Bradycardie réflexe de Branham

Bradycardie réflexe de Branham

Note historique Bradycardie re´flexe de Branham Amit Sharma, Kenneth G. Swan, Newark, NJ, USA Les e´tudiants se´rieux de me´decine et de chirurgie vas...

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Note historique Bradycardie re´flexe de Branham Amit Sharma, Kenneth G. Swan, Newark, NJ, USA Les e´tudiants se´rieux de me´decine et de chirurgie vasculaire connaissent le signe de Branham: bradycardie en re´ponse a` la compression manuelle d’une fistule arte´rioveineuse. Certains l’appellent le « signe de Nicoladoni, » tandis que d’autres insistent sur le fait qu’il s’agit du « signe de Nicoladoni-Israe¨lBranham. » Cette dernie`re appellation est plus approprie´e car elle rappelle les chirurgiens de´couvreur dans l’ordre chronologique de leurs observations inde´pendantes: Nicoladoni, 1875;1 Israe¨l, 1877; 2 et Branham, 1890.3 Karl Nicoladoni et James Adolf Israe¨l sont relativement bien connus comme deux chirurgiens europe´ens de renom. Cependant, on en connaıˆt beaucoup moins au sujet de Branham. Karl Nicoladoni (1847-1902) e´tait un chirurgien Autrichien et un professeur de chirurgie aux Universite´s d’Innsbruck et de Graz. Il s’est spe´cialise´ en orthope´dique et en chirurgie re´paratrice, avec un inte´reˆt particulier pour la scoliose. Nicoladoni est cre´dite´ d’avoir « . pre´sente´ le concept de transplantation d’un muscle fonctionnel pour en remplacer un paralyse´. » 4 Il a de´crit, en de´tail, la torsion testiculaire et a de´veloppe´ pour la premie`re fois son traitement chirurgical. Nicoladoni a aide´ au de´veloppement de la premie`re gastro-ente´rostomie, qui plus tard a e´te´ popularise´e par Anton Wo¨lfler dans la clinique de Billroth. Nicoladoni a e´galement re´alise´ « . la premie`re re´section intestinale pour une hernie e´trangle´e et gangrene´e suivie d’un re´tablissement de continuite´. » 4 James Adolf Israe¨l (1848-1926), habitant Berlin, a passe´ la majeure partie de sa carrie`re a` l’Hoˆpital Juif dans cette ville.5 Il y a principalement re´alise´ de la

DOI of original article: 10.1016/j.avsg.2009.10.008. De´partement de chirurgie, UMDNJ- Faculte´ de Me´decine du New Jersey, Newark, NJ, USA. Correspondance: Amit Sharma, BA, 122 Harper Street, Apt. 1A, Highland Park, NJ 08904, USA, E-mail: [email protected] Ann Vasc Surg 2010; 24: 295-298 DOI: 10.1016/j.acvfr.2010.08.009 Ó Annals of Vascular Surgery Inc. E´dite´ par ELSEVIER MASSON SAS

chirurgie urologique mais a e´galement apporte´ des contributions a` la chirurgie plastique et maxillofaciale. Israe¨l est cre´dite´ de la premie`re description du type bacte´rien actinomyces chez l’homme. En son honneur, l’une de ces espe`ces est appele´es Actinomyces israelii.5 Nicoladoni et Israe¨l sont bien reconnus dans leurs domaines respectifs. Branham l’e´tait moins. Ce qui suit est une bre`ve biographie de l’homme et un examen des circonstances de sa de´couverte.

LES JEUNES ANNE´ES Harris Miller Branham (Fig. 1) est ne´ le 30 mars 1862, a` Fort Valley, en Ge´orgie. Son lieu de naissance e´tait approximativement a` 20 miles du bord me´ridional de Sherman’ march en Ge´orgie.6 Branham e´tait le fils d’Isham et de Mary Helen Branham, deux habitants de Ge´orgie. Isham Branham, ne´ en 1828, e´tait « . l’un des fils fide`les du Sud qui a offert son aide a` la cause des Confe´de´re´s.» 7 Isham s’e´tait enroˆle´ en 1862 comme lieutenant dans la 57e infanterie de volontaires de Ge´orgie et plus tard a e´te´ e´leve´ au rang de capitaine de sa compagnie. Isham et Mary ont eu quatre enfants: Harris Miller, Mamie Helen, Fannie, et Henry. Les grand-pe`res des enfants e´taient des me´decins ge´ne´ralistes. Apre`s ses e´tudes primaires, Harris Branham a suivi l’universite´ des professeurs de Peabody a` Nashville, Tennessee. Il en a e´te´ diploˆme´ en 1883. Il a enseigne´ pendant les 3 anne´es suivantes dans les e´coles du comte´ de Screven, en Ge´orgie. En 1886, Branham s’inscrivait a` l’universite´ des me´decins et des chirurgiens de Baltimore, Maryland (maintenant Universite´ de Me´decine du Maryland). Branham y a e´te´ un excellent e´le`ve, recevant son diploˆme en 1888 avec non seulement niveau de docteur en me´decine mais e´galement une distinction de « . major sur une promotion de quatrevingt-quinze individus. » 7 Comme re´compense, il a e´te´ nomme´ chirurgien re´sident auxiliaire de l’hoˆpital de Baltimore, un poste qu’il a garde´e pendant 14 mois. 323

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Fig. 1. Dr. Harris M. Branham (1862-1936).6 Cet article a e´te´ publie´ dans Annals of Thoracic Surgery, vol. 40, Sealy WC. On the care and preservation of eponyms: the case of Branham’s sign, 311-314. Copyright Elsevier 1985.

En 1889, le Dr. Branham partit pour Brunswick, Ge´orgie, pour rendre visite a` des amis. Il a e´te´ tellement impressionne´ « . par la petite ville a` ce moment-la` qu’il a imme´diatement de´cide´ d’y e´tablir sa maison et a de´bute´ sa pratique de la me´decine a` Brunswick.» 8 Il s’est implique´ dans la pratique de la me´decine ge´ne´rale, avec autant d’emphase pour la chirurgie et la me´decine. Branham a e´te´ nomme´ inspecteur de sante´ publique a` Brunswick en 1889, un titre qu’il a tenu jusqu’en 1894.

LE SIGNE En avril 1890, le Dr. Branham, aˆge´ de 28 ans, a e´te´ appele´ a` la prison de Brunswick pour voir un prisonnier de 24 ans. Le prisonnier avait essaye´ de s’e´chapper de la cour de justice de Brunswick. Il avait ainsi arrache´ un pistolet d’un calibre de 32 mm a` l’un des trois gardes. Il avait tue´ un garde et blesse´ un autre. Le troisie`me garde avait re´cupe´re´ le pistolet du prisonnier, provoquant une plaie par arme a` feu de ce dernier.9 Quand Branham a rencontre´ le prisonnier, il a note´ que « . la balle avait pe´ne´tre´ la face ante´rointerne de la cuisse gauche environ 4 pouces ½

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au-dessous du ligament de Poupart, et s’e´tait dirige´ vers le bas, l’arrie`re et l’exte´rieur, pour venir se loger sous la surface poste´ro-externe du membre, 6 pouces au-dessus du genou.»3 La blessure saignait a` profusion « . jusqu’a` eˆtre controˆle´e par la syncope; et n’a pas ressaigne´ par la suite.»3 Branham a examine´ la blessure 15 minutes apre`s l’accident, constatant qu’il « . n’y avait rien a` noter en dehors d’une vascularisation diminue´e du membre blesse´.»3 La blessure avait e´te´ couverte d’un pansement antiseptique, mais la peau n’e´tait pas ferme´e. Trois jours apre`s la le´sion, Branham signalait que « . un le´ger thrill pouvait eˆtre ressenti au-dessus de la blessure et un souffle entendu a` l’auscultation. »3 Il a appele´ la le´sion du prisonnier « un ane´vrysme traumatique » de l’arte`re fe´morale superficielle. Ceci fut plus tard confirme´ par plusieurs membres de l’association me´dicale de l’e´tat de Ge´orgie, qui e´tait en re´union a` Brunswick a` ce moment-la`. Bien qu’une ope´ration ait e´te´ indique´e comme traitement de choix pour le patient, la chirurgie, pour des raisons inconnues, avait e´te´ remise a` plus tard. Dr. Branham a suivi le patient et a observe´ que le tressaillement et le bruit, qu’il avait pre´ce´demment identifie´s, augmentaient en intensite´. Il a e´galement note´ qu’il y avait un le´ger gonflement sur le site de la le´sion. Curieux, Branham a palpe´ le gonflement et a e´te´ intrigue´ par le re´sultat: Le phe´nome`ne le plus myste´rieux en rapport avec ce cas, que je n’ai pu m’expliquer, ou dont je n’ai pu obtenir d’explication satisfaisante par d’autres, e´tait le ralentissement des battements cardiaques lors de la compression de l’arte`re fe´morale commune. Ce symptoˆme e´tait davantage marque´ lors de la pression au-dessus de la plaie, entrainant un ralentissement des battements cardiaques de 80 a` 35 ou 40 par minutes, et cela jusqu’a` ce que la pression soit relaˆche´e. Branham a comprime´ l’arte`re fe´morale du membre sain, mais ceci n’a pas produit le meˆme effet. Il a e´galement examine´ le cœur et n’a trouve´ aucune anomalie valvulaire a` l’auscultation. A deux mois de la le´sion, le prisonnier a e´te´ fina` ce lement programme´ pour une ope´ration. A ` ´ ` moment-la, il etait revenu chez son pere, un me´decin. Branham a fait un trajet par train de nuit pour retrouver le patient a` Cathbert, Ge´orgie.9 Le jour pre´ce´dent, le seul beau costume du Dr. Branham avait e´te´ vole´ par son servant.9 Arrivant dans de vieux veˆtements, Branham a eu du mal a` persuader le cousin du patient, qui devait eˆtre le guide du docteur, que lui, Branham, e´tait un chirurgien. Cependant, apre`s discussion, le cousin a finalement accepte´ de mener Branham a` la maison ou` l’ope´ration devait avoir lieu.

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L’ope´ration a e´te´ conduite avec l’aide d’un me´decin local, qui a anesthe´sie´ le patient a` l’e´ther. Une incision de la peau recouvrant l’arte`re a e´te´ re´alise´e. Apre`s davantage de dissection, Branham a note´ quelque chose d’e´tonnant. Au de´but, il a pense´ que la grande veine qu’il avait expose´ en aval de la fistule e´tait l’arte`re fe´morale.9 Mais il s’est rendu compte que « . l’arte`re et la veine e´taient adhe´rentes au niveau ou` le tressaillement e´tait le plus perceptible, et que le sang arte´riel e´tait aspire´ dans la veine, comme le montrait les pulsations de ce vaisseau au-dessous de la blessure, avec une quasiabsence de pulsation dans la partie distale de l’arte`re.»3 Branham a e´galement note´ que « . la veine e´tait conside´rablement dilate´e devant l’ouverture, et lors de la pression de l’arte`re en amont, semblait eˆtre en danger de la rupture. »3 Confronte´ a` cette anatomie peu commune, Branham « . a passe´ une ligature de soie autour de l’arte`re en amont et en aval de la varice, noue´ et sectionne´ »3 L’ope´ration a e´te´ un succe`s. Deux heures plus tard, Branham a trouve´ la circulation dans le membre « . meilleure qu’elle l’avait e´te´ a` tout moment dans les suites de l’accident.»3 Vraisemblablement, Branham avait e´value´ la vascularisation sur la couleur, la tempe´rature, et la force des pouls distaux. La plaie a cicatrise´ et le patient a re´cupe´re´. Branham a revu le patient apre`s 7 mois, et il allait bien. Huit mois apre`s l’ope´ration, cependant, le patient est de´ce´de´ d’une probable pneumopathie.6 Le Dr. Branham a rapporte´ ce cas dans un article envoye´ au International Journal of Surgery. Il avait intitule´ son article « Ane´vrysme d’une varice de l’arte`re fe´morale et de la veine suivant une blessure par balle.»3 Dans la dernie`re phrase du manuscrit, Branham e´crit: « je rapporte ce cas en raison de son caracte`re unique, parce que la varice a e´te´ provoque´ par le passage de la balle entre la veine et l’arte`re; et aussi pour obtenir des informations quant a` la cause re´elle de la re´action cardiaque retarde´e.»3 Branham ne se rendit compte que son article avait e´te´ accepte´ pour publication 25 ans plus tard, « . quand il a rec xu un paquet de livres et de papiers et une lettre du ce´le`bre chirurgien de la NouvelleOrle´ans, Dr. Rudolph Matas, l’en informant.»6 Le Dr. Matas e´crivait, « la bradycardie re´flexe de Branham. .. est de loin le signe pre´coce le plus important de la perturbation cardio-vasculaire provoque´ par une fistule arte´rioveineuse et est d’une grande importance diagnostique dans tous les cas de communication arte´rioveineuse accessible a` la compression.»10 Le Dr. D.C. Elkin, un chirurgien vasculaire bien connude l’universite´ d’Emory, e´tait en de´saccord avec Dr. Matas, croyant que le signe avait e´te´ pre´ce´demment observe´ par Nicoladoni.11 Le

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Dr. Matas, cependant, a persiste´ en l’appelant « le signe de Branham » et, en raison de son effort, le nom de Branham « . est devenu attache´ au ralentissement de la fre´quence cardiaque quand une fistule arte´rioveineuse est comprime´e. »11

LES DERNIE`RES ANNE´ES Le 27 avril 1892, Branham a e´pouse´ Daisy Tison, ne´e le 21 janvier 1865.12 Elle e´tait la fille des re´sidents biens connus du comte´ de Glynn, Ge´orgie, John M. et Ann Greenleaf Tison. Le Dr. et Mme Branham ont eu deux enfants, Helen (ne´e le 7 mars 1893) et Harris Miller, Jr. (ne´ le 16 de´cembre 1898).12 Branham est reste´ vivre a` Brunswick, la Ge´orgie. Pour son travail de´voue´, il a e´te´ fre´quemment honore´ et a occupe´ beaucoup de postes respectables. Il a e´te´ conseiller municipal de Brunswick et a e´te´ e´galement nomme´ chirurgien responsable de la station de quarantaine locale. Dr. Branham fut « . le premier me´decin a` diagnostiquer une maladie redoute´e, la fie`vre jaune, dans l’e´pide´mie du de´but des anne´es 90 et graˆce a` ses bons soins, elle n’a fait que peu de de´ce`s chez ses victimes.»8 D’ailleurs, les efforts du Dr. Branham pendant l’e´pide´mie de fie`vre jaune de 1894 « . ont e´te´ cite´s dans plusieurs de ses e´pitaphes.» 8 Le Dr. Branham a dirige´ la socie´te´ me´dicale locale et a e´te´ e´lu pre´sident du conseil sanitaire de Brunswick. Le professionnalisme de Branham a suscite´ toute l’attention. Il e´tait bien connu que « . pendant toutes les anne´es depuis son diploˆme, aucun me´decin n’avait obtenu une aussi haute moyenne durant ses e´tudes . il a tout au long de ces anne´es suivies ses e´tudes et lorsque de nouvelles me´thodes e´taient mises en pratique, le Dr. Branham e´tait toujours le premier a` les acque´rir.» 8 Cependant, en dehors de la me´decine, Branham e´tait actif dans sa communaute´. Il a tenu des re´unions politiques avec le parti de´mocrate et e´tait « . un membre e´minent de l’organisation locale des me´thodistes du Sud de l’e´glise e´piscopale, dans laquelle il [e´tait] administrateur.» 7 Le Dr. Branham a e´te´ e´galement affilie´ a` la Loge macxonnique Oce´an, Libre et Accepte´e, et a` la Loge de l’Ordre de Brunswick, bienveillant et protecteur des Elans. En tant que citoyen civique, Dr. Branham « . s’est inte´resse´ a` tout qui touche le bien-eˆtre de sa communaute´ et sa vie a e´te´ d’une grande utilite´, inspire´e par des ide´aux de service envers son prochain.»12 Le Dr. Branham est de´ce´de´ le 28 octobre 1938. Une ne´crologie de´clare que Harris M. Branham « . age´ de 76 ans; de´ce´de´ dans sa maison apre`s une maladie de courte dure´e».13 Il faut se rappeler

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que « le Dr. Branham e´tait le plus vieux des me´decins du comte´ de Glynn et y e´tait le doyen de la profession . et il a e´te´ cre´dite´ dans des rapports de presse comme le de´couvreur de ce qui est connu comme le signe de Branham. »13 RE´FE´RENCES 1. Nicoladoni C. Phlebarteriectasie der rechten oberen Extremita¨t. Arch Klin Chir 1875;18:252. 2. Israel JA. Beobachtung einiger bemerkenswerther Phaenomene nach Unterbindung der A. femoralis. Klin Arch Chir 1877;21:109. 3. Branham HM. Aneurismal varix of the femoral artery and vein following a gunshot wound. Int J Surg 1890;3:250. 4. Gurunluoglu R, Shafighi M, Huemer GM, et coll. Carl Nicoladoni (1847-1902): professor of surgery. Ann Surg 2004;239:281-292.

Annales de chirurgie vasculaire

5. Schultheiss D. James Israel (1848-1926). Discoverer of actinomycosis and pioneer of kidney surgery. Akt Urol 2004;39:105-108. 6. Sealy WC. On the care and preservation of eponyms: the case of Branham’s sign. Ann Thorac Surg 1985;40:311-314. 7. Candler DA, Evans CA. Georgia: Comprising Sketches of Counties, Towns, Events, Institutions, and Persons Arranged in Cyclopedic Form. Atlanta, GA: State Historical Association, 1906. 8. Stevenson BA. Dr. Harris M. Branham. J Med Assoc Ga 1938;27:170. 9. Branham HM. Letter to L. Minor Blackford, 13th may, 1935. Papers of HM Branham: Emory University Library. 10. Matas R. On the systemic or cardiovascular effects of arteriovenous fistula. Trans South Surg Assoc 1923;36:623. 11. Hurst JW, Harris M. Branham Clin Cardiol 1986;9:589-590. 12. Howell C. History of Georgia. Chicago: S.J: Clarke, 1926. 13. Obituary. Harris Miller Branham. J Med Assoc Ga 1939; 28:35.