Anatomie chirurgicale des tumeurs de moelle épinière

Anatomie chirurgicale des tumeurs de moelle épinière

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ARTICLE IN PRESS Neurochirurgie xxx (2015) xxx–xxx

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Rapport SNCLF 2012 : Les tumeurs intramédullaires

Anatomie chirurgicale des tumeurs de moelle épinière Surgical anatomy of spinal cord tumors J. Peltier ∗ , L. Chenin , P. Hannequin , C. Page , É. Havet , P. Foulon , D. Le Gars Service de neurochirurgie, laboratoire d’anatomie et d’organogenèse, faculté de médecine, université de Picardie-Jules-Verne, 3, rue des Louvels, 80036 Amiens cedex 1, France

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : ´ Rec¸u le 20 fevrier 2015 Rec¸u sous la forme révisée le 26 avril 2015 Accepté le 23 mai 2015 Disponible sur Internet le xxx

a b s t r a c t In this article, we respectively describe the morphology of the spinal cord, spinal meningeal layers, main fiber tracts, and both arterial and venous distribution in order to explain signs of spinal cord compression. We will then describe a surgical technique for spinal cord tumor removal. © 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Anatomy Meningeal layers Denticulate ligament Spinal supply Spinal fiber tracts Surgical technique

r é s u m é Mots clés : Anatomie Méninges Ligament dentelé Vascularisation médullaire Faisceaux médullaires Technique chirurgicale

Nous décrirons la morphologie de la moelle épinière, des méninges spinales, du ligament dentelé, des principaux faisceaux médullaires et enfin la vascularisation artérielle et veineuse afin de comprendre la symptomatologie et les troubles occasionnés par les tumeurs intramédullaires responsables de tableau de compression de la moelle. Nous aborderons enfin de fac¸on succincte la technique chirurgicale pour ces tumeurs de moelle. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

1. Introduction

2. Les méninges rachidiennes

Nous étudierons rapidement dans un premier temps l’environnement médullaire et notamment le ligament dentelé, rapport latéral important notamment pour l’exposition des cordons médullaires puis nous rappellerons les principaux faisceaux médullaires de substance blanche ascendants et descendants. Nous évoquerons la vascularisation artérielle et veineuse de la moelle épinière en insistant sur les variations locales. Enfin le dernier chapitre sera consacré à la technique chirurgicale d’exérèse de ces tumeurs de moelle.

Le seul rapport des méninges rachidiennes avec la moelle spinale se fait par l’intermédiaire du ligament dentelé et par un discret septum dorsal que l’on retrouve de fac¸on très prononcée chez les chats et chiens [1–3]. Lorsque le ligament dentelé n’est pas adhérent à la dure mère, son bord libre est recouvert par une couche de cellules leptoméningées. Au niveau de la moelle thoracique, le septum dorsal apparaît fenêtré. Sur la face dorsale de la moelle épinière, une fois la dure mère et l’arachnoïde retirées, il existe une couche leptoméningée intermédiaire qui consiste en une fine couche de cellules très fenêtrées latéralement pour former des trabéculations d’où s’échappent les racines dorsales [4]. Enfin la couche piale est une couche continue mais non uniforme avec de nombreux petits puits. Une fine couche de collagène sous-piale sépare la pie mère du

∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J. Peltier). http://dx.doi.org/10.1016/j.neuchi.2015.05.003 0028-3770/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Peltier J, et al. Anatomie chirurgicale des tumeurs de moelle épinière. Neurochirurgie (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.neuchi.2015.05.003

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tissu neural. La pie mère se réfléchit à l’extérieur de la moelle pour englober les vaisseaux médullaires au moment où ils traversent l’espace sous-arachnoidien [4,5]. Sur la face ventrale de la moelle épinière, une couche de leptoméninge intermédiaire entoure l’artère spinale antérieure. Il n’existe aucun septum ventral à chaque niveau médullaire étudié. Cette couche de leptoméninge sur la face interne de l’arachnoïde ventrale est moins substantielle que celle vue dorsalement [4]. Les fénestrations des leptoméninges rachidiennes sont apparemment expliquées par la position érigée de l’homme et l’adaptation aux différents changements de pression lors des changements de posture. Elles permettent aussi la fixation et la suspension des éléments vasculaires et nerveux [6]. 3. Le ligament dentelé Le ligament dentelé amarre la pie-mère par son bord interne et s’attache à la face interne de la dure-mère rachidienne par les sommets de ses dentelures (Fig. 1) [5,7]. Il se constitue d’une paire de 20 à 21 extensions constituées d’arachnoïde et de pie-mère cerclant une attache collagénique de forme triangulaire à base médiale et à sommet latéral. Il a un rôle topographique séparant les racines ventrales des racines dorsales. La première attache se place entre le segment V4 intracrânien de l’artère vertébrale en avant et le nerf hypoglosse XII en arrière [8]. Au niveau cervical, entre les myélomères C1 et C5, il précroise la racine spinale du nerf accessoire XI qui chemine entre ce dernier et les racines dorsales des 5 premiers nerfs rachidiens cervicaux. L’extrémité de ces digitations comprend en fait 2 apex qui mesurent 1 mm de longueur ancrés latéralement qui sont robustes et très pro-éminents dans la région cervicale et dans la région thoracique haute puis plus discrets en descendant vers le pôle caudal (Fig. 1). L’ultime digitation sépare la première racine lombaire de la dernière douzième thoracique avec une fusion de la pie mère de la portion inférieure du ligament à l’intérieur du filum terminale [9].

Fig. 1. Vue postérieure de la moelle épinière. 1 = veine spinale postérieure ; 2 = ligament dentelé ; 3 = dure mère ; 4 = cône terminal ; 5 = racines de la queue de cheval. Posterior view of the spinal cord. 1 = posterior spinal vein; 2 = denticulate ligament; 3 = dura mater; 4 = conus terminalis; 5 = cauda equina nerve roots.

4. Les principaux faisceaux médullaires Le faisceau pyramidal croisé ou tractus cortico-spinal croisé (80 à 85 % des fibres) se situe grossièrement en arrière du plan du ligament dentelé dans le cordon ou funiculus latéral. Le tractus cortico-spinal direct ou faisceau pyramidal direct se place au fond du sillon ventral de la moelle épinière. Ces 2 faisceaux atteignent les motoneurones alpha organisés en 4 colonnes de substance grise de la couche IX de Rexed placée à l’extrémité de la corne ventrale médullaire d’allure trapue et festonnée [10]. Ces colonnes ont une somatotopie motrice bien précise. Une compression médullaire tumorale antérieure s’exprimera avant tout par une atteinte des voies motrices. Dans le segment ventrolatéral de la moelle épinière se placent les faisceaux spinothalamiques ventral et dorsal véhiculant respectivement les sensations thermiques, douloureuses, tactiles diffuses puis les sensations douloureuses dont la localisation est précise [1,10]. Ainsi, une tumeur intramédullaire latérale se révèlera par une symptomatologie essentiellement sensitive. Enfin les cordons postérieurs sont constitués par le faisceau cunéiforme ou faisceau de Burdach transportant la sensibilité épicritique du membre supérieur et du thorax pour sa partie la plus médiale, et le faisceau gracile ou faisceau de Goll véhiculant la sensibilité épicritique de l’abdomen et du membre inférieur pour son extrémité la plus médiale [10]. Une compression tumorale postérieure entraînera un tableau proprioceptif ou syndrome cordonal postérieur.

5. Vascularisation de la moelle La vascularisation médullaire est non pas segmentaire mais territoriale [7,11]. L’axe médullaire artériel constitué longitudinalement par 3 artères principales : au niveau de la face ventrale, il existe l’artère spinale antérieure ou ventrale qui émerge de la portion intracrânienne V4 de l’artère vertébrale tout comme les deux artères spinales postérieures ou dorsales. L’artère spinale antérieure est tortueuse et parfois double : ceci est parfaitement expliqué par l’embryologie : elle apparaît au stade 16–18 mm (stade 5 de Padget) puis pénètre dans la dure-mère dans l’aisselle ou l’épaule de la racine et suit les radicelles contrairement aux veines avalvulées qui perforent la dure mère entre 2 racines (et donc ne la suivent pas) [12]. Elle n’est jamais située dans le sillon médullaire antérieur (contrairement à la veine) sauf s’il existe une tumeur intra-médullaire volumineuse qui rend la moelle turgescente et peut alors déplisser le sillon médullaire antérieur. L’artère spinale ventrale se place à la superficie du sillon ventral ou fissure médiane antérieure et présente des irrégularités de calibre tout au long de son trajet ; elle se dilatera au niveau du renflement cervical et du renflement lombaire [13–16]. Cette artère peut parfois se dédoubler et son diamètre est de 200 à 500 ␮m [16,17]. Le système spinal ventral a pour traits dominants l’inégalité des afférences et la variabilité du débit artériel dans les différentes régions. Ce réseau est parfois interrompu, véritable discontinuité anatomique. Le système artériel spinal dorsal est alimenté par une vingtaine d’artères grêles également réparties qui sont réunies par les deux artères spinales dorsales, échangeant ainsi de nombreuses anastomoses (Fig. 2) [13,14]. Ces artères spinales postérieures sont des artères piales nées de l’artère vertébrale sur son segment intracranien V4 ou parfois de l’artère cérébelleuse postéro-inférieure PICA (suivant le niveau de naissance de la PICA le long de l’artère vertébrale, il est possible de prévoir l’origine de l’artère spinale postérieure) [12]. Le renflement cervical bénéficie d’un apport artériel riche ; l’artère cervicale profonde branche du tronc cervico-intercostal, lui-même issu de l’artère subclavière gagne l’axe spinal antérieur. Il en est de même pour l’artère du renflement cervical ou artère de Lazorthes correspondant le plus souvent à la première

Pour citer cet article : Peltier J, et al. Anatomie chirurgicale des tumeurs de moelle épinière. Neurochirurgie (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.neuchi.2015.05.003

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Fig. 2. Vue postérieure d’une moelle injectée par du latex. 1 = dure mère ; 2 = racine dorsale ; 3 = ligament dentelé ; 4 = artère spinale dorsale droite ; 5 = anastomose artérielle postérieure ; 6 = veine dorsale spinale. Posterior view of a spinal cord injected by latex. 1 = dura mater; 2 = dorsal root; 3 = denticulate ligament; 4 right posterior spinal artery; 5 = dorsal arterial anastomosis; 6 = dorsal spinal vein.

artère intercostale postérieure, originaire de l’aorte thoracique descendante. La portion du territoire étendu entre C4 et Th4 est fonctionnellement active car la moelle est à ce niveau richement irriguée même en cas de chute de débit [18,19]. L’étage thoracique est doté d’une vascularisation très précaire ; en effet, seule l’artère radiculo-médullaire gagne l’axe spinal antérieur. Le réseau thoracique moyen intercalé entre les deux renflements est toujours grêle et c’est à ce niveau que le régime circulatoire est le plus bas [15,16]. Enfin, la trophicité du renflement lombaire fait appel à une artère dite artère d’Adamkiewicz (arteria radiculomedullaris magna) ou artère du renflement lombaire qui naît dans 77 % des cas à gauche et entre Th9 et L2 mais dans 44 % des cas entre Th9 et Th11 (Fig. 3 et 4) [20]. À son origine, son diamètre est 1,89 mm et cette artère va croiser le complexe ganglion rachidien-racine ventrale. Après avoir percé la dure-mère, cette dernière présente un diamètre qui se rétrécit chemin faisant puis décrit une crosse à sa naissance et se termine en épingle à cheveux [20]. Elle constitue la seule afférence dans près de 50 % des cas mais peut s’accompagner d’une seconde artère qui la renforce lorsque cette dernière est en variété basse. Ce second vaisseau est toujours plus grêle que l’artère d’Adamkiewicz. Enfin, une troisième afférence peut être aussi rencontrée. C’est au niveau du renflement lombaire que le régime circulatoire est le plus élevé. Mais ce territoire artériel, hautement fonctionnel, est aussi le plus menacé lors des désordres circulatoires. Sa vulnérabilité tient à deux raisons essentielles : son organisation qui la rend entièrement tributaire d’une afférence primordiale ; sa situation en position rostrale éminemment critique lorsqu’une réduction du débit artériel affecte l’ensemble du système vasculaire [15,16]. En anatomie comparée, chez le chien, il existe d’autres artères à destinée médullaires qui naissent au-dessous de l’artère lombaire qui donne l’artère du renflement

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Fig. 3. Vue antérieure d’une moelle injectée au latex. 1 = artère d’Adamkiewicz ; 2 = artère spinale antérieure ; 3 = racines ventrales ; 4 = dure mère ; 5 = ligament dentelé. Anterior view of a spinal cord injected by latex. 1 = artery of Adamkiewicz; 2 = anterior spinal artery; 3 = ventral roots; 4 = dura mater; 5 = denticulate ligament.

Fig. 4. Vue antérieure du cône terminal montrant le pédicule vasculaire radiculomédullaire ventral. 1 = cône terminal ; 2 = racines de la queue de cheval ; 3 = dure mère ; 4 = artère radiculomédullaire ventrale ; 5 = veine radiculomédullaire ventrale. Anterior view of the conus medullaris showing ventral radiculomedullary pedicle. 1 = conus medullaris; 2 = cauda equina nerve roots; 3 = dura mater; 4 = ventral radiculomedullary artery; 5 = ventral radiculomedullary vein.

Pour citer cet article : Peltier J, et al. Anatomie chirurgicale des tumeurs de moelle épinière. Neurochirurgie (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.neuchi.2015.05.003

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lombaire (artères sacrées moyennes et artères sacrées latérales) [18]. Le cône terminal est pourvu d’une arcade anastomotique ou artère du cône terminal ou anse anastomotique médullaire [7,18,21]. Au niveau de cette anse viennent aboutir des artères radiculaires sacrées dont l’artère de Desproges et Gotteron [18]. Le filum terminale est pourvu d’une artère, l’artère du filum terminale qui naît de la terminaison de l’axe spinale ventral, soit par trifurcation, soit de la partie proximale d’une des 2 branches de l’anse anastomotique du cône. Son calibre va diminuer rapidement. Aucune vascularisation artérielle n’est notée à la face dorsale du filum terminale. La veine satellite chemine en avant du filum terminale, mais en arrière de l’artère, comme au niveau médullaire [14]. Les artères radiculomédullaires et radiculopiales plongent à travers la dure-mère de fac¸on perpendiculaire, parcourent les nerfs rachidiens et rejoignent les 3 axes artériels longitudinaux précédents en décrivant une courbe à concavité inférieure (Fig. 4). Ces artères sont plus nombreuses à la face dorsale de la moelle (11 à 16) qu’à la face ventrale (2 à 14) et plus fréquentes à droite qu’à gauche sur la face ventrale [16,17,19]. Les artères radiculopiales se terminent dans les anastomoses longitudinales [15]. Les zones critiques de l’irrigation médullaire lors de compressions médullaires tumorales se rencontrent avec prédilection sur les renflements, alors qu’elles sont beaucoup plus rares dans la région thoracique moyenne et tout à fait exceptionnelles au niveau de la moelle épinière cervicale supérieure [15]. La vascularisation veineuse n’est pas superposable à la trophicité artérielle. Le système médullaire veineux est un courant à basse pression, agencé par des veines spinales ventrales et dorsales de 600 à 700 ␮m de diamètre qui peuvent parfois se dédoubler. Il s’agit d’un réseau avalvulé qui traverse la pachyméninge en biseau ou en chicane. La veine spinale antérieure est située dans le sillon antérieur sous l’artère et donc dans l’espace sous-pial contrairement à la veine spinale postérieure qui est située dans les espaces sous-arachnoidiens. Lors d’une compression médullaire tumorale, il existera une hyperpression dans l’espace épidural qui gênera le retour veineux et occasionnera dès lors une myélomalacie d’origine veineuse [2,22,23].

Fig. 5. Vue opératoire d’un épendymome cervical. Premier temps opératoire. Notez la turgescence de la moelle sans affleurement tumoral sous pial. 1 = sillon spinal postérieur ; 2 = racines postérieures ; 3 = veine spinale postérieure. Operative view of a cervical ependymoma. First step. Note the bulging tumoral spinal cord without subpial tumoral. 1 = posterior medullary sulcus; 2 = posterior rootlets; 3 = posterior medullary vein.

On peut alors noter soit une hypervascularisation péritumorale soit au contraire une raréfaction vasculaire [24–26]. Le fort grossissement permet de distinguer le sillon médullaire dorsal souvent parcouru par une grosse veine tortueuse. Les funiculi postérieurs s’ils sont tumoraux peuvent être difficiles à visualiser si bien que le chirurgien peut se reporter sur l’émergence des radicelles postérieures [24–26]. L’usage de la microspatule est recommandé pour éviter une électrocoagulation de vaisseaux à la bipolaire. Seules les anastomoses vasculaires entre les cordons postérieures sont sacrifiées. Ces funiculi dorsaux sont écartés de fac¸on précautionneuse permettant l’exposition de la portion solide tumorale (Fig. 6 et 7). Les kystes polaires sus- et sous-jacents peuvent être effondrés et permettent la vidange d’un liquide souvent xantochromique. Un éventuel prélèvement de leur contenu liquidien peut s’avérer intéressant, notamment chez les patients suspects de métastases intramédullaires [26]. Ils confirment souvent les extrémités de la résection. L’ouverture de la pie mère et la suspension de cette dernière permet non seulement l’exposition de l’axe blanc de la moelle

6. Bases anatomiques intradurales de la chirurgie des tumeurs de moelle épinière Dans ce chapitre ne seront pas abordés l’installation opératoire du malade, les temps chirurgicaux de dissection musculoaponévrotiques et extraduraux. Nous nous consacrerons uniquement au temps intradural qui se réalise sous microscope opératoire. Supposée avoir été exposée au moins 2 niveaux au-dessus et en dessous de la lésion intramédullaire, la dure mère est suspendue de part et d’autre après une ouverture médiane au bistouri lame 11 ou par écartement des deux berges aux pinces de De Bakey [24–26]. L’espace épidural doit être exsangue et colmaté par des feuilles de surgical ou instillation de FlosealR dans les gouttières épidurales pour tamponner un éventuel saignement qui contaminerait le temps intradural. Les instruments nécessaires sont des microspatules, microcotons, irrigation régulière au sérum physiologique tiède à 37 ◦ C, microaspiration. L’ouverture de l’arachnoïde est précautionneuse. Le terme de myélotomie est en fait inapproprié car la moelle épinière n’est pas incisée ; on procède à un écartement de ses cordons postérieurs. L’usage du laser à ce niveau est déconseillée [26]. Cette face dorsale de la moelle épinière apparaît enfin le plus souvent tendue, de gros calibre, déplissée (Fig. 5) et on peut deviner quelquefois directement un aspect grisâtre sous-pial tumoral « sans manteau cortical médullaire » qui facilitera la voie d’abord.

Fig. 6. Vue opératoire d’un épendymome cervical. Deuxième temps. Suspension durale et ouverture du plan pial. Découverte de la tumeur violacée. 1 = suspension de la dure mère ; 2 = suspension piale ; 3 = tissu tumoral. Operative view of a cervical ependymoma. Second step. Dural anchorage and pial opening. Note the purple aspect of tumoral tissue. 1 = dural suspension; 2 = pial suspension; 3 = tumoral tissue.

Pour citer cet article : Peltier J, et al. Anatomie chirurgicale des tumeurs de moelle épinière. Neurochirurgie (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.neuchi.2015.05.003

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vasculaire connecté en profondeur à l’axe spinal artériel antérieur afin d’éviter tout sacrifice de ce dernier sur une ultime électrocoagulation [24–26]. Une suspension piale après section de 2 à 3 digitations de ligament dentelé permettent de luxer délicatement la moelle permettant une exposition du funiculus latéral (Fig. 8). Une myélotomie latérale dans une zone piale avasculaire peut être ainsi proposée si la tumeur affleure les bords latéraux de la moelle. Le prix à payer sera une anesthésie thermoalgique controlatérale dans les suites post-opératoires. Enfin à l’heure de la fermeture en cas d’exérèse partielle ou de biopsie, une duroplastie avec du fascia thoracolombaire du lattissimus dorsi pourra être proposée [24–26]. 7. Conclusion

Fig. 7. Vue opératoire d’un épendymome cervical. Dernièr temps. Dissection de l’intégralité de la tumeur intramédullaire. Operative view of a cervical ependymoma. Last step. Dissection of the whole tumoral mass between cottonoids.

et de la tumeur mais empêche surtout les microtraumatismes répétés dus à la dissection. La recherche d’une différence de couleur est cruciale tout comme celle d’un plan de clivage avec la microspatule. L’usage du microbistouri ultrasonique type CUSAR peut être recommandé après avoir conservé des fragments tumoraux pour l’analyse anatomo-pathologique. Toute présence d’hématome intratumoral ou de kystes satellites polaires facilitera la dissection. L’absence de plan de clivage d’une tumeur infiltrante et ou maligne peut encourager à interrompre l’exérèse pour ne pas occasionner de catastrophe fonctionnelle. De la même fac¸on, la prudence doit être de mise en fin d’intervention sur un éventuel pédicule

Fig. 8. Vue postérieure de la moelle épinière après suspension piale et exposition du funiculus latéral. 1 = dure mère ; 2 = veine médullaire postérieure ; 3 = fenêtre entre deux racines postérieures après section du ligament dentelé ; 4 = cordon latéral ; 5 = foramen intervertébral. Posterior view of the spinal cord after pial suspension after exposure of the funiculus lateralis. 1 = dura mater; 2 = posterior medullary vein; 3 = window between two rootlets after section of denticulate ligament; 4 = funiculus lateralis; 5 = intervertebral foramen.

Ces rappels anatomiques élémentaires soulignent essentiellement la fragilité de l’étage thoracique autant sur le plan de la morphologie canalaire que sur le plan vasculaire. La connaissance de l’anatomie des sillons de la moelle et du ligament dentelé permette de mieux envisager les possibles myélotomies pour accéder aux tumeurs intramédullaires. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Rouvière H, Delmas A. Moelle spinale : configuration extérieure et intérieure. In: Rouvière H, Delmas A, editors. Anatomie humaine : descriptive, topographique et fonctionnelle, Vol. 4, 15th ed. Paris: Masson; 2002. p. 6–18. [2] Louis R, Ouiminga RM, Oboubou D. Le système azygos ou système veineux anastomotique vertébro-pariétal. Bull Ass Anat 1976;60:391–7. [3] Andres KH. Uber die Feinstruktur der Arachnoidea und Dura mater von Mammalia. Z Zellforsch Mikrosk Anat 1967;79:272–95. [4] Nicholas DS, Weller RO. The fine anatomy of the human spinal meninges: a light and scanning electron microscopy study. J Neurosurg 1988;69:276–82. [5] Roland J. Les méninges. In: Bossy J, editor. Neuroanatomie. Paris: SpringerVerlag; 1990. p. 325–34. [6] Arutiunov AI, Baron MA, Majorova NA. The role of mechanical factors in the pathogenesis of short-term and prolonged spasm of cerebral arteries. J Neurosurg 1974;40:459–72. [7] Tillaux P. De la moelle épinière et de ses enveloppes (chapitre III). In: Tillaux P, editor. Traité d’anatomie topographique avec applications à la chirurgie. 8th ed. Paris: Asselin et Houzeau; 1985. p. 379–95. [8] Hollinshead WH. Anatomy for surgeons, vol 3. Philadelphia: Harper & Row; 1982. [9] Tubbs RS, Salter G, Grabb PA, Jerry Oakes W. The denticulate ligament: anatomy and functional significance. J Neurosurg (Spine 2) 2001;94:271–5. [10] Rexed B. The cytoarchitectonic organization of the spinal cord in the cat. J Comp Neurol 1952;96:415–95. [11] Tanon L (Thèse, Paris no 98) Les artères de la moelle dorso-lombaire. Vigot Editeur; 1908. [12] Lasjaunias P, Bereinstein A, Ter Brugge KG. Surgical neuroangiography. Clinical vascular anatomy and variations, vol 1, 2e édition Berlin Heidelberg New York: Springer-Verlag; 2001. [13] Djinjian M, Ribeiro A, Ortega E, Gaston A, Poirier J. The normal vascularization of the intradural filum terminale in man. Surg Radiol Anat 1988;10:201–9. [14] Djindjian R. Angiography of the spinal cord. Surg Neurol 1974;2:179–85. [15] Corbin JL. Artères de la moelle et pathologie ischémique médullaire. Presse Med 1961;69:1271–344. [16] Thron AK. Vascular anatomy of the spinal cord: neurological investigations and clinical syndromes. Wien: Springer Verlag; 1988. p. 1–112. [17] Brassier G, Destrieux C, Mercier P, Velut S. Anatomie de la moelle épinière. Neurochirurgie 1994;40:11–8. [18] Lazorthes G, Gouaze A, Bastide G, Soutoul JH, Zadeh O, Santini JJ. La vascularisation artérielle du renflement lombaire : étude des variations et des suppléances. Rev Neurol (Paris) 1966;114:109–22. [19] Lazorthes G, Gouaze A, Djindjian R. Vascularisation et circulation de la moelle épinière. Anatomie, physiologie, angiographie. Paris: Masson et Cie; 1973. [20] Alleyne CH, Cawley M, Shengelaia GG, Barrow DL. Microsurgical anatomy of the artery of Adamkiewicz and its segmental artery. J Neurosurg 1998;89:791–995. [21] Guerin J. Moelle épinière, anatomie clinique, neuro-anatomie. Paris: Springer Verlag; 1990. p. 113–26.

Pour citer cet article : Peltier J, et al. Anatomie chirurgicale des tumeurs de moelle épinière. Neurochirurgie (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.neuchi.2015.05.003

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Pour citer cet article : Peltier J, et al. Anatomie chirurgicale des tumeurs de moelle épinière. Neurochirurgie (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.neuchi.2015.05.003