Cas clinique à tendance diagnostique n°1

Cas clinique à tendance diagnostique n°1

Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2013) 5, 3-4 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Cas clinique à tendance diagnostique n°1 A...

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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2013) 5, 3-4

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

Cas clinique à tendance diagnostique n°1 A. Xhaard1, P. Ribaud1, 2* a b

Service Hématologie-Greffe, Hôpital Saint-Louis, APHP, Paris, France Université Paris-Diderot, Paris, France

Observation

Antécédents 8n diaJnostic de leucéPie aiJue l\PpKoblastiTue est porté Àn octobre 2002. Pendant la période de neutropénie chimio-induite, le patient présente une pneumopathie fébrile. Le scanner thoracique montre plusieurs macronodules bilatéraux. L’enquête microbiologique est négative. Un diagnostic d’aspergillose invasive (AI) possible est porté et le patient est traité par voriconazole qui permet d’obtenir une réponse complète.

Histoire de la maladie Une allogreffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH) est réalisée le 13 mars 2003 (J0) à partir d’un donneur de la fratrie. Le voriconazole est poursuivi depuis l’épisode précédent. Le patient sort d’aplasie (PN > 500) à J18 et développe à partir de J27 une réaction du greffon contre l’hôte (GVH) cutanée et hépatique, traitée par 2 mg/kg/j de méthylprednisolone (MP), dont la posologie sera ensuite diminuée progressivement. Le patient sort du service à J3. Un nouvel épisode de GVH survient à J134 justiÀant une réaugmentation de la MP. Finalement, la GVH semble s’amender et la MP est diminuée jusqu’à 24 mg/j.

Motif d’hospitalisation Le 29/09/2003 (J200), le patient consulte car il présente depuis quelques jours des nodules cutanés inÁammatoires

*

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (P. Ribaud).

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A. Xhaard, P. Ribaud

Examen clinique Le patient décrit une asthénie depuis 15 jours. Il est apyrétique. Il présente une dizaine de nodules cutanés nécrotiques disséminés sur le corps. Le reste de l’examen est normal. La NFS est normale (en particulier pas de neutropénie). Plusieurs antigénémies aspergillaires (Platelia® Aspergillus, BioRad ®) sont positives. L’examen Figure 1. Scanner pulmonaire direct de la biopsie montrant un nodule du lobe inférieur cutanée montre la droit avec halo et contact pleural. présence de filaments mycéliens septés. La culture est positive à Aspergillus ustus. L’examen anatomopathologique montre un tissu nécrosé. Le scanner thoracique montre un nodule du lobe inférieur droit avec halo et contact pleural (Fig. 1). L’examen mycologique de l’expectoration montre la présence d’A. ustus en culture. Un diagnostic d’AI prouvée disséminée est porté.

Évolution Le voriconazole est remplacé par l’amphotéricine B (AmB) déoxycholate. Deux jours plus tard, le patient présente un déÀcit moteur du membre inférieur droit. L’IRM cérébrale montre une lésion fronto-pariétale gauche évoquant un accident ischémique. Le patient est alors traité par une association d’amphotéricine (AmB) liposomale et de caspofungine. L’évolution est progressivement favorable, sur le plan clinique, radiologique et biologique. Le patient sort du service le 12/11/2003 avec la bithérapie antifongique et une dose quotidienne de MP de 8 mg. Il présente le 15/12/2003 une hémoptysie de faible abondance motivant une nouvelle hospitalisation. Il est apyrétique et asymptomatique en dehors de la persistance d’une toux et d’une expectoration claire striée de sang. Le scanner montre la régression du nodule d’aspergillose, une nouvelle opacité du lobe inférieur droit proximale et spiculée et un épanchement pleural de faible abondance (Fig. 2). La Àbroscopie bronchique montre un bourgeon blanchâtre d’allure nécrotique qui obstrue totalement une sous-segmentaire interne de la bronche postéro-basale droite. L’aspiration bronchique et le LBA sont stériles en bactériologie et en mycologie. L’examen direct de la biopsie montre des Àlaments non septés évocateurs de mucorales. Les cultures resteront négatives. Le traitement antifongique est modiÀé par du posaconazole. Une segmentectomie est réalisée par thoracoscopie le 21/12/2003. L’étude anatomopathologique montre une

Figure 2. Scanner montrant une régression du nodule d’aspergillose et l’apparition d’une opacité spiculée proximale basale droite avec réaction pleurale.

volumineuse masse nécrosée qui contient de nombreux Àlaments mycéliens évocateurs de mucorales. Les limites d’exérèse sont indemnes de toute structure mycosique. Les suites opératoires sont simples et le patient retourne à domicile 6 jours plus tard. Il est alors considéré en rémission complète des 2 infections fongiques Àlamenteuses. Malheureusement, la situation se complique mi-janvier avec une nouvelle réactivation sévère de la GVH (avec nécessité de ré-augmenter la MP) et l’apparition d’un hydropneumothorax récidivant malgré plusieurs tentatives d’exsufflation. Le patient décède le 23/02/2004 (J347) d’un choc septique à E. coli à point de départ pleural.

Questions Êtes-vous d’accord avec le diagnostic d’AI possible ? Que pensez vous du traitement antifongique initial prescrit pour ce patient ? À quel titre ce patient recevait-il encore du voriconazole ? Ce traitement vous apparaît-il « logique » ? Pourquoi ? Êtes-vous surpris par la survenue d’une mucormycose chez ce patient en cours de traitement pour une aspergillose ? Pourquoi la chirurgie a-t-elle était effectuée chez ce patient ?