Particularités des tumeurs de la parotide

Particularités des tumeurs de la parotide

1S74 Ann Pathol 2007 ; 27 : 1S69-1S80 Références [1] Barnes L, Eveson JW, Reichart P, Sidranski D. Pathology and genetics of head and neck tumours. ...

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Ann Pathol 2007 ; 27 : 1S69-1S80

Références [1] Barnes L, Eveson JW, Reichart P, Sidranski D. Pathology and genetics of head and neck tumours. Lyon: IARC Press, 2005. [2] Seethala RR, Barnes EL, Hunt JL. Epithelial-myoepithelial carcinoma: a review of the clinicopathologic spectrum and immunophenotypic characteristics in 61 tumors of the salivary glands and upper aerodigestive tract. Am J Surg Pathol 2007 ; 31 : 44-57. [3] Brochériou C. Tumeurs à cellules claires des glandes salivaires : problèmes diagnostiques. Rev Fr Laborat 2001 ; 333 : 23-7.

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Particularités des tumeurs de la parotide COSTES V Hôpital Gui de Chauliac, CHU de Montpellier, 34295 Montpellier cedex 5.

Plus des 2/3 des tumeurs des glandes salivaires se développent dans la parotide, 15 à 32 % sont malignes (fréquence moindre que dans les glandes accessoires)

Particularités anatomiques et cliniques La parotide comporte deux lobes, superficiel et profond, séparés par un plan conjonctif, dans lequel cheminent les branches du nerf facial. Elle émet plusieurs prolongements, superficiels et para-pharyngé profond, qui rendent la parotidectomie totale difficile. Le plus souvent les tumeurs se développent à partir du lobe superficiel et se traduisent par une masse faciale. Les tumeurs développées au dépends du lobe profond peuvent se traduire par une masse du mur pharyngé latéral. Des lobules accessoires sont localisés le long du canal de Stenon et peuvent engendrer des tumeurs très antérieures de la joue. L’atteinte du nerf facial est un signe de malignité présent dans 12 à 14 % des tumeurs malignes de la glande parotide. C’est aussi un indicateur de mauvais pronostic.

Particularités histologiques La parotide est une glande séreuse presque pure qui peut renfermer des îlots sébacés ou des perles épithéliales kératinisées, rapportés à l’origine ectodermique de la glande. L’intrication avec le tissu lymphoïde est remarquable. Il peut s’agir soit de véritables ganglions avec souvent des acini et des canaux excréteurs englobés au niveau de la médullaire (jusqu’à 25, surtout dans le lobe superficiel), soit de simples nodules lymphoïdes.

Particularités anatomopathologiques Certaines tumeurs se rencontrent pratiquement exclusivement dans la parotide : Tumeur de Wartin, adénome et adénocarcinome à cellules basales, adénocarcinome sébacées. D’autres

sont dans plus de 80 % des cas parotidiennes (carcinome à cellules acineuses, adénome et adénocarcinome oncocytaire, adénocarcinome canalaire salivaire, adénome pléomorphe et carcinome ex adénome pléomorphe, hémangiome). À l’inverse, certains types tumoraux sont rares dans cette topographie : adénocarcinome polymorphe de bas grade, adénome canaliculaire, papillomes ductaux). D’autre part les cellules myoépithéliales sont plus volontiers fusiformes ou claires que plasmocytoïdes dans cette topographie. Pour certaines tumeurs, le diagnostic est automatiquement associé à un grade pronostique : — le carcinome à cellules acineuses, l’adénocarcinome à cellules basales sont par définition de bas grade de malignité. — le carcinome canalaire salivaire, le carcinome épidermoïde primitif ou le carcinome indifférencié sont par définition de haut grade de malignité. Trois entités doivent être gradées de manière spécifique selon leur morphologie en utilisant aussi des critères classiques (atypies, mitoses, différenciation, nécrose) : le carcinome adénoïde kystique, les carcinomes mucoépidermoïdes et les adénocarcinomes SAI « sans autres précisions »

Prise en charge de la pièce opératoire L’encrage de la pièce chirurgicale pour évaluer les limites d’exérèse est indispensable. La tumeur peut être incluse en totalité, si elle est inférieure à 2 cm. Au-delà, un échantillonnage suffisant, par exemple une tranche sur deux, semble adapté. Il est capital d’effectuer ces coupes à l’interface tumeur/tissu sain car c’est le caractère infiltrant qui affirme à lui seul la malignité dans certains diagnostics comme adénome versus adénocarcinome à cellules basales Les tumeurs des glandes salivaires sont hétérogènes, et il est important de les échantillonner correctement. C’est souvent l’examen de nombreuses coupes qui permettra de porter le diagnostic avec certitude…

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L’adénome pléomorphe et ses variantes Il représente la plus fréquente (60 %) des tumeurs des glandes salivaires et plus de 50 % des tumeurs de la parotide (surtout au niveau du lobe superficiel). Il correspond à une prolifération de cellules épithéliales et myoépithéliales qui produisent des quantités variables de matrice muco polysaccharidique qui subit une métaplasie chondroïde ou osseuse. L’adénome pléomorphe fait partie d’un spectre lésionnel dénommé tantôt par le contingent cellulaire prédominant (adénome à cellules basales, myoépithéliomes), tantôt selon des critères architecturaux (adénome canaliculaire, membraneux…). L’encapsulation est inconstante, avec parfois des excroissances de la tumeur au contact direct du tissu parotidien normal. S’il existe une capsule, sa pénétration ou l’extension au-delà n’est pas un critère de malignité lorsqu’il s’agit de « protrusions bien limitées ». Une « rupture » macroscopique est un facteur de risque de récurrence. En présence de foyers de nécrose sans manipulation chirurgicale antérieure : faire des reprises pour chercher la malignité. L’hyper cellularité et la présence de mitoses sont tolérées en l’absence d’atypies Le concept d’adénome pléomorphe (AP) malin regroupe 3 entités : — Carcinome ex AP : les carcinomes (the guest) développés sur un AP (the ghost) représentent 6 % des tumeurs mixtes. Ils se présentent typiquement chez les hommes (discrète prépondérance féminine) de plus de 60 ans (10 ans après AP) avec une longue histoire de nodule parotidien qui a récemment augmenté de volume. Le risque de malignité augmente avec la durée de la tumeur (10 % après 15 ans). Il s’agit le plus souvent de tumeur manifestement infiltrante. Le diagnostic nécessite soit l’identification d’un contingent d’AP bénin associé à un contingent épithélial malin, soit une histoire antérieure de résection d’AP dans le même site. Ils sont classés en : — Non invasif = in situ = intracapsulaire : rares, leur identification nécessite un échantillonnage soigneux pour éliminer une effraction capsulaire. Attention aux modifications liées aux cytoponctions : hémorragie, nécrose, dystrophies… quelques atypies très focales surtout vues dans le contingent myoépithélial ne modifient pas le diagnostic d’AP. Il faut savoir reconnaître un contingent de carcinome intra-canalaire. L’expression membranaire de HER-2 semble être un bon marqueur de transformation maligne. Ils ne nécessitent pas de traitement complémentaire mais une surveillance étroite. — Microinvasif (pénétration extra capsulaire < ou = à 1,5 mm) : très bon pronostic. — Macroinvasif (> 1,5 mm) : le type histologique le plus fréquent est l’adénocarcinome peu différencié, parfois difficile à classer (adénocarcinome not overwide specified). Presque tous les types histologiques ont été décrits, parfois associés. Le pronostic est défavorable (25 à 65 % de survie à 5 ans), lié à l’importance de l’extension du contingent tumoral hors du nodule tumoral et au grade histologique du contingent malin. — Carcinosarcome : exceptionnel et de mauvais pronostic, il associe un contingent carcinomateux et sarco-

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mateux (chondrosarcome +) soit intimement mêlés soit adjacents. — Adénome pléomorphe métastasiant : il correspond à des nodules d’AP bénin en positions pulmonaire, osseuse ou ganglionnaires. Exceptionnel il fait en général suite à une histoire d’AP récurrent : manipulation chirurgicale ?

Lésions kystiques avec stroma lymphoïde Deuxième tumeur parotidienne en fréquence, la tumeur de Warthin est considérée comme un adénome développé aux dépens de canaux salivaires ectopiques présents dans le tissu lymphoïde intra ou péri parotidien. Plus fréquent chez les fumeurs, elle est multiple dans 12 % des cas, bilatérale dans 5 à 7,5 % des cas. Le diagnostic est facile dans la forme typique : kystes plus ou moins visibles en macroscopie avec un contenu épais mucoïde brun, prolifération papillaire d’un épithélium oncocytaire bistratifié reposant sur un tissu lymphoïde. Parfois l’épithélium est épaissi, en métaplasie malpighienne avec disparition de la couche cylindrique et présence de quelques cellules à mucus. Ces modifications s’observent parfois après infarctus secondaire à une cytoponction. Dans ces formes remaniées on pourra discuter : — Un kyste lymphoépithélial. Pratiquement spécifique de la parotide, il se développe à partir des canaux excréteurs de moyen et petit calibre. Le revêtement est le plus souvent de type malpighien kératinisant mais parfois cubique, cylindrique ou pseudo-stratifié cilié. Des cellules à mucus ou des cellules sébacées sont parfois observées. Cet épithélium repose sur un tissu lymphoïde dense renfermant des follicules aux centres germinatifs activés. — Une autre tumeur salivaire avec un stroma lymphoïde : adénocarcinome à cellules acineuse, carcinome mucoépidermoïde. — La métastase ganglionnaire d’un carcinome épidermoïde (en général du nasopharynx). — Les kystes lymphoépithéliaux liés à HIV : l’hyperplasie lymphoïde des glandes parotides liée au HIV survient chez environ 55 % des sujets HIV+ adultes mais est beaucoup plus fréquentes chez les enfants séropositifs. Il s’agit d’une manifestation précoce qui apparaît avant le développement du SIDA. Cette hyperplasie est habituellement bilatérale, s’accompagne d’adénopathies cervicales et présente un aspect radiologique caractéristique. Histologiquement le tissu lymphoïde montre des modifications superposables à celles décrites dans le syndrome des adénopathies persistantes liées au HIV. Des kystes épithéliaux et des îlots épimyoépithéliaux sont présents (T8 < T4). Le traitement est essentiellement esthétique. Ces hyperplasies parotidiennes n’ont pas d’incidence sur la progression de la maladie. — le kyste branchial amygdaloïde est écarté sur des critères topographiques. Il s’agit d’une lésion latérocervicale, qui peut exceptionnellement intéresser le pôle inférieur de la parotide.

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TABLEAU I. – Classification des proliférations lymphoïdes des glandes salivaires avec LEL. Sialadénite lymphoépithéiale

Infiltrat lymphoplasmocytaire avec LEL

Plasmocytes polyclonaux (cellules B polyclonales)

Bénin

Sialadénite lymphoépithéiale

Infiltrat lymphoplasmocytaire avec LEL

Plasmocytes polyclonaux (cellules B monoclonales)

Borderline

Sialadénite lymphoépithéliale avec halos monocytoïdes

LEL avec halos de cellules monocytoïdes

Plasmocytes polyclonaux (cellules B polyclonales)

Borderline

Lymphome B de la zone marginale de type LEL avec cellules monocytoïdes et/ou MALT lymphocytes B atypiques en nappes

Plasmocytes polyclonaux (cellules B monoclonales)

Lymphome indolent

Lymphome B de la zone marginale de type MALT avec différenciation plasmocytaire

Idem avec maturation plasmocytaire monoclonale

Plasmocytes et cellules B monoclonales

Lymphome indolent

Lymphome B diffus à grandes cellules

Plages de grandes cellules B plus ou moins associées à des zones de lymphome de la zone marginale de type MALT

Poly ou monoclonaux (cellules B monoclonales)

Lymphome agressif

Lésions lymphoépithéliales de la glande parotide

SIGNIFICATION

DES INFILTRATS LYMPHOÏDES ASSOCIÉS À DES LÉSIONS LYMPHOÉPITHÉLIALES

(LLE) Cette association correspond à un large spectre de proliférations lympho +/– plasmocytaires allant de la bénignité (lésions lymphoépithéliales bénignes ou sialadénite myoépithéliale d’origine autoimmune) à des lymphomes B à petites (lymphome B de la zone marginale) et à grandes cellules (lymphome du MALT de haut grade, lymphome B à grandes cellules) La plupart des lésions considérées autrefois comme bénignes sont aujourd’hui considérées comme des lymphomes du MALT. Le classement bénin/malin est parfois difficile et certains auteurs préfèrent utiliser le diagnostic de « prolifération clonale de signification indéterminée » pour les cas difficiles.

ÉVALUATION

DES LÉSIONS LYMPHOÉPITHÉLIALES DANS LES GLANDES SALIVAIRES

Les lésions lymphoépithéliales (îlots épimyoépithéliaux) correspondent à une infiltration des lymphocytes dans l’épithélium canalaire qui s’accompagne de modifications épithéliales, d’une perte de la lumière et souvent d’une hyalinisation des membranes basales. Un immunomarquage des cytokératines peut être utile pour voir les LLE. Les cellules de l’infiltrat sont majoritairement petites centrocytique-like (CD20+, CD10–,

CD5–,CD23–) avec rares grandes cellules. Une expression de bcl2 ou CD43 par les lymphocytes B est en faveur de leur malignité. Des centres germinatifs et des plasmocytes sont souvent présents. Il est important de reconnaître la présence et la topographie de cellules monocytoïdes à cytoplasme pâle. Ces cellules monocytoïdes peuvent rester confinées dans les îlots épithéliaux ou en couronne autour ou encore en nappes confluentes (d’un îlot épithélial à un autre). Une différenciation plasmocytaire franche est en fait rare. Dans ce cas il faut évaluer la clonalité en repérant une zone tumorale et comparer kappa et lambda. Dans les zones non transformées il peut persister une polyclonalité.

Références [1] Lewis JE, Olsen KD, Sebo TJ. Carcinoma ex pleomorphic adenoma: pathologic analysis of 73 cases. Hum Pathol 2001 ; 32 : 596-604. [2] Di Palma S, Skalova A, Vanieek T, Simpson RH, Starek I, Leivo I. Non-invasive (intracapsular) carcinoma ex pleomorphic adenoma: recognition of focal carcinoma by HER2/neu and MIB1 immunohistochemistry. Histopathology 2005 ; 46 : 144-52. [3] Ihrler S, Weiler C, Hirschman A, Sendelhofert A, Lang S, Guntinas-Licius O. Intraductal carcinoma is the precursor of carcinoma ex pleomorphic adenoma and is often associated with dysfunctional P53. Histopathology 2007 ; 25 : 125-9. [4] Zarbo R. Salivary gland neoplasia: a review for the practicing pathologist. Mod Pathol 2002 ; 15 : 298-323. [5] Jaffe E. Lymphoid lesions of the head and neck: a model of lymphocyte homing and lymphomagenesis. Mod Pathol 2002 ; 15 : 255-63.

Particularités des tumeurs des glandes salivaires accessoires URO-COSTE E Service d’Anatomie Pathologique et Histologie-Cytologie, CHU Rangueil, Toulouse, France.

La cavité buccale contient 500 à 1 000 glandes salivaires accessoires (GSA), mesurant 1 à 5 mm, disséminées dans toute la muqueuse et drainées chacune par un petit canal excréteur. Elles ne sont pas encapsulées et sont bien souvent intriquées au tissu musculaire ou adi-

peux. Cette absence de limitation rendra difficile l’appréciation du caractère infiltrant. Les tumeurs malignes des GSA se concentrent autour de trois diagnostics : carcinome adénoïde kystique, carcinome mucoépidermoïde et adénocarcinome polymorphe

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