Bases Physiopathologiques, Mécanismes et Facteurs de Risque

Bases Physiopathologiques, Mécanismes et Facteurs de Risque

5 BASES PHYSIOPATHOLOGIQUES, MÉCANISMES ET FACTEURS DE RISQUE MÉCANISMES ET FACTEURS DE RISQUE DES THROMBOSES VEINEUSES Ismail ELALAMY, Gregoris GER...

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BASES PHYSIOPATHOLOGIQUES, MÉCANISMES ET FACTEURS DE RISQUE

MÉCANISMES ET FACTEURS DE RISQUE DES THROMBOSES VEINEUSES Ismail ELALAMY, Gregoris GEROTZIAFAS, Meyer-Michel SAMAMA L’incidence des thromboses veineuses (TV) est de l’ordre de 1/1 000 par an. En France, la fréquence des thromboses veineuses profondes (TVP) des membres inférieurs est estimée à 70 000 cas/an. La complication principale de ces dernières est représentée par l’embolie pulmonaire (EP), de pronostic redoutable (plus de 20 000 décès par an en France) : un nombre non négligeable concerne en fait des cancéreux en phase terminale. Les accidents thrombotiques veineux et les séquelles post-thrombotiques représentent une part importante des dépenses de santé avec un coût > 1 milliard de dollars par an, aux États-Unis. Les conditions responsables de la thrombogenèse veineuse sont connues depuis la célèbre triade de Virchow associant la stase sanguine, la lésion de la paroi endothéliale et l’altération de l’équilibre hémostatique. Plus des 2/3 des TV sont asymptomatiques et l’EP est le plus souvent silencieuse, soulignant ainsi l’importance d’une prophylaxie appropriée dans les contextes favorisants. En fait, l’accident résulte de l’intrication complexe de facteurs génétiques, retrouvés chez près de la moitié des patients, avec des facteurs de risque environnementaux (cancer, grossesse, intervention chirurgicale, contraception orale) et/ou des facteurs de risque acquis (syndrome des antiphospholipides [SAPL], hyperhomocystéinémie), transitoires ou persistants. Les facteurs conduisant à un risque thrombotique accru sont donc de nature diverse et leur association apparaît plus souvent potentialisatrice qu’additive (tableaux 5.I et 5.II). Permettant une véritable stratification du risque thrombotique, la connaissance croissante de ces mécanismes autorise une optimisation de la prise en charge des patients et de la prévention des TV. Nous étudierons les localisations habituelles, les facteurs de risque découlant souvent de la triade de Virchow, avant d’analyser les mécanismes de la thrombogenèse veineuse.

154 Maladies thrombosantes Tableau 5.I. Facteurs de risque de TV Facteurs acquis Âge Antécédent de thrombose Cancer Immobilisation prolongée > 72 h Immobilisation plâtrée Acte chirurgical Traumatisme majeur : polytraumatisé, fractures multiples, lésion moelle épinière par exemple Traitements hormonaux : contraception, traitement substitutif de la ménopause Grossesse et post-partum SAPL (exceptionnellement familial) Syndrome myéloprolifératif (JAK2?) Cathéter central Insuffisance cardiaque congestive Obésité Varices TIH

Facteurs constitutionnels

Facteurs mixtes ou non établis

Déficit en AT Déficit en PC Déficit en PS FVL Mutation du FII

Hyperhomocystéinémie  du FVIII  du FIX  du FXI  du TAFI Dysfibrinogénémie

AT : antithrombine, FVL : facteur V Leiden, PC : protéine C, PS : protéine S, TIH : thrombopénie induite par l’héparine

Tableau 5.II. Analyse des facteurs de risque selon la triade de Virchow Stase Lésion de la Altération de veineuse paroi vasculaire la coagulation Âge > 60 ans

+

Obésité

+

+

Grossesse

+

+

Immobilisation ou paralysie

+

Chirurgie orthopédique

+

+/–

+

Traumatisme des membres inférieurs

+

+

+

Insuffisance cardiaque

+

IDM (phase aiguë)

+

Accident vasculaire cérébral

+

Cancer Chirurgie générale

+/– +/–

+/–

+

+

+

+

+

Thrombophilie héréditaire ou acquise Insuffisance veineuse ou varices

+/– + +

+ : implication comme facteurs de risque de la triade de Virchow +/– : implication comme facteurs de risque de la triade de Virchow dans certains cas IDM : infarctus du myocarde

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Mécanismes et sites privilégiés de l’apparition des TV Les TV surviennent classiquement au niveau des veines profondes des membres inférieurs, mais elles peuvent encore siéger dans le réseau superficiel aux membres supérieurs, dans les sinus cérébraux, dans le système porte, au niveau rétinien ou dans des sites insolites (maladie de Mondor du sein). Le thrombus veineux apparaît dans les zones dites à bas débit sanguin : les sinus veineux ou les sacs valvulaires des veines profondes des membres inférieurs par exemple (fig. 5.1 et 5.2). L’extension du thrombus responsable de l’occlusion veineuse suit une progression rétrograde. Les valves sont avasculaires et dépendent directement de la qualité du flux circulatoire pour l’apport d’oxygène et d’autres nutriments. La stase entraîne une hypoxémie locale qui favorise l’expression du FT. Les valvules peuvent aussi subir des traumatismes au même titre que la paroi vasculaire. Un bon exemple est l’intervention chirurgicale pour prothèse totale de hanche responsable d’une lésion potentielle de la veine fémorale. De même, le traumatisme engendré par les cathéters centraux peut favoriser des thromboses des membres supérieurs. Les cytokines pro-inflammatoires sont capables d’induire une activation endothéliale responsable d’une surexpression des molécules adhésives, qui favorise alors l’adhésion des leucocytes à la surface vasculaire. Les monocytes liés à la paroi peuvent exprimer du FT tandis que les neutrophiles génèrent des radicaux libres d’oxygène ainsi que des protéases. Les microparticules relarguées par les plaquettes accumulées au niveau du site lésionnel favorisent la formation du caillot. Les TV des membres supérieurs représentent moins de 5 % de l’ensemble des TVP. Leur prévalence ne cesse de croître en rapport, le plus souvent, avec une cause

Fig. 5.1. Formation du caillot. (Sevitt S. J Clin Path 1974; 27 : 517-528).

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Coll

GPIb-IX-V VWF

Facteur tissulaire GPIa-IIa 6

1 TxA2

Fibrinogène

COX1

Fg

GPIIb-IIIa

Thrombine 4 Prothrombine

2 AD

Voie extrinsèque

XIIIa

TxA2

3

Fibrine

ADP

Prothrombinase Ca2+ + V + Xa Membrane plaquettaire

X 5

Ca2+ + VIII + IXa Membrane plaquettaire

IX Voie intrinsèque

PL3 XIa Microparticules

XI

XIIa

XII

Surface contact

Fig. 5.2. Étapes intriquées de l’atteinte endothéliale, de l’activation des plaquettes et de la coagulation plasmatique. Après la survenue d’une lésion endothéliale ou de la rupture d’une plaque athéroscléreuse, l’activation de la cascade de la coagulation est à l’origine d’une génération accrue de thrombine. La thrombine amplifie la réponse plaquettaire qui est elle-même initiée par la mise à nu des fibrilles de collagène présentes dans le sous-endothélium et aboutit à la génération de thromboxane A2 (TxA2) (vasoconstricteur et proagrégant) et à l’induction enzymatique pro-inflammatoire (cyclooxygénase [Cox], phospholipases par exemple) majorant la coopération intercellulaire. Cela illustre bien le caractère plurifocal de la réponse après une lésion vasculaire.

iatrogène. Le syndrome du défilé thoracobrachial est la cause primitive la plus fréquente de TV du membre supérieur (50 % des cas). La compression de la veine sous-clavière ou axillaire se complique dans 30 % des cas de thrombose. Cet accident survient dans plus de 75 % des cas avant 40 ans. Au-delà de 50 ans, une cause secondaire néoplasique doit être recherchée (voir chapitre 6).

Stase sanguine La stase est un élément prépondérant de la thrombogenèse veineuse. Elle favorise d’une part l’accumulation des différents facteurs procoagulants et limite d’autre part l’élimination des facteurs activés. Différents phénomènes peuvent être responsables du ralentissement du flux sanguin. L’immobilisation ralentit le retour veineux par défaut de contraction musculaire. La réduction de la marche liée à un état grabataire ou à une impotence fonctionnelle est un facteur de risque démontré d’accident thrombotique

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veineux postopératoire. Ainsi, les TVP sont 4 à 9 fois plus fréquentes dans le membre paralysé chez les sujets hémiplégiques alors que la fréquence est identique dans les deux jambes des patients paraplégiques. La survenue d’un accident thrombotique est aussi liée au type de geste opératoire, à la durée de l’intervention chirurgicale, à la pathologie sous-jacente ou au terrain du patient pouvant aggraver cette stase. L’obésité responsable d’une mobilité réduite et associée à une réduction de l’activité fibrinolytique pourrait ainsi majorer le risque de TVP postopératoire. La compression extrinsèque (hématome, kyste, tumeur) ou la persistance de séquelles post-thrombotiques gênant le retour veineux majorent le risque thrombotique. Le syndrome de Cockett (ou syndrome de compression veineuse iliocave) correspond à la compression de la veine iliaque primitive gauche entre le disque lombosacré et la 5e vertèbre lombaire en arrière et l’artère iliaque primitive droite en avant. Le plus souvent asymptomatique, ce syndrome peut être responsable d’œdème chronique du membre inférieur gauche avec des signes d’hypertension veineuse ou des varices, de thrombose iliaque gauche en contexte gravide ou après un voyage prolongé, et même d’une compression de l’artère iliaque primitive gauche. En cas d’hypercytose (polyglobulie, hyperleucocytose, leucémie par exemple), de dysglobulinémie (myélome, Waldenström) ou de syndrome myéloprolifératif, l’hyperviscosité sanguine est un élément à ne pas négliger. La déshydratation peut renforcer l’hypercoagulabilité plasmatique éventuelle par l’hémoconcentration des facteurs procoagulants. Les diurétiques utilisés au cours d’une défaillance cardiaque congestive peuvent ainsi contribuer à accroître le risque thrombotique par la majoration de l’hémoconcentration associée à la stase sanguine. Les dilatations veineuses ou varices sont fréquentes. En cas de grossesse ou de prise de contraception orale œstroprogestative, elles peuvent majorer le risque thrombotique en contexte chirurgical postopératoire. La TV superficielle est une complication fréquente de la maladie variqueuse. Elle peut favoriser la survenue de TVP. Les varices représentent la huitième cause d’hospitalisation en France (200 000 interventions/an). Toutefois, si la stase est un phénomène physique important, elle semble incapable à elle seule de générer un thrombus. En effet, des études ultrastructurales ont révélé l’existence de lésions endothéliales associées, responsables d’une perméabilité vasculaire accrue, d’une adhésion leucocytaire et d’une migration cellulaire importante.

Lésions endothéliales Elles jouent classiquement un rôle plus important dans le déterminisme des thromboses artérielles que veineuses. Les causes de l’atteinte endothéliale dans la pathologie des veines sont toutefois assez nombreuses : – traumatismes opératoires : les interventions pour prothèse de hanche ou du genou sont particulièrement associées à une incidence accrue de TV. Les tractions

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vasculaires et le traumatisme médullaire lors de l’utilisation d’un garrot seraient responsables de l’activation de la coagulation aboutissant à une génération importante de thrombine. Néanmoins, il ne faut pas méconnaître l’existence de thromboses postopératoires du côté opposé à celui opéré, qui n’obéissent pas à ce mécanisme; – sclérothérapies : la survenue de TV n’est pas négligeable au décours de séances itératives de sclérothérapie. En cas de thrombophilie constitutionnelle, le rapport bénéfice/risque de ce geste devrait être particulièrement analysé; – cathéters veineux : la prévalence de thrombose sur cathéter des gros troncs veineux est d’environ 5 % et 1/3 des TV des membres supérieurs seraient dues à un cathéter veineux. Elle est liée au terrain (inflammation, thrombophilie), au matériau (positionnement correct ou non, taille du diamètre plus ou moins importante, nature non mouillable en silicone ou en polyuréthane), à la durée prolongée du maintien du dispositif et au type de produits perfusés (chimiothérapie type bléomycine, microparticules des solutés de perfusion). Ce matériel étranger est classiquement recouvert par un manchon fibrinocruorique mais c’est le thrombus mural en regard de l’extrémité du cathéter qui est responsable de la symptomatologie clinique. Ce type de thrombose est aussi facilité par l’infection secondaire du cathéter (staphylocoque doré, bacille Gram négatif ou Candida albicans); – mise en place d’une sonde de stimulateur cardiaque : elle se compliquerait de TV du membre supérieur dans près de 30 % des cas; – injections multiples des toxicomanes : ce contexte associe le caractère traumatique itératif au caractère procoagulant des substances injectées (cocaïne, amphétamines, quinine par exemple); – antécédents de TV : le risque relatif de récidive serait quintuplé en cas d’épisode thrombotique antérieur. En effet, les séquelles phlébologiques, la dégradation valvulaire et la distension musculaire pariétale limitent le retour veineux et aggravent la stase veineuse;

Conception récente Dans les TVP des membres inférieurs, la théorie classique indique l’absence d’altération de l’endothélium vasculaire. Cette observation est aujourd’hui remise en question. Ainsi l’hypoxie au niveau des valvules pourrait à elle seule entraîner une altération des cellules endothéliales (fig. 5.3) de même que celle des plaquettes entraîne l’expression à la surface cellulaire de P-sélectine. Cette dernière peut activer les monocytes ce qui se traduit par l’expression de facteur tissulaire à leur surface. Les microparticules d’origine monocytaire possèdent du facteur tissulaire et un ligand de la P-sélectine ou P-selectin glycoprotein ligand 1 (PSGL-1).

Hypercoagulabilité héréditaire Décrite dès les années soixante-cinq, la thrombophilie familiale est liée à une génération accrue de thrombine en cas de déficit en inhibiteur physiologique (antithrombine [AT], protéine C [PC], protéine S [PS]), ou beaucoup plus

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stase Désaturation de l’hémoglobine Lésion hypoxique de l’endothélium

Activation des cellules endothéliales

Expression de la P-Selectine Interaction avec les microparticles portant le FT Expression des phospholipides procoagulants

Fig. 5.3. Stase veineuse et thrombogenèse. (Del Conde I, Lopez JA. J Thomb Haemost 2005; 3 :1-3).

rarement d’hypofibrinolyse (excès de PAI1, défaut d’activateur tissulaire du plasminogène [t-PA]). Les déficits en inhibiteurs sont retrouvés chez 10 à 15 % des patients ayant des antécédents de TVP. La résistance à l’activité anticoagulante de la PC activée (PCa) – le facteur V Leiden (FVL) –, découverte en 1993, et la mutation G20210A du gène du FII, mise en évidence en 1996, représentent les causes constitutionnelles les plus fréquentes (30 à 50 % des patients). L’hétérogénéité de l’expression clinique et la sévérité variable des thrombophilies sont reconnues de façon consensuelle (voir chapitre 3, p. 188). L’intrication des anomalies génétiques et des facteurs environnementaux dans divers contextes favorisants souligne la pluralité des acteurs thrombogènes potentiels et pourrait expliquer la diversité d’expression clinique des thrombophilies héréditaires. L’hyperhomocystéinémie est la résultante de facteurs génétiques (mutation C677T de la méthylène tétrahydrofolate réductase ou MTHFR) et acquis (déficit vitaminique en B6, B12, acide folique) (voir chapitre 6). Associée à une incidence élevée de TVP, l’augmentation des taux de FVIII (> 150 UI/dl) serait aussi liée à la conjonction de facteurs génétiques et environnementaux. La combinaison de ces facteurs aboutit non pas à une simple sommation mais souvent à une véritable potentialisation du risque thrombotique.

Thrombophilie acquise La recherche de pathologies connues pour être associées à un risque thrombotique accru sera élargie à partir de l’anamnèse clinicobiologique. La

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confirmation d’une affection sous-jacente conditionnera la prise en charge du patient avec un traitement étiologique combiné au traitement anticoagulant. Récemment, l’étude SIRIUS a montré que les patients porteurs d’un accident thromboembolique veineux symptomatique avaient plus d’un facteur de risque par rapport au groupe contrôle (1,7 ± 0,05 vs 0,78 ± 0,03) et que la majorité de ces patients avait en fait plus de deux facteurs de risque identifiés. Ces divers facteurs sont d’une part propres au sujet et à son terrain (facteurs intrinsèques), d’autre part liés à une circonstance favorisante (facteurs extrinsèques).

Âge Le risque thrombotique augmente singulièrement avec l’âge puisqu’il passe de 1/10 000 avant 40 ans à 1/1 000 après 40 ans et à 1/100 au-delà de 75 ans. Il existe une augmentation exponentielle du risque d’accident thrombotique veineux avec la progression de l’âge (risque relatif × 1,9 par décade). Plusieurs mécanismes sont proposés : limitation de la mobilité physique, stase sanguine accrue, comorbidité (cancer, inflammation chronique), augmentation des taux de FVIII, de fibrinogène ou de PAI1 ou vieillissement de l’endothélium.

Antécédents de thrombose Ils constituent un facteur de risque très important, retrouvé dans toutes les séries. Le caractère spontané ou provoqué, le nombre d’accidents jouent un rôle essentiel dans l’évaluation du risque. Ainsi, il a été démontré que la fréquence des récidives est bien plus grande pour les thromboses spontanées, sans cause retrouvée, dites idiopathiques que pour les accidents liés à une cause déclenchante. Dans ce dernier cas, sa persistance ou sa disparition doit être prise en compte.

Cancers Un cancer est objectivé chez 10 à 20 % des patients ayant une TVP. La survenue d’un épisode thrombotique apparemment idiopathique peut précéder de plusieurs années le diagnostic effectif de néoplasie évolutive. Armand Trousseau, professeur de clinique médicale à l’Hôtel-Dieu, a été le premier à souligner l’association d’accidents thrombotiques veineux à des cancers gastriques découverts à l’autopsie. Ces phlébites, superficielles ou profondes, sont volontiers multiples, récidivantes et résistantes au traitement anticoagulant oral bien conduit (voir chapitre 6, p. 201).

Immobilisation prolongée L’alitement strict est un facteur de risque reconnu de TV. Diverses situations associées à une mobilisation réduite sont aussi des circonstances déclenchantes potentielles. Ainsi, une impotence fonctionnelle ou une paralysie, le

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port d’un plâtre, un voyage prolongé en avion (> 6 h) et même les importants embouteillages citadins peuvent favoriser la constitution de thrombi. Les travaux récents en milieu médical tendent à distinguer différents stades dans l’immobilisation prolongée selon l’autorisation ou non de déplacement à la salle de bains, de marche de moins ou plus de 10 mètres.

Hémopathies Différentes hémopathies sont particulièrement associées à un risque thrombotique veineux. Il s’agit principalement des proliférations cellulaires clonales avec les syndromes myéloprolifératifs chroniques (< 10 % des patients) et les hémopathies lymphoïdes comme la maladie de Hodgkin ou les lymphomes non hodgkiniens. En plus du bilan classique d’hémostase, la recherche d’une pousse spontanée des progéniteurs hématopoïétiques fait partie du bilan étiologique des TV portales ou splanchniques.

Chirurgie et traumatismes Les actes chirurgicaux et les traumatismes sévères favorisent la survenue de TV et l’alitement associé aggrave la stase sanguine. La chirurgie orthopédique et la neurochirurgie sont des situations particulièrement à risque. Ainsi, en dehors de toute prophylaxie, en cas de prothèse totale de hanche ou du genou, les thromboses sont retrouvées par phlébographie dans 40 à 70 % des cas et, en cas de chirurgie générale, chez 15 à 30 % des patients. Les chirurgies gynécologique et urologique sont aussi thrombogènes avec 30 % de cas de TVP proximales. La fréquence des accidents thrombotiques est singulièrement accrue après un traumatisme pelvien ou une fracture du fémur. Cela serait lié au passage systémique de matériel médullaire procoagulant, particulièrement riche en phospholipides, et aux lésions endothéliales combinées avec la stase sanguine. En l’absence de prophylaxie et en cas de polytraumatisme, une complication thromboembolique veineuse peut survenir dans 20 à 90 % des cas. Il faut insister sur le caractère asymptomatique de ces thromboses puisqu’il s’agit de la présence de thrombus décelés par phlébographie systématique. Les conjonctions de l’atteinte endothéliale, de la complexité des lésions osseuses, de l’immobilisation, de l’acte chirurgical éventuel et du syndrome inflammatoire contribuent à générer une hypercoagulabilité importante et à engendrer un contexte à très haut risque thrombotique.

Contraception orale œstroprogestative et traitements hormonaux en général Le premier cas de TVP associée à la prise d’œstroprogestatif a été publié en 1961 et, depuis, de nombreux travaux ont confirmé l’augmentation du risque thrombotique. La réduction de la teneur en éthinylœstradiol a réduit significativement ce risque, mais ne l’a pas supprimé (voir chapitre 18).

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Les pilules dites de 3e génération contenant le désogestrel ou le gestodène sont associées à un risque de TVP supérieur aux pilules dites de 2e génération contenant du lévonorgestrel. Cet effet serait en partie corrélé à l’induction d’une résistance à l’activité anticoagulante de la PCa. Il existe aussi d’autres anomalies de l’hémostase : une authentique hypercoagulabilité par l’augmentation des taux de FVII, FX et FXII associée à une diminution des inhibiteurs physiologiques comme l’AT ou la PS et une hyperfibrinolyse liée à la combinaison d’une augmentation du plasminogène et d’une diminution du PAI1. Le traitement hormonal substitutif à base d’œstrogène par voie orale est aussi responsable d’une majoration du risque d’accident thrombotique veineux. Ce risque ne doit donc pas être négligé dans ce contexte de femmes plus âgées (voir chapitre 18).

Grossesse et post-partum La prévalence de TVP est d’environ 1/1 000 grossesses. Chez la femme de moins de 40 ans, la moitié des accidents thromboemboliques veineux serait liée à la grossesse ou au post-partum. L’EP fatale reste la cause la plus fréquente de mortalité maternelle. Plusieurs mécanismes concourent à cette augmentation du risque thrombotique : le ralentissement du flux sanguin, la diminution précoce du tonus veineux, la gêne du retour veineux par l’utérus gravide et les modifications de l’hémostase générant un profil hypercoagulable. Ces perturbations se normalisent dans les 6 à 8 semaines après l’accouchement. Pour cela, la prise en charge optimale de la TV durant la grossesse est essentielle (voir chapitres 17 et 18). Si l’accident thrombotique durant la grossesse a des caractéristiques importantes (siège au membre inférieur gauche dans 90 % des cas, surtout au niveau iliofémoral et à risque élevé d’embolisation), il n’a pas été retrouvé d’incidence particulièrement accrue à l’un des différents trimestres. Globalement, les 2/3 des épisodes thrombotiques surviennent au cours de la période du postpartum pour certains auteurs. En fait, une association avec une thrombophilie constitutionnelle doit être recherchée. Ainsi, une étude a montré que 60 % des femmes enceintes ayant une TVP sont porteuses du FVL. En revanche, une résistance à l’activité anticoagulante de la PCa peut aussi être acquise dans ce contexte gravide. En dehors de l’existence d’une thrombophilie héréditaire, le risque thrombotique augmente avec la notion d’antécédents de phlébite, l’âge, la multiparité ou le recours à une césarienne. Les fécondations in vitro constituent un cadre particulier où les épisodes thrombotiques peuvent survenir dans les 2 à 8 semaines suivant l’induction de la grossesse. Elles touchent préférentiellement le territoire cave supérieur.

Syndrome des antiphospholipides (SAPL) Ce chapitre est également traité ailleurs dans l’ouvrage (voir chapitre 15). Un anticoagulant circulant (ACC) de type lupus ou anti-prothrombinase est

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retrouvé chez environ 5 à 15 % des patients ayant une TVP. Cet ACC serait aussi associé à un risque thrombotique 5 à 9 fois plus élevé. Certaines maladies dites de système sont à envisager dans le contexte de la maladie thromboembolique veineuse : le lupus érythémateux disséminé (LED) (5 à 20 % des cas) et la maladie de Behçet (10 à 45 % des cas). L’atteinte des gros troncs veineux est fréquente. Au cours des colites ulcéreuses comme la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique, le risque thrombotique est 2 à 3 fois supérieur à celui de la population générale. L’hypercoagulabilité serait en rapport d’une part avec l’élévation des taux de FVIII, l’hyperfibrinogénèmie, et d’autre part avec l’atteinte endothéliale responsable d’une libération de FT, d’une adhésivité cellulaire accrue et de l’élévation des taux de facteur Willebrand (VWF). Ces anomalies ne sont pas spécifiques.

TV iatrogènes ou médicamenteuses Ces thromboses sont rencontrées au cours des chimiothérapies, toxiques pour l’endothélium, ou de la contraception œstroprogestative, responsable d’une authentique hypercoagulabilité systémique. Les antiœstrogènes comme le tamoxifène peuvent majorer le risque de TV. Plus récemment, un rôle prothrombotique a été attribué à la Thalidomide lorsqu’elle est associée à la dexaméthasone. D’autres inhibiteurs de l’angiogenèse pourraient avoir le même inconvénient. Le rôle des corticoïdes est discuté. Il ne faut pas omettre les thrombopénies induites par l’héparine (TIH) caractérisées par l’apparition d’une diminution rapide de la numération plaquettaire et la survenue d’un accident thrombotique veineux extensif. Ce syndrome complexe est une complication rare (3 à 5 % des traitements par héparine non fractionnée (HNF) et 0,1 % des traitements par héparine de bas poids moléculaire [HBPM]), mais qui est redoutable avec une morbi-mortalité sévère liée au diagnostic tardif et difficile (voir chapitre 8).

Causes plus rares Le syndrome néphrotique, responsable d’une hypercoagulabilité acquise par fuite rénale d’AT, peut se compliquer de TVP chez l’adulte, mais cela est beaucoup plus rare chez l’enfant. Les érysipèles avec lymphangite sont un diagnostic différentiel de TVP, mais ils peuvent favoriser l’apparition d’une authentique thrombose. Le syndrome de Lemierre associe une thrombophlébite de la veine jugulaire interne et/ou une EP secondaire à une infection à Fusobacterium necrophorum. Les thromboses des veines sus-hépatiques ou portales sont particulièrement fréquentes dans l’hémoglobinurie paroxystique nocturne (voir chapitre 6).

Stratification du risque thrombotique Les multiples réunions de consensus et d’experts soulignent l’importance primordiale de l’évaluation du risque thrombotique propre à chaque contexte et relatif à un patient donné de façon à définir la stratégie prophylactique assurant le meilleur rapport bénéfice (antithrombotique)/risque (hémorragique).

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Néanmoins, la plupart des études disponibles présentent des limites méthodologiques : analyse univariée ou absence d’analyse des interrelations possibles entre les divers facteurs. En pratique, la hiérarchie véritable du risque thrombotique et l’importance spécifique de chaque facteur dans un contexte donné, restent difficiles à définir. Différents systèmes de scores ont été proposés pour déterminer le niveau du risque global chez les patients chirurgicaux et médicaux afin de choisir un schéma de prévention antithrombotique adapté au contexte et de tenter de standardiser cette prise en charge. Aucun score, à ce jour, n’est utilisé en dehors d’un petit nombre de centres spécialisés. Il y a quatre niveaux de risque thrombotique en fonction du nombre de facteurs intrinsèques et/ou extrinsèques identifiés chez un patient : faible (un seul facteur), modéré (deux facteurs), élevé (trois à quatre facteurs) et très élevé (plus de cinq facteurs). L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) propose, en revanche, une stratification à trois niveaux d’intensité croissante, définis selon le type d’intervention chirurgicale et les risques propres au malade. La validation de ces scores doit être réalisée de façon prospective sur de grandes séries de sujets étudiés. Une nouvelle étude Decision Matrix propose un logiciel spécifique à ce problème. Il est le fruit d’une collaboration avec de nombreux experts de différents pays, qui ont confronté leur évaluation du risque sous la direction d’un spécialiste des études de ce type en médecine et en chirurgie. Une variante de la méthode Delphi a été utilisée. La TV résulte invariablement de la conjonction de plusieurs facteurs génétiques ou intrinsèques et environnementaux ou extrinsèques. L’association de ces facteurs est responsable d’un véritable sur-risque thrombotique. La stratification de ce risque par l’évaluation précise des différents acteurs de la thrombogenèse veineuse devrait permettre de mieux définir la stratégie prophylactique adaptée à un type de patient dans un contexte donné. La détermination de plus en plus fine du risque thrombotique est donc la clé d’une prophylaxie optimisée pour une réduction significative de la morbi-mortalité thrombotique veineuse. BIBLIOGRAPHIE EMMERICH J. Fréquence et facteurs de risque de la maladie veineuse thromboembolique. Rev Prat 2003; 53 : 14-19. FREDERICK A, ANDERSON Jr, SPENCER MD. Risk Factors for Venous Thromboembolism. Circulation 2003; 107 : I-9-I-16. KEARON C. Epidemiology of venous thromboembolism. Semin Vasc Med 2001; 1 :7-25. MOTYKIE GD, CAPRINI JA, ARCELUS JI, ZEBALA LP, LEE CE, FINKE NM, TAMHANE A, REYNA JJ. Risk factor assessment in the management of patients with suspected deep venous thrombosis. Int Angiol 2000; 19 :47-51.

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THROMBOGENÈSE ARTÉRIELLE ET MARQUEURS BIOLOGIQUES Ismail ELALAMY

Introduction Les accidents cardiovasculaires représentent la première cause de mortalité dans les pays industrialisés. Ils sont responsables de plus de 500 000 décès aux États-Unis et de plus de 100 000 en France. La morbi-mortalité associée à ce véritable fléau a un coût estimé à plus de 120 milliards de dollars. Le vieil adage « l’homme vit avec son artériosclérose mais meurt de thrombose » est connu depuis près d’un demi-siècle. Dès 1956, le cardiologue norvégien Jens Dedichen proposa la dénomination d’artériosclérose thrombosante pour caractériser la complication aiguë et imprévisible d’une pathologie inflammatoire chronique. Divers paramètres biologiques sont modifiés lors de la survenue d’un épisode thrombotique coronarien mais la pertinence du choix de ces marqueurs dans notre pratique quotidienne reste encore à définir.

Athérosclérose Certes, l’athérosclérose a une définition anatomique avec la disposition en plaques d’un noyau lipidique coiffé par une chape fibreuse de sclérose au sein de l’intima des artères. Une classification des différents types lésionnels a été proposée pour caractériser l’évolution de la plaque qui existe chez tous les individus à un âge plus ou moins avancé. Il est donc aisé d’imaginer que la vulnérabilité de la plaque est un élément prépondérant dans l’évolutivité clinique de cette pathologie inflammatoire de la paroi artérielle avec des lésions dynamiques capables de passer d’un état de stabilité à un potentiel de haute gravité clinique. Les plaques molles, riches en lipides et en macrophages spumeux sont les plus fragiles. En fait, l’effraction de la plaque n’explique pas à elle seule l’accident coronarien car il faut souligner la fréquence des ruptures asymptomatiques et une proportion relativement importante de décès non cardiaques avec une

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authentique fissure de plaque (10 à 15 %), alors qu’un thrombus mural ou occlusif est en revanche constamment retrouvé en cas de décès d’origine cardiaque. Cette hétérogénéité dans l’expression clinique d’un même type de plaque suggère l’intervention de différents facteurs en rapport avec l’hémostase et la fibrinolyse contribuant à l’instabilité et à la rupture de la plaque (tableau 5.III). Tableau 5.III. Facteurs influençant la rupture de la plaque athéroscléreuse Type de facteurs

Mécanismes associés

Mécaniques

Forces de turbulence accrues (shear stress) Vasospasme Importance du cœur lipidique Finesse de la chape fibreuse

Constituants de la plaque

 Cholestérol estérifié  Matrice extracellulaire  Métalloprotéases  Cellules T et des macrophages  FT  Cytokines pro-inflammatoires

Chape fibreuse

 Synthèse de collagène  Dégradation du collagène  Cellules musculaires lisses

Acteurs de l’athérothrombose Les divers facteurs de risque artériel sont répertoriés de façon consensuelle : la dyslipidémie, l’hypertension, le tabac, le diabète, l’âge par exemple. Il est clairement admis que l’athérothrombose résulte d’un processus plurifactoriel au sein du compartiment vasculaire avec des acteurs cellulaires et plasmatiques multiples. Mais les mécanismes impliquant l’ensemble des protagonistes sont complexes et encore mal connus. La rupture de la plaque expose le sous-endothélium thrombogène via le collagène, le VWF et le FT. La richesse particulière de la plaque elle-même en FT a bien été démontrée. L’activation plaquettaire consécutive à leur adhésion via les glycoprotéines (GP) membranaires (GPIb-IX, GPIIb/IIIa) provoque la libération de substances prothrombotiques telles que le thromboxane A2 (TxA2) et la génération de thrombine contribuant ainsi à la formation et à la consolidation du thrombus (voir fig. 5.2). Sa croissance importante et rapide sera responsable de la symptomatologie ischémique clinique. C’est donc suite à une véritable coopération métabolique et cellulaire complexe que survient l’accident athérothrombotique. Nous envisagerons donc successivement les différents acteurs impliqués dans l’accident mécanique de la plaque et leurs marqueurs avant de discuter de leur intérêt potentiel.

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Endothélium L’atteinte endothéliale est à l’origine de la mise à nu de la matrice conjonctive riche en collagène et de la croissance du thrombus colmatant la brèche vasculaire. Différents paramètres biologiques sont proposés pour évaluer l’atteinte endothéliale ou l’état d’activation cellulaire de cette structure réputée non thrombogène : – la sécrétion de FT avec la détection de complexes FVII-FT; – la sécrétion de molécules adhésives sous forme soluble telles que sICAM-1 ou sVCAM-1; – l’expression de E-sélectine favorisant les contacts intercellulaires proinflammatoires; – les taux accrus de VWF et surtout des formes de haut poids moléculaire; – la génération de microparticules endothéliales prothrombotiques; – le détachement de cellules endothéliales circulantes corrélé à l’agression endothéliale par exemple; – la thrombomoduline, principalement sous sa forme soluble, serait un indicateur fidèle de l’atteinte endothéliale. La rupture de la plaque athéroscléreuse aboutit donc à la formation d’un thrombus plaquettaire et à l’activation focale de la génération de thrombine qui constituent la clé de voûte de la thrombogenèse. La thrombine liée au thrombus toujours active contribue à la croissance du caillot en agissant sur de multiples cibles cellulaires ou plasmatiques. La thrombogénicité du thrombus résiduel dépend à la fois de la sténose générée, des turbulences (forces de cisaillement) associées et de la thrombine formée restant liée au caillot. La libération de médiateurs vaso-occlusifs tels que l’endothéline, le thromboxane d’origine monocytaire et plaquettaire, l’ADP, la sérotonine ou le PAF (platelet activating peptide) issus des granules plaquettaires contre balancent la vasodilatation protectrice endothéliale assurée par la synthèse de prostacycline ou PGI2 et de monoxyde d’azote ou NO. Le VWF plasmatique contribue à la formation de l’agrégat plaquettaire dans des conditions de turbulences élevées. Il apparaît à la fois comme un marqueur de la phase aiguë d’une thrombose coronaire et comme un facteur prédictif de récidive et de mortalité postangioplastie. La VCAM-1 (vascular cell adhesion molecule 1), l’ICAM-1 (intercellular adhesion molecule 1) et la E-sélectine permettent l’adhésion et la migration leucocytaire au sein de la paroi vasculaire concourant ainsi à la croissance et à l’instabilité de la plaque d’athérome. Dans une étude prospective sur près de 1 250 patients coronariens, des chercheurs ont montré que l’élévation des taux de sVCAM-1 était associée à une augmentation de 300 % du risque de décès cardiovasculaire. D’autres chercheurs ont rapporté l’élévation précoce d’ICAM-1 soluble (sICAM-1) chez les patients présentant un infarctus du myocarde (IDM) et proposent ce marqueur sensible de l’état inflammatoire comme un indicateur du risque thrombotique en cas d’atteinte coronaire. Une méta-analyse de Malik et al., concernant l’association de l’augmentation des molécules adhésives et de la survenue d’accidents coronariens, souligne l’utilisation potentielle du dosage des ICAM-1 pour identifier les patients à

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risque thrombotique important et justifier alors une prophylaxie optimisée. Cela demande néanmoins à être validé au plan épidémiologique. Récemment, la cytométrie en flux a montré que les microparticules endothéliales sont significativement plus nombreuses en cas d’IDM aigu (25,5 ± 4,8; n = 14) ou d’angor instable (18,6 ± 1,9; n = 13) avec des taux 2 à 3 fois supérieurs à ceux des sujets témoins (9,9 ± 1,6; n = 12) ou ayant un angor stable (10,1 ± 1,6; n = 12). L’activité du FT, particulièrement abondant au sein des plaques athéromateuses, combinée aux microparticules riches en phospholipides anioniques contribue ainsi largement à la thrombogénicité de la plaque et à l’hypercoagulabilité systémique. Le système complexe du NO, modulant la vasomotricité et la réponse plaquettaire, est aussi à l’interface d’un conflit artériel éventuel. Après avoir montré que les plaquettes des patients ayant un syndrome coronarien aigu produisaient moins de NO que celles des sujets ayant un angor stable, il a été souligné que le déficit endothélial en NO peut contribuer à la genèse d’un accident thrombotique artériel. La biologie vasculaire a réussi à identifier une cause rare mais très intéressante en physiopathogénie. Il a en effet été prouvé la survenue d’accident vasculaire cérébral (AVC) familial chez des sujets jeunes porteurs d’un déficit constitutionnel en glutathion peroxydase (GPx-3), enzyme impliquée dans le métabolisme du NO. Cette altération génétique rare est transmise sur un mode autosomal dominant. Cette observation a comme application thérapeutique potentielle la recherche de donneurs de NO.

Plaquettes Nous disposons de nombreuses méthodes pour évaluer la réactivité plaquettaire et l’état des plaquettes circulantes (fig. 5.4). L’agrégométrie permet d’établir l’existence d’une réponse plaquettaire exacerbée (hyperagrégabilité) ou une réactivité moindre aux agonistes classiques (désensibilisation liée à une exposition préalable in vivo à certains agonistes). Bien plus, une agrégation spontanée in vitro serait prédictive de récidive thrombotique et même de mortalité cardiovasculaire dans le postinfarctus. Les dosages immunoenzymatiques permettent d’identifier une synthèse accrue de Txa2 sérique ou urinaire et une libération granulaire consécutive à l’activation plaquettaire avec l’élévation des taux de certaines protéines comme le facteur 4 plaquettaire (F4P) ou la β-thromboglobuline (βTG). Compte tenu des variations artefactuelles potentielles en rapport avec les conditions préanalytiques drastiques, la possibilité d’étude des métabolites urinaires métaboliquement stables a simplifié radicalement le recueil des échantillons et amélioré significativement les possibilités de dosages en pratique clinique. Le volume plaquettaire moyen (VPM) est systématiquement disponible grâce à la réalisation simple de l’hémogramme. L’augmentation du VPM à la phase aiguë d’un accident coronarien serait un facteur de risque prédictif de l’évolution péjorative. Cette augmentation de taille serait responsable d’une réactivité plaquettaire accrue et d’une expression de sites glycoprotéiques membranaires

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(A) Au repos expression basale de GP membranaires

(B) Activées modification conformationnelle des GP membranaires expression de GP granulaires

(C) Désensibilisées modification conformationnelle des GP membranaires état réfractaire

Fig. 5.4. États fonctionnels plaquettaires. Les plaquettes sont des cellules anucléées contribuant à l’hémostase et à la thrombose. À l’état de repos, elles circulent sous la forme discoïde (A). En cas de stimulation préalable, les plaquettes deviennent alors réfractaires du fait d’une désensibilisation des récepteurs membranaires, elles ne répondent pas à l’exposition ultérieure à l’agoniste homologue (C). Cela est notamment décrit dans certaines situations cliniques avec génération accrue de TxA2 ou en cas de drépanocytose sévère. Les plaquettes subissent des modifications conformationnelles du cytosquelette identifiables au plan membranaire par cytométrie en flux (B). En cas d’activation plaquettaire aboutissant à la formation d’un thrombus plus ou moins occlusif, les modifications morphologiques plaquettaires sont encore plus nettes avec l’enchevêtrement plus important des pseudopodes membranaires et la constitution de nombreux points d’ancrage interplaquettaires matérialisés par les ponts de fibrinogène fixés sur les sites GPIIb/IIIa activés. (D’après Gawaz, In Blood Platelets, Thieme Medical Publishers, 2002.)

plus nombreux (GPIb, GPIIb/IIIa). Est-elle le reflet d’une consommation accrue des plaquettes avec des plaquettes réticulées plus nombreuses ou d’une stimulation de la thrombopoïèse en rapport avec un profil pro-inflammatoire (sécrétion d’interleukine 6 [IL6]). Les plaquettes réticulées, par analogie avec les réticulocytes, correspondraient à une sous-population plaquettaire particulièrement riche en acides nucléiques et de nature plus jeune. Le CD62 ou sélectine est une glycoprotéine membranaire retrouvée au sein des granules alpha plaquettaires (CD62-P) et des corps de Weibel-Palade des cellules endothéliales (CD62-E). Une surexpression de la P-sélectine serait associée au passage de l’état d’angor stable à celui d’angor instable, ou prédictive d’accidents ischémiques après angioplastie. En analyse multivariée, il apparaît que l’élévation des taux de la forme soluble de CD62 est prédictive des complications thrombotiques cardiaques. L’intérêt de ce marqueur a été considéré comme le meilleur témoin de l’activation plaquettaire. Mais son intérêt reste discuté en clinique compte tenu des difficultés analytiques de son évaluation et de ses clairances plasmatique et membranaire particulièrement rapides.

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Les développements de la cytométrie en flux ont permis de mieux caractériser le phénotype plaquettaire par la mise en évidence de sites membranaires particuliers (GPIIb/IIIa activée, ligand-induced binding sites, receptor-induced binding sites) et d’authentifier l’état fonctionnel des plaquettes par leur modification conformationnelle éventuelle. L’existence de divers polymorphismes fonctionnels des récepteurs membranaires pourrait ainsi influencer le risque thrombotique : PlA1/PlA2 pour la GPIIb/IIIa (récepteur du fibrinogène), Thr145/Met145 pour la GPIb (récepteur du VWF), ou Ser219/Pro219 pour la GPVI (récepteur du collagène).

Complexes leucoplaquettaires : coopération cellulaire pro-inflammatoire Il est de plus en plus évident que l’inflammation occupe un rôle fondamental en pathologie coronarienne. L’infiltration du compartiment vasculaire par les cellules inflammatoires est orchestrée par un ensemble complexe de cytokines (IL6, IL18, TNFα, IL1 par exemple) et de molécules d’adhésion cellulaire (VCAM-1, ICAM-1 par exemple). Ces éléments pourraient constituer de véritables marqueurs modernes du risque cardiovasculaire. L’expression de P-sélectine par les plaquettes activées permet la liaison aux récepteurs leucocytaires spécifiques PSGL-1 (P-selectin glycoprotein ligand 1) (fig. 5.5). Le Polynucléaire neutrophile Plaquette activée

Monocyte T lymphocyte

PSGL-1

CD62 Endothélium

Subendothélium

Fig. 5.5. P-sélectine : support de la coopération cellulaire. La formation de complexes leucoplaquettaires est possible après l’activation plaquettaire autorisant l’expression accrue de P-sélectine (CD62). Ces contacts intercellulaires provoquent à leur tour une activation de tous les partenaires cellulaires du compartiment vasculaire via l’induction d’autres molécules d’adhésion (MAC-1 par exemple) et de cytokines proinflammatoires.

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pourcentage de ces complexes leucoplaquettaires est significativement accru chez les patients ayant un angor instable ou un IDM mais pas en cas de douleur thoracique non cardiaque. Ils seraient des marqueurs précoces de l’activation plaquettaire in vivo lors des syndromes coronariens aigus. Le contingent monocytaire joue aussi un rôle prépondérant au sein de l’athérome et de son évolutivité clinique. L’activation monocytaire peut être évaluée par cytométrie en flux et les patients ayant un IDM aigu présentaient une surexpression du CD14, alors que cette expression était similaire au groupe contrôle en cas d’angor instable. Même les lymphocytes sont impliqués dans le conflit thrombotique. Les taux de sCD40L, la forme soluble du ligand du CD40 (CD154) étaient significativement plus élevés en cas d’IDM et d’angor stable par rapport aux valeurs témoins. La coopération cellulaire au sein du compartiment vasculaire est la pierre angulaire de la complication thrombotique. Le CD40, autorisant à lui seul des échanges intercellulaires multiples (lymphocytes, cellules endothéliales, plaquettes, monocytes par exemple), serait le chaînon manquant (missing link) de cette association délétère. La combinaison du CD40 membranaire endothélial ou monocytaire au CD154 (CD40L) plaquettaire provoque la synthèse des molécules adhésives, l’induction de diverses chémokines, l’expression accrue du FT et même l’activation des métalloprotéases. Le CD40 matérialise ainsi le lien étroit existant entre la thrombose aiguë et l’inflammation chronique.

Marqueurs de l’hypercoagulabilité : déséquilibre de la balance hémostatique Responsable de l’amplification du processus thrombotique et de la consolidation du thrombus, la génération de thrombine est le résultat d’une série de réactions faisant intervenir de multiples facteurs dont le dosage permettrait de mieux identifier les patients à haut risque vasculaire (fig. 5.6 et 5.7 et tableau 5.IV). Tableau 5.IV. Paramètres potentiels témoins de l’activation de l’hémostase Paramètres FT  FVIIa  TFPI  F1 + 2  Complexes TAT  FPA  t-PA  PAI1  Complexes PAP  D-Di 

Évolution et mécanisme physiopathogénie Lésion endothéliale/activation monocytaire Activation de la voie du FT Consommation à la phase aiguë Génération accrue de thrombine Formation accrue de thrombine Formation accrue de fibrine Atteinte endothéliale Atteinte vasculaire Formation accrue de plasmine Dégradation accrue de la fibrine générée

D-Di : D-dimères, PAP : plasmine-antiplasmine, TAT : thrombine-antithrombine

172 Maladies thrombosantes Fig. 5.6

FPB Monomère de fibrine-2

Thrombine 3

4

Monomère de fibrine-1

FPA F1+2 Prothrombine

Fibrine soluble

TAT 2 Thrombine

1

Fibrinogène

Fig. 5.7 Monomère de fibrine-2

Facteur XIIIa Ca++

Polymère de fibrine

PLASMINE

Produit de dégradation de haut poids moléculaire

DD-E

Génération de D-Di Produits de dégradation de la fibrine

Fig. 5.6 et 5.7. Marqueurs de l’activation de la coagulation. La transformation de la prothrombine en thrombine libère les F1+2. Ils reflètent la génération de thrombine comme les complexes TAT. L’attaque du fibrinogène par la thrombine est alors responsable de la libération des FPA et FPB et aboutit à la formation de monomères de fibrine. L’action de la plasmine consécutive à celle de la thrombine génère alors des produits de dégradation spécifiques de la fibrine, les D-Di, marqueurs indirects de l’activation de la coagulation.

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L’élévation chronique du fibrinogène est un facteur de risque cardiovasculaire classique. Il a été montré que son augmentation au-delà de 3,5 g/l est associée à un risque accru de resténose postangioplastie. Protéine de l’inflammation, le fibrinogène est le précurseur de la fibrine. Il joue un rôle majeur dans la viscosité plasmatique. Il accroît l’adhésion leucocytaire à l’endothélium, stimule la prolifération des cellules musculaires lisses et favorise la captation macrophagique des lipides. Les taux de fibrinogène obéissent à un double déterminisme : l’un génétique avec l’existence de polymorphismes et l’autre environnemental, avec l’influence du tabac par exemple. À la phase aiguë d’un syndrome coronarien, il a récemment été montré que l’augmentation des taux de fibrinopeptide A (FPA), issus de la protéolyse du fibrinogène par la thrombine, était associée à une évolution péjorative. Contrairement à l’augmentation des taux de fragments 1 + 2 de la prothrombine (F1 + 2) ou des complexes thrombine-antithrombine (TAT), seuls les taux de FPA élevés avaient une valeur prédictive de la mortalité cardiovasculaire. Produits de dégradation de la fibrine, les D-dimères (D-Di) sont considérés à la fois comme des marqueurs directs de la fibrinolyse et indirects de l’activation de la coagulation. Toutefois, leur augmentation régulière avec l’âge et leur manque de spécificité limitent leur intérêt dans ce contexte où la comorbidité est fréquente : sujets âgés, inflammation, sepsis par exemple. De nouvelles méthodes de dosage d’exécution simplifiée, unitaires et rapides sont maintenant disponibles et particulièrement intéressantes dans la stratégie diagnostique d’un accident thrombotique. Plusieurs tests sont disponibles et commercialisés. Fondés sur le même principe (Elisa), ils diffèrent par l’anticorps monoclonal dirigé contre les D-Di, l’immunoconjugué reconnaissant les complexes immuns générés, la procédure analytique (temps d’incubation, nombre de dilutions) et la limite de détection. La limite supérieure des taux normaux de D-Di varie selon la technique utilisée et selon le mode d’expression des résultats. Il faut donc garder à l’esprit le défaut de standardisation et l’hétérogénéité des anticorps utilisés dans ces différentes méthodes. Plusieurs études ont montré que l’augmentation des D-Di est bien corrélée à une majoration du risque coronarien après ajustement aux autres facteurs de risque vasculaire tels que le tabac, l’âge, la tension artérielle, les taux de cholestérol ou de HDL et le poids (ou l’indice de masse corporelle). Il apparaît que le risque relatif d’accident passe de 1,3 (IC 95 % 0,98 à 1,66) si le taux de D-Di est compris entre 49 et 94 ng/ml à 1,8 (IC95 % 1,38 à 2,32) s’il est > 94 ng/ml.

Risque thrombotique : combinaison multifactorielle La survenue d’un accident thrombotique artériel est la conséquence complexe de la conjonction de divers facteurs constitutionnels, acquis et environnementaux, de l’interaction de différents acteurs pariétaux et circulants, de la combinaison délétère de phénomènes mécaniques et pharmacologiques intimement intriqués. La notion de thrombophilie est aussi avancée avec d’authentiques particularités biologiques responsables d’une hypercoagulabilité plasmatique, comme la résistance à l’activité anticoagulante de la PCa ou

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la mutation du gène codant la prothrombine (FII 20210A), qui sont classiquement rapportées en thrombophilie veineuse. L’hyperhomocystéinémie, responsable d’une toxicité endothéliale, semble être un facteur de risque cardiovasculaire indépendant. Elle facilite l’expression du FT et module le système frénateur de la PC et de la thrombomoduline. Elle pourrait alors potentialiser la génération accrue de thrombine et être associée à une augmentation significative des taux de FVII activé et de F1+2 en cas de syndrome coronarien aigu.

Cause, conséquence ou coïncidence : intérêt des marqueurs La physiopathologie moderne réserve une place importante aux processus de l’hémostase-thrombose et de la fibrinolyse pouvant expliquer les conséquences cliniques variables des lésions mécaniques des plaques d’athérome (tableau 5.V). Des progrès réels ont été réalisés dans l’identification de marqueurs de plus en plus sensibles, mais leur spécificité reste limitée en raison de la comorbidité fréquente et l’intrication avec le processus inflammatoire. Tableau 5.V. Marqueurs de l’hémostase disponibles et utilisés dans les essais cliniques dans le contexte des syndromes coronariens aigus Activation plaquettaire

CD62 (P-sélectine, alpha-granulaire) β-thromboglobuline (alpha-granulaire) Sérotonine (delta-granulaire) CD63 PAC-1 (Ac monoclonal anti-GPIIb/IIIa modifiés) Volume plaquettaire moyen Complexes leucoplaquettaires (CD16/CD62) Microparticules plaquettaires

Activation de la coagulation

Complexes TAT F1+2 FPA FVIIa

Fibrinolyse (dégradation de la fibrine)

Complexes t-PA/PAI D-Di FPA Complexes PAP

D-Di : D-dimères, PAP : plasmine-antiplasmine

L’abondance relative des travaux dans la littérature contraste avec la pauvreté des acquisitions effectives pour la pratique clinique au quotidien. Après l’identification de l’altération biologique ou la démonstration de sa fréquente association avec une expression clinique particulière, il reste encore à déterminer la causalité et la pertinence de ce paramètre en pratique clinique. Le ou les paramètres ayant une valeur diagnostique ou prédictive utile au clinicien

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restent donc à identifier. Même si certains d’entre eux peuvent être comparés à la troponine, leur utilisation souffre de problèmes préanalytiques et de la complexité de la méthodologie peu applicable en routine. Les objectifs de ces marqueurs sont néanmoins importants et leurs enjeux cliniques restent multiples : – meilleure connaissance de la physiopathogénie; – stratification du risque avec la définition de sous-groupes de patients aux besoins thérapeutiques différents; – suivi thérapeutique ciblé; – optimisation de la prise en charge des patients. Donc, l’utilisation de ces marqueurs doit être mieux analysée compte tenu des retombées potentielles en thérapeutique car la réponse clinique aux différents schémas préconisés est en fait loin d’être univoque. En effet, restent à établir l’utilité potentielle de ces indicateurs dans l’évaluation de la pathogénie de l’accident vasculaire, leur intérêt dans la stratification des patients, leur valeur pronostique éventuelle, leur caractère prédictif dans la stratégie thérapeutique et le suivi des patients.

Stratification du risque vasculaire Un score chez l’homme et chez la femme est proposé pour évaluer le risque vasculaire. Ce score de Framingham est fondé sur différents critères auxquels sont accordées des valeurs numériques plus ou moins grandes (– 9 à + 8). Les critères retenus sont : l’âge, le cholestérol total, le cholestérol HDL, la pression artérielle systolique, l’existence d’un diabète ou le tabagisme. Le risque sera estimé selon quatre grades : faible, moyen, modérément élevé, et élevé. Ce score peut être obtenu sur le site de la Société américaine de cardiologie (www.circulationaha.org). Les progrès de la biologie et le développement des tests proposant de nouveaux marqueurs de l’altération de l’hémostase dans les syndromes coronariens aigus ont certainement contribué à mieux connaître les étapes et les acteurs de la pathogenèse des accidents thrombotiques. Toutefois, les études actuelles sont trop limitées pour pouvoir confirmer leur intérêt pronostique et leur réelle contribution en pratique quotidienne pour la stratification effective du risque athérothrombotique. Encore réservés à des laboratoires spécialisés, les limites et les insuffisances de ces dosages spécifiques restent à mieux définir dans ce contexte particulier à très haut risque vasculaire. Ces marqueurs devraient idéalement apporter une aide stratégique pour établir le choix de l’optimum thérapeutique et pour le suivi des patients. BIBLIOGRAPHIE BEST PJ, GERSH BJ. Cell adhesion molecules and inflammation in acute coronary syndromes : markers and emerging risk factors. Eur Heart J 2001; 22 : 1155-1159.

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