Biologie périnatale : le point de vue du pédiatre

Biologie périnatale : le point de vue du pédiatre

BIOLOGIE ET PÉRINATALITÉ Biologie périnatale : le point de vue du pédiatre Bertrand Lebouchera,*, Noémie Huetza, Géraldine Gascoina SUMMARY RÉSUMÉ ...

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BIOLOGIE ET PÉRINATALITÉ

Biologie périnatale : le point de vue du pédiatre Bertrand Lebouchera,*, Noémie Huetza, Géraldine Gascoina

SUMMARY

RÉSUMÉ Le sepsis néonatal et l’asphyxie périnatale continuent d’être une importante cause de mortalité et de morbidité chez le nouveau-né. Dans ces situations, une collaboration étroite entre les pédiatres et la biologie doit être obtenue. Les marqueurs biologiques d’infection, comme la procalcitonine dosée maintenant par certaines équipes au niveau du cordon ombilical, peuvent aider le clinicien à mieux préciser le risque infectieux afin d’éviter le recours à une antibiothérapie parfois abusive. La mesure du pH ou des lactates sanguins sont des signes d’alerte pour le clinicien en cas d’asphyxie périnatale mais ces marqueurs ne permettent pas à eux seuls de préciser le pronostic neurologique. Le lien de causalité entre survenue d’un handicap (paralysie cérébrale) et la naissance dans un contexte d’asphyxie perpartum ne peut être évoqué que lorsque s’associent un contexte d’événement perpartum à risque (anamnèse), des marqueurs biologiques d’asphyxie fortement perturbés et une encéphalopathie néonatale clinique.

Perinatal biology: the paediatrician’s view? Neonatal sepsis and birth asphyxia continue to be a significant cause of morbidity and mortality in newborns. In these situations, a close collaboration between paediatricians and biologists is necessary. Accurate infection biological markers as procalcitonin in cord blood allow clinicians to better assess the risk of infection and thus avoid abusive antibiotic therapy. pH or blood lactates measurement on blood cord are needed to early diagnose birth asphyxia but theses biological markers are not sufficient to establish a neurological prognosis. Permanent neurological impairment (cerebral palsy) may be attributed to birth asphyxia if three conditions are associated: per partum history of asphyxia event, biological markers of asphyxia and neonatal encephalopathy.

Infection néonatale précoce et sepsis secondaire – marqueurs biologiques de sepsis – asphyxie périnatale – pH et lactates – encéphalopathie néonatale.

1. Introduction Chaque jour, en maternité et dans les unités de néonatalogie, de nombreuses situations cliniques, urgentes ou moins urgentes, nécessitent la réalisation d’examens complémentaires sur lesquels les pédiatres s’appuient pour effectuer la prise en charge de leurs patients, prématurés ou nouveau-nés à terme. Ces examens, biochimiques, hématologiques, bactériologiques, centralisés au laboratoire ou délocalisés, sont un guide précieux pour l’établissement de certains diagnostics, l’évaluation de la gravité et du pronostic de certaines pathologies, et aussi pour adapter le suivi des nouveau-nés. Dans un contexte évocateur d’infection néonatale, le pédiatre recherchera des marqueurs biologiques précoces et sensibles afin de débuter au plus vite un traitement antibiotique, mais également spécifiques afin d’éviter une utilisation abusive des antibiotiques [1]. Dans une situation d’asphyxie périnatale, les marqueurs biologiques sont importants à relever pour le diagnostic et la prise en charge du nouveau-né. Leur valeur pronostique individuelle est cependant faible en regard des autres éléments plus spécifiquement neurologiques [2].

a Fédération de pédiatrie – Pôle Femme-Mère-Enfant Centre hospitalier universitaire d’Angers 4, rue Larrey 49933 Angers cedex 9

* Correspondance [email protected] article reçu le 16 octobre, accepté le 22 octobre 2014 © 2015 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés.

Early and late onset neonatal sepsis – sepsis biological markers – birth asphyxia – pH and blood lactate – neonatal encephalopathy.

La collaboration étroite entre d’un côté, le pédiatre et les soignants au plus près du patient, et de l’autre côté, le biologiste et les techniciens de laboratoires, ainsi que la connaissance par chacun des particularités liées au terme de naissance, et à l’âge du nouveau-né, sont nécessaires pour une prise en charge adaptée. Malheureusement, la méconnaissance parfois du travail de l’autre, des contraintes liées aux soins urgents mais aussi à certaines techniques de laboratoire et aux volumes sanguins demandés, peut rendre cette collaboration difficile. Notre objectif n’est pas ici d’aborder du point de vue du pédiatre, tous les examens complémentaires réalisés en néonatalogie, du jour de la naissance au retour à domicile, mais de décrire, à travers plusieurs grandes situations cliniques, telle que, l’infection néonatale précoce, le sepsis néonatal secondaire d’origine bactérienne et fongique, et l’asphyxie périnatale, l’apport pratique de ces examens pour le praticien.

2. Les infections néonatales précoces 2.1. Épidémiologie Les infections néonatales précoces (INP) restent à l’heure actuelle une préoccupation majeure en périnatalité, et le streptocoque du groupe B (SGB) est toujours la cause principale de ces infections chez le nouveau-né à terme et proche du terme, suivi par E. coli [3]. Des recommandations pour la prévention des INP ont été émises en 1996 aux États-Unis par le Center for disease control and prevention (CDC) [4]. Elles ont été suivies en France en 2001 et 2002 REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2015 - N°470//

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par des recommandations pour la prévention anténatale du risque infectieux bactérien néonatal précoce ainsi que pour le diagnostic et le traitement curatif de l’infection du nouveau-né [5, 6]. Elles consistaient en un dépistage systématique du portage maternel du SGB entre 34 et 38 semaines d’aménorrhée (SA) à partir d’un prélèvement vaginal en fin de grossesse, la réalisation d’une antibioprophylaxie perpartum si nécessaire, et la mise en route d’une antibiothérapie précoce chez le nouveau-né infecté ou fortement suspect d’infection. En France, avec l’application de ces stratégies, le taux des infections néonatales précoces à SGB a ainsi diminué de 0,46/1 000 naissances vivantes en 2002 à 0,23/1 000 en 2006 pour les formes invasives [7]. L’incidence des INP varie cependant en fonction des études, allant du simple au double si le diagnostic est certain, définie par une hémoculture et/ou une culture du liquide céphalo-rachidien (LCR) positive, ou probable. Les INP causées par E. coli ont augmenté ces dernières années, principalement chez les nouveau-nés de poids de naissance inférieur à 2 500 g, et E. coli est considéré comme le principal agent responsable d’INP dans cette population. E. coli est fréquemment associé à des infections sévères et des méningites. Ensemble, le SGB et E. coli représentent 70 % des causes d’INP [8]. La mortalité des infections néonatales précoce est de 6 à 10 % chez le nouveau-né à terme, liée en particulier aux formes fulminantes des infections à E. coli et streptocoque du groupe B (20 à 50 % de décès pour ces formes). Chez le nouveau-né prématuré, la mortalité s’élève à 30 %, avec une morbidité respiratoire et neurologique associée. Les décès par infection materno-fœtale sont observés essentiellement chez les nouveau-nés symptomatiques avant H12, d’où l’importance d’un traitement précoce [1].

2.2. Diagnostic Si l’enfant symptomatique est une indication consensuelle de pratique d’examens complémentaires et d’antibiothérapie immédiats, chez l’enfant asymptomatique la décision d’instaurer en urgence un traitement antibiotique repose sur un faisceau d’éléments de l’anamnèse obstétricale et d’éléments biologiques conduisant de nombreux nouveau-nés suspects d’infection à subir des bilans biologiques répétés ou une antibiothérapie probabiliste à large spectre. Les éléments de l’anamnèse obstétricale devant attirer l’attention du pédiatre sont l’absence d’une antibioprophylaxie bien menée en cas de portage du streptocoque du groupe B chez la mère, un antécédent d’infection materno-fœtale, la présence d’une chorioamniotite, une fièvre maternelle, une rupture de la poche des eaux prématurée, c’est-à-dire avant 37 semaines d’aménorrhées, ou prolongée, supérieure à 18 heures. Au moment de la naissance, des anomalies du rythme cardiaque fœtal, un liquide amniotique teinté ou méconial sans raison évidente doivent également faire suspecter une infection [5, 6]. Sur le plan biologique, la protéine C réactive (CRP) et la numération formule sanguine (NFS) sont les seuls tests biologiques indiqués dans les recommandations américaines, révisées en 2012 [3, 9]. Les recommandations françaises de 2002, anciennes et non révisées à ce jour, reconnaissent quant à elles le rôle diagnostique des marqueurs de l’inflammation reposant principalement sur

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la CRP ; l’intérêt modeste de la NFS ; et l’indication, en cas de facteurs de risques cliniques et anamnestiques d’infection, des prélèvements de liquide gastrique (direct + culture), des prélèvements périphériques (oreille + un autre au choix), et du frottis placentaire en cas d’infection supposée hématogène [3, 6]. La France est cependant le seul pays à intégrer dans l’algorithme décisionnel le liquide gastrique pour le diagnostic d’INP [3]. Dans une étude récente réalisée dans une maternité française, le prélèvement gastrique a été réalisé dans 45 % des naissances, mais seulement positif dans 2,7 % des cas [10]. La CRP est un marqueur spécifique mais tardif d’infection néonatale précoce. Sa sensibilité est basse à la naissance mais augmente considérablement si la première détermination est faite 6 à 12 heures après. Deux dosages de CRP normaux, le premier effectué 8 à 24 heures après la naissance, et le deuxième 24 heures plus tard, permettent d’écarter le diagnostic d’infection et ainsi d’arrêter l’antibiothérapie (valeur prédictive négative : 99,7 % ; rapport de vraisemblance négatif : 0,03) [11]. Pour LacazeMasmonteil et al., d’après une étude récente effectuée chez des nouveau-nés asymptomatiques de plus de 34 SA, un seul dosage de CRP réalisé à 18 heures de vie permettrait également de réduire le traitement (valeur prédictive négative : 93 %) [12]. Comparés à des nouveau-nés à terme, il a été rapporté chez des nouveau-nés prématurés des valeurs de CRP plus basses ainsi qu’une réponse plus courte à l’infection [13, 14]. Mais indépendamment de l’âge gestationnel et de l’âge postnatal, la valeur seuil de CRP de 10 mg/l est la plus couramment utilisée [14]. Les faux positifs sont rares et bien identifiés : inhalation méconiale, volumineux hématome, administration de surfactant, gastro-œsophagite, cytostéatonécrose, suites opératoires. Les faux négatifs sont essentiellement le fait de dosages trop précoces [1]. La cinétique de décroissance de la CRP sous traitement est également un marqueur utile du bon contrôle thérapeutique de l’infection. En pratique, la CRP est dosée dans le bilan réalisé 12 à 24 heures après la naissance, puis à 24-48 heures d’évolution. Le diagnostic d’infection est pris en compte si la CRP est supérieure à 10 voire 20 mg/L pour certaines équipes. La NFS associée au rapport leucocytes immatures sur leucocytes totaux (I:T) et au taux de plaquettes est l’examen biologique de référence aux États-Unis, bien que peu sensible [3]. La leuco- ou neutropénie présente une bonne sensibilité. En revanche, la thrombopénie et la modification morphologique des polynucléaires neutrophiles constituent des signes tardifs d’infection [15]. La leucopénie est définie chez le nouveau-né par un nombre de leucocytes inférieur à 5 000/mm3 et l’hyperleucocytose par un nombre supérieur à 25 000/mm3. La thrombopénie est définie par un nombre de plaquettes inférieur à 150 000/mm3. En pratique, la NFS est réalisée dans le bilan initial puis à 24-48 heures d’évolution. Afin d’identifier plus précisément les nouveau-nés justifiant une antibiothérapie, certains auteurs se sont intéressés à la procalcitonine (PCT), prohormone peptidique de la calcitonine de production ubiquitaire (thyroïde, pancréas, poumon) qui n’a pas de passage transplacentaire. Ce marqueur d’inflammation est difficile à interpréter pour le diagnostic d’INP, du fait de son augmentation physiologique dans

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les 48 à 72 premières heures de vie. Mais d’après une étude nantaise, intégré à un algorithme dérivé des critères de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES) et prenant en compte l’aspect symptomatique ou non du nouveau-né, le dosage à la naissance sur sang de cordon de la PCT semble présenter une valeur diagnostique discriminante avec une valeur seuil > 0,6 ng/ml. Dans cette étude, une réduction des examens biologiques de 42,2 % à 13,1 % aurait pu être observée en utilisant le nouvel algorithme, avec à une diminution de 64,2 % du coût [16]. Le diagnostic de certitude de l’infection néonatale précoce est apporté par les examens bactériologiques centraux : l’hémoculture et la ponction lombaire. Une hémoculture réalisée sur sang périphérique est indiquée pour tout enfant suspect de sepsis. Les hémocultures ne sont malheureusement positives que dans 10 % des cas [1]. Leur sensibilité est problématique chez le nouveau-né, et un volume insuffisant ou la répartition du prélèvement sanguin dans un flacon d’hémoculture aérobie et anaérobie risque de majorer les faux négatifs. Si un volume de 0,5 ml paraît acceptable, les données de la littérature suggèrent qu’un volume de 1 ml est le minimum [9]. Certains travaux en cours évaluent également la possibilité d’hémoculture au cordon [16]. La ponction lombaire reste recommandée au minimum chez les nouveau-nés ayant un tableau de sepsis ou des signes neurologiques, en cas d’hémoculture positive et en l’absence d’amélioration sous antibiotiques [9].

2.3. Conclusion Le dépistage précoce des nouveau-nés à risque d’infection reste donc un enjeu majeur pour les néonatalogistes. Des algorithmes décisionnels intégrant de nouveaux marqueurs comme la PCT sur sang de cordon semblent nécessaires, dans le but de réduire le nombre de prélèvements de liquide gastrique et d’examens biologiques réalisés, et de limiter les antibiothérapies inutiles. Le Réseau Sécurité Naissance-Naître Ensemble des Pays-de-la-Loire a ainsi proposé récemment un nouveau protocole de prise en charge des infections materno-fœtales avec des algorithmes tenant compte des antécédents maternels, du suivi de la grossesse, de l’accouchement, de l’état de l’enfant à la naissance et des prélèvements biologiques maternels et néonataux effectués [17]. Une révision des recommandations française paraît également nécessaire.

3. Le sepsis néonatal secondaire

health and human development (NICHD), Neonatal research network (NRN) ont rapporté près de 21 % des nouveaunés de poids de naissance < 1 500 g avec un épisode ou plus de sepsis secondaire, et des taux de sepsis inversement proportionnels à l’âge gestationnel [8]. La densité d’incidence (DI), rapportée à 1 000 j-cathéter permet d’apprécier ce risque indépendamment de la durée de cathétérisme. Une surveillance en réseau (NEOCAT) des bactériémies liées aux cathéters veineux ombilicaux (CVO) et centraux (CVC) a été mise en place en France depuis 2006 dans plus d’une trentaine de services de réanimation néonatale, soins intensifs et néonatalogie demandeurs. En 2010, 306 BLC ont été identifiées sur CVC soit une DI de 11,2/1 000j-CVC, IC95 % (10,0-12,5), allant de 5,8 p.1 000 chez les nouveau-nés > 2 500 g à 20,8 p.1 000 chez ceux ayant un poids de naissance < 750 g. Le délai médian d’apparition de la bactériémie liée au CVC était de 12 jours après la pose [19]. Les sepsis secondaires sont largement causés par des microorganismes acquis après la naissance dans l’environnement. Les staphylocoques à coagulase négative (SCN) sont les premiers pathogènes, et en particulier S. epidermidis, mais d’autres espèces ont également été rapportées comme S. capitis, S. haemolyticus, et S. hominis [8]. En France, les SCN sont en cause dans 45 % à 65 % des septicémies et dans 85 % des septicémies sur cathéter [18]. Aux États-Unis, ils sont responsables de 22 % à 55 % des sepsis secondaires chez les prématurés de très petit poids de naissance, et S. aureus de 4 % à 8 %. Les bactéries Gram-négatives (principalement E. coli, Klebsiella, Pseudomonas, Enterobacter, Citrobacter, et Serratia) sont retrouvées dans 1/3 des cas et les Candida représentent la troisième cause de sepsis secondaire dans cette population [8]. La mortalité par infection nosocomiale est évaluée entre 2 et 11 % mais elle est d’autant plus attribuable à l’infection nosocomiale que l’âge postnatal augmente. Le germe en cause est un facteur de risque important de mortalité : elle atteint 40 % dans les infections nosocomiales à bacilles Gram-négatifs et 28 % dans les infections fongiques [18]. En cas d’infection associée à un cathéter central, l’isolement d’un staphylocoque à coagulase négative autorise le maintien du cathéter si l’évolution initiale est rapidement favorable. Inversement, si l’évolution est défavorable ou si un pathogène inhabituel est isolé dans les hémocultures (S. aureus, Candida, Pseudomonas, entérobactérie), le cathéter est immédiatement retiré.

3.1. Épidémiologie

3.2. Diagnostic

Le sepsis néonatal secondaire est habituellement défini comme une infection survenant après 72 h de vie et est causé par des pathogènes acquis après la naissance. Le risque d’infection nosocomiale bactérienne chez le nouveau-né varie de 7 à 25 % selon les études et les bactériémies représentent au moins la moitié de ces infections sévères en néonatalogie et réanimation néonatale [18]. Une hospitalisation prolongée et l’utilisation de procédures invasives comme les cathéters veineux centraux exposent les nouveau-nés prématurés et plus particulièrement ceux de petit poids de naissance à ces infections [8, 18]. Aux États-Unis, les études du National institute of child

Pour le diagnostic de sepsis néonatal secondaire, le néonatalogiste s’appuie sur des signes cliniques souvent peu spécifiques ; tels que des troubles de la régulation thermique et des variations de température de l’incubateur, une aggravation respiratoire, troubles digestifs, la persistance d’hyperglycémies ou encore un tableau de choc septique ; et demande la réalisation d’examens complémentaires biologiques et bactériologiques, afin de décider la mise en route rapide d’une antibiothérapie. Les deux marqueurs biologiques couramment prescrits en néonatalogie dans ce contexte sont la CRP et la PCT. Si l’augmentation de la CRP est différée environ 24 h après REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2015 - N°470//

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le stimulus infectieux, le taux de PCT commence à s’élever 4 heures après l’exposition à l’endotoxine bactérienne et atteint des pics de concentration 6 à 8 heures après [20], faisant ainsi de la PCT un marqueur plus précoce d’infection. De nombreuses études sur l’intérêt de la PCT pour le diagnostic des infections tardives en néonatalogie ont été menées depuis plusieurs années, avec cependant des techniques de dosage et des méthodologies différentes. Dans l’étude française de Savagner et al., avec dosage de la PCT réalisé à l’aide d’une méthode quantitative automatisée (Kryptor1-PCT, Brahms), la sensibilité et la spécificité de la PCT étaient respectivement de 79 % et 96 % versus 50 % et 88 % pour la CRP [21]. La PCT présente donc une meilleure sensibilité et une meilleure spécificité que la CRP pour le diagnostic précoce d’infection nosocomiale. Dans cette étude, une valeur seuil de 0,8 ng/ml a été retrouvée. D’autres valeurs, comprises entre 0,5 ng/ml et 2 ng/ml, ont également été rapportées [22-24]. En 2010, dans le réseau NEOCAT, le diagnostic de bactériémie liée aux cathéters (BLC) reposait dans 84 % des cas sur la présence d’une bactériémie (isolement d’un microorganisme, quel qu’il soit, dans au moins une hémoculture) concomitante de la présence du cathéter avec des signes cliniques ou biologiques et la mise en route d’une antibiothérapie adaptée au moins 5 jours. Les autres définitions retenues pour le diagnostic étaient l’association d’une bactériémie chez un nouveau-né porteur d’un cathéter veineux central à l’une des situations suivantes : r une culture positive du site d’insertion au même micro-organisme ; r une culture quantitative supérieure ou égale à 103 unités formant colonie (ufc)/mL ou semi-quantitative supérieure ou égale à 15 ufc ; r un rapport hémocultures quantitatives centrales/périphériques supérieur ou égal à 5 ; r un délai différentiel de positivité des hémocultures centrales et périphériques supérieur ou égal à 2 h En pratique, ces situations sont peu rencontrées car chez les nouveau-nés, les hémocultures sont prélevées principalement en périphérie (plus de 90 % des cas en 2010 dans le réseau NEOCAT) [19]. Les principaux micro-organismes isolés par les hémocultures étaient dans le réseau, des staphylocoques à coagulase négative (83 %), S. aureus (6 %), et des entérobactéries (5 %). Seules 3 levures ont été isolées, parmi les 336 microorganismes identifiés (1 %) [19].

3.3. Infections néonatales invasives à Candida Aux États-Unis, les infections invasives à Candida représentent la troisième cause d’infections nosocomiales sur cathéter et la mortalité attribuable à cette maladie chez le nouveau-né est de 20 à 50 %. C. albicans et C. parapsilosis sont les espèces les plus fréquemment retrouvées. Les principaux facteurs de risque d’infection sont le petit poids de naissance, le sexe masculin, une antibiothérapie à large spectre et l’absence d’alimentation entérale [8]. Le taux de mortalité varie de 10 à 32 % chez les nouveau-nés de moins de 1 000 g et peut atteindre jusqu’à 50 % chez ceux nés avant 26 semaines d’aménorrhée et avec un poids de naissance < 1 000 g [25].

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La dissémination aux organes du Candida peut se faire principalement au niveau du système nerveux central, de l’œil, du cœur et du tractus urinaire et des reins, et peut être le fait de candidémies successives ou d’une seule hémoculture positive à Candida. La survenue d’une candidémie peut être secondaire à la flore endogène du nouveau-né, ou en relation avec une contamination nosocomiale [25]. Comme pour les infections néonatales bactériennes, le diagnostic d’infection invasive à Candida sera évoqué sur un faisceau d’arguments cliniques peu spécifiques, mais la résistance à un traitement antibiotique bien conduit, une thrombopénie inexpliquée, ou encore la perturbation des paramètres rénaux et hépatiques sont des éléments très en faveur du diagnostic d’autant plus lorsqu’ils surviennent chez un nouveau-né très grand prématuré et de petit poids de naissance. Si il est aussi classique de l’évoquer devant une hyperleucocytose associée à une CRP basse, une neutropénie peut aussi être observée [25]. Le diagnostic d’infection néonatale invasive à Candida est confirmé par les prélèvements mycologiques. Ils doivent être adaptés et réalisés dans de bonnes conditions car la recherche de champignons chez le nouveau-né est souvent difficile. Tout nouveau-né suspect d’infection doit avoir un examen des urines, un prélèvement sanguin et une ponction lombaire, avec une quantité minimale à recueillir de 1 ml quel que soit le site [25]. En fonction des signes cliniques, les prélèvements peuvent également être réalisés dans d’autres sites, et en particulier au niveau du liquide péritonéal et pleural. L’isolement du Candida peut nécessiter un volume de sang plus important que celui habituellement prélevé chez un nouveau-né, et plusieurs cultures peuvent être nécessaires pour documenter l’infection [8]. La sensibilité des hémocultures pour le Candida est en effet faible (autour de 60 %), mais elle s’est améliorée grâce à l’autonomisation des processus d’analyse. Les hémocultures se positivent respectivement chez 91 et 97 % des nouveau-nés en 72 heures, selon qu’ils aient reçu ou non un traitement antifongique. La spécificité est proche de 100 % [25]. Parmi les nouveau-nés avec une culture du LCR positive, près de 50 % ont une hémoculture négative. La discordance entre la culture du LCR et l’hémoculture indique la nécessité de réaliser une ponction lombaire devant toute suspicion d’infection néonatale invasive à Candida [8]. Une culture du LCR négative n’élimine pas pour autant le diagnostic d’atteinte méningée. Le seuil de positivité des candiduries est défini comme > 104 Candida/ml d’urine.

3.4. Conclusion Le sepsis néonatal secondaire continue d’être une importante cause de mortalité et de morbidité particulièrement chez les nouveau-nés prématurés de très petit poids de naissance. La PCT est plus spécifique et plus sensible que la CRP pour le diagnostic, mais aucun marqueur biologique ne présente encore une valeur prédictive positive suffisante. Le traitement sera donc guidé par la combinaison des signes cliniques, et biologiques, dans l’attente des résultats des cultures.

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4. L’asphyxie périnatale et l’encéphalopathie post anoxique 4.1. Définition et généralités L’asphyxie périnatale correspond à une altération sévère des échanges gazeux utéroplacentaires et est définie par une acidose métabolique à la naissance avec un pH inférieur à 7,00 et un déficit de base supérieur ou égal à 12 mmol/l [26]. Elle constitue un événement rare, rencontrée dans 0,5 % des naissances à terme, mais est particulièrement redoutée [27]. Les critères d’asphyxie intrapartum comprennent : des éléments anamnestiques à recueillir auprès de l’équipe obstétricale (événement obstétrical accompagné d’une altération brusque du rythme cardiaque fœtal), un score d’Apgar restant bas (< 4) à 5 min ou plus, une acidose métabolique mesurée au cordon ou dans la première heure de vie (pH inférieur à 7,00, déficit de base supérieur ou égal à 12 mmol/l). En pratique, ils sont rarement réunis et le pédiatre n’attendra donc pas tous ces critères pour décider d’intervenir en urgence. D’autres situations intermédiaires, qualifiées par Zupan Simunek d’état néonatal non rassurant, nécessitent une vigilance accrue et dans certains cas une surveillance en unité d’hospitalisation (score d’Apgar à 5 min inférieur à 7 min, manœuvres de réanimation à la naissance, acidose métabolique persistante avec pH inférieur à 7,20 au-delà de H2) [26]. L’asphyxie engage le pronostic vital, elle est source de défaillances organiques précoces dans 60 % des cas, d’encéphalopathie néonatale dans 40 % des cas et de séquelles neurologiques, dont les paralysies cérébrales, dans 15 à 25 % des cas [26]. La survenue des défaillances viscérales est corrélée à la sévérité de l’asphyxie dont elles sont également les marqueurs. Ces atteintes au niveau endothélial, rénal, mycocardique, pulmonaire, hépatique, digestif, ou cutané, doivent être recherchées dans le bilan post-anoxique. Ces perturbations ne sont que transitoires et se normalisent en majorité en cas de survie. Le pronostic neurologique des nouveau-nés atteints d’asphyxie périnatale repose principalement sur des éléments cliniques avec présence d’une encéphalopathie classée en trois stades de gravité croissante ; électrophysiologiques avec l’électroencéphalogramme (EEG) ; et d’imagerie avec l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Le pronostic a été modifié ces dernières années avec l’hypothermie contrôlée (33,5 °C), rare thérapeutique neuroprotectrice ayant validée son efficacité dans l’encéphalopathie post-asphyxique du nouveau-né à terme. Une réduction significative de la mortalité et de la morbidité neurologique à 18 mois a en effet été observée [28].

4.2. Marqueurs biologiques d’asphyxie : étude et valeur pronostique L’équilibre acido-basique est mesuré au niveau de l’artère ombilicale ou chez le nouveau-né le plus tôt après la naissance, à moins d’une heure de vie. Le prélèvement doit être effectué dans une seringue héparinée à partir de l’artère ombilicale qui reflète l’équilibre acidobasique du fœtus alors que le prélèvement veineux rend compte davantage de la qualité des échanges placentaires [29]. La validité des résultats peut être altérée si les conditions de prélèvement ou le délai et les conditions d’acheminement au laboratoire

ne sont pas conformes. La mise à disposition, dans les salles d’accouchement et dans les unités de réanimation néonatale, de techniques de biologie délocalisée pour la mesure des gaz du sang, permet de diminuer ces risques. Une mesure isolée du pH est nécessaire pour faire le diagnostic d’acidose mais elle n’est pas suffisante pour en établir la nature (respiratoire, métabolique ou mixte), même si une acidose profonde inférieure à 7,00 correspond très souvent à une acidose métabolique ou mixte. La mesure des lactates au cordon peut être réalisée le cas échéant, permettant d’authentifier l’acidose lactique [26]. Selon Gjerriss et al. [30], un déficit de base de 12 mmol/L correspond à une valeur des lactates de 8 mmol/L, avec l’avantage de pouvoir être mesurés directement et de ne pas dépendre de la pCO2. Un pH inférieur à 7,00 en veineux est plus pathologique qu’un pH inférieur à 7,00 en artériel, la valeur normale du pH artériel ombilical étant 7,24 ± 0,07, alors qu’elle est de 7,33 ± 0,06 en veineux ombilical [31]. Idéalement, la mesure simultanée des gaz du sang à l’artère et à la veine du cordon apporte un argument supplémentaire pour l’analyse des perturbations observées. Une acidose marquée avec peu de différence artério-veineuse est en faveur d’une acidose prolongée, survenue progressivement au cours du travail, voire préexistant parfois au travail. En revanche, plus la différence du pH et de la pCO2 est élevée et plus le phénomène est aigu (compression du cordon, procidence…) [26, 27]. Dans l’étude de Goodwin et al. [32], le risque d’encéphalopathie avec convulsions augmentait avec l’abaissement du pH : 9 % pour un pH compris entre 6,90 et 6,99 ; 80 % pour un pH entre 6,61 et 6,70. Pour da Silva et al. [33], un déficit de base inférieur à 10 mmol/l n’était pas associé à un risque neurologique. Le risque d’encéphalopathie était en revanche de 20 % pour un déficit de base supérieur ou égal à 16 mmol/l. De même, d’après l’étude de Svirko et al. [34], une acidose modérée avec un pH supérieur à 7,00 au cordon n’était associée à aucune séquelle cognitive entre six et huit ans. La cinétique de normalisation du pH est aussi un élément pronostique, avec pour les nouveau-nés qui avaient encore un pH inférieur à 7,20 à 2 heures de vie, un risque six fois plus élevé de développer une encéphalopathie avec convulsions que ceux qui avaient corrigé leur pH, d’après l’étude de Casey et al. [35]. L’acide lactique s’élève au décours de l’asphyxie et témoigne d’un métabolisme cellulaire anaérobie. Un taux d’acide lactique au cordon supérieur à 6 mmol/l est habituellement considéré comme pathologique, très corrélé à une acidose métabolique. Dans l’étude de da Silva et al. [33], une lactacidémie inférieure à 5 mmol/l n’était pas associée à des complications neurologiques, alors qu’une valeur supérieure à 9 mmol/l était associée à une encéphalopathie modérée à sévère. Pour Shah et al. [36], une valeur de 7,5 mmol/l était associée au risque d’encéphalopathie. Dans cette même étude, la sensibilité et la valeur prédictive négative des lactates étaient également plus élevées que pour le pH et le déficit de base. La cinétique de décroissance des lactates est également corrélée à la gravité de l’asphyxie. En l’absence d’encéphalopathie néonatale, le délai moyen de normalisation des lactates est de 10,0 heures, contre 27,3 heures en cas de convulsions électriques [37]. REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2015 - N°470//

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4.3. Conclusion Le recours à des marqueurs biologiques simples et rapides, dosés à la naissance sur le sang de cordon ou dans la première heure de vie, est indispensable pour le diagnostic d’asphyxie périnatale. L’acidose métabolique ou l’élévation des lactates sanguins ne permettent cependant pas à eux seuls d’établir un pronostic neurologique. La gravité de l’asphyxie est liée surtout à l’encéphalopathie postanoxique, dont le pronostic repose sur l’évaluation clinique, EEG, et IRM néonataux, ainsi que le suivi de l’enfant sur le plan neurodéveloppemental au moins à 2 ans pour le diagnostic de paralysie cérébrale et jusqu’à 7 ans pour les éventuelles difficultés cognitives et comportementales. La connaissance des critères permettant de rapporter des séquelles neurologiques à un phénomène asphyxique est indispensable, de même que leur recherche systématique au cours de tout accouchement, par la réalisation de mesures des gaz du sang au cordon. La pratique systématique des gaz du sang à la naissance est recommandée par le Collège national des obstétriciens français [38].

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5. Conclusion Les infections néonatales précoces, le sepsis néonatal secondaire et l’asphyxie périnatale, sont autant de situations cliniques à risque, rencontrées quotidiennement par les pédiatres en maternité et dans les unités de néonatalogie. Sans l’aide précieuse de marqueurs biologiques simples, dosés à partir de volumes sanguins minimes, comme la CRP et la PCT et sans des techniques de biologie délocalisée permettant la mesure quasi instantanée des gaz du sang et des lactates sanguins, la prise en charge des nouveau-nés dans ces situations ne pourrait être complète et adaptée. La recherche de nouveaux marqueurs permettant d’identifier encore plus précocement l’infection néonatale doit se poursuivre, tout comme celle de marqueurs de l’atteinte cérébrale dans les situations d’encéphalopathie post-anoxique. Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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