Analyse bibliographique
confrontés également à d’autres paramètres, par analyse multivariée, tels que le nombre de visites médicales dans l’année, l’existence d’autres maladies, la consommation d’alcool ou de tabac, etc. En analyse multivariée, les femmes pour lesquelles la mammographie avait été interprétée comme faussement positive avaient plus tendance à se sentir triste (OR = 1,18), épuisée (OR = 1,23), ou atonique (OR = 1,27). Ces femmes avaient également plus tendance à consulter un professionnel en santé mentale dans les 12 mois suivant leur inclusion dans l’étude ; ces femmes avaient un score plus élevé de tous les items selon l’échelle K6. L’analyse comparative par race ou âge montrait que les femmes les plus jeunes étaient plus souvent épuisées.
Trois groupes de cancers étaient inclus dans l’étude : des vrais-positifs du dépistage, des cancers d’intervalle et des faux-négatifs du dépistage. Le taux de détection du lecteur avec CAD était de 49,1 % contre 42,3 % pour la double lecture. Le taux de détection du lecteur + CAD était donc majoré de 15 %, mais au prix d’une augmentation du taux de rappel de 32 %. Dix cancers ont été découverts uniquement par la double lecture, alors que 25 ont été détectés uniquement par le lecteur + CAD. Les auteurs concluent que l’association lecteur + CAD augmente le taux de détection par rapport à une double lecture classique.
Commentaires de la Rédaction Commentaires de la Rédaction 1) Cette étude est intéressante car peu d’auteurs se sont penchés sur le ressenti des femmes après une mammographie positive, et de surcroît faussement positive. 2) Elle inclut un échantillon important de patientes et peut donc être considérée comme représentative pour cette tranche de population, dans ce pays. 3) On peut se rendre compte que l’annonce d’une anomalie mammographique, redressée comme bénigne finalement, n’est pas dénuée d’effets secondaires et de morbidité psychologique. Elle peut être responsable de syndromes anxieux ou dépressifs, et retentir sur la qualité de vie de ces femmes, et sur leur confiance dans le dépistage. 4) Cette étude américaine n’aurait pas forcément les mêmes conclusions en Europe ou en France, où les taux de fauxpositifs et de biopsies pour lésions bénignes sont inférieurs. Néanmoins, à l’heure de la crainte du médico-légal, et donc du risque de surdépister et surbiopsier, il apparaît nécessaire de prendre en compte tous ces éléments pour que la prise en charge des femmes dépistées soit optimale.
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n CAD
Le CAD meilleur que le deuxième lecteur ? Gilbert FJ, Astley SM, McGee MA and al. Single reading with computeraided detection and double reading of screening mammograms in the United Kingdom National Breast Screening Program. Radiology 2006; 241:47-53
Il s’agit d’une enquête comparant les performances en situation de dépistage d’une double lecture et d’un premier lecteur assisté par le CAD. L’enquête portait sur 10 000 mammographies de dépistage ayant fait l’objet d’une double lecture et qui ont été soumises 7 ans plus tard à huit lecteurs différents aidés d’un CAD.
Il s’agit de la première étude à grande échelle montrant la supériorité de l’association lecteur + CAD sur la double lecture. L’originalité de l’étude réside dans l’important délai entre le début de l’enquête et les résultats permettant d’avoir un recul suffisant et de pouvoir intégrer les cancers d’intervalle et les cancers manqués dans l’évaluation des deux modes de lecture. Cependant, le taux de cancers dans la cohorte est nettement supérieur à celui des campagnes de dépistage (14,89 ‰). De plus, on notera que 70 % des cas étaient des mammographies à une seule incidence. Surtout, les résultats doivent être interprétés avec prudence car la lecture assistée par le CAD était effectuée rétrospectivement et les décisions des lecteurs n’avaient pas de conséquence pour les patientes contrairement à la double lecture prospective. Il en résulte un taux de rappel plus élevé favorisant l’augmentation du taux de détection. Une enquête prospective effectuée également au Royaume-Uni et publiée récemment [1] avait conduit à des conclusions inverses, c’est-à-dire à la supériorité de la double lecture classique. Ces réserves faites, l’enquête soulève une question intéressante : Peut-on envisager de remplacer le deuxième lecteur par le CAD, ce qui simplifierait grandement l’organisation du dépistage ? Il est trop tôt pour répondre à cette question pour deux raisons : tout d’abord, il faudra attendre la généralisation du numérique dans le dépistage car l’utilisation du CAD auprès du premier lecteur ne peut s’envisager que dans l’analyse de mammographies numériques. D’autre part, il faudrait démontrer qu’une deuxième lecture effectuée après une première lecture assistée par le CAD ne détecte pas de cancer supplémentaire…
Référence [1]
Khoo LA, Taylor P, Given-Wilson RM. Computer-aided detection in the United Kingdom National Breast Screening Programme: prospective study. Radiology 2005;237:444-9.
285