Pathol Biol 2002 ; 50 : 401-12 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0369-8114(02)00313-9/REV
Revue générale
Brucella à l’aube du troisième millénaire : organisation du génome et pouvoir pathogène Sylvie Michaux-Charachon ∗ , Vincent Foulongne, David O’Callaghan, Michel Ramuz INSERM U431, faculté de médecine, avenue Kennedy, 30900 Nîmes, France Résumé Les bactéries du genre Brucella, responsables de la brucellose, sont pathogènes pour les animaux et occasionnellement pour l’homme. Le coût de cette zoonose mondialement répandue est encore très important pour la société aujourd’hui. Ces dernières années, les travaux entrepris sur Brucella ont permis d’avancer dans deux domaines principaux. D’une part, sur le plan de l’organisation du génome, il a été montré que Brucella possède un génome complexe à deux chromosomes. D’autre part, en ce qui concerne l’étude du pouvoir pathogène de cette bactérie, les données les plus récentes suggèrent que Brucella a su développer des mécanismes de virulence communs avec des pathogènes de plantes et des symbiotes du groupe des α protéobactéries. L’étude des facteurs de virulence de Brucella est importante dans l’optique du développement d’un vaccin efficace et peut être aussi de nouveaux antibiotiques. L’accès à la séquence du génome de Brucella est un atout important pour le futur. 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS α-protéobactéries / Brucella / facteurs de virulence / génome complexe / pouvoir pathogène
Summary – Brucella at the dawn of the third millenium: genomic organization and pathogenesis. Bacteria of the genus Brucella, responsible for brucellosis, are pathogenic for animals and occasionally for humans. The cost of this widespread zoonotic infection is still very high for the community. Over the last few years, there have been advances in two main domains. First, the Brucella genome has been shown to be complex, with two circular chromosomes. Second, recent data on the virulence of Brucella suggest common mechanisms shared with plant pathogens and endosymbionts of the α-proteobacteria. Understanding virulence will have practical repercussions in the realms of vaccine development and, perhaps, development of new antibiotics. Two complete Brucella genome sequences are now available and will be a gold mine of information to guide future research. 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS α-proteobacteria / Brucella / complex genome / pathogenesis / virulence factors
1. INTRODUCTION Les bactéries du genre Brucella sont responsables de la brucellose, zoonose mondialement répandue pouvant atteindre pratiquement tous les animaux domestiques et sauvages. Brucella est pathogène non seulement pour les animaux, mais aussi occasionnellement pour l’homme. La contamination humaine est accidentelle, en général par contact avec des animaux d’élevage infectés ou
∗ Correspondance et tirés à part.
Adresse e-mail :
[email protected] (S. Michaux-Charachon).
par ingestion de produits laitiers contaminés (lait crû, fromages frais) provenant de ceux-ci [1]. La brucellose animale reste un énorme problème mondial ; elle est encore endémique dans de nombreux pays, notamment le pourtour méditerranéen, le Moyen-Orient, certaines régions d’Afrique, d’Asie et surtout d’Amérique du Sud. Dans ces pays, la brucellose humaine est un problème de santé publique. Le contrôle de la brucellose humaine est totalement dépendant du contrôle
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Tableau I. Classification dans le genre Brucella Espèce
Biovars
Hôtes préférentiels
Pathologie humaine
B. melitensis
1–3
Caprins, ovins
Fréquence + + +a,b , virulence + + +,
B. abortus
1–6, 9
Bovins
Fréquence + +, virulence + +
B. suis
1, 3
Porcins
Fréquence +, virulence + + +
2
Porcins, hase
Fréquence (+), virulence +
4
Renne
Fréquence +, virulence + +
B. canis
Aucun
Chiens
Fréquence (+), virulence +
B. ovis
Aucun
Ovins
Aucune
B. neotomae
Aucun
Rat du désert
Aucune
infections sévères, complications fréquentes
a + + + : élevée, ++ : modérée, + : faible, (+) : rare ; b la notion de fréquence correspond à l’épidémiologie de la brucellose en France.
de la brucellose animale. Les pays qui ont pu mettre en route des mesures de surveillance vétérinaire et de contrôle de la brucellose animale (abattage des animaux malades, vaccination), notamment chez les bovins, ont vu leur nombre de cas de brucelloses humaines fortement diminuer. C’est le cas de la France. Mais bien évidemment, ces mesures vétérinaires ont un coût très élevé. Quatre espèces du genre Brucella peuvent infecter l’homme à des degrés variables : Brucella melitensis, Brucella abortus, Brucella suis et plus rarement Brucella canis (Tableau I). En France, la quasi totalité des cas de brucellose humaine est due à B. melitensis, une espèce particulièrement pathogène qui provoque souvent des infections sévères ou d’évolution prolongée. Il n’y a pas eu d’évolution récente dans l’approche du problème de la brucellose. La mise au point de tests diagnostiques simples, rapides, spécifiques et peu coûteux et d’un vaccin efficace font partie des enjeux à relever. Cela justifie pleinement les travaux entrepris dans le domaine de la brucellose et de l’étude de la bactérie responsable, Brucella. Cet article veut être une mise au point sur les dernières avancées dans l’étude de Brucella, sur le plan de l’organisation génomique de cette bactérie et sur les mécanismes de son pouvoir pathogène à l’aube de l’ère postgénomique ! En effet, la séquence du génome d’au moins deux souches de Brucella (B. melitensis 16M et B. suis 1330) est disponible depuis 2001, et cela va très certainement ouvrir de nouvelles perspectives dans l’étude de la biologie et de l’évolution de ce pathogène [2].
2. ORGANISATION GÉNOMIQUE DE BRUCELLA 2.1. Généralités et classification Classiquement, sur la base de caractères phénotypiques biologiques (caractères culturaux, métaboliques, antigé-
niques et de sensibilité à certains bactériophages), le genre Brucella est divisé en six espèces, trois d’entre elles étant elles-mêmes divisées en biovars : B. melitensis (3 biovars), B. abortus (7 biovars), B. suis (4 biovars), B. canis, B. ovis et B. neotomae (Tableau I) [3]. Chaque espèce ou biovar est naturellement pathogène pour un hôte animal préférentiel, mais non exclusif (Tableau I). Cet hôte préférentiel a une valeur épidémiologique et permet d’introduire la notion de pathovars (groupes de bactéries définis par leur pouvoir pathogène pour un hôte préférentiel), superposables à la classification en espèces. Cependant, au niveau génomique, il existe une extrême homogénéité entre les différentes souches de Brucella. Les techniques d’hybridation ADN/ADN mettent en évidence plus de 90 % de similitude des séquences ADN entre les différentes espèces. Il a été proposé par Verger [4] une espèce unique, B. melitensis, dans le genre Brucella, avec différents biovars : par exemple, B. melitensis biovar abortus 1. Néanmoins, à ce jour, le sous-comité de taxonomie des Brucella a conservé la classification en plusieurs espèces classique, car elle garde toute sa valeur sur le plan clinique et épidémiologique. Par ailleurs, cette classification a également le mérite de refléter de réelles différences au niveau de l’organisation génomique dans le genre Brucella [5]. Sur la base du séquençage de l’ARN ribosomique 16S, le genre Brucella se trouve dans la sous-division α des Protéobactéries [6]. Cette division regroupe notamment des bactéries pathogènes ou symbiotes de plantes (Agrobacterium et Rhizobiaceae) ou d’animaux (Brucella, Bartonella ou Rickettsia), caractérisées par leur pouvoir pathogène intracellulaire.
2.2. Le génome de Brucella est stable L’étude du polymorphisme de longueur des fragments de restriction (RFLP) après électrophorèse en champ pulsé de l’ADN génomique digéré par des endonucléases à
Brucella : organisation génomique et pouvoir pathogène
faible fréquence de coupure a montré que le génome de Brucella est très stable, et que pour une espèce donnée ou pour un biovar donné à l’intérieur d’une espèce, il existe un profil de restriction spécifique [7]. Cette spécificité est d’ailleurs utilisée dans notre laboratoire pour effectuer le typage des souches de Brucella dans le cadre du diagnostic bactériologique de la brucellose. Cependant, au cours d’une enquête épidémiologique, la technique de RFLP ne permet pas la distinction des souches de Brucella à l’intérieur d’un même biovar [7]. Les méthodes les plus performantes pour mettre en évidence ce très faible polymorphisme semblent être les techniques de PCR basées sur l’amplification de séquences courtes répétées, localisées dans les régions extra-géniques (repetitive element sequence-based PCR ou rep-PCR) [8]. La stabilité du génome de Brucella a été confirmée par la construction des cartes physiques des deux chromosomes composant le génome des souches types d’espèces et de biovars : ces cartes sont très conservées dans l’ensemble [5]. En dehors des réarrangements retrouvés parmi les quatre biovars de B. suis (voir plus loin) et d’une inversion de 600 kb dans le petit chromosome de B. abortus, les différences correspondent à de nombreuses petites insertions ou délétions (de 1 à 34 kb) dans le génome des différentes souches. Récemment, un fragment de 10 kb a été identifié chez B. melitensis contenant 15 gènes potentiels, dont la protéine de membrane externe OMP 31 et 11 cadres de lectures montrant une homologie avec des gènes impliqués dans la synthèse de polysaccharides [9, 10]. Cette région probablement impliquée dans la synthèse d’un nouveau polysaccharide chez B. melitensis n’est pas retrouvée chez B. abortus. Dans l’avenir, en utilisant le génome de B. melitensis comme référence, il sera possible d’identifier les séquences spécifiques à chaque souche soit par des techniques d’hybridation différentielle, soit par comparaison des données provenant des projets de séquençage des génomes de différentes espèces de Brucella. Cette faible variabilité génomique est peut-être le résultat d’un isolement génétique de Brucella. En effet, il n’a jamais été mis en évidence d’échanges génétiques entre ces bactéries de façon naturelle ; il n’a jamais été décrit de plasmide chez Brucella. De plus, cette bactérie est de culture difficile, exigeant des milieux complexes pour obtenir des colonies visibles en deux jours. Il est donc probable et communément admis que, dans la nature, Brucella se multiplie assez mal dans le milieu extérieur, la multiplication bactérienne s’effectuant presque exclusivement chez les hôtes infectés. Enfin, l’expression de la virulence de chaque espèce de Brucella, comme nous l’avons dit plus haut, est restreinte à un très petit nombre d’hôtes ; l’infection d’un hôte autre que l’hôte préférentiel se fait en général au contact de celui-ci et représente une impasse épidémiologique pour la bactérie. Tous ces éléments suggèrent que le genre
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Brucella est constitué de clones évolutifs, liés à un pouvoir pathogène particulier, adapté à un hôte spécifique préférentiel, quoique non exclusif [5]. Les différences retrouvées au niveau génomique entre les différentes souches pourraient correspondre aux gènes responsables de cette spécificité d’hôte et jouer un rôle important dans la compréhension de l’évolution du genre Brucella. Cette analyse semble confirmée par la description récente de nouveaux pathovars de Brucella retrouvés chez des mammifères marins tels que dauphins, marsouins, phoques ou baleines [11]. Ces souches semblent peu virulentes pour l’homme et les animaux domestiques [12]. L’analyse génomique de ces souches par RFLP a montré qu’il s’agissait de souches de Brucella distinctes des espèces déjà décrites et que chaque souche associée avec un hôte animal particulier avait une organisation génomique spécifique [13, 14].
2.3. Le génome de Brucella est complexe La réalisation des cartes physiques des génomes des différentes espèces du genre Brucella a été le point de départ de l’étude de l’organisation génomique de cette bactérie. Le génome de Brucella est constitué de deux réplicons circulaires. Cela fut démontré la première fois pour la souche de référence B. melitensis 16M, qui possède deux chromosomes circulaires de 1,15 Mb et 2,1 Mb, et donc un génome d’environ 3,2 Mb au total [15]. Cela a été confirmé récemment par le séquençage génomique. Les souches de référence des différentes espèces de Brucella possèdent toutes la même organisation génomique [5]. En revanche, l’étude de l’organisation du génome des quatre biovars de B. suis a mis en évidence des différences importantes. Tandis que B. suis biovar 1 possède deux chromosomes de 1,15 et 2,1 Mb comme les autres souches, les biovars 2 et 4 possèdent également deux réplicons, mais de taille différente (1,85 et 1,35 Mb). Quant au biovar 3, son génome est constitué d’un chromosome circulaire unique de 3,2 Mb (Fig. 1) [16]. Nous avons proposé que ces différentes structures pouvaient être le résultat de deux modes possibles de recombinaisons homologues au niveau des trois opérons codant pour les ARN ribosomiques (loci rrn). Les souches de Brucella possédant deux réplicons auraient évolué à partir d’un ancêtre commun ayant un chromosome unique circulaire, probablement voisin de celui du biovar 3 de B. suis (Fig. 1). De tels événements de recombinaison homologue au niveau des gènes rrn ont été aussi montrés responsables de réarrangements chromosomiques (inversions ou transpositions de fragments d’ADN) chez Salmonella typhi [17]. Les génomes complexes sont classiques chez les α protéobactéries [18] ; dans ce groupe, des bactéries possédant un seul chromosome (avec ou sans plasmides), telles que Bartonella spp., Rickettsia spp. ou Phyllobacterium spp., sont reliés phylogénétiquement avec des bactéries possédant deux chromosomes (avec ou sans plasmides),
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Figure 1. Représentation de l’évolution possible de la structure génomique des différentes lignées de Brucella à partir d’un ancêtre commun possédant un seul chromosome (d’après Jumas-Bilak E et al. [16]).
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telles que Brucella, Ochrobactrum spp. ou Agrobacterium spp., ou bien encore avec des bactéries contenant un chromosome et des mégaplasmides permanents comme Rhizobium spp. En fait, la définition d’un chromosome bactérien n’est absolument pas claire : en pratique, c’est la présence de gènes essentiels à la bactérie, tels que les gènes rrn, qui a été choisie pour définir un chromosome. La présence de plusieurs réplicons à l’intérieur d’une bactérie pose le problème de la réplication du génome et de la ségrégation des chromosomes durant la division cellulaire. Quand plusieurs mégaréplicons sont présents dans une cellule, chacun d’eux doit posséder une origine de réplication propre et il n’est pas impensable d’imaginer l’existence d’un équivalent bactérien de l’appareil mitotique eucaryote pour assurer la coordination de la division bactérienne [19]. Les séquences du génome des deux souches de Brucella et de celui de Agrobacterium tumefaciens pourront peut-être apporter des éléments de réponse aux questions de l’origine des multiples réplicons chez les α Protéobactéries et de leur réplication.
3. FACTEURS DE PATHOGÉNICITÉ DE BRUCELLA 3.1. Rappel du pouvoir pathogène La maladie animale est variable dans sa symptomatologie, avec des manifestations cliniques souvent frustres. Après pénétration de la bactérie par ingestion ou par voie cutanéomuqueuse, il se produit une invasion du système lymphatique à proximité du point de pénétration. Si la dissémination vers les organes cibles nécessite vraisemblablement un passage circulatoire, le diagnostic positif de cette bactériémie transitoire (hémoculture) est souvent pris en défaut chez les animaux. La brucellose animale est caractérisée par l’atteinte de l’appareil génital, responsable d’avortements chez les femelles gravides : Brucella envahit l’utérus et les glandes mammaires et provoque des avortements et des mastites avec une contamination du lait [20]. Chez les mâles, l’infection se traduit notamment par des orchites et des épididymites. L’infection est généralement bien contrôlée par le système immunitaire conduisant à l’élimination plus ou moins rapide de la bactérie ou à l’établissement d’une forme latente chronique. Chez l’homme, la brucellose ou fièvre de Malte est classiquement dans sa phase aiguë une septicémie d’origine lymphatique où les bactéries viennent coloniser les cellules du système réticulo-endothélial. Les décharges bactériémiques se traduisent par la fièvre ondulante caractéristique de la primo-infection. Néanmoins, les signes cliniques sont peu spécifiques et peuvent passer inaperçus ou être négligés. Le risque est alors le passage à plus ou moins courte échéance à une forme suppurée localisée : c’est la brucellose subaiguë focalisée. Ces localisations secondaires, parfois révélatrices, sont le plus
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souvent ostéoarticulaires, mais aussi neuroméningées, hépato-spléniques, cardiaques ou encore glandulaires (organes génitaux notamment) [1]. La survenue de ces manifestations à distance de la primo-infection suggère que la bactérie se soit maintenue dans une niche à l’abri du système immunitaire de l’hôte. La survie de Brucella dans les cellules peut expliquer l’apparition des foyers secondaires dans ces formes localisées, ainsi que les fréquentes rechutes observées même après traitement antibiotique. Enfin, la brucellose chronique, quant à elle, caractérisée par des signes cliniques fonctionnels non spécifiques (asthénie physique et psychique), serait due à la persistance d’antigènes de Brucella, induisant un maintien de la stimulation antigénique chez le sujet. Le diagnostic est délicat et repose sur la constatation d’une forte réaction d’hypersensibilité retardée à l’injection d’antigènes brucelliens. La nature et la localisation de ces antigènes sont inconnus. Toutefois, il ne s’agit probablement pas de bactéries vivantes, car les traitements antibiotiques sont inactifs sur les troubles liés à la brucellose chronique. Classiquement, Brucella fait partie des bactéries pathogènes intracellulaires facultatives. C’est une bactérie relativement fragile dans le milieu extérieur qui a donc choisi de survivre plutôt dans l’organisme des animaux infectés. Brucella a ainsi su développer des facteurs de virulence permettant sa survie dans l’hôte. Pour Brucella, comme pour toutes les bactéries pathogènes, l’établissement de relations intimes avec l’hôte n’a donc pas pour but principal de provoquer la maladie, mais plutôt de permettre à la bactérie de survivre en se multipliant dans les cellules de l’hôte, puis d’assurer sa pérennité par sa transmission d’un hôte à l’autre. En revanche, comme cela a été dit plus haut, l’infection humaine représente une impasse épidémiologique pour Brucella, et traduit donc une adaptation encore imparfaite de la bactérie pour l’homme. Les facteurs de pathogénicité de Brucella restent encore en grande partie méconnus aujourd’hui. Il n’y a pas de capsule chez Brucella et la production de toxine protéique n’a pu être mise en évidence. Le pouvoir pathogène de Brucella diffère entre l’hôte animal, notamment l’hôte préférentiel, et l’homme, mais l’élément clé reste dans tous les cas la capacité de la bactérie à survivre et à se multiplier dans les cellules phagocytaires, en particulier les macrophages [21, 22]. Chez l’animal, Brucella a également le pouvoir de se développer fortement dans les cellules du tractus génital et, chez les femelles gravides infectées, d’énormes quantités de bactéries sont retrouvées au niveau des cellules trophoblastiques du placenta [20].
3.2. Trafic intracellulaire de la bactérie L’étude de la nature des relations établies entre Brucella et la cellule hôte a donné lieu à un certain nombre de publications. En l’état actuel des connaissances, la situation peut être résumée de la façon suivante. Les
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Figure 2. Multiplication intracellulaire de Brucella dans un macrophage humain après 48 h d’infection. Microscopie électronique. Quelques bactéries sont désignées par des flèches.
mécanismes de l’adhérence de Brucella à la cellule cible sont encore méconnus. Quelle que soit la cellule infectée, Brucella semble s’insérer dans la cellule de façon polaire par l’intermédiaire d’une vacuole de phagocytose, sans déclencher de réorganisation spectaculaire du cytosquelette [23] et la bactérie va persister et se multiplier dans un compartiment cellulaire membranaire jusqu’à la mort de la cellule-hôte (Fig. 2). L’opsonisation des Brucella permet d’augmenter le nombre des bactéries ingérées par la cellule, mais en définitive le taux de multiplication et de survie des bactéries est équivalent à celui des Brucella non opsonisées au bout de 24–48 heures [24]. Classiquement, il est décrit que Brucella inhibe la fusion phagosome-lysosome dans les macrophages, ainsi que la dégranulation dans les polynucléaires neutrophiles. Des travaux récents ont montré que Brucella est capable de modifier le processus de maturation du phagosome pour créer une niche intracellulaire spécifique dans laquelle elle va pouvoir se multiplier (Fig. 3).
Dans un modèle d’infection cellulaire Brucella abortus/cellules HeLa, après avoir bloqué la fusion phagolysosomiale, les bactéries sont retrouvées transitoirement dans un nouveau compartiment cellulaire présentant les caractéristiques d’un autophagosome [25, 26]. Brucella est ensuite dirigée vers un autre compartiment qui présente des marqueurs membranaires du réticulum endoplasmique (RE) et qui représente le compartiment de multiplication de la bactérie, compartiment dans lequel Brucella pourrait être au contact des nutriments dont elle a besoin. Ainsi, il semble que Brucella exploite la machinerie cellulaire dévouée à l’autophagocytose (élimination des déchets cellulaires) pour atteindre sa niche de multiplication intracellulaire (Fig. 2). Dans les macrophages, la situation parait plus compliquée. La phagocytose de Brucella par des phagocytes professionnels donnerait naissance à deux types de phagosomes reconnaissables en microscopie électronique [27] : soit des phagosomes classiques de type spacieux
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Figure 3. Représentation du trafic intracellulaire de Brucella dans la cellule HeLa et dans le macrophage. Après son entrée dans la cellule HeLa (moitié gauche de la figure), Brucella inhibe la fusion avec le lysosome et se retrouve dans un compartiment cellulaire présentant les marqueurs membranaires d’un autophagosome, puis du réticulum endoplasmique, dans lequel la bactérie va se multiplier. Dans le macrophage (moitié droite de la figure), Brucella se retrouve soit dans un phagosome de type spacieux, compartiment aboutissant à la fusion avec le lysosome et à la lyse de la bactérie, soit dans un phagosome étroit permettant la survie de la bactérie. Dans ce cas là, la modification du processus de maturation du phagosome est caractérisée par son acidification précoce, mais le trajet de Brucella et la nature exacte du compartiment final de multiplication dans la cellule sont mal connus.
représentant un compartiment aboutissant à la lyse de la bactérie, soit des phagosomes de type étroit permettant au contraire la survie de la bactérie (Fig. 2). Cela est peut être un début d’explication au fait que la grande majorité des Brucella sont tuées après leur entrée dans les macrophages. Les bactéries qui survivent à l’attaque bactéricide initiale du phagocyte semblent également affecter le processus de maturation du phagosome, mais à la différence de ce qui est décrit dans les cellules HeLa, seule une faible proportion des bactéries sont retrouvées dans des compartiments cellulaires présentant les caractéristiques d’un autophagosome ou du RE [24]. Un modèle in vitro de fusion phagosome-lysosome a montré que l’inhibition de la fusion par Brucella était un processus actif, dirigé par la bactérie et restreint au phagosome contenant la bactérie [28]. Dans le macrophage, après l’entrée de Brucella, l’élément essentiel est l’acidification rapide et importante (pH 4) du phagosome [29] qui semble être pour la bactérie un signal inducteur de facteurs de virulence [30]. Néanmoins, s’il est nécessaire, le pH acide seul ne semble pas suffisant pour établir l’infection intracellulaire : le type « étroit » du phagosome, permettant ou révélant l’appo-
sition de la bactérie sur la membrane vacuolaire, paraît déterminant [27]. Une fois que Brucella a établi sa niche intracellulaire de réplication, les bactéries vont tenter de se maintenir dans la cellule le plus longtemps possible en inhibant l’apoptose, comme cela a été ensuite décrit pour Chlamydia et Rickettsia, deux autres bactéries pathogènes intracellulaires. En effet, il a été montré que dans les macrophages infectés, l’expression du gène A2, un facteur anti-apoptotique de la famille bcl-2, était induite [31]. De plus, Brucella produit également un facteur protéique qui inhibe la production de TNFα par les macrophages humains, mais non par les macrophages murins [32]. Très récemment, il a été mis en évidence que la protéine de membrane externe Omp25 de Brucella est impliquée dans ce phénomène [33]. Non seulement, l’inhibition de l’excrétion du TNFα, acteur essentiel de la réponse immune Th1 (immunité cellulaire), pourrait favoriser une réponse Th2 (réponse anticorps) moins efficace contre Brucella, mais cela pourrait aussi agir sur la réponse inflammatoire non spécifique. Ainsi, Brucella semble avoir su développer des mécanismes lui permettant de bloquer
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les défenses de l’hôte et donc d’augmenter ses chances de survie intracellulaire.
3.3. Identification de facteurs de virulence Les progrès récents obtenus dans la manipulation génétique de Brucella ont permis d’accéder à l’étude des facteurs génétiques de la virulence brucellienne. Différentes approches ont été utilisées par plusieurs groupes : mutagénèse par transposon, identification de gènes par homologie avec des gènes d’autres pathogènes, expression différentielle de gènes dans différentes conditions, notamment dans le macrophage. C’est la mutagénèse par transposon qui a permis l’identification des premiers gènes de Brucella participant à la création de la niche intracellulaire spécifique à la réplication de la bactérie. Tout d’abord, des mutants chez lesquels la mutation affectait un système de régulation à deux composants, appelé BvrS/BvrR, se sont révélés très atténués à la fois dans les modèles d’infection cellulaire et chez la souris [34]. Ces mutants ont perdu la capacité d’inhiber la fusion lysosomiale et sont incapables de se multiplier dans la cellule. Le système de régulation BvrS/BvrR pourrait contrôler l’expression de molécules de la membrane externe, et notamment la protéine Omp25 [2]. Ce système présente une homologie de séquence avec deux systèmes de régulation à deux composants rencontrés chez des bactéries phylogénétiquement proches de Brucella : ChvI/ChvG chez Agrobacterium tumefaciens et ChvI/ExoS chez Sinorhizobium meliloti. Chez ces deux α protéobactéries, ces systèmes de régulation interviennent au niveau de la relation de la bactérie vis-à-vis de la plante. La seconde découverte importante a été l’identification d’un système de sécrétion de type IV chez Brucella [35], homologue du système VirB chez A. tumefaciens, responsable du transfert du plasmide Ti dans la cellule de plante infectée, et du système Ptl chez Bordetella pertussis, responsable de la sécrétion de la toxine pertussique. Ces systèmes de sécrétion de type IV ont été décrits chez plusieurs bactéries : ce sont soit des systèmes de transport conjugatif d’ADN (E. coli), soit des systèmes de sécrétion transmembranaire de complexes protéiques, le plus souvent directement vers l’intérieur de la cellule cible. Ils interviennent dans le pouvoir pathogène de plusieurs bactéries (A. tumefaciens, B. pertussis, Legionella pneumophila, Helicobacter pylori) [36]. Chez Brucella, ce système est essentiel à la virulence de la bactérie aussi bien dans les modèles cellulaires que chez la souris [35, 37] ; en effet, des mutants obtenus dans les gènes de cette région appelée virB sont incapables de se multiplier dans les macrophages ou dans les cellules épithéliales. L’opéron virB, composé de 12 gènes, est régulé en réponse à des signaux environnementaux ressemblant à ceux rencontrés par la bactérie dans le phagosome. Récemment, il a été montré par induction différentielle de fluorescence (DFI)
que le promoteur de virB était spécifiquement induit dans le macrophage et que l’acidification du phagosome représentait un des signaux inducteurs [30]. L’analyse de mutants virB a mis en évidence le rôle essentiel de ce système de sécrétion de type IV dans le trafic intracellulaire de Brucella [38 – 40], comme cela a été décrit pour le système Dot/Icm chez Legionella. L’hypothèse actuelle est que le ou les produits sécrétés par VirB, qui restent encore à identifier, doivent intervenir dans la détermination du devenir de Brucella dans le phagosome, après l’entrée dans la cellule hôte, en particulier dans l’établissement de la niche spécifique de réplication de la bactérie. Récemment, la technique de signature-tagged mutagenesis (STM) a été appliquée pour Brucella dans le modèle animal de la souris [37, 41] et a également été adaptée à un modèle d’infection cellulaire de macrophages humains [42]. Cette technique de mutagénèse par transposon un peu particulière permet l’identification de mutants atténués par sélection négative au sein d’un pool de nombreux mutants et a maintenant été appliquée à un grand nombre de bactéries et de champignons pathogènes pour mettre en évidence des gènes de virulence [43]. Quelques mutants au niveau de l’opéron virB ont été identifiés, confirmant le rôle important de ce système dans le pouvoir pathogène de Brucella. Mais, quel que soit le système de sélection utilisé (modèle cellulaire ou souris), la plupart des gènes identifiés sont impliqués dans le métabolisme de base de la bactérie, ou dans le transport de métabolites, ou encore dans la constitution de la paroi bactérienne [2]. Pour plusieurs mutants identifiés par cette technique, il n’a pas été retrouvé d’homologie dans les banques de données ; l’accès à la séquence du génome de Brucella permettra peut-être de comprendre la fonction de ces gènes. En définitive, cette méthode n’a pas permis l’identification de nouveaux facteurs directement responsables de la virulence de Brucella, mais a plutôt permis de retrouver des facteurs nécessaires à la survie et à la multiplication de la bactérie dans l’hôte. Cela est peut-être le reflet de la nature chronique de l’infection par Brucella : la bactérie a su s’adapter au mieux aux conditions cellulaires rencontrées, son objectif principal étant de rester plus ou moins quiescente dans l’animal hôte jusqu’à la première grossesse, élément déterminant pour la dissémination de la bactérie et l’infection de nouveaux hôtes. Mais il est aussi possible que les modèles d’infection, choisis pour leur facilité d’utilisation, ne soient pas réellement appropriés et que des études sur des hôtes primaires de Brucella (chèvres ou vaches gravides par exemple) auraient permis la mise en évidence de gènes spécifiquement impliqués dans le processus infectieux naturel. Au cours de l’infection cellulaire, Brucella va devoir s’adapter aux différentes conditions environnementales qu’elle rencontre. L’hypothèse selon laquelle Brucella doit faire face à un environnement hostile dans le macrophage a permis l’identification de plusieurs protéines liées au stress, parmi lesquelles deux superoxide dis-
Brucella : organisation génomique et pouvoir pathogène
mutases, une catalase (Kat) et des protéines chaperones (HtrA, RecA, DnaK, ClpA, ClpB et GroE) [21, 22, 44 – 46]. Cependant, excepté pour DnaK [47], leur rôle dans la virulence n’a pas été clairement démontré ou semble marginal. Brucella doit être capable de moduler l’expression de ses gènes pour s’adapter aux différentes conditions environnementales qu’elle rencontre au cours de l’infection. Les gènes spécifiquement induits dans l’hôte sont souvent des facteurs de virulence essentiels [48]. Différentes techniques permettent de mettre en évidence l’expression différentielle de gènes dans différentes conditions, et notamment dans le macrophage. L’induction différentielle de fluorescence (DFI) permet l’identification de gènes induits en situation intracellulaire, à partir d’une banque de promoteurs de la bactérie étudiée fusionnés à un gène « reporter », codant pour la protéine fluorescente verte (GFP). L’induction de la fluorescence est alors mesurée en cytométrie de flux ou en microscopie. Cette technique a été appliquée à Brucella pour identifier les gènes exprimés uniquement dans le macrophage [49] : la plupart des gènes retrouvés sont des gènes de métabolisme, probablement impliqués dans l’adaptation à l’environnement intracellulaire. Le rôle de ces gènes dans la virulence doit encore être vérifié par la mutagénèse systématique de chacun d’eux. En définitive, les gènes identifiés par DFI, bien que retombant dans les mêmes catégories (gènes du métabolisme, gènes de transport de métabolites, etc.) ne sont en général pas redondants avec ceux identifiés par STM [2], mais cela confirme combien la capacité de la bactérie à s’adapter aux conditions environnementales semble importante dans le pouvoir pathogène de Brucella. L’identification de deux gènes en particulier pose une question intéressante : le gène manB/ppm codant pour une phosphomannomutase, enzyme intervenant dans la synthèse du lipopolysaccharide (LPS), et le gène mtgA, codant pour une transglycosylase impliquée dans la synthèse du peptidoglycane, sont induits dans le macrophage. Cela suggère l’existence de remaniements membranaires au cours de l’infection cellulaire [2]. En complément de l’approche génétique, l’analyse biochimique par l’électrophorèse de protéines classique ou à deux dimensions (2D) a été utilisée pour mettre en évidence les protéines induites dans le macrophage, mais aussi in vitro dans des conditions expérimentales mimant celles rencontrées lors de l’infection de l’hôte [50 – 53]. Bien qu’il y ait un chevauchement entre les réponses aux différents stress et à l’infection du macrophage, la réponse intracellulaire est la plus complexe. L’association de l’électrophorèse-2D et de la spectrométrie de masse d’une part, et l’accès à la séquence complète du génome d’autre part, comme cela a été montré avec Mycobacterium tuberculosis récemment [54], permettront certainement dans un proche avenir l’identification des protéines induites dans différentes conditions, ouvrant ainsi la porte au développement de nouveaux vaccins
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ou de nouveaux outils diagnostiques. À côté de l’étude du « protéome », se développe actuellement une autre voie, celle du « transcriptome », c’est-à-dire l’étude de la transcription des ARN messagers en fonction des conditions rencontrées par la bactérie. Après extraction de l’ARN des bactéries cultivées dans différentes conditions expérimentales ou lors de l’infection cellulaire, l’hybridation sur des puces à ADN représentant la totalité du génome de la bactérie étudiée permet d’explorer l’expression génique. Cette technologie est maintenant accessible à l’étude de Brucella avec le séquençage complet du génome. Avant la mise en route des programmes de séquençage génomique complet de Brucella, certains groupes avaient choisi de séquencer au hasard et de comparer leurs résultats avec les banques de données pour identifier des gènes potentiellement intéressants [55, 56]. C’est ainsi, par exemple, que des gènes présentant une homologie de séquence avec des gènes de flagelle ont été mis en évidence chez B. abortus [55]. L’étude de la séquence génomique montrera si Brucella, une bactérie réputée immobile, a effectivement la capacité génétique de synthétiser un flagelle ou bien si ces gènes font partie d’un système de sécrétion de type III. Le rôle dans le pouvoir pathogène de Brucella de ces différents gènes, identifiés par homologie avec d’autres gènes connus, est en cours d’étude.
3.4. Relation avec les α protéobactéries Parmi tous ces gènes identifiés chez Brucella, il est remarquable que la plupart codent pour des protéines présentant une forte homologie avec des protéines impliquées dans les interactions entre bactéries pathogènes ou symbiotiques de plantes du groupe des α protéobactéries et leur plante hôte. Nous avons déjà cité les exemples du système de régulation BvrS/BvrR et du système de sécrétion de type IV VirB. Récemment, a été identifié chez B. abortus un gène fortement homologue au gène bacA de Sinorhizobium meliloti, qui coderait chez ce dernier pour une protéine de transport de la membrane cytoplasmique nécessaire à la symbiose [57]. Comme dans le cas de S. meliloti, cette protéine pourrait être un facteur de virulence de Brucella. Un autre exemple est fourni par la description chez Brucella d’une enzyme permettant la synthèse d’un polysaccharide particulier, le β(1-2) glucane cyclique, existant uniquement chez les α protéobactéries, comme S. meliloti et A. tumefaciens [58, 59]. Le gène cgs de Brucella est capable, chez des mutants de S. meliloti et A. tumefaciens, de restaurer la synthèse de ce polysaccharide, nécessaire respectivement à la nodulation ou à l’induction de la tumeur. Il semble aussi jouer un rôle important chez Brucella en tant que facteur de virulence [59]. Il existe encore d’autres exemples de gènes communs à Brucella et aux α protéobactéries, pathogènes d’animaux ou de plantes. Notamment, lors du séquençage au hasard du génome de B. abortus, la séquence d’environ
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20 % de ce génome a été obtenue. Sur 925 nouveaux gènes putatifs retrouvés, 220 présentent une homologie significative avec des séquences bactériennes provenant du sous-groupe α2 des protéobactéries, notamment Rickettsia, Agrobacterium et Sinohizobium [60]. Ce résultat vient encore renforcer l’idée d’une relation phylogénétique très intime entre Brucella et les autres bactéries du sous-groupe α des protéobactéries, comme cela avait déjà été montré par l’analyse de la séquence de l’ARN 16S [6].
4. CONCLUSION Brucella est une bactérie pathogène intracellulaire dont le comportement reste unique en comparaison avec les autres bactéries pathogènes intracellulaires. Elle semble avoir su développer des mécanismes particuliers pour se maintenir dans les cellules hôtes, notamment en contrôlant les réponses de l’hôte pour induire un minimum de désordre afin d’assurer sa survie et sa dissémination. La plupart des facteurs de virulence de Brucella qui ont été mis en évidence jusqu’à ce jour relève d’une même origine phylogénétique : ces gènes sont communs aux membres de la subdivision α des protéobactéries. Cette subdivision regroupe des pathogènes humains ou animaux comme Rickettsia, Bartonella, Ochrobactrum, Anaplasma ou Brucella, et des pathogènes (Agrobacterium) ou des symbiotes (Rhizobiaceae) des végétaux, en général caractérisés par les relations étroites qu’ils ont su établir avec leurs cellules hôtes. À partir de ces éléments, certains auteurs ont comparé le comportement furtif de Brucella dans la cellule à celui d’un symbiote de plante [56], voire même à celui d’une mitochondrie dont l’origine bactérienne dans le sous-groupe α des protéobactéries a maintenant été établie [61] ! Le séquençage du génome de Brucella va permettre de compléter nos connaissances tant sur l’organisation de la réplication du génome complexe de cette bactérie, que sur les facteurs de virulence qu’elle a su développer pour se maintenir et se multiplier dans la cellule hôte. L’accès à la séquence de plusieurs espèces de Brucella, en permettant notamment des études comparatives, nous éclairera peut être sur les mécanismes de l’adaptation de chacune d’entre elles à un hôte préférentiel. Enfin, tous ces éléments pourront être utilisés pour essayer de définir éventuellement de nouvelles cibles diagnostiques, thérapeutiques ou vaccinales.
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