141 Journal of Molecular Strrrctrrre.20 (1974) 141-146 Q Elsewer Scientific Publishing Company, Amsterdam
ANALYSE CONFORMATLONNELLE ACLDE-BASE DE LEWIS VII’. LE BORANE,
CAS DE LA (CH,),P - BH,
MOLECULE
- Printed
m The Netherlands
THEORTQUE DE
DES
COMPLEXES
TRLMETHYLPHOSPHINE-
MARIE-CHANTAL BACH-CHEVALDONNET, FRANCOIS CRASNIER, JEAN-FRANCOIS LABARRE Laboratoire de Chimie de Coordination associP au C.N.R.S. No. 160, UnicersirP Paul Sabatier, 38 rare des 36-Pants. 31078 - Totdouse-C@dex (France) CLAUDE SociPfd
LEIBOVICI Nationale
der
P&roles d’Aqurtaine, Traitement de I’lnformation, acenrre Jules Ferry,
64000 - Pau (France) (Recu
le 22 mai 1973)
ABSTRACT
The conformational analysis and the electronic structure of the trimethylphosphine-borane Lewis adduct are investrgated within the framework of the CND0/2 approximation. The methyl groups take up the Lem conformation and and the whole molecule is staggered with respect to the P - B bond. The rotational barriers around the P - B and P-C bonds are respectively 4.09 and 3.83 kcal mole- ‘. Their origin is due to the spatial energy interaction terms between the phosphorus atom and the 12 hydrogens. The computed value of the dipole moment (6.0 D) matches the two available experimental data.
RtSUMC:
La methode CND0/2 est appliquee a l’analyse conformationnelle et & la connaissance de la structure Clectronique du complexe de Lewis (CH,),P - BH, _ Les groupements m&hyles adoptent la conformation Lem, et le groupement BH, est trouvi en position decal& par rapport au motif (CH,),P. Les barrieres B la rotation autour des liaisons P - B et P-C valent respeetivement 4.09 et 3.83 kcal mole- ‘. L’origine de ces barrieres est due aux termes inergCtiques d’interaction dans l’espace qui existent entre l’atome de phosphore et les 12 hydrog&nes de la mol&.rle. La valeur calculee du moment dipolaire (6.0 D) est en bon accord avec les determinations experimentales. * VI: G. Robinet,
J.-F.
Labarre
et C. Leibovici,
Chem. Phys. Left., 22 (1973) 356.
142 INTRODUCTION
Un ensemble de travaux recents nous a permis de montrer que la methode SCF-LCAO-MO dans l’approximation CND0/2 de Pople et Segal [1] est indiscutablement bier-r adaptee a l’analyse conformationnelle theorique des systemes moleculaires e’lecironiqrrement IoculisPs, que ceux-ci appartiennent d’ailleurs a la chimie organique [2], a la chimie minerale 131 ou encore a la partie importante de cette derniere que constitue la chimie de coordination [4]. 11 nous parait indispensable de souligner avec insistance que ce que nous venons de dire n’a de sens que lorsque l’edifice etudie ne peut &re le siege d’aucune delocalisation electronique notable; cette remarque a pour but de rendre vaine toute polemique qui pourrait Etre alimentee par les deux articles recents de Gropen et Seip dune part [5] et de Perahia et Pullman [6] d’autre part, articles qui ont condamne - 5 juste titre d’ailleurs - l’utilisation de la methode CND0/2 pour la prediction des conformations privilegiees d-edifices co/ljlrguPs, done electroniquement de’localis&. Les recherches poursuivies dans notre groupe ont done eu l’indret de delimiter un domaine p&is de la chimre oti l’approche CNDO/Z parait une methode de choix pour l’analyse conformationnelle des molecules. Les succ&s obtenus ont CtC, nous semble-t-il, particulierement significatifs en chimie de coordination dans le domaine des complexes acide-base de Lewis: il a Cte en effet possible soit de reproduire et d’interpreter par le calcul les don&es conformationnelles experimentales fournies par les techniques les plus sures - cas de F,P - BH, et F,HP - BH, [4a], cas de (CH,)H,P - BHs [4bJ par exemple soit de construire (lorsqu’il Ctait ma1 connu par voie experimentale) un modele geometrique et conformationnel plausible - cas de H,N - BH, [4c], de H,P - BHs [4d] et de leurs derives fluor&. Dans le mEme esprit, l-etude d’autres composes de coordination de reference - tels (CH,),SO, [4e] ou (CH,),SO [4f] - ou de composes de Lewis plus complexes - tels H,PO - BF, [4g] ou (CH,),SO - BF, [4h] - nous a conduits en tous cas a un accord particuli&ement satisfaisant entre rksultats du calcul et experience quant a l’analyse des conformations et des drstributions Clectroniques. 11 est bien certain que de tels travaux se trouvent beaucoup facilites des qu’une giometrie trts fine du systeme CtudiC a pu &re proposee par telle ou telle equipe d’expkimentateurs. C’est pour cette raison que nous avons d&eloppC ces dernieres annees une collaboration aussi itroite que possible avec certaines de ces dernieres, notamment dans le domaine de la spectroscopic micro-ondes et plus particulierement avec R. L. Kuczkowski de 1’UniversitC d’Ann Arbor. Cette collaboration nous a deja permis de mener ti bien l’etude theorique de la molecule (CH3)H2P - BH, et c’est dans la ligne directe de ce travail que nous nous proposons de rapporter ici des rksultats de l’ttude du trimCthylphosphine borane, (CHs),P - BH,, mokule dont la gkomttrie a &C tout recemment determike
143 par Bryan et Kuczkowski [7] mais dont l’analyse conformationnelle n’a pu etre completement prCcisee par voie experimentale. Tous les calculs ont CtC effectues au moyen de la parametrisation orrginale de Pople et Segal (11 et & l’aide de I’ordmateur IBM 370-165 du CIRCE du CNRS (Orsay, France).
ANALYSE
CONFORhlATlONNELLE
11 n’etait pas question de d&ire par le calcul l’hypersurface de potentiel 5-dimensionnelle qui ett permis de rendre compte des variations de l’energie du systeme lors de la mise en rotation simultanee des trois _moupements methyles et du groupe BH, autour des liarsons qui les unissent au phosphore. A l’autre extremite de l’echelle des complexites, on aurait pu admettre que les trois groupements CH, presentent darts le complexe la conformation privilegiee - appelee conformation (60, 60, 60) ou encore conformation Lem [8] - qui est la leur aussi bien experimentalement [9] que theoriquement [8] dans la molecule de trimethylphosphme libre; le probllme alors se serait reduit a celui de la variation de l’energie totale avec la seule rotation a du goupement BH3 autour de la liaison P . B. Compte tenu des difficultes rencontrees et soulignees par Bryan et Kuczkowski [7] dans le positionnement rigoureux par voie experimentale des atomes d’hydrogene des groupements methyles, nous avons done choisi une solution intermediaire entre les deux precedentes et CtudiC la variation de l’energie en fonctron de a pour chacune des dix conformations particulieres (#I, y, 6) rapportees dans le Tableau 1. La signification de la symbolique (8, y, 6) ainsi utilisee a CtC anterieurement don&e [8]: nous avons srmplement ici, dans le but de simphfier I’ecriture, remplace une notation telle que (60, 60, 60) par celle, plus abrCgCe, (666). TABLEAU VALEURS
I DE
~hIERGlE
TOTALE
ptis)
(& -26.OOOkcalmole-
u=o”
10”
20’
30’
40’
50’
333
23.887 33.561
24.33 1 34.197
25.534 35.359
27.150 36.728
28.737 37.941
29.880 38-686
666 003
40.410 27.151
33.156
43.480 31.850 34.556
44.227 32.859
30.296 30.377 35.833 35.804 38.123
41.435 28.853 31.737
42.458 30.387
006 033 633 066 366
40.685 27 661 30.684 30.952 36.412 36.136 38.517
32.130 37.378 37.038 39.4.05
33.582 38.632 38.260 40.544
34.920 39.783 39.471 41.631
35.568 35.797 40.680 40.352 42.379
036
33.098
33.550
34.590
35.928
37.203
38.082
000
POURLESDIFF~REMES
60:
CONFORMATIONSENVISAG~S
70”
80’
go=
100’
110”
38.173
37.035
35.654
34.405
33.635
32 685
31.542
30.022
28.528
27470
30.295 38.772 44.500 33.163 35.936 35.991
35.452
34.310
32.859
31.487
30.573
40.954 40.672
40.191
39.184
37.922
36.747
35 981
42.592
42.21
41.334
40.192
39.092
38.333
3&.341
37.911
36.900
35.569
34.271
33-362
I
144 Pour chacune done de ces conformations, now avons alors fait varier [Yde (0”, 110”) en tenant compte, bien entendu, des symetries du systeme etudie lorsque celles-ci existent. Le Tableau 1 montre alors 5 l’evidence que la conformation moEculaire privrl&j~e est bien obtenue pour une conformation Lem du groupement (CH,)3P et pour UR angIe OLegaI 5 60”_ L’origine des E ayant et6 choisie de telle manike que les trois liaisons (P-C) kclipsent les trois Iiaisons (B-H), on voit ainsi que la conformation prrvilegiee de la molecule (CHa),P - BH3 est la conformation decalee. Ces risultats sont en parfait accord avec ceux de Bryan et Kuczkowski [7] en ce qui concerne l’arrangement spatial des trois groupements mCthyles mais precisent cette etude experImentale en ce qui concerne la valeur privilegiee de a, celle-ci n’ayant pu Etre dCtermir&e meme d’une man&e approchee. L’analyse theorique permet en outre de chlffrer quelques parametres conformationnels dont la valeur expirimentale n’a pu etre determinee: - la barriere 2 la rotation AGT amour de Ia Iiaison (P - B) vaut: 10” en 10” dans l’intervalle
AGf = E(6,6,6),,,oo-E(6,6,6)==~a
= 4.09 kcal mole-’
- celle AC:
pondante
d’un groupement methyle autour de la liaison (P-C) dans la conformation LT= 60” vaut:
A@
= E(6,6,6),=,,0
--E(0,6,6)Z,6,0
corres-
= 3.83 kcal mole- ’
L’origine de ces barrieres a iti obtenue d’une mar&e dksormais classique [3, 41 en utilisant le decoupage de I’knergie dG & Pople et Beveridge [lo]:
E=CE,+ A ou
CEAB
A-=B
encore:
E = E,+E,,, avec EI=cEA+
En,
=
c
A
EAB
(A et B chimiquement
lies)
A-=B ~EAEI
(A et B non chimiquement
lies)
A
La conclusion 2 laquelle nous parvenons ainsi est que l’existence de AC: et de AG: est due pour la plus grande part aux interactions biilectroniques existant entre l’atome de phosphore et les douze atomes d’hydrogene de la mol&ule. On retrouve ainsi - en le g&Walisant - le resultat fondamental auquel nous sommes SystCmatiquement parvenus lors de l’etude conformationnelle des compo&s renfermant les motifs M-CHa ou M - BX3 (X = H ou F) avec la restriction que M appartienne % la deuxieme ligne longue du tableau pkriodique: nous avons en effet montrk qu’il n’en est plus du tout ainsi lorsque M est un atome dans lequel des orbitales de polarisation ne peuvent en aucune man&e exister 11l]_
145 Pour aller plus loin, nous preciserons que, conformement ti ce que nous avions deja observe dans le cas de la molecule (CH,)H2P . BHa [4b], le terme = E(p - - - HB) d’interaction du phosphore avec les hydrog&res du groupement G BHJ, qui rend compte a lui seul des AG dans F,P - BHs et F,HP - BH, et qui n’intervient pIus que pour 50% darts les AG de la mol&ule (CH,)H,P-BHs [4b], voit ici encore son importance relative diminuer au profit du terme r, = E(P - - - Hc) d’interaction du phosphore avec les neuf hydrogenes mCthyliques: on retrouve ainsi le phenomene selon lequel dans une molecule du type X3P - BH, I’effet du terme T,, determmant Iorsque X = H ou F [&I], s’attinue progressivement lorsque X est un groupement methyle au profit de termes du type T2.
STRUCTUREFLECTR~NIQUE Les charges Clectroniques et les indices de Wiberg [12] de la molecule dans sa conformation priviligiee (a = 60”, conformation Lem pour le groupement (CH,),P) sont rassembles dans le Tableau 2. TABLEAU 2 CHARGES
~LEC~RONIQUES
QAm
INDICES
DEWIBERG
W,,,
DE LA MOLiCULE
DANS SA CONFORMATION
PRIVILiCI6E
A tome
QA
Liaison
W AD
P C H ,CBP Htcjb
4.748 4.147 0.950 0.938 3.228 I .034
P-B P-C c-w c-w B-H
1.065 I.143 0.937 0.940 0.901
:,.I
a Pour l’atome situ6 duns le plan PBC. b Pour les deux atomes situ6s hors da plan PBC. ’ Pour la liaison C-H situ&e dons le plan PBC. d Pour les dew liaisons C-H sltuk hors de ce plan.
La valeur calculCe (6.0 D) du moment dipolaire pour cette conformation est en bon accord avec les valeurs experimentales, l’une obtenue par effet Stark (4.99+0.02 D) [7] et I’autre par la technique du super-hetirodyne (4.97 D) 1131.
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J.-F. Labarre
et J.-F_ Tocanne,
Tetrahedron, 27 (1971)
et J.-F. Labarre, Tetrahedron Lett., 40 (1971) 3759; Tetrahedron,
146 3 Cf. par exemple: M.-C. Bach, F. Crasnier, J.-F. Labarre et C. Leibovici, 1. Mol. Srrucrrrre, 13 (1972) 171; J.-F. Labarre et C. Leibovici, C/rem. P~IJS. Lerr., 14 (1972) 449; F. Crasnier, J.-F. Labarrc et C. Lerbovici, J. Fhorme Chem., 3 (1973) 307. 4 (a) J.-F. Labarre et C. Leibovici, fnr. J. Qrronrum C/rem., 6 (1972) 625. (b) F. Crasnier, J.-F. Labarre et C. Leibovici, J. Mol. Structure, 14 (1972) 405 (c) M.-C. Bach, F. Crasnier, J.-F. Labarre et C. Leibovicr, /. Mol. Sfrrrcrure, 16 (1973) 89. (d) M.-C. Bach, F. Crasnier, J-F. Labarre et C. Leibovici, 1. Fhorine Ciwm.. 3 (1973) 409(e) G. Robinet, F. Crasnier, J.-F. Labarre et C. Leibovicr, Tileor. Chim. Acra, 25 (1972) 259 (f) G. Robinet, C Leibovici et J.-F. Labarre, Theor. Chim. Acm, 26 (1972) 257. (g) J.-F. Labarre et C. Leibovici, 1. Chim. Phys., 70 (1973) 687. (h) G. Robinet, J.-F. Labarre et C. Leibovici, Chenr. Phys. Left., 22 (1973) 356. 5 0. Gropen et H. M. Seip, C/e/n. Phys. Lerr., 1 I (1971) 445. 6 D. Perahia et A. Pullman, Chenr. Phyx. Left., 19 (1973) 73. 7 P. S. Bryan et R. L. Kuczkowskr, fnorg. Cherrr., 1 I (1972) 553 8 M. Corosine, F. Crasnier, M.-C. Labarre, J.-F. Labarre et C. Leibovici, Ciwm. Pi~ys. Left., 20 (19731
11 I.
9 D. R. Lide et D. E. Mann,
10 1I 12 13
1. Chem. P/I_vs., 29 (1958) 914; L. S. Bartell et L. 0. Brockway, 1. Che/lr. Phys., 32 (1960) 512. J. A Pople et D. L. Beveridge, Approximafe Molccrrlu Orbiral Throry, McGraw-Hill, York, 1970. G. Robine:, C. Leibovici et J.-F. Labarre, CherJr. Piqs- Lerf., 15 (1972) 90. K. Wiberg, Terrohedron, 24 (1968) 1083. J. G. Morse et R W. Parry, J. C/rem. Phys., 57 (1972) 5365.
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