Bryonia in loco dolenti, une technique originale

Bryonia in loco dolenti, une technique originale

71 pratiques Bryonia in loco dolenti, une technique originale Mourad Benabdallah Médecin homéopathe Arras (62) [email protected] Bryon...

132KB Sizes 0 Downloads 52 Views

71

pratiques

Bryonia in loco dolenti, une technique originale Mourad Benabdallah Médecin homéopathe Arras (62) [email protected]

Bryonia in loco dolenti, an original technique Abstract How can homeopathy relieve acute pains? A proposal for the sub-cutaneous injection of the homeopathic Bryonia remedy is illustrated by clinical observations. This original use, without any prior reference, is not the same as acupuncture or mesotherapeutic approaches. The author thus highlights the homeopathy and attests to its efficacy.

Résumé Mots-clés

Comment l’homéopathie peut-elle résoudre des algies aiguës ? Une proposition d’injection sous-cutanée du remède homéopathique Bryonia est illustrée par des observations cliniques. Cette utilisation originale, sans référence antérieure, est différente des techniques acupuncturales et mésothérapiques. L’auteur met ainsi en exergue l’homéopathie et atteste de son efficacité.

Algies aiguës Articulation Bryonia Injection sous-cutanée Key-words Acute pain Bryonia Joint Sub-cutaneous injection

V

oilà comment tout a commencé… Denise B., née en 1958, consulte en juin 1993 pour douleur et gonflement des chevilles, des genoux et des poignets. Le diagnostic de crise de goutte avec un taux d’uricémie à 86 est posé. Elle reçoit un traitement allopathique. En septembre de la même année, la douleur au poignet gauche persiste ; celui-ci est bandé et gonflé. tDébut 1994, je m’aperçois que Bryonia a été prescrit en remède symptomatique à toutes dilutions et en remède d’action générale « chez une patiente de type Calcarea carbonica, et que le traitement n’a pas “marché” ». Je dis alors à ma patiente : « Je suis pourtant sûr de Bryonia, il faudrait presque vous l’injecter ! » Elle me répond avec la force tranquille du remède : « Qu’est-ce que vous attendez ? » tEn mars 1994, 1 ml de Bryonia 7 CH1 est donc injecté en sous-cutané au point douloureux repéré par la patiente, au niveau de l’articulation trapézométacarpienne du pouce gauche. Une deuxième injection est réalisée un mois plus tard. Fin mars, comme elle n’a plus mal, elle décide d’aller skier. Elle consulte à son retour, car elle souffre d’une gonalgie à la suite d’une chute. Elle réclame alors « son Bryonia »... qui la soulage. D’autres injections émailleront l’histoire pathologique de cette patiente, avec le même succès. En février 2003, elle est traitée pour une épicondylite droite et en janvier 2005 pour une épicondylite gauche. La méthode sera reproduite dans les trois observations suivantes.

L La revue d’Homéopathie L Tome 1 L n° 2 L Juin 2010

Observation 1 Ghislaine D., née en 1932, porteuse d’une prothèse totale de hanche droite, consulte en mars 2003, pour une dyspnée et des douleurs des deux poignets. Son traitement de fond comporte Sulfur et Kalium carbonicum en 7 CH. En juillet, elle refait du vélo, mais les poignets sont toujours très sensibles. Elle consulte de nouveau en janvier 2006 pour une douleur avec œdème de la main gauche, aggravée le matin, calmée par le repos. t-FUSBJUFNFOUDPNQSFOE 2 doses par semaine de Bryonia 15 CH associées à des prises d’Hekla lava et d’Apis en 7 CH, mais également une injection de Bryonia 7 CH n° 1 au poignet gauche. Le 20 janvier 2006, la radiographie confirme la lésion tant à gauche qu’à droite avec une amélioration à gauche. t6OFOPVWFMMFJOKFDUJPO de Bryonia 7 CH n° 2 est réalisée à gauche et à droite. En février 2006, Ghislaine refait des frites, car elle peut à nouveau manier le couteau éplucheur.

Observation 2 Odile T., née en octobre 1957, vient en mai 2005 comme nouvelle consultante : elle souffre d’un syndrome algique de l’articulation temporomaxillaire, d’une surdité “auto-immune”. Elle est par ailleurs constipée, et présente un eczéma géant suite à son divorce. Elle est tombée sur la tête, trois ans auparavant. Enfin, elle souffre d’une douleur à l’inter-métatarso-phalangienne du pouce gauche.

© Elsevier Masson SAS, Paris 2010

Source Ce texte a été présenté lors des Journées de printemps de la Fédération nationale des sociétés médicales homéopathiques de France, qui se sont tenues à Annecy en mai 2006.

Conflit d’intérêts L’auteur n’a pas déclaré de conflit d’intérêts.

72

pratiques

Bryonia in loco dolenti, une technique originale

tSon traitement de fond comportera Thuya 5 CH et Ignatia 5 CH en granules quotidiens, avec en doses hebdomadaires alternées : Arnica 30 CH, Natrum sulfuricum 9 CH et Histaminum 9 CH. tDébut novembre 2005, elle porte une orthèse et prend Art 50® (diacerhéine) pour une rhizarthrose du pouce. Est adjoint au traitement Hekla lava 5 CH pour la notion d’arthrose avec exostose et Bryonia, pour la douleur en point améliorée par l’immobilité. La patiente reçoit une première injection de Bryonia 7 CH. t-FOPWFNCSF, elle signale une amélioration de la douleur pendant 8 jours durant lesquels elle a ôté l’orthèse : effet de la deuxième injection. t%JYKPVSTQMVTUBSE, elle a arrêté Art 50®, ne porte plus du tout son orthèse après sa troisième injection. tDébut décembre, elle en réclame une quatrième. t-FKBOWJFS, on ne parle plus du pouce totalement indolore et bien mobile. Cette infirmière, en reclassement professionnel à cause de sa surdité, pratique à nouveau les injections à ses malades : elle peut saisir enfin une ampoule dans la pince pouce-index de la main gauche.

0CTFSWBUJPO

Bibliographie Benabdallah M. Homéopathie, une médecine pour tous. Paris: Ellébore; 1992. Benabdallah M. Chroniques homéopathiques. Paris: Ellébore; 2007. Guermonprez M, Pinkas M, Torck M. Matière médicale homéopathique. Sainte-Foy-lès-Lyon; Boiron; 1997.. Lasselin P. Bryonia 7 CH, injection sous-cutanée loco dolenti, 10 observations cliniques [mémoire pour le diplôme universitaire d’homéopathie]. Université Lille II, 1998.

Note 1. Bryonia 7 CH en ampoules injectables n’est plus disponible chez les laboratoires Boiron, mais Bryonia en D 20 est délivrée par Weleda en boîte de 12 ampoules injectables.

Chantal G. est née en mars 1947. En octobre 2002, elle consulte pour tendinite du coude droit, et cliniquement, elle présente un tableau de périarthrite scapulo-humérale de l’épaule droite. Elle a « toujours souffert d’arthrose quand il fait humide ». tSon traitement de fond comportera en doses hebdomadaires alternées : Calcarea carbonica 7 CH, Natrum sulfuricum 15 CH, avec en granules quotidiens Sulfur 5 CH et Taxus baccata 7 CH, car en fait sa tendinite du coude évoque une épicondylite. tLe 21 décembre, elle présente spécifiquement une douleur en point au niveau de l’épicondylite, mais aussi une douleur en point au niveau du muscle trapèze. C’est souvent le cas dans les pathologies douloureuses du membre supérieur, une chaîne musculaire algique. Il est procédé à deux injections de Bryonia 7 CH : une demiampoule à chacun des deux points. tLe 24 décembre, elle n’a plus mal au coude… t En janvier 2004, elle se présente à la consultation en boitant, et elle s’est fait fabriquer des semelles… En fait, il s’agit d’un syndrome de Morton, car une douleur est reproduite à la pression latérale des têtes de métatarsiens. Une seule injection de Bryonia 7 CH dans le deuxième espace intermétatarsien la soulagera définitivement… et les semelles sont jetées.

t'JOTFQUFNCSF, elle consulte pour douleur du pouce gauche. Le diagnostic est celui d’une rhizarthrose. Il est prescrit Hekla lava 7 CH et une injection de Bryonia est réalisée. Une deuxième, le 5 octobre, suivie d’une troisième, le 13 novembre, la soulageront. t%ÏCVUKBOWJFS elle raconte qu’elle a même réussi à ouvrir à nouveau des huîtres. Pourtant, le radiologue n’avait pas été très rassurant en remettant ses radiographies à cette patiente…

Indications pratiques Bien d’autres pathologies douloureuses auront fait l’objet d’injections de Bryonia loco dolenti avec une efficacité souvent retrouvée. Si une injection ne suffit pas, une deuxième à 15 jours peut être tentée. À la troisième, espacée de 15 à 30 jours, on constate le soulagement. Sinon, il est inutile de persister. La plupart des douleurs sont “de type Bryonia”, car améliorées par l’immobilité. En cas de type sensible, c’est encore mieux. Essayez donc cette technique dans les névralgies liées à des poussées inflammatoires sur arthrose : névralgie d’Arnold, névralgies cervico-brachiales, sciatalgies, lombalgies, syndrome du canal carpien, gonalgies. La liste n’est pas exhaustive. J’ai parfois remarqué des améliorations quasi immédiates en cas de pathologie aiguë bénigne, comme pour Yves R., qui vient début janvier 2010, en urgence, pour une lombalgie aiguë : « Il s’est fait un tour de rein en travaillant dans une soupente. » Après deux injections de Bryonia au niveau des points douloureux en projection sacro-iliaques à droite et à gauche, il est reparti en oubliant son lombostat…

Conclusion Bryonia dioïca est un remède d’inflammation articulaire et périarticulaire. Sa composition, grâce à la présence de cucurbitacine, lui confère une activité “cortisone-like”. Si les modalités du remède sont présentes, l’indication devient “royale”: localement, amélioration par la pression forte et immobilité d’une douleur en point ; action généralisée : désireux de calme, ténacité, obstination. Une, deux, voire trois injections assez rapprochées, pas plus. Où vous voulez, en première intention, si le traitement de fond judicieusement prescrit tarde à faire son effet… 

L La revue d’Homéopathie L Tome 1 L n° 2 L Juin 2010