration. Le pediatre avait quant a lui sous-CvaluC la symptomatologie et avait renvoye l’enfant a son domicile oti il devait deceder par asphyxie (Cour d’appel d’Aix, chambre correctionnelle, 30 nov. 1998, Juris-Data no 045722).

Lescamct&istiques dela responsabilit6 p&ale Les recours devant les juridictions p&ales sont, le plus frequemment motives par le mecontentement du patient qui cherche a faire sanctionner le medecin pour des comportements que le patient ou ses ayants droit estiment contraires aux lois regissant la societe, souvent dans des situations d’urgence et de non-assistance h personne en danger.

La responsabilid penale est personnelle a la personne poursuivie. La condamnation penale ne s’analyse pas comme une simple reparation en argent, mais comme une sanction pour le medecin ayant commis une infraction et par le prononce de differentes peines. 11 peut s’agir d’emprisonnement (avec ou sans sursis), d’amende ou de peines complemenmires, consistant essentiellement, en

mat&e mklicale, en une interdiction d’exercice, temporaire ou definitive. Toutefois le plaignant pourra se constituer partie civile a l’instance, en vue d’obtenir l’indemnisation pecuniaire de son prejudice. L’action p&ale est encadree par des regles rigoureuses. Les textes incriminant sont d’interpretation stricte et il existe des d&is de prescription relativement courts (tableau Z). Le plaignant n’a pas B avancer les frais d’expertises judiciaires si bien que la procedure p&ale est nettement moins onereuse que la procedure civile, d’autant que le ministere d’avocat (sauf aux assises) n’est pas obligatoire.

La responsabilit6 administrative Introduction La responsabilite administrative [ 121 ne concerne que l’activite meditale dans le secteur public. Cela signifie a contrario que l’exercice de la medecine en secteur prive, y compris en milieu public hospitalier, releve sinon exclusivement, du moins toujours en partie du juge judiciaire [ 131. Dans ce cas, la victime engage laresponsabilite de l’hopital et est ainsi assuree de la solvabilite du defendeur, attendu que son action tend B l’allocation d’une somme d’argent. En effet, l’administration se substitue au medecin fautif pour le versement des indemnitCs que la juridiction administrative pourra allouer si elle retient la responsabilite. L’administration peut alors exercer, par la suite, une action recursoire contre la persomre effectivement fautive, afin de recupkrer les indemnites versees a la victime. De telles actions sont fort rarement intentees.

Leprincipe La solution classique, que certaines juridictions du fond appliquent

Responsabilit& du medecin urgentiste

Tableau

I. Les diff&entes

responsabilitks

encore, consiste a retenir la responsabilite pour faute prom&e. prouvee. Ainsi, tout comme au civil, Ia victime doit prouver la faute, fame, le prejudice et le lien de causalitb. Contrairement au civil, le demandeur n’est pas seul. 11 est aide dans sa recherche des preuves par le juge et par des presomptions de faute qui renversent la charge de la preuve, c’est-a-dire que c’est a l’hopital de s’affranchir de toute faute. En mat&e

des m6decins

[28].

medicale, l’acte de soin qui provoque un dommage grave comme une paralysie ou a fortiori un d&es constitue une presomption simple de la commission d’une faute. En mat&e administrative, le prejudice doit Stre reel, certain, porter atteinte a une situation juridique protegee, revttir un caractere anormal et special. Le dommage peut &tre materiel et/au moral.

Ainsi, le tribunal administratif de Lyon, le 10 juin 1994 a decide que constitue une faute medicale et dans l’organisation du service engageant la responsabilite de l’etablissement, le renvoi a son domicile d’une patiente souffrant d’une embolie pulmonaire et deddant quelques heures plus tard faute de soins rapides (Gazette Palais du 12 et 13 juillet 1995, p. 5). Dans une telle situation: c’est l’hopital qui

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B. Ludes, S. Hauger

indemnisera les ayants droit de la victime. De plus, l’administration pourra se retoumer contre le chef de service responsable de l’organisation des soins. La personne ayant renvoyt cette patiente pourra, quant a elle, faire l’objet d’une mesure disciplinaire. Cette repercussion de responsabilite est possible en theorie, mais peu vraisemblable dans la pratique.

Lafauted

abfeduservice,

le wnsuntement et I’information dupatient Dans le cas ou le tribunal administratif declarerait la faute detachable du service, l’administration ne serait pas inquietee et n’a done pas B couvrir le personnel fautif. Ce dernier pourra alors Ctre poursuivi au civil, d’oti l’utilite, meme dans l’exercice hospitalier, de contracter une assurance responsabilite civile professionnelle qui prendra alors en charge les tventuelles consequences d’une telle faute. Les exemples de fautes detachables du service sont constitues par le refus de se deplacer lors d’une garde ou d’une astreinte apres un appel, l’euthanasie d’un patient, la non-assistance a personne en danger, la realisation d’investigations ou de soins en l’absence ou contre le consentement d’un patient en &at de donner son avis et hors de l’urgence. De plus, tous les actes criminels sont necessairement detachables dans la mesure oti l’administration ne peut couvrir des agissements aussi graves. 11 faut encore noter que la faute personnelle d’un employ6 de l’hopital totalement d&achable du service oblige la victime a s’adresser aux juridictions judiciaires, tandis que la faute personnelle detachable, mais non dCpourvue de tout lien avec le service public peut entrainer un cumul de responsabilid si bien que le plaignant devra exercer deux actions : l’une devant le tribunal

administratif contre l’etablissement public et l’autre devant le tribunal de grande instance contre l’agent fautif. Quant au consentement et ti titre preliminaire, il ne faut pas oublier qu’un individu majeur peut toujours refuser les soins qui lui sont proposes, ce qui peut se produire pour des raisons de convenances personnelles (croyances religieuses notamment chez les dmoins de Jehovah). L’absence de consentement du patient est sanctionnee par la jurisprudence comme une faute darts l’organisation du service (tour administrative d’appel, Nancy, 9 juillet 1991, Dame Devresse et autres), mais certaines decisions la considerent comme une faute personnelle du praticien et, B ce titre detachable du service, ipso facto engageant sa responsabilid. Le defaut d’information doit Ctre distingue de la faute precedemment citee et il ne peut pas &re CvoquC dans deux hypotheses, lorsque les risques que comporte l’intervention sont imprevisibles, lorsque l’operation est urgente. D’une faGon g&&ale et ce, depuis l’arret confirmatif du Conseil d&t du 5 janvier 2000, en mat&-e d’information, la jurisprudence administrative adopte les mCmes criteres que la Cour de cassation (cf. infra) : renversement de la charge de la preuve et critkre qualitatif des risques encourus. Les regles varient sensiblement selon qu’il s’agit dune urgence vitale ou pas. Comme en mat&e civile, le praticien confront6 a une urgence relative devra informer son patient et recueillir son consentement eclair& tandis que face B une urgence vitale averee, le praticien devra tout mettre en aeuvre pour sauver son patient, sans devoir l’informer au prealable. Le consentement meme du patient n’est plus requis, attendu qu’il a CtC jug6 par la tour administrative d’appel de Paris, le 9 juin 1998, qu’une transfusion sanguine realide contre

la volonte d’un patient temoin de JChovah, n’est pas fautive, dans la mesure oti le patient Ctait inconscient et qu’il n’existait aucune alternative therapeutique, alors que le pronostic vital &tit en jeu. La tour a consider6 que l’obligation pesant sur les medetins de respecter la volonte de leurs patients trouve sa limite dans l’obligation du mkdecin de proteger la sand du patient, c’est-a-dire en demier ressort la vie mCme de ce demier. En matibre de consentement des mineurs non-Cmancipes, la decision de soins appartient aux titulaires de l’autorite parentale, le plus g&n?ralement les deux parents ; l’accord d’un seul est suffisant pour les actes de soins courants ou benins, l’accord des deux est en principe requis pour des actes plus serieux en vertu des articles 371 et suivants du code civil. Outre le cas de d&accord entre les parents qui relbve du juge aux affaires familiales (JAP), lorsque l’enfant est en peril et necessite rapidement des soins que refusent les parents, il est du devoir du medecin de saisir d’emblee le procureur de la Republique qui prendra les mesures necessaires pour permettre de soigner cet enfant. Lorsqu’il est impossible, pour des raisons materielles notamment, de joindre les titulaires de l’autorite parentale et qu’il y a vCritablement urgence pour sauver l’enfant, le medecin saura se dispenser du consentement. La mCme attitude sera adoptee envers les majeurs proteges et represent& [14]. Cette solution est d’ailleurs adoptee par le code de deontologie medicale (art. 42).

La responsabilitbsans faute Afin d’assurer une meilleure indemnisation des victimes, la jurisprudence actuelle s’est toumee vers la notion de responsabilite sans faute. Dans cette hypothese, la victime doit seulement ttablir l’existence d’un

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Responsabilitesdu mkdecin urgentiste

prejudice et l’imputabilite de ce dernier a une activite de l’administration. Cette inclinaison jurisprudentielle est apparue tout d’abord avec l’arr& Cohen du Conseil d’l%at du 9 decembre 1988 oii avait ete avancee la notion de presomption de faute - la notion de presomption de causalid a Cgalement vu le jour en la mat&e -, puis avec l’arr& Gomez de la tour administrative d’appel de Lyon du 21 decembre 1990, dans lequel la tour a innove en retenant la responsabilite saris faute pour l’utilisation d’une therapeutique nouvelle, dont les condquences n’etaient pas encore entibrement connues, creant un risque special pour les malades qui en sont l’objet. Ainsi, trois conditions cumulatives sont requises pour Cvoquer cette notion, I’emploi de techniques meditales nouvelles non CprouvCes et dont les consequences ne sont pas connues, l’absence de raison vitale pour le retours B cette nouvelle technologie et l’apparition de complications exceptionnellement graves. Le domaine a tte Clargi par l’arkt Bianchi du Conseil d&at du 9 avril 1993 dans lequel la juridiction administrative supreme s’est fondee, pour permettre l’indemnisation de la victime, sur l’existence d’un risque exceptionnel mais neanmoins connu. Monsieur Bianchi est en effet devenu tetraplegique a la suite d’une arteriographie verte’brale. La jurisprudence a, par cet art&, institue l’alea therapeutique, c’est-a-dire qu’il n’existe pas de lien de causalid entre I’acte therapeutique et le prejudice. 11s’agit avant tout de trouver des solutions pour &parer le prejudice que subissent les victimes, ces dommages &ant particulibement graves et apparaissant en somme injustes. Et enfin, il apparait qu’actuellement la responsabilitt administrative sans faute pour risque a Cd &endue a l’ensemble des

actes medicochimrgicaux, comme en temoigne le recent a&t du Conseil d&t du 3 novembre 1997 (hopital Joseph-Imbert d’ Aries, Revue frungaise de Droit Administratif 1998, p. 90) confirmant la tour administrative d’appel qui avait motive la condamnation de cet Ctablissement en donnant au dispositif de l’arr& Bianchi ,une large acception. Ledit hopital a en effet dci dedommager les parents du jeune Djammel Mehraz qui est decede apt-es un coma d’un an consecutif a un accident anesthesique lors d’une banale intervention pour circoncision effectuee pour des motifs religieux. Toutefois, ces solutions trouvent leurs fondements dans des circonstances d’espbce, le principe demeurant inchange. Les decisions de justice tendent a simplifier l’indemnisation des victimes d’accidents medicaux en facilitant la recherche des preuves et visent une meilleure protection des victimes par la mise en place de garanties toujours plus larges. La jurisprudence actuelle semble Claborer un droit compassionnel a l’egard de telles victimes [15].

en service d’urgence oii nombre d’intemes veillent, une faute de l’un d’entre eux pourra entrainer une recherche de responsabilite du fautif et du senior de garde ce jour-la, voire du chef de service des urgences. La chaine de delegation &ant souvent propre B chaque service, il est difficile de poser une regle gCnCrale, d’autant que chaque affair-e est examint% individuellement. Compte tenu des travaux ministeriels en tours, souhaitant instaurer un repos de s&u&, il faut ajouter qu’une telle disposition devra Cvidemment Ctre mise en place par les responsables des services d’urgence et qu’un manquement B pareille contrainte relbvera certainement du probleme de l’organisation et qu’h ce titre la responsabilite, du moins disciplinaire, du chef de service pourra Ctre recherchee. Par ailleurs, le nonrespect d’un acte reglementaire relatif a la securite peut entrainer des poursuites penales ?I I’encontre des responsables.

La responsabilit6ordinale Le principe

Prtkisions Dans le cas d’une faute averee d’un medecin hospitalier, celui-ci peut encourir une sanction disciplinaire hospital&e de nature a affecter sa cart-i&-e ou sa remuneration au sein de l’hopital. Bien que les enjeux soient de moindre importance a l’interieur du service hospitalier, la chaine hitrarchique peut &re sollicitee essentiellement pour les problemes d’organisation du service oh l’on recherchera toujours la responsabilite du chef de service. En mat&e de faute personnelle, elle sera imputee au praticien hospitalier fautif et si le fautif est un inteme, le praticien auquel il est rattache pow-a Ctre inquiete. Dans le cadre des gardes

La mise en jeu de la responsabilite disciplinaire d’un medecin resulte de l’infraction au code de dtontologie medicale (CDM, du 6 septembre 1995 paru au JO le 8 septembre 1995 [16]). Cette voie de recours, ne permettant pas d’obtenir de versement d’indemnit&, est utilisee par les patientes et leurs familles ou leurs conseils afin d’obtenir des sanctions disciplinaires a I’encontre du medecin (avertissement, bl&ne, interdiction d’exercer ou radiation du tableau de l’ordre). Les plaintes sont d6posQs aupres du conseil departemental de l’ordre des medecins qui les instruit et a obligation de les transmettre a la juridiction de premiere instance representee par le conseil regional de 1’Ordre. La

B. Ludes, S. Hauger

section disciplinaire du Conseil national de l’ordre des mklecins est la juridiction d’appel et il est meme possible de se pourvoir en cassation devant le Conseil d&at. II n’existe pas de d&i de prescription. Cette mise en cause devant les pairs n’est pas exclusive d’autres poursuites, puisque toute condamnation p&ale est notifif5e a 1’Ordre qui peut ajouter a cette premiere condamnation une sanction disciplinaire (cf. l’arr& du Conseil d&at du 30 janvier 1963 : recueil Lebon, p. 63), conformement a l’art. L. 459 code de la Sante publique [17]. Cette disposition est particulibrement importante dans la mesure ou la culpabilitk av&e d’un medecin est signif&%, et ce que celleci ait ou non un lien avec l’exercice de la profession m&kale. Au demeurant, nombre d’obligations issues du CDM sont par ailleurs sanctionnf5es civilement voire p&alement, comme le respect du secret medical (art. 4, 72 et 73 du CDM) ou l’obligation d’information (art. 35 du CDM), ou encore l’euthanasie (art. 20 du CDM). 11 est a noter que l’Ordre, a l’instar des juridictions civiles, ne peut pas se prononcer sur une affaire relevant d’une infraction penale, tant que celle-ci n’a pas fait l’objet d’une decision devenue d&initive au penal. L’obligation d’informer est souvent dictee par la deontologie. En service d’urgence, un aspect de ce devoir deontologique doit btre CvoquC : il s’agit de l’article 64 du CDM qui prescrit d’informer les confreres qui ont a prendre en charge le patient que l’on vient de traiter. La transmission des informations doit s’effectuer avec mesure nCanmoins : les don&es d’ordre purement medical du type ant&?dents, traitement suivi, constantes du patient doivent faire I’objet d’une large transmission - tout moyen peut Ctre envisage, Ccrit ou oral -, dans la

mesure oti ces notions sont indispensables au traitement du patient. Les informations plus personnelles, sans int&t pour la prise en charge, que le patient aura peut-ttre revtlees, doivent Ctre couvertes par le secret medical, car elles n’entrent pas dans le champ du secret partage. Le CDM fait obligation B tout medecin de constituer un dossier pour chaque patient. Le caractere urgent d’une intervention ne doit pas faire oublier ce devoir, d’autant que ce dossier pourra Ctre tres utile dans l’hypothese oB le patient chercherait B engager la responsabilite du mbdecin. Dans le cadre des regroupements de medecins assurant les urgences, la loi fait obligation a ces entites d’avoir un regulateur qui centralisera les informations collect& par les medecins intervenants.

publique, que par le ministre de la Sante publique et de la Population, le directeur departemental de la Sante ou le procureur de la Republique >>. Les Ctudiants en 3e cycle ne peuvent Ctre sanction&% disciplinairement que par le directeur general du centre hospitalier regional auquel ils sont rat&h&, apres consultation du responsable hit%-archique de l’inteme et avis d’un conseil de discipline ad hoc, lorsqu’une exclusion des fonctions est envisagte [19]. De plus, depuis mars 1999, une procedure Ccrite et contradictoire est indispensable pour prononcer un bl%me a l’encontre d’un inteme, procedure apparaissant Bgalement comme indispensable pour toute sanction plus severe.

Cas particuliers DeI’exerciceencliniqueprivt5e

Lasamhagements Le premier concerne les medecins exer9ant une mission de service public notamment les praticiens hospitaliers qui ne peuvent &tre traduits devant le conseil regional, au terme de l’art. L. 418 du code de la Sante publique, que par le ministre charge de la Sante publique, le directeur de la DDASS ou le procureur de la RCpublique [ 181. Ce privilege est tel qu’il ne concerne que les actes se rattachant a l’accomplissement d’un service public, ce qui exclut notamment les fautes detachables du service Cvoquees en mat&e de responsabilite administrative, tel qu’il en resulte de l’arret Wurch du Conseil d&at du 20 mai 1981. Cette mesure est la principale cause d’irrecevabilite des plaintes depose& devant le conseil de l’ordre. L’ article L. 418 du Code de la Sante publique stipule : (< Les medecins charges d’un service public et inscrits au tableau de 1’Ordre ne peuvent Ctre traduits devant le conseil regional, a l’occasion des actes de leur fonction

Un ttablissement hospitalier prive, comme une clinique, est dote de la personnalite morale, si bien qu‘il peut Ctre poursuivi devant les tribunaux de l’ordre judiciaire (civil et penal). Ainsi, a l’extreme, une infraction commise dans une clinique peut entrainer la condamnation non seulement du m&kin fautif, mais Cgalement de la clinique dans laquelle il exerce [20].

Desm6decins salaribs Les praticiens salark% sont soumis au droit du travail, qui est une ICgislation protectrice de l’employe, mais qui ne’anmoins encadre aussi le pronon& par l’employeur de sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’au licenciement. Outre les dispositions legales et reglementaires regissant la profession, le medecin salat% doit se conformer au reglement interieur de l’etablissement dans lequel il exerce. Par ailleurs une sanction disciplinaire n’est assurement pas exclusive

Responsabilitis du m&l&n urgentiste

de l’engagement des autres types de responsabilite. Toutefois, il a Cte etabli par la jurisprudence de la Cour de cassation qu’en mat&e de responsabilite civile, le contrat hospitalier conclu entre le malade et l’etablissement de soins prive exclut, en quelque sorte, l’existence d’un contrat medical entre ce m&me patient et le medecin salark? mis dans la situation de prepose dudit Ctablissement. La 1~ chambre civile de la Cour de cassation a doncdkharge le praticien saIariC de sa responsabilik?, attendu que le patient avait choisi tel Btablissement et non tel m&kin, mais que ce demier lui avait et& en somme, fourni par l’hapital prive (Cour de cassation, 1~ chambre civile, 4 juin 1991). Cette solution a et6 egalement consacree par la chambre criminelle, statuant en mat&e de responsabilid civile (Cour de cassation, chambre criminelle, 5 mars 1992). En principe, le patient consultant en urgence choisit tel ou tel Btablissement de soins et non pas le praticien, si bien que le m&kin salarie assurant les urgences dans une clinique privee verra rarement sa responsabilitk engagee dans la mesure air celle de l’etablissement sera preferentiellement recherchee.

Ducasparticulierdesintemes (et destisidents) Comme CvoquC plus haut, l’interne jouit d’un statut privilegie en mat&-e de responsabilitk disciplinaire, toutefois, sa situation au regard du droit civil, du droit administratif et du droit penal est identique a celIe de tout medecin. 11 est vrai neanmoins que son principal exercice, sauf le cas de remplacement et d’activite b&n?vole, se situe a l’hopital 03 il est un medecin encore en formation, si bien que sera recherchee la responsabilite du service ou du responsable de la formation de l’inteme fautif, plutot que sa

propre responsabilite. Exceptees les fautes impardonnables (attentatoires au bon sens notamment), il sera exceptionnellement exerce a l’encontre d’un inteme une action r&ursoire de l’administration. Quant aux fautes detachables du service commises par un interne, celui-ci est, par definition mCme, responsable personnellement de ses agissements. Pareillement, l’inteme est responsable penalement, m&me si une juridiction repressive sera en principe plus clemente avec un Ctudiant qu’avec un praticien chevronne.

Quelques chlffres Force est de constater que le nombre des affaires mettant en cause la responsabilite d’un medecin se multiplient. Le Conseil national de l’ordre des medecins a constate une augmentation de plus de 30 % des plaintes deposees devant les juridictions ordinales de premiere instance entre 1993 et 1998. Au plan judiciaire, les fautes le plus souvent denoncees sont les fautes techniques, les faux certificats, le defaut d’information et l’atteinte au secret medical. Au plan administratif, les fautes ne sont plus forcement recherchees du fait de l’instauration de la responsabilite sans faute. Le refus ou le defaut de soins, la mauvaise organisation d’un service, le refus de se deplacer et les fautes techniques sont souvent Cvoq&es a l’appui d’une demande d’indemnisation. D’un point de vue ordinal [21], les statistiques Ctablies pour 1998 font &at de 1 582 plaintes devant les conseils regionaux. Les plaignants, constitues pour moitie de particuliers et pour quart de medecins, denoncent majoritairement des problbmes de devoirs envers les malades, de confratemite, de deconsideration de la profession ou de certificat. La moitie

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environ des plaintes aboutissent B une relaxe ou sont irrecevables. Dix radiations ont Cte prononcees en 1998. Le Groupe d’assurances mutuelles medicales [22-271 fait &at de 2 166 declarations de sinistres pour dommages corporels en 1997 (un peu plus de 100 000 praticiens sociemires), alors que son rapport de 1993 comptabilisait 1508 declarations. Ces mf?mes rapports stipulent que la majorite des dossiers se regle a l’amiable (plus de la moitie). Relativement aux anesthesistes-r&nimateurs et aux urgentistes, sur presque 5 000 societakes, 202 affaires ont etd recensees en 1994 et 257 en 1997. Parmi ces dernieres, 28 seulement ont fait l’objet d’une procedure penale. 11 faut prtkiser que la majorite des dossiers concemait des litiges lies B l’anesthesie elle-mi?me, et 19 demandes uniquement Ctablissaient un probleme de reanimation (11) ou d’activite d’urgence (8). Les accidents les plus frequents concement la pose de catheter, les transfusions sanguines ou des erreurs de diagnostic. Comparativement, les 168 chirurgiens estheticiens societaires ont adresd 22 declarations de sin&es en 1996, les 50 000 gCnt?ralistes 344 et les 3 000 pediatres une trentaine... chiffres qui permettent de dire que l’on recherche fort peu souvent la responsabilite des medecins urgentistes, mais quand elle est engag&, cela suppose souvent qu’il s’agit d’une affaire d’importance...

Conclusion 11 demeure une difference fondamentale entre la medecine lib&ale et la medecine hospitalibre, ne serait-ce qu’au niveau de la competence juridictionnelle. Toutefois, le recent at-ret du Conseil d’ktat du 5 janvier 2000, confirmant l’arr& de la tour administrative d’appel de Paris du 26 mai

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1998, consacre la jurisprudence judiciaire en mat&e d’information du patient. Cela correspond-i1 a l’uniformisation des regles dans les deux ordres juridictionnels ? Quoi qu’il en soit, cet at-r& annonce sans doute une augmentation du contentieux. Ndanmoins et quel que soit le type d’exercice, le medecin conserve une position confortable, attendu qu’il est diffkile d’engager sa responsabilite devant les juridictions de l’ordre judiciaire et que l’hopital fait &ran a l’engagement direct de sa responsabilite lorsqu’il exerce dans le secteur public. Toutefois, meme si l’urgence vitale permet d’Ccarter nombre de ces regles rigides, la pratique des urgences relatives (fort fr6quentes) oblige l’urgentiste, comme tout medecin, a respecter ces mi2mes regles. n

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