L'imagerie par résonance magnétique dans les spondylarthropathies

L'imagerie par résonance magnétique dans les spondylarthropathies

Revue du Rhumatisme 73 (2006) 1–3 http://france.elsevier.com/direct/REVRHU/ Éditorial L’imagerie par résonance magnétique dans les spondylarthropath...

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Revue du Rhumatisme 73 (2006) 1–3 http://france.elsevier.com/direct/REVRHU/

Éditorial

L’imagerie par résonance magnétique dans les spondylarthropathies Magnetic resonance imaging in spondyloarthropathies◊

Mots clés : IRM ; Spondylarthropathie ; Anti-TNF-alpha Keywords: spondyloarthropathy; Magnetic resonance imaging; Anti-TNF-alpha

1. Introduction Il existe cinq sous-types principaux des spondylarthropathies (SpA), la plus représentative étant la spondylarthrite ankylosante (SPA). Les autres sont le rhumatisme psoriasique, les arthrites réactionnelles, les SpA associées aux maladies inflammatoires colo-intestinales (MICI) et les SpA indifférenciées. Ces différentes SpA ont en commun certaines manifestations cliniques comme les rachialgies inflammatoires, les enthésopathies inflammatoires et les arthrites périphériques des membres, mais aussi des manifestations plus rares comme les uvéites antérieures aiguës et les inflammations de l’aorte. L’imagerie tient une place importante dans le diagnostic, la classification et la surveillance de la SPA et des autres SpA. Nous disposons de plusieurs techniques d’imagerie. Si les radiographies restent l’examen de première intention dans la majorité des situations cliniques, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et l’échographie ont pris une place grandissante dans les études cliniques et la pratique quotidienne. Selon la forme clinique et le stade évolutif, les Spa peuvent toucher de nombreuses structures anatomiques. Au cours des premières années d’évolution, la SPA est caractérisée par une atteinte inflammatoire des articulations sacro-iliaques qui est présente chez presque tous les patients [1]. Les radiographies des sacro-iliaques ne restent normales que chez moins de 5 % des patients atteints de SPA. À un stade plus avancé, la SPA atteint le rachis chez près de 70 % des patients, et cela selon plusieurs manières possibles. Les corps vertébraux peuvent être atteints par une spondylite et aussi, en association avec les disques intervertébraux, par une spondylodiscite inflammatoire. L’enthésite inflammatoire peut toucher les différentes enthèses et ligaments. Les articulations interapophysaires postérieures, ◊ Pour citer cet article, utiliser ce titre en anglais et sa référence dans le même volume de Joint Bone Spine.

costovertébrales et costosternales peuvent être le siège d’une arthrite. L’atteinte périphérique touche le plus souvent les articulations des membres inférieurs et les enthèses, principalement l’insertion du tendon d’Achille et de l’aponévrose plantaire. 2. L’imagerie de la spondylarthrite ankylosante Les SpA peuvent être responsables d’anomalies de type inflammatoire et d’anomalies structurales chroniques, ces dernières faisant habituellement suite aux premières. Les anomalies structurales peuvent réaliser des modifications ankylosantes caractérisées par une prolifération osseuse ou des anomalies destructrices. En matière de diagnostic et de classification de la SPA, les radiographies des sacro-iliaques et du rachis constituent l’examen de référence pour la détection des anomalies structurales, alors que l’IRM présente des avantages évidents pour la détection des lésions inflammatoires actives du squelette axial mais aussi périphérique. À l’avenir, il est probable que les données de l’IRM seront incluses parmi les critères de diagnostic et de classification [2,3]. L’appréciation quantitative des anomalies en imagerie a un double objectif : définir l’état du patient à un moment donné et apprécier les modifications évolutives. Cette double problématique apparaît pertinente tant dans les études cliniques que dans la pratique quotidienne. Les techniques d’imagerie ont des capacités différentes d’analyse des modifications survenant dans le temps. Les radiographies et la tomodensitométrie (TDM) ont les meilleures capacités d’appréciation des modifications structurales chroniques. En revanche, l’IRM, et à un moindre degré la scintigraphie, sont supérieures pour détecter les modifications liées à l’activité inflammatoire. L’IRM possède l’avantage, par rapport aux autres techniques, de ne pas irradier le patient, ce qui est important chez les jeunes femmes, les enfants et les patients

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qui sont destinés à avoir des examens répétés. Mais en pratique, l’IRM a des inconvénients : accès parfois difficile à l’examen, équipement non forcément adapté pour ce type de situation, équipe médicale non toujours expérimentée en la matière, coût financier supérieur à celui des autres techniques. De plus, les patients souffrant de claustrophobie, ou ayant un pacemaker ou porteurs d’implants métalliques ne peuvent pas bénéficier de l’IRM. Pour évaluer les lésions inflammatoires actives, les techniques appropriées d’IRM sont les séquences d’inversion–récupération appelées STIR (short tau inversion recovery), les séquences en écho de gradient T2 avec saturation sélective de la graisse appelées T2-FS (ou T2-FAT SAT) et les séquences en spin-écho T1 après injection d’un agent de contraste paramagnétique comme le gadolinium appelées T1/Gd-DTPA [4,5]. Les séquences en spin-écho T1/Gd-DTPA montrent le caractère inflammatoire des lésions par le rehaussement du signal par l’agent de contraste que l’on observe dans les zones hypervascularisées. Les techniques T2-FS et STIR démontrent le caractère inflammatoire des lésions en mettant en évidence, en l’absence d’agent de contraste, un œdème de la moelle osseuse. Si la technique du T2-FS a été plus souvent utilisée, la technique STIR est souvent préférée car elle offre un meilleur contraste entre la graisse et l’eau du fait de la suppression complète du signal graisseux [6]. 3. Les articulations sacro-iliaques L’IRM et la TDM sont des techniques performantes pour visualiser cette anatomie particulièrement complexe de l’articulation sacro-iliaque et notamment les anomalies des tissus périarticulaires : capsule articulaire, os sous-chondral, anthèses et ligaments qui sont difficiles à visualiser avec les autres techniques d’imagerie. L’IRM est particulièrement intéressante pour mettre en évidence les lésions inflammatoires du squelette axial dans la SPA. Les anomalies observées en IRM sont bien corrélées avec celles mises en évidence par les examens histologiques et immunohistochimiques [7]. L’appréciation du degré de l’atteinte sacro-iliaque est essentielle pour la classification de la SPA. Cette évaluation est habituellement faite sur les radiographies, mais la TDM et l’IRM ont aussi un intérêt pour évaluer les modifications chroniques des sacro-iliaques. La technique de choix est la TDM. Jusqu’à présent, il n’y a pas eu de standardisation de l’évaluation des modifications structurales par IRM. Les systèmes de cotation des lésions par des scores IRM [8, 9] ont récemment été comparés de manière systématique [10]. Le projet ASAS–OMERACT intitulé « IRM dans la SPA » a pour objectif de développer et de valider une évaluation quantitative par score IRM dans la SPA. Cet objectif est d’importance dans la mesure où dans les études récentes des biothérapies, infliximab ou étanercept, celles-ci ont démontré une très bonne efficacité sur les signes cliniques d’activité, mais aussi qu’elles entraînaient une amélioration des lésions inflammatoires des articulations sacro-iliaques et du rachis [11–14]. Plusieurs études ont comparé directement les différentes techniques d’évaluation des sacro-iliaques. Il a été démontré

que l’IRM est, en comparaison avec la scintigraphie, la TDM et la radiographie, la méthode ayant la meilleure sensibilité et la meilleure spécificité pour l’évaluation des anomalies inflammatoires des sacro-iliaques [15,16]. Pour le diagnostic de SPA, en accord avec les critères révisés de New York [17], les radiographies des sacro-iliaques constituent la méthode de choix. L’IRM devrait être utilisée chez les patients atteints d’une MICI chez lesquels on suspecte une sacro-iliite de SpA, cela permettant un diagnostic sur des données plus objectives [2]. L’IRM peut aussi être utilisée pour exclure une atteinte infectieuse quand cela est nécessaire. Pour l’évaluation de l’importance des modifications structurales, par exemple pour des questions d’assurance, la TDM doit être utilisée préférentiellement. 4. Le rachis L’IRM est considérée comme étant la méthode d’imagerie la plus sensible pour détecter les anomalies inflammatoires du rachis [18]. Elle est de plus en plus utilisée en pratique. L’intérêt de l’IRM dans la classification et pour le diagnostic des patients souffrant de lombalgies inflammatoires chez lesquelles une Spa est suspectée est encore en cours d’investigation [3]. Chez les patients atteints d’une SPA, l’IRM rachidienne est maintenant utilisée pour évaluer l’inflammation en tant qu’indicateur d’activité de la maladie et en tant que possible facteur prédictif de la réponse aux traitements. L’intérêt pratique de l’IRM comme aide à la décision thérapeutique, en particulier en ce qui concerne les indications des biothérapies, est actuellement discuté [19,20]. Les radiographies sont considérées comme méthode de référence pour évaluer et quantifier les lésions structurales du rachis. Mais les séquences d’IRM pondérées en T1 ont aussi démontré leur intérêt pour l’évaluation des dommages structuraux [21]. Plus généralement, l’IRM est supérieure aux autres techniques d’imagerie pour identifier et quantifier les lésions vertébrales actives [22,23]. La performance de l’IRM apparaît la même que l’on utilise les séquences STIR ou T1/Gd-DTPA [23,24]. En pratique quotidienne, les séquences STIR sont donc suffisantes pour le dépistage et doivent être préférées car elles sont plus rapides et moins coûteuses. L’influence des traitements à action anti-inflammatoire, comme les agents anti-TNF, sur les lésions inflammatoires du rachis analysées par IRM, a été largement étudiée dans les essais thérapeutiques randomisés [19,20]. Des scores IRM d’activité ont été développés pour les séquences appropriées dans le but de quantifier les lésions actives au cours de la SPA. La méthode la plus validée est le score IRM pour le rachis dans la SPA appelé ASspiMRI (AS spinal MRI scoring system) [6,19], qui a le pouvoir de décrire à la fois les lésions inflammatoires (ASspiMRI-a) et les lésions structurales (ASspiMRI-c). L’activité inflammatoire évaluée par la méthode ASspiMRI-a peut quantifier, soit le rehaussement du signal après injection de gadolinium en séquence pondérée T1, soit l’œdème de la moelle osseuse sur les séquences STIR ou T2-FS. Il est important de rappeler ici qu’il n’existe pas, à ce jour, d’études démontrant

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que les lésions vertébrales actives en IRM soient prédictives des lésions structurales ultérieures. Les modifications structurales sont évaluées par la méthode ASspiMRI-c en établissant une cotation des lésions osseuses sur les séquences IRM pondérées en T1, avant injection de produit de contraste qui n’a pas d’utilité pour l’évaluation des lésions chroniques. 5. Conclusion Nous espérons que l’IRM deviendra un outil reconnu dans la prise en charge des patients atteints de SPA en pratique courante. À l’avenir, l’IRM du corps entier pourrait être utilisée chez les patients atteints de Spa pour la détection des lésions inflammatoires quel que soit leur siège. Références [1] [2]

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Xenofon Baraliakos* Jürgen Braun Rheumazentrum ruhrgebiet, herne, université de la Ruhr, Bochum, Allemagne Adresse e-mail : [email protected] (J. Braun). Reçu le 29 juin 2005 ; accepté le 27 septembre 2005 Disponible sur internet le 05 décembre 2005 *Auteur correspondant. 1169-8330/$ - see front matter © 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rhum.2005.11.002