Une proposition d’algorithme pour la prise en charge des douleurs neuropathiques périphériques

Une proposition d’algorithme pour la prise en charge des douleurs neuropathiques périphériques

Douleurs, 2006, 7, 5 284 ACTUALITÉS BRÈVES DE « DOULEURS » Brefs échos des congrès et des sociétés savantes, notes de lecture des revues spécialisée...

162KB Sizes 0 Downloads 131 Views

Douleurs, 2006, 7, 5

284

ACTUALITÉS BRÈVES DE « DOULEURS » Brefs échos des congrès et des sociétés savantes, notes de lecture des revues spécialisées à l’usage des cliniciens, cette rubrique est ouverte à tous. La revue Douleurs encourage tous ses lecteurs à lui faire parvenir des informations brèves issues de leurs lectures, de leurs rencontres, de leurs expériences, de leurs travaux, de leurs voyages ou de leurs navigations sur le web, à l’adresse suivante : [email protected] Une référence bibliographique pour ceux qui souhaitent en savoir plus, un court commentaire critique seront bienvenus.

À la recherche des craintes enfouies Les craintes des patients douloureux font l’objet de la moitié des articles du numéro d’août 2006 de la revue European Journal of Pain. Définie comme une appréhension inquiétante, la crainte peut revêtir plusieurs aspects : peur d’une maladie grave (ou nosophobie), anticipation d’une douleur liée aux soins, peur du mouvement (ou kinésiophobie), projection vers une évolution défavorable (ou catastrophisme)… Facteur de risque de chronicisation [1, 2] ou majorant le retentissement fonctionnel [3, 4], les craintes liées à la pérennisation douloureuse font l’objet d’outils spécifiques d’évaluation, en cours de traduction dans le monde entier [5]. Les auteurs de ces 5 articles soulignent tout l’intérêt de prendre en compte les craintes de nos patients, dans le cadre d’une approche cognitivo-comportementale, basée sur la dédramatisation de leur situation : correction des idées fausses, accompagnement dans la reprise d’activités, approche psychocorporelle de la kinésiophobie. La douleur persistante est inquiétante, la peur va majorer la douleur, la chroniciser du fait de l’installation d’un véritable cercle vicieux douleur/ crainte. N’oublions donc jamais d’interroger nos patients sur leurs représentations de la douleur : en effet un abord cognitif de leurs craintes est souvent la première étape de la prise en charge globale du patient douloureux chronique. ■

Les accès douloureux des patients cancéreux Breakthrough pain in cancer patients Mercadante, S, Arcuri, E. Pain clinical update, IASP, march 2006. Présents chez 2/3 des patients cancéreux, les accès douloureux sont insuffisamment reconnus, évalués et traités en pratique quotidienne. Ils durent en général moins de 30 minutes et sont d’intensité élevée. Alors que le traitement de la douleur cancéreuse bénéficie du développement des opioïdes forts à libération prolongée, le recours systématique aux doses de secours reste plus marginal. Pourtant les opioïdes à libération immédiate existent bel et bien, sous plusieurs formes galéniques. Leur délai d’action dépend de cette galénique, plus court (10 minutes) pour le citrate de fentanyl transmuqueux, intermédiaire pour le sulfate de morphine buvable (20 à 30 minutes) et plus long pour les formes orales de sulfate de morphine ou d’oxycodone (30 à 45 minutes). La voie transmuqueuse semble donc particulièrement adaptée à la prise en charge des accès douloureux du cancer, surtout pour les molécules lipophiles telles que le fentanyl. Les voies nasale et sublinguale, en cours d’étude, sont prometteuses… ■ F. Clère

RÉFÉRENCES 1. Vancleef LMG, Peters ML, Roelofs J, Asmundson GJG. Do fundamental fears differentially contribute to pain-related fear and pain catastrophizing? An evaluation of the sensitivity index. Eur J Pain 2006;10:527-36. 2. Neubauer E, Junge A, Pirron P, Seemann H, Schiltenwolf M. HKF-R 10 – Screening for predicting chronicity in acute low back pain (LBP): A prospective clinical trial. Eur J Pain 2006;10:559-66. 3. Gheldof ELM, Vinck J, Van den Bussche E, Vlaeyen JWS, Hidding A, Crombez G. Pain and pain-related fear are associated with functional and social disability in an occupational setting: evidence of mediation by painrelated fear. Eur J Pain 2006;10:513-25. 4. Boersma K, Linton SJ. Expectancy, fear and pain in the prediction of chronic pain and disability: a prospective analysis. Eur J Pain 2006;10:551-7. 5. Van Wijk AJ, Hoogstraten J. Dutch translation of the Fear of Pain Questionnaire: Factor structure, reliability and validity. Eur J Pain 2006;10:479-86.

F. Clère

Une proposition d’algorithme pour la prise en charge des douleurs neuropathiques périphériques Jugeant nécessaire, 4 ans après la parution de l’ouvrage publié par l’IASP, de refaire un état des lieux des études cliniques concernant le traitement des douleurs neuropathiques (DN), les auteurs s’appuient sur une revue de la littérature pour proposer un algorithme. 105 essais contrôlés, randomisés en double aveugle ont pu être analysés, 39 concernaient les antiépileptiques, 26 les antidépresseurs,

Douleurs, 2006, 7, 5

285

11 les opioïdes, 7 les anti-NMDA, 9 la mexiletine, 4 la lidocaïne en tissugel, 3 les cannabinoïdes, 11 la capsaïcine et 1 un antagoniste de la glycine. Aucunes conclusions n’ont pu être tirées pour le traitement des DN d’origine centrale, faute d’études suffisantes. Les auteurs ont donc axé leur réflexion sur la prise en charge des DN périphériques : polyneuropathies douloureuses dont la polyneuropathie diabétique, douleurs post-zostériennes, douleur par lésion d’un nerf périphérique. En termes d’effet antalgique, les antidépresseurs tricycliques (ADT) arrivent en tête, suivis des opioïdes, du tramadol puis des antiépileptiques (AE) possédant en France une AMM spécifique (gabapentine, prégabaline). En revanche si l’efficacité du produit est basée à la fois sur l’effet antalgique et sur la qualité de vie (avec prise en compte des effets secondaires), cet ordre s’avère inversé : gabapentine/prégabaline > tramadol > opioïdes > ADT. Un algorithme à 3 niveaux est proposé en fin d’article : – en cas de douleurs post-zostériennes ou de territoire douloureux limité : utiliser en priorité la lidocaïne en tissugel (disponible en France en ATU : NEURODOL® tissugel) ; – dans les autres cas utiliser en première intention les ADT et/ou les AE (gabapentine ou prégabaline) en fonction de leurs contre-indications respectives et de leur tolérance ; – en seconde ligne l’utilisation du tramadol ou de l’oxycodone est recommandée. Bien entendu les auteurs conviennent du fait que ces recommandations méritent d’être approfondies par la poursuite d’études ; ils sont également convaincus de l’intérêt d’une approche globale, où les moyens non pharmacologiques trouvent également leur place. ■

RÉFÉRENCES 1. Finnerup NB, Otto M, McQuay HJ, Jensen TS, Sindrup SH. Algorithm for neuropathic pain treatment: an evidence based proposal. Pain 2005;118: 289-305. 2. Hansson PT, Fields HL, Hill RG, Marchettini P. Neuropathic pain: pathophysiology and treatment. Seattle: IASP Press 2001.

F. Clère

22e congrès national de la SFAP La Société Française d’Accompagnement et de soins Palliatifs (S.F.A.P.) a organisé son 22e congrès annuel au Corum de Montpellier les 15, 16 et 17 juin 2006. « Accompagnement, soins palliatifs, exigences collectives : quelle place pour la personne ? » : c’est à cette question qu’ont tenté de répondre les orateurs de la séance plénière du 16 juin. C’est

autour de la notion d’altérité qu’un philosophe, un psychanalyste, un anthropologue et un chercheur à l’INSERM ont exposé leur argumentation puis répondu à la salle, sous la houlette de Bernard Devallois (actuel président de la SFAP) et de Benoît Burucoa. La journée pré-congrès a été consacrée à la place des équipes mobiles de soins palliatifs (E.M.S.P.) dans la prise en charge globale des patients atteints de maladies graves ou incurables : lien avec les réseaux, avec les lits identifiés de soins palliatifs (L.I.S.P.), richesses et difficultés liées à la pratique d’une équipe transversale ont pu être évoqués. Bernard Wary, dont l’équipe est à l’origine de l’échelle DOLOPLUS 2, a notamment pu y exposer son septicisme quant au développement des L.I.S.P., « un concept noble, une politique floue » (sic). Régis Aubry, ancien président de la société savante, a présenté un projet de cahier des charges des EMSP où le profil des membres fait l’objet de recommandations. Si une formation universitaire (D.I.U.) en soins palliatifs est requise et des formations à l’éthique et/ou à la coordination d’équipe sont souhaitables, aucune mention n’est pour le moment prévue sur l’intérêt spécifique d’un diplôme qualifiant en prise en charge de la douleur (ni D.U., ni capacité, ni D.E.S.C.). Pourtant la thématique douleur a été, bien légitimement, largement abordée au cours du congrès, et ce dès la soirée grand public dont on retiendra les exposés toujours aussi passionnés de Marie de Hennezel et du député Jean Léonetti, rapporteur de la loi qui porte son nom. Sur l’ensemble du congrès, la prise en charge de la douleur a fait l’objet de : – un déjeuner débat autour des spécificités dans la prise en charge de la douleur chez les sujets âgés fragilisés ; – une intervention en session atelier (programme qualité douleur dans un réseau de soins palliatifs à domicile) ; – une matinée thématique douleur, en collaboration avec la S.F.E.T.D., marquée par 6 interventions : prévention de la douleur induite, analgésie interventionnelle, évaluation chez le patient peu communicant, douleur des métastases osseuses, recherche de sens dans la douleur cancéreuse rebelle, utilisation de la musicothérapie. – 11 posters : 4 sur le thème de la personne âgée et/ou peu communicante, 1 décrivant la douleur axillaire du cancer du sein et 6 consacrés au développement de stratégies thérapeutiques (2 sur l’hypnose, 1 sur l’acupuncture, 1 sur le toucher-massage, 1 sur le MEOPA et 1 sur la morphinothérapie intrathécale dans les cancers pelviens). Les actes du congrès sont téléchargeables au format PDF sur le site internet de la S.F.A.P. : http://www.sfap.org/content/ view/120/44/ ■ F. Clère