L’évolution psychiatrique 68 (2003) 658–668 www.elsevier.com/locate/evopsy
Le temps qui passe
Le tragique en psychopathologie> Arnaud Plagnol * Psychiatre attaché, E.P.S. Esquirol (94, Saint-Maurice), CNRS-IHPST/lLille 3, 214, rue Martainville, 756000 Rouen, France.
J. Pigeaud [1] rappelle que le tragique était au cœur de la réflexion des Anciens sur la folie. L’étude des Tragiques a nourri la pensée médicale, par exemple sur la question des rapports du corps et de l’âme, à une époque où l’art médical était inséparable d’une conception de l’univers, en particulier dans la tradition hippocratique ([2], 270c). Un lien étroit fut alors perçu entre le tragique et la folie, soit que l’on décelât la folie chez le héros tragique, soit que l’on reconnût le caractère tragique de la pathologie de l’âme : « La tragédie [...], en réfléchissant sur la nature du tragique, a découvert l’être profond de la folie. » ([1], p.414). Dans la tragédie, le rapport de l’individu et du cosmos se concentre dans l’unité d’une action s’accomplissant en un temps et un lieu déterminés. Le choc du malheur amorçant la tragédie prend la forme définie d’une blessure corporelle (Philoctète), d’une passion érotique (Médée), d’une transgression des lois divines ou des lois de la Cité (Oedipe, Antigone)... Mais blessure, passion ou transgression procèdent elles-mêmes de l’enchaînement implacable d’un destin lié à l’ordre nécessaire du monde, par-delà la faute/erreur (hamartia ) ([3], 1453a16) du héros aveuglé. La contradiction de l’individu a toujours une source objective, reflétant un rapport logique au monde, ainsi qu’Aristote le formule nettement : « De chose irrationnelle (alogon) il ne peut y avoir aucune dans les faits ; s’il y en a ce doit être en dehors de la tragédie, comme c’est le cas dans l’Oedipe de Sophocle. » ([3], 1454b). Toute explication purement psychologique est donc anti-tragique dès lors qu’elle ne fournit qu’une représentation masquant la fondation objective de la contradiction subjective. 1 Non seulement la folie est malheur mais elle naît du malheur -- d’où un terrible cercle vicieux -- et la raison du malheur qui rend fou réside dans l’histoire du héros, car cette
> Toute référence à cet article doit porter mention : Plagnol A. Le tragique en psychopathologie. Evol psychiatr 2003 ;68. * Auteur correspondant : M. le Dr. Arnaud Plagnol. Adresse e-mail :
[email protected] (A. Plagnol). 1 Freud introduit ainsi le complexe d’Oedipe pour éclairer l’« incompréhensible » Œdipe-Roi de Sophocle, dont l’« effet saisissant » s’exerce « en dépit de toutes les objections rationnelles qui s’opposent à l’hypothèse d’une inexorable fatalité » : Freud S. Lettre n°71 à Wilhem Fliess (1897). In ([4], p 196-99): ([4], p. 198]).
© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.evopsy.2003.09.004
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histoire l’inscrit dans un enchaînement originel dont la seule issue logique est le châtiment annoncé par l’oracle. La tragédie ancienne offrait ainsi une quadruple leçon pour la pensée : (1) l’expérience tragique induit la folie ; (2) la folie précipite réciproquement l’issue tragique ; (3) la folie constituée est tragique ; (4) le tragique lui-même est logique, rationnel, fondé dans la structure du monde. L’action tragique est intriquée à l’obscurcissement du logos dans l’âme du héros, mais la possibilité de l’alogon pour l’âme émerge sur le fond du logos en tant que raison de l’unité essentielle du cosmos.
1. Unité Tragique et Raison de la Folie La connexion logique entre le tragique et l’existence, enracinée dans la possibilité de l’existence elle-même, n’a cessé d’être exprimée dans l’art, quel que soit le processus historique de subjectivation de la représentation du monde. L’intuition de cette connexion est la raison profonde de l’importance de l’unité d’action, de temps et de lieu pour les Classiques. Le Romantisme n’a désarticulé formellement cette unité que pour renforcer les signes explicites d’un destin inexorable, comme l’atteste la célèbre folie de Lucie de Lammermoor [5] : la triste fin de l’héroïne de Walter Scott est fixée depuis toujours par les oracles et ne cesse de lui être rappelée par une multitude de fantômes transgénérationnels.2 De même, pour exercer ses effets les plus puissants, le grand roman du XIXème siècle respecte l’exigence de l’unité énoncée par Aristote ([3], 1451a30). Le tragique apparaît chez Balzac ou Zola dans les œuvres où se tisse une trame implacable telle que chaque fait compte jusqu’à l’issue fatale. Ce n’est au départ qu’un point noir sur l’horizon, un frémissement d’angoisse, le souffle léger d’une intuition sensuelle... mais le secret bien enfoui finit par absorber la vie entière, l’agitation du héros demeure vaine, la Peau de Chagrin [7] se rétracte à chaque mouvement jusqu’à la mort. L’intrusion d’un étrange locataire (La conquête de Plassans ([8], II)), une trouée dans la muraille (La faute de l’Abbé Mouret ([9], p. 76, p. 274])), le cri joyeux d’une petite Nana (L’Assommoir ([10], p.132)), un pervers souvenir qui s’échappe (La bête humaine ([11], p. 46)), et c’est l’engrenage, la faille sans fond, la ruine de la Maison, la chute jusqu’à la folie suicidaire ou meurtrière. L’idée même de la Comédie Humaine implique cette unité tragique où tout est joué d’avance sur la scène du monde, comme l’« hérédité » dans l’histoire « naturelle » des Rougon-Macquart ne signifie rien d’autre que la peine originelle infligée à tous les personnages (voir le Docteur Pascal [12]). En fait, la séduction sur l’âme du lecteur exercée par la folie romanesque est liée à sa genèse éminemment logique, en accord avec le principe de raison, le délire ne pouvant faire irruption gratuitement sans incohérence hermétique. Certes, la littérature subjective moderne peut à dessein nous placer d’emblée devant l’énigme d’un Narrateur fou, et ce procédé, fort prisé dès le XIXème siècle 3, devait prospérer avec les écritures dissociées des Narcissiques fascinés par la psychose. Cependant, si l’ambiguïté est essentielle pour susciter l’émotion moderne, lorsqu’un personnage passe de la lucidité à la folie, il faut qu’il 2
Le fantôme de Lucie de Lammermoor imprègne lui-même le destin d’Emma Bovary [6]. Par exemple : Journal d’un fou (1835) : in ([13], p. 61-85), Mémoire d’un fou [14], Aurélia ou le rêve et la vie (1855) : in ([15], p 251-315), Le Horla (1887) [16], plusieurs histoires extraordinaires d’Edgar Poe [17]... 3
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y en ait raison (logos), or cette raison réside nécessairement dans la peine issue du malheur, d’où la présence irréductible du tragique ancien dans le tragique moderne [18]. Et l’hypersubjectivité « post-moderne », en mettant à nu le Vide, en jouissant de ses jeux enfantins sur la Représentation elle-même, en réduisant l’Erotisme au Sexe et à la Cruauté [19], ne manifeste-t-elle pas encore en négatif la nostalgie de la très puissante unité tragique du cosmos ? Les derniers avatars du nihilisme pourraient bien n’être que l’ultime protection contre le tragique pur tel qu’il se dévoile à travers le Malentendu 4, le Retour Eternel de la contradiction [20], ou le Supplice de l’Expérience Intérieure [21]. L’épuisement quasirevendiqué de l’esthétique contemporaine ne ferait alors que manifester en creux le « retour du tragique » [22], tous les stupéfiants de la conscience lui étant devenus si odieux que son Odyssée la reconduit enfin à son Enfer perdu. Pourtant, malgré l’exclusion de l’alogon hors de la tragédie, le lien précis entre tragique et folie reste énigmatique, sauf à se contenter de quelque « vague raison romantique » comme le reproche Pigeaud ([1], p.418) à Foucault [23]. Selon Aristote, les moments décisifs de l’action tragique s’articulent autour de reconnaissances (anagnorisis) ([3], 1452a29) 5, et Pigeaud met en parallèle ce ressort de l’action tragique avec celui de la folie dont les phases essentielles seraient déterminées par les pertes/retours de la conscience. Mais cette parenté structurale n’épuise pas l’intérêt clinique du tragique dès lors que sa relation étroite avec la folie pourrait ne pas concerner seulement les héros mythifiés de la Grèce, de l’Art (Van Gogh) ou de la Pensée (Nietzsche), mais aussi les sujets de la psychopathologie la plus quotidienne [24, 25].
2. Du Tragique à l’Angoisse Le tragique n’est pas réductible au psychologique, et encore moins au pathologique. Même le tragique moderne, si imprégné de la subjectivation de la contradiction, ne saurait pourtant s’y limiter pour rester proprement tragique. Cependant, dès lors que le tragique révèle un rapport essentiel du sujet au monde, il importe de comprendre comment un trouble psychique engage ce rapport, voire comment le tragique pèse dans la genèse d’un effondrement pathologique ou dans les impasses thérapeutiques rencontrées. Quel est alors le phénomène psychique manifestant la présence du tragique ? 2.1. Peine et pathos tragique D’après la célèbre définition d’Aristote, le spectacle d’une représentation tragique suscite le phobos (peur/angoisse) et l’eleos (sympathie/pitié) ([3], 1449b27). Si l’on suit Ricœur [26, 27], le phobos, « émotion tragique par excellence », serait l’angoisse à son degré ultime, intégrant aussi bien l’angoisse d’un fondement « méchant » de l’existence que l’angoisse de culpabilité. En fait, l’interprétation en tant qu’angoisse de ce que les Grecs désignaient par « phobos » est caractéristique du tragique moderne. En effet, tandis que le tragique ancien insistait sur le fondement objectif du malheur, l’angoisse -- « peur 4 5
Kierkegaard S. Le plus malheureux (1843). In : ([18], p. 169-79). Par exemple, lorsque Œdipe apprend le secret de sa naissance.
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sans objet » -- est un mouvement intrapsychique qui déborde le pur malheur pour résonner à travers l’espace de représentation défini par la mémoire subjective [28]. Pour Kierkegaard, si la peine désigne la souffrance immédiate issue du malheur objectif, l’angoisse est « la force de mouvement par laquelle la peine s’enfonce dans le cœur » ([18], p. 120). Le corrélat psychologique du tragique moderne est donc l’angoisse en tant que résonance subjective de la souffrance (dont la racine objective tend à être niée au profit de la pure conflictualité intra-psychique). Pour Nietzsche également, le corrélat psychologique du tragique moderne est la souffrance de la subjectivité réflexive devant l’énigme du malheur. Même si Nietzsche ne thématise pas le concept de l’angoisse, toute la partie critique de son œuvre développe une psychopathologie de la « volonté de puissance » (i.e., l’être en tant que puissance de vie) lorsque celle-ci devient une conscience confrontée à la souffrance [20]. Les « idéaux ascétiques » de la conscience (art, science, politique...) ne seraient que des « narcotiques », c’est-à-dire des représentations stupéfiantes pour apaiser le sentiment tragique de la vie, et la pensée moderne tournerait toujours à la toxicomanie afin de calmer cette souffrance devant la souffrance. Dans le cadre de l’analytique existentiale, Heidegger considère que l’angoisse est le « sentiment de la situation » où l’existant humain (Dasein) est arraché à la quotidienneté et placé « face au monde comme monde et en même temps face à lui-même en tant qu’être-au-monde » ([29], p.231). Dans une perspective existentielle, on peut dire que l’angoisse, en tant que phénomène psychique, ouvre l’espace de représentation ordinaire et révèle le rapport tragique du sujet au monde, alors que ce rapport est obscurci dans la quotidienneté, enfoui sous toutes les normes produites par l’histoire individuelle et sociale. L’angoisse est le « possible de la liberté » ([30], p. 46, p. 160) qui surgit à l’instant où le sujet s’avance sur la frontière de son espace, mettant à nu la finitude des représentations, ce qui peut entraîner aussi bien l’ouverture sur l’Infini que la fermeture défensive (« hermétisme démoniaque » dans la perspective chrétienne de Kierkegaard [30]). 2.2. Reconnaissances Comment préciser ce mouvement subjectif de l’angoisse dans le tragique contemporain ? Kierkegaard [18] imagine une Antigone « moderne » où le conflit est initié par la révélation du secret de la faute incestueuse d’Œdipe. Le ressort de l’action tragique reste donc une « reconnaissance » (anagnorisis) qui amorce l’intériorisation de la souffrance. Cependant, Kierkegaard indique que la connaissance du secret est corrélative d’une ignorance : Antigone « sait tout » sur sa naissance mais ce savoir ne résout rien car elle ignore si son père l’a su, et cette ignorance « peut toujours maintenir la peine en mouvement, la transformer toujours en douleur » ([18], p. 125)(Comme le dévoilement des origines d’un enfant adopté exacerbe d’abord l’angoisse, même si une telle épreuve est nécessaire.). L’Antigone de Kierkegaard tente de réparer la Maison familiale par son silence et porte la faute de son père jusqu’à l’instant d’un second « choc tragique », déterminé par une nouvelle anagnorisis, lorsque la rencontre érotique de son fiancé vient heurter violemment le fardeau de cette fidélité filiale. Dans l’angoisse, il y a donc à la fois certitude et doute, savoir et non-savoir, conscience et inconscience... Cette contradiction se dissipe si l’on différentie les multiples strates possibles dans la représentation du malheur : le sujet peut connaître d’une façon ineffaçable
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la peine qui pèse sur son destin, mais être dans l’impossibilité de l’élaborer symboliquement dans toutes ses conséquences. Ceci explique que l’enfance, selon Kierkegaard, puisse s’accompagner aussi bien d’une peine profonde que d’une angoisse profonde : d’une part, l’enfant, en tant qu’innocence, ressent une peine infinie devant le malheur parental qu’il ne peut comprendre ([18], p. 115) ; d’autre part, l’angoisse appartient essentiellement à l’enfance en tant que mouvement vers l’en-dehors de l’innocence ([30], p. 47). D’une façon analogue, Ricœur évoque à la fois la « révélation insupportable du tragique » et l’impossibilité de l’élaboration réflexive d’un secret inavouable -- la possibilité du Dieu méchant -- ce qui justifierait que le tragique se révèle par essence dans une représentation scénique sans pouvoir être saisi par la pensée [26]. De cette ambiguïté inhérente à l’angoisse découle le mouvement dialectique entre savoir et ignorance, nécessité et possibilité, destin et liberté, hybris (démesure) et responsabilité, la mousiké tragique étant rythmée par les alternances d’alogon et d’anagnorisis dans l’âme du héros. Ce n’est qu’au dénouement que, selon Ricœur, « le passé absolu du destin » écrase la « résistance de la liberté » après l’avoir éprouvée, épreuve qui est la condition pour que naisse le phobos chez le spectateur s’identifiant au héros par l’eleos ([26], p. 205-208).6 2.3. Entre le malheur et l’Intenable Le tragique a-t-il une fin ? Selon Schopenhauer, au dénouement de la tragédie, le héros prend conscience qu’il expie non pas son crime individuel mais « le crime de l’existence », et cette connaissance purifiée par la souffrance met un terme à l’angoisse [31]. Ricœur évoque la « sagesse tragique » en citant le chœur de l’Agamemnon d’Eschyle : « Souffrir pour comprendre » est la loi donnée par Zeus, « violence bienfaisante » qui lève le poids de la « stérile angoisse » ([26], p. 215). Kierkegaard considère que « l’apprentissage véritable de l’angoisse est le suprême savoir » en ouvrant sur la Foi et la Rédemption ([30], p. 159). Œdipe à Colone (Sophocle) est souvent choisi comme exemple d’issue au tragique vers un savoir supérieur (e.g., Ricœur [26]) mais Lacan rappelle les malédictions proférées par Œdipe jusqu’à l’ultime instant, signes d’une colère irréconciliable face au destin bien plutôt que d’une sagesse apaisée [32]. Quoiqu’il en soit d’une consolation finale, l’angoisse disparaît au dénouement du tragique lorsque la contradiction du rapport du sujet au monde se dévoile sans retour. La peine est abolie comme source d’angoisse dès que sa contingence est dissipée et sa nécessité destinale comprise (sinon acceptée). La certitude consciente du tragique a pour corrélat psychique non plus l’angoisse mais l’Intenable [25], au sens où aucune position ne peut plus être tenue dans l’espace de représentation, que l’Intenable soit rapporté au Malentendu « du plus malheureux » ([18], p 169-179), à la contradiction du monde comme Volonté et Représentation [31], au Retour Eternel de la contradiction entre la Vie et la Pensée [20], ou encore au Supplice et à l’Extase de l’Expérience Intérieure [21]. L’Intena6
La traduction d’eleos par « sympathie » ou par « pitié » marque un enjeu éthique essentiel pour la psycho-thérapie, compte tenu du danger de la pitié souligné par Nietzsche [20,28]. En fait, si l’on admet comme Kierkegaard que l’angoisse est « une antipathie sympathisante et une sympathie antipathisante » ([30], p.46), ce qui met l’accent sur l’ambivalence dans le concept d’angoisse, la meilleure traduction moderne d’eleos est « empathie », terme qui suggère le parallèle entre la dialectique de l’intersubjectivité et la dialectique de l’angoisse.
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ble n’offre aucun thème tragique car il ne comporte plus d’ignorance devant une peine énigmatique, plus d’ambiguïté, plus d’angoisse, plus de mouvement : tout est joué. La dynamique d’une tragédie s’inscrit donc entre deux bornes : (1) la peine brute issue du malheur, sans réflexivité aucune, en deçà de toute représentation symbolique, (2) l’Intenable, lorsque la peine est totalement réfléchie et intégrée symboliquement, ouvrant sur le tragique pur, voire sur l’au-delà de toute représentation. La peine brute et l’Intenable excluent tous deux l’angoisse, celle-ci n’existant que dans le mouvement associé à la résonance de la peine dans l’espace de représentation. En fait, ces deux bornes sont théoriques : d’une part la peine brute est inhumaine car le malheur, pour être malheur humain, doit déjà interagir avec la mémoire subjective 7; d’autre part, le maintien dans l’Intenable est possible pour le Héros mythologique, le Penseur pur ou le Saint surincarné, mais non pour un sujet plongé dans une histoire concrète. Le tragique détermine l’angoisse car la peine s’inscrit dans l’histoire subjective, c’està-dire dans la chair et la mémoire, mais le mouvement continu de cette historicité concrète ne permet que rarement l’accès à la signification essentielle de la peine au-delà de son accidentalité -- c’est-à-dire l’accès à une conscience pleine de la finitude -- et permet encore moins de se maintenir dans le tragique pur et l’Intenable. De nouvelles péripéties ([3], 1452a22) ne cessent de déplacer le sens initial de la peine par d’autres résonances, ou bien les vertus rituelles de l’espace ordinaire offrent une symbolisation du malheur sans altérer le « principe de sens » qui fonde toute représentation [34]. Cependant, de par le poids même de cette histoire subjective, il arrive que la dynamique de l’angoisse et des représentations tourne au mouvement perpétuel, les représentations n’étant plus que des défenses contre l’angoisse. Une défense -- par exemple, un non-dit face au malheur -- offre par définition une solution temporaire et locale contre l’angoisse, mais ferme l’ensemble de l’espace de représentation [28]. Lorsque toute tentative d’issue aggrave le piège, le mouvement perpétuel devient un cercle vicieux et le tragique de la folie se dessine avec sa puissance propre de fascination.
3. Le Tragique de la Folie Le tragique ne pèse sur le psychisme qu’en pénétrant une histoire subjective, lorsque ce que Kierkegaard [18] nomme le « choc tragique » heurte un tissu singulier d’évènements vitaux. Dans le choc tragique, le malheur se révèle à la fois irréfutable et obscur, certain mais non symbolisable complètement, voire non verbalisable, même s’il envahit parfois tout le champ de conscience. La fermeture défensive du pathologique dépend de la résonance du choc tragique relativement à l’espace de représentation subjectif : pour analyser le tragique de la folie, nous distinguerons le pôle « traumatique » renvoyant à l’évènement objectif, dans son accidentalité apparente, et le pôle « subjectif » renvoyant à l’individu plus ou moins « vulnérable ». Le sujet éprouvant le choc tragique en tant que corps et mémoire, le pôle subjectif peut être subdivisé en un pôle « somatique » lié au corps 7
La peine brute, sans nulle réflexivité consciente, ne serait sans doute même pas animale, sauf à considérer les affects de l’huître ([33], 21c). Dans cette perspective, le malheur peut très bien être « après-coup », c’est-à-dire qu’un évènement initialement heureux (e.g., une rencontre érotique) devient rétrospectivement l’épouvantable amorce de la fatalité (e.g., [5,9,15]).
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et un pôle « mnésique » lié à la mémoire. Ces pôles ne sont ici distingués qu’à titre de points de repères conceptuels et leur interaction essentielle est évidente pour toute histoire subjective concrète, même si pour tel ou tel « cas clinique », il arrive que l’un d’entre eux paraisse prédominant [25]. 3.1. Le pôle traumatique « Une explosion de bombe, si elle est suffisamment intense, rend tout être humain ’fou’ » notait Ferenczi ([35], p. 307). Le malheur objectif peut être tel que sa résonance semble pouvoir ébranler les fondations de tout univers subjectif, quelle que soit son histoire singulière. Le poids du pôle traumatique est par définition déterminant dans les névroses traumatiques déclenchées par un évènement caractérisé par sa brutalité et l’horreur d’une confrontation avec la mort [24]. La scène mortifère ne peut être élaborée dans toutes ses conséquences symboliques, car la mort est par essence négation, non-vie, non-présence, et, se donnant comme non-intégrable, ne peut être intégrée pleinement comme telle au sein de l’espace de représentation [34]. Son élaboration étant inachevable, la scène mortifère tend à faire retour à l’identique et s’installe progressivement au cœur de la mémoire. Le syndrome de répétition brise d’autant plus l’historicité subjective que le choc tragique se prolonge dans une intuition de l’irrémédiable, aucun monde possible ne paraissant plus unifiable avec la scène mortifère, de même que l’histoire passée devient rétrospectivement défaillante. La scène mortifère révèle donc la possibilité d’une contradiction ancrée au plus profond de l’univers subjectif et peut même finir par imprégner la substance entière de la mémoire au point que le sujet ne peut plus y renoncer, la fascination par le non-sens étant devenue un atroce néo-sens tumoral. Dans les névroses traumatiques, la scène mortifère constitue un évènement objectif clairement repérable de par le sens universel de la mort. Cependant, le poids du pôle traumatique dans la résonance du choc tragique est également évident dans de nombreuses situations cliniques où un évènement objectif, sans avoir une portée universelle, brise néanmoins l’histoire singulière, par exemple lors d’un deuil ou d’une rupture amoureuse lorsque l’objet perdu était au cœur de tout l’univers subjectif [34-36]. Le choc tragique se propage alors à tout l’espace de représentation accessible, dans l’intuition qu’aucun monde unifié n’est plus possible, le rappel immédiat de la perte contredisant tout souvenir ou tout projet. Même lorsque l’évènement objectif a un caractère universel, seuls certains sujets développent une névrose traumatique : le pôle traumatique ne peut jamais rendre compte de la portée d’un choc tragique indépendamment du pôle subjectif. 3.2. Le pôle somatique La maladie était un thème de tragédie essentiel pour la réflexion antique sur la folie, notamment quant à la question fondatrice des rapports de l’âme et du corps [1]. En effet, une atteinte somatique peut affaiblir assez pour empêcher l’assimilation d’un choc tragique, voire constitue par elle-même le choc (e.g., Philoctète de Sophocle). Mettant en jeu l’intégrité du corps, et, via le corps, l’intégrité du psychisme, l’altération organique révèle par excellence la condition humaine et son horizon tragique lié à la mort. La maladie offrait donc une expérience cruciale pour la philosophie, par exemple pour l’école stoïcienne : le
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Sage est lui-même menacé de perdre la raison, d’où l’invalidation potentielle d’une pensée qui prétend maîtriser la souffrance et la peur de la mort. La maladie reste aujourd’hui un lieu privilégié d’émergence du tragique, ce d’autant que le tissu social se révèle défaillant ou que le soin se réduit à une technique ignorant la subjectivité. Le poids du pôle organique est évident dans les troubles psychiques d’étiologie organique, mais aussi dans toute maladie chronique, invalidante ou incurable 8. La douleur, le handicap ou la dépendance, réfléchis subjectivement en tant qu’altérations de l’image du corps ou blessures narcissiques, peuvent fermer l’histoire singulière jusqu’au non-sens (pourquoi vivre si la vie entière est devenue maladie ?), non-sens dont la preuve est parfois la proximité de la mort. Tant que la maladie dure, la peine persiste en tant que douleur physique ou souffrance morale. Le choc tragique de la maladie ne se réduit donc pas à l’instant d’un diagnostic ou d’un pronostic : la peine reste continûment actuelle et ne cesse d’alimenter l’angoisse pour retentir sur tout l’espace subjectif. Et la résonance de la peine est interminable car la représentation de la maladie reste toujours ambiguë, quelle que soit sa certitude : d’une part, les capacités d’élaboration peuvent être amoindries en raison même de la maladie ; d’autre part, même chez le Sage endurci, le malheur ne peut sans doute être totalement réfléchi jusqu’au sens ultime de la mort. 3.3. Le pôle mnésique Quels que soient les facteurs traumatiques ou organiques, c’est essentiellement en tant que mémoire subjective que le choc tragique est éprouvé. Ce poids du pôle mnésique devient manifeste dans de véritables « maladies de la mémoire » [25] où l’angoisse est moins déterminée par un malheur actuel que par la présence d’une peine inassimilée issue du passé. (Rappelons avec Saint Augustin que la mémoire peut être définie comme le « présent des choses passées » ([37], XI, § XX). L’impact d’un choc tragique renvoie alors à des chocs antérieurs qui n’ont pu être élaborés complètement, entraînant une fermeture défensive de l’espace de représentation, voire la formation de failles ou de zones de fragmentation. L’action de la peine inassimilée se dévoile à l’occasion d’un évènement ultérieur, parfois heureux de prime abord, mais dont la résonance est multipliée par la vulnérabilité issue du passé jusqu’à le transformer en malheur : le choc tragique conduit au choc tragique, ce qui est la puissance propre du tragique. Le poids du pôle mnésique soulève le problème récurrent de l’inassimilation des chocs antérieurs. Et la réponse logique est que l’origine du malheur vient de l’enfance et bien au-delà. La clinique confirme presque toujours que le premier choc repérable dans l’histoire subjective a heurté une mémoire encore trop peu épaisse pour l’élaborer symboliquement. Sauf accident, cette perte trop brutale de l’innocence renvoie elle-même logiquement à une peine parentale, familiale ou sociale, transmise de génération en génération. Quoiqu’il en soit de son origine ultime, la peine passée peut contaminer avec le temps la mémoire toute entière. La fidélité au malheur initial s’étend alors à l’ensemble de la vie qui devient toute entière malheur. Une « maladie de la mémoire » peut devenir l’atroce raison (logos) paradoxale de vivre, ce qui définit la pointe tragique de la folie. 8 Lors d’une maladie aiguë sévère, le pôle somatique se confond avec le pôle traumatique, surtout si le caractère d’accidentalité est net (e.g., maladie rare frappant brutalement un sujet jeune) ou si l’horreur de la mort devient intensément présente avec la dégradation du corps et l’agonie terminale [25].
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3.4. La pointe tragique Quel que soit l’impact initial du pôle traumatique ou du pôle somatique, une maladie de la mémoire se constitue si l’histoire subjective s’imprègne au fil des ans d’un malheur non élaboré. Tout se passe alors comme si le sujet se laissait fasciner par sa peine de telle sorte que l’angoisse devenait encore préférable à la suppression de la peine. Citons encore Kierkegaard : « Comme un regard passionnément érotique convoite son objet, ainsi l’angoisse regarde la peine afin de la convoiter. Comme un regard d’amour calme et inflexible s’occupe de l’objet aimé, c’est ainsi que l’angoisse se dépense devant la peine. Mais l’angoisse a en elle un élément de plus qui fait qu’elle s’attache plus fortement encore à son objet, car en même temps qu’elle l’aime, elle le craint » ([18], p. 120). La peine devient son propre stupéfiant à tel point que le sujet ne peut plus y renoncer, et l’ambiguïté de l’angoisse devant la peine en est la condition. Renoncer à la peine, ou, ce qui revient au même, l’accepter en pleine conscience, dans sa nécessité, sans angoisse ni défense, confronterait au tragique pur, c’est-à-dire au non-sens intenable de la peine, en reconnaissant que l’on s’est muré soi-même en elle, que l’on s’est voué au malheur pour rien, que l’on a manqué le sel de la vie dans un sacrifice dénué de sens. Même si le sujet lâche sa peine un instant pour l’ivresse de la liberté, comment pourrait-il s’y maintenir ? Ne s’effondre-t-il pas dans l’angoisse au moindre souffle du souvenir de la peine ? Kierkegaard [18] comparait son Antigone à Epaminondas : celui-ci, blessé à la bataille de Mantinée, laissa la flèche dans la blessure jusqu’à la nouvelle de la victoire car il savait qu’il mourrait dès que la flèche serait ôtée. Si n’importe quelle souffance est préférable au non-sens de la souffrance, la maladie mentale peut offrir une protection contre le tragique tout en le reflétant indirectement. Nietzsche évoque ainsi la folie comme « le masque d’un savoir funeste et trop certain » ([38], p. 138), et, lui-même devenu dément quelques jours plus tard, donnait à ses amis l’effarante impression de simuler une maladie dont la « guérison » serait fatale ([39], p. 149). De fait, en psychiatrie, une phase d’amélioration implique souvent un risque majeur (e.g., suicide par privation trop brutale du stupéfiant addictif, dépressif ou délirant). Un trouble psychique peut représenter une défense telle qu’il existe un danger vital à l’aborder, comme dans Adieu de Balzac [40] où la tentative de guérison d’une psychose traumatique se révèle fatale 9. La mort devient même impossible pour l’aïeule des Rougon-Macquart, figée dans une démence traumatique par la vision du crime fondateur du destin familial [12] 10. 9 Barrois [24] évoque à ce propos le mythe d’Orphée (Eurydice est perdue à l’instant du salut). Nerval inscrivit « Eurydice ! Eurydice ! » en exergue à la seconde partie d’Aurélia et se pendit quelques jours avant sa parution [15]. 10 Ce n’est qu’à cent cinq ans, trois mois et sept jours, dans l’ultime épisode des Rougon-Macquart [12], que la vieille Adélaïde meurt à l’Asile lors d’un « troisième choc moral » (la « mort tragique », sous ses yeux, de son arrière-arrière-petit-fils par hémorragie hémophilique). Dans le « roman des origines » [41], la démence se constituait lors du « second choc », Adélaïde assistant au meurtre de son petit-fils Silvère (« victime des haines et des luttes sanglantes de la famille »). Ce meurtre résonnait avec un « premier choc » (la mort de son amant, le contrebandier Macquart, également tué par un gendarme). Mais Zola oublie des chocs plus anciens encore : Adélaïde était orpheline et son père était fou [41]. Kierkegaard [18] remarque qu’il faut au moins deux chocs tragiques pour déterminer le plus haut degré de malheur (l’un pour fermer le passé, l’autre pour fermer l’avenir, de telle sorte qu’il n’y ait plus de possible ni dans le souvenir, ni dans l’espoir).
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Que la guérison se révèle plus dangereuse que la maladie signe la puissance tragique de la folie, et cette puissance est encore multipliée quand la « maladie mentale » devient elle-même une « maladie de la mémoire ». En effet, l’image d’un trouble psychique a des reflets infinis sur l’espace de représentation et peut maintenir par elle-même dans le malheur. Par exemple, une hospitalisation, si elle ne rend plus fou en deux heures comme au temps de l’Asile ([8], p. 400), peut néanmoins redoubler un choc tragique et constituer une blessure narcissique indélébile. Et l’on peut souffrir profondément de son statut de « malade mental », comme certains schizophrènes, sans pouvoir s’en délier, à moins d’un risque mortel dès lors que l’on ne disposerait plus d’explication de son malheur pour affronter la misère ordinaire. Plus d’un « vieux psychotique » est mort la veille de sa « libération » de l’Asile...
4. Conclusion Platon se méfiait des poètes tragiques auxquels il reprochait de flatter les passions de l’âme au détriment de la rationalité qui accède au logos ([42], 502bc), ([43], 408c ), ([44], X ), ([45], 817ac). Face au tragique de la folie, le clinicien est-il lui-même victime d’un obscurcissement du logos, lorsque le choc de la rencontre du « patient » résonne trop fortement avec son propre espace subjectif ? L’empathie de l’eleos risque-t-elle de dégénérer en pitié suscitant la dépendance [28] ? En fait, Platon ne condamnait pas la tragédie elle-même, mais la représentation mimétique qu’en offre le poète, pâle copie de la véritable unité tragique de la vie, et le philosophe, renouant avec ses amours d’enfance, réintégrait la poésie dans la Cité dès que celle-ci se justifiait par un chant doté du metron (juste mesure) ([44], 607d). Or, quel que soit le masque emprunté par la folie, le clinicien n’est pas confronté à une pure représentation mais à un individu en chair et en mémoire. Et, même si la raison profonde de la peine est d’abord une énigme, pour le sujet aveuglé ou pour le clinicien fasciné, ils peuvent ensemble frayer un chemin vers la mesure intersubjective, au sein de la Cité, sur fond de l’unité logique du cosmos
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