Caractéristiques sociodémographiques et cliniques de patients souffrant de troubles bipolaires suivis en ambulatoire en France métropolitaine

Caractéristiques sociodémographiques et cliniques de patients souffrant de troubles bipolaires suivis en ambulatoire en France métropolitaine

L’Encéphale (2012) 38, 211—223 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP ÉPIDÉMIOLOGIE Car...

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L’Encéphale (2012) 38, 211—223

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP

ÉPIDÉMIOLOGIE

Caractéristiques sociodémographiques et cliniques de patients souffrant de troubles bipolaires suivis en ambulatoire en France métropolitaine Who are patients suffering from bipolar disorders in France? The TEMPPO survey: Patients’ sociodemographic and clinical characteristics data W. de Carvalho a,∗, P. Nuss b, P. Blin c, R. Arnaud d, A. Filipovics d, J.-Y. Loze e, A. Dillenschneider d a

Maison de santé de Bellevue, 8, avenue du 11-Novembre-1918, 92190 Meudon, France UMR 7203, laboratoire des biomolécules, service de psychiatrie, université Pierre-et-Marie-Curie-6, CHU Saint-Antoine, AP—HP, 184, Faubourg-Saint-Antoine, 75012 Paris, France c Unité de pharmaco-épidémiologie, département de pharmacologie, université Victor-Segalen — Bordeaux-2, hôpital du Tondu, case 41, 146, rue Léo-Saignat, 33076 Bordeaux cedex, France d Laboratoire Bristol-Myers-Squibb, 3, rue Joseph-Monier, BP 325, 92506 Rueil-Malmaison cedex, France e OTSUKA Pharmaceuticals France SAS, Le Corosa, 1, rue Eugéne-et-Armand-Peugeot, 92508 Rueil-Malmaison cedex, France b

Rec ¸u le 21 juin 2011 ; accepté le 6 avril 2012 Disponible sur Internet le 5 juin 2012

MOTS CLÉS Trouble bipolaire ; Données sociodémographiques ; Données cliniques ; Étude observationnelle ; Étude naturalistique



Résumé Le présent article décrit les résultats de l’étude TraitEment Médicamenteux et histoire de la maladie des Patients souffrant de troubles biPOlaires (TEMPPO) dont l’objectif était de décrire les caractéristiques cliniques et sociodémographiques d’un échantillon de patients adultes ambulatoires souffrant de troubles bipolaires de type I ou II en France métropolitaine. Il s’agit d’une étude observationnelle, transversale, multicentrique, effectuée en 2009, mise en place auprès de psychiatres exerc ¸ant en secteur public ou privé. Les données exploitables sont issues du recueil effectué par 135 psychiatres ayant inclus 619 patients bipolaires (197 vus en secteur public et 422 en secteur privé). L’extrapolation des données de cette étude à la population franc ¸aise fait état d’une prévalence de 0,43 % de patients bipolaires suivis par un psychiatre. Les données de l’étude montrent une prédominance dans l’échantillon examiné de troubles bipolaires de type I (58 % des patients). Les résultats de l’étude confirment le fait que les patients présentant un trouble bipolaire et suivis en ambulatoire ont des caractéristiques cliniques de sévérité comme l’atteste la valeur moyenne (4,4) de la clinical global impression (CGI)-gravité et la valeur moyenne de la évaluation globale du fonctionnement (GAF) à 59. Cette sévérité est plus évidente pour les patients en périodes d’épisodes dépressifs en comparaison de ceux présentant un épisode maniaque (CGI à 6 vs 4) ou hypomaniaques (CGI à 6 vs 3).

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (W. de Carvalho).

0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2012. http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2012.04.007

212

W. de Carvalho et al. L’étude a pu aussi mettre en évidence une forte proportion de cycles rapides (11 %), de fréquentes comorbidités psychiatriques (45 % des patients), une obésité (16 % des patients), des troubles de la libido ainsi que la présence de symptômes psychotiques. Les patients en phase maniaque étaient ceux présentant les indices de sévérité les plus élevés et les scores de fonctionnement les plus faibles. Plus de la moitié des patients (57 %) avait des antécédents familiaux de troubles psychiatriques. Cette étude a permis de mieux caractériser les patients bipolaires suivis par des psychiatres en France. Elle a souligné l’impact négatif de la maladie sur la vie sociale et professionnelle des patients en insistant sur la nécessité d’une prise en charge spécifique en complément du traitement symptomatique. © L’Encéphale, Paris, 2012.

KEYWORDS Bipolar disorders; Clinical and sociodemographic survey; Patients’ characteristics clinical data; Naturalistic study

Summary Aim. — One of the aims of the TEMPPO study was to describe the sociodemographic and clinical characteristics of a cohort of adult outpatients with type I or type II bipolar disorders (as defined by DSM-IV criteria) in France. Methods. — TEMPPO is a multicenter, cross-sectional, non-interventional study conducted in France between November 2008 and May 2009, with a random sample of academic and private practice psychiatrists. Each psychiatrist who agreed to participate in the study had to: complete a register with data on all consecutive patients (up to 20 patients) consulting during a 2-month period and fulfilling inclusion criteria; include in the study the first five patients of the register with an on-going consultation for at least 6 months; for each of which a detailed questionnaire had been assessed, notably their sociodemographic and bipolar clinical characteristics. Adult outpatients diagnosed with bipolar disorders (BD) were enrolled if fulfilling the following inclusion criteria: man or woman, aged 18 and above, diagnosed bipolar type I or II according to DSM-IV criteria, treated (whatever the treatment strategy) or not, and followed-up for at least 6 months by the participating psychiatrist. Results. — One hundred and thirty-five psychiatrists included 619 patients with bipolar disorder (197 and 422 followed-up in public and private practice respectively). The estimated prevalence of patients with bipolar disorders consulting psychiatrists was 0.43%. Type I bipolar disorder was the most frequent condition (58% of the patients). As a whole, bipolar disorder was associated with severe handicap (mean global disease Clinical Global Impression [CGI]-Severity score of 4.4 and mean GAF [Global Assessment of Functioning] score of 59), with more depressive episodes than manic episodes (6 vs. 4) or hypomania (6 vs. 3), a high proportion of rapid cycles (11%), psychiatric comorbidities (45% of patients), obesity (16% of patients), libido dysfunction and associated psychotic symptoms. Current manic phase was associated with more pronounced illness severity and lowest functioning. More than half of the patients (57%) had a family history of psychiatric disorders. Conclusion. — This study could shed some light for a better understanding of demographics and clinical patterns of patients with bipolar disorders consulting psychiatrists in France. The results emphasize the severity of bipolar disorders with mainly depressive episodes, a high proportion of rapid-cycling, comorbidities and associated psychotic symptoms; these characteristics being more marked in patients suffering from BD I. Furthermore, this study confirms the strong negative impact on social and professional life of French bipolar patients, requiring specific management in addition to the symptomatic treatment. © L’Encéphale, Paris, 2012.

Introduction Le trouble bipolaire est un trouble de l’humeur remarquable par la diversité de ses expressions cliniques. Si certains patients souffrant de trouble bipolaire présentent de profondes phases dépressives ou à l’inverse des phases d’irritabilité, d’excitation, d’activités accrues, de nombreux autres présentent des formes atypiques d’allure caractérielle, pseudonévrotique avec des comorbidités au premier plan. Ainsi, la caractérisation du trouble dans le DSM-IV (manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux de l’American Psychiatric Association) est-elle un cadre général qui efface les diversités expressives de ce trouble expliquant les errances diagnostiques,

particulièrement concernant le trouble bipolaire de type II. On rappellera que le trouble bipolaire de type I est caractérisé par la présence d’au moins un épisode maniaque ou mixte chez des sujets ayant présenté ou non un ou plusieurs épisodes dépressifs majeurs et que le trouble bipolaire de type II est caractérisé par la survenue d’un ou plusieurs épisodes dépressifs majeurs accompagnés d’au moins un épisode hypomaniaque mais sans manie franche. Il n’est donc pas surprenant que son identification soit difficile tant en épidémiologie clinique que dans la pratique médicale individuelle. Il en résulte que de nombreux sujets souffrant de formes atypiques, notamment les plus jeunes, ne sont pas suivis au sein de structures psychiatriques [1].

Caractérisation sociodémographique, clinique de patients ambulatoires bipolaires Malgré une sous-estimation probable, la prévalence du trouble bipolaire est estimée à 1 % avec des variations selon les études considérées (0,3 à 5,1 %) [2]. Pour les raisons que nous avons mentionnées, on peut estimer qu’une prévalence de 3 à 5 % pourrait être plus proche de la réalité témoignant de la sensibilité et de la spécificité des outils et des méthodologies d’évaluation [1,3,4]. L’évolution de ces paramètres diagnostiques et méthodologiques a ainsi pu montrer une incidence plus importante du trouble ces dernières décennies, notamment en utilisant des outils plus aboutis pour aborder les dimensions hypomaniaque et dépressive [5]. Cette évolution s’est accompagnée d’une meilleure définition des comorbidités associées (abus de substances etc.) [6] et d’une meilleure connaissance de l’impact des troubles bipolaires en termes de qualité de vie et de santé publique. On conc ¸oit aisément que la nature de cette maladie impose une prise en charge plurifactorielle dépendant notamment de la phase thymique considérée, de la typologie et de l’histoire clinique du patient, mais aussi de l’arsenal thérapeutique actuellement disponible, ainsi que des habitudes et des pratiques des psychiatres [7,8]. Lorsque nous avons initié l’étude TraitEment Médicamenteux et histoire de la maladie des Patients souffrant de troubles biPOlaires (TEMPPO) en 2008, il n’existait pas en France de recommandations thérapeutiques officielles pas plus qu’il n’y avait d’informations sur les modalités de prise en charge en ambulatoire des troubles bipolaires I ou II, notamment lorsque l’on considérait l’ensemble des expressions cliniques du trouble. Notamment, aucune étude n’avait encore utilisé d’échantillon représentatif de la population des psychiatres exerc ¸ant en France métropolitaine afin d’en évaluer les habitudes de prescription au sein de la population de patients bipolaires [9—13]. L’objectif principal de la présente étude était ainsi de décrire de la manière la plus précise l’état de la prise en charge thérapeutique des patients bipolaires vus en consultation par les psychiatres en France, et plus particulièrement de déterminer la proportion de patients souffrant de troubles bipolaires traités par antipsychotiques. Les résultats de l’étude ont été colligés en 2011. Une volonté de plus grande clarté de l’exposé des résultats nous a incitée à les présenter dans deux articles distincts : le présent article vise à décrire la typologie d’une population de patients bipolaires en France, qu’ils soient suivis en ville ou à l’hôpital, et d’en identifier les caractéristiques cliniques. Le second article concerne les modalités de prescription pharmacologiques et non pharmacologiques ainsi que leur cohérence avec les recommandations [14].

Méthodes L’étude TEMPPO est une étude pharmaco-épidémiologique observationnelle, transversale, multicentrique, conduite en France métropolitaine, entre novembre 2008 et mai 2009 et portant sur la prise en charge ambulatoire des patients suivis par des psychiatres hospitaliers et/ou libéraux pour un trouble bipolaire de type I ou de type II.

213

Détermination de la taille de l’échantillon et du nombre de centres La taille de l’échantillon a été déterminée afin de répondre à l’objectif principal, à savoir la détermination de la proportion de patients bipolaires traités par antipsychotiques. Aucune donnée n’étant disponible sur ce critère au moment de l’écriture du protocole, il a été considéré que le pourcentage observé pourrait varier de 10 à 50 %. Avec un risque bilatéral alpha de 5 % et une précision de 5 %, les formules de calcul aboutissent à 400 patients nécessaires pour estimer la proportion de patients. Pour tenir compte du pourcentage d’observations inexploitables, ce nombre de patients a été augmenté de 10 %. Le nombre de patients nécessaire pour atteindre les objectifs de l’étude a donc été estimé à environ 450 patients. Selon l’hypothèse que chaque médecin pouvait recruter cinq patients au cours d’une période de deux mois, il était nécessaire de sélectionner 90 psychiatres actifs. Compte tenu d’un taux habituellement rencontré de 20 % de psychiatres inactifs, le nombre total de psychiatres nécessaire s’élevait donc à 110.

Sélection des psychiatres La participation à l’étude a été proposée à un échantillon représentatif des psychiatres franc ¸ais tiré au sort dans une base nationale des psychiatres (base de données TVF, Groupe Cegedim). Le tirage au sort a été effectué après stratification par mode d’exercice et par région administrative franc ¸aise. Deux groupes de psychiatres ont été distingués selon leur mode d’exercice : médecins du secteur public pour les praticiens hospitaliers exclusifs et médecins du secteur privé regroupant les praticiens à exercice libéral ou mixte.

Sélection des patients Au cours des deux mois suivant le démarrage de l’étude, chaque psychiatre ayant accepté de participer à l’étude devait : • compléter un registre avec les données, requises par l’étude, de tous les patients consécutifs différents (jusqu’à un maximum de 20 patients), vus en consultation durant cette période et répondant aux critères d’inclusion de l’étude. Ce registre était destiné à s’assurer que les patients étaient inclus dans l’étude consécutivement et devait permettre d’évaluer l’activité mensuelle de chaque psychiatre en termes de patients suivis ; • inclure dans la partie « étude » les cinq premiers patients du registre suivis depuis au moins six mois par le psychiatre et remplir un questionnaire détaillé pour chacun de ces patients permettant en particulier de documenter les caractéristiques sociodémographiques des patients, les caractéristiques cliniques des troubles bipolaires présentés et la prise en charge thérapeutique. Les sujets inclus dans le registre et/ou la partie « étude » devaient répondre aux critères d’inclusion suivants : hommes ou femmes âgés de 18 ans ou plus ; souffrant

214 de trouble bipolaire de type I ou II établi selon le DSM-IV ; bénéficiant d’une prise en charge ambulatoire, traité(e)s ou non pour leur maladie psychiatrique ; et suivi(e)s par le psychiatre enquêteur depuis au moins six mois, ce critère de durée minimum de suivi ne s’appliquant qu’aux patients inclus dans l’étude. S’agissant d’une étude observationnelle, visant à décrire « la vie réelle », aucun critère de non sélection n’a été retenu pour cette étude à l’exception de la participation des patients à un essai thérapeutique.

Données recueillies Données concernant les psychiatres Un coupon réponse permettait d’obtenir des informations générales sur le psychiatre (sexe, âge, type d’exercice, nombre de patients bipolaires dans la file active) et le cas échéant de renseigner les raisons de son refus à participer à l’étude. Données concernant les patients Les données du registre portaient sur les informations suivantes : caractéristiques sociodémographiques du patient, histoire de la maladie, caractéristiques du trouble bipolaire présenté, prise en charge médicamenteuse et appréciation de l’observance. Les données de la partie « étude » portaient sur les informations suivantes : les caractéristiques sociodémographique (sexe, âge, poids, taille, statut professionnel, socioéconomique et marital, type d’hébergement, niveau d’études atteint, antécédents judiciaires, mesures de protection civile), l’histoire de la maladie (diagnostic, date d’apparition des troubles, nombre d’épisodes aigus et d’hospitalisations depuis le début de la maladie, nombre de consultations pour la maladie psychiatrique durant les 12 derniers mois, antécédents familiaux de troubles psychiatriques), l’évaluation globale de la maladie psychiatrique depuis le début de la maladie : niveau global de la sévérité des symptômes (échelle clinical global impression [CGI]—Sévérité en 7 classes de 1 [patients pas du tout malades] à 7 [patients parmi les plus malades], évaluation globale du fonctionnement par l’échelle EGF [traduite de la global assessment of functioning (GAF)] entre 1 : altération maximale et 100 : altération nulle), comorbidités psychiatriques, tentatives de suicide, conduites à risque, caractéristiques de la phase actuelle (type de la phase actuelle, fréquence des consultations et hospitalisations, échelle CGI-Sévérité, échelle EGF, consommation ou non de toxiques, plaintes sexuelles, comorbidités somatiques associées, prise en charge médicamenteuse et non médicamenteuse à l’issue de la consultation, appréciation de l’observance). Seules les données portant sur les caractéristiques épidémiologiques et cliniques des patients de la partie « étude » seront présentées dans cette publication.

Analyse statistique Pour l’analyse statistique, les données patients ont été redressées sur trois critères : le nombre de patients vus par mois par le psychiatre enquêteur permettant d’estimer l’activité des psychiatres et la fréquence des

W. de Carvalho et al. consultations au cours des 12 derniers mois pour chaque patient (données du registre) ainsi que le type d’activité du psychiatre (données du coupon-réponse) pour prendre en compte la répartition des secteurs privés-mixtes/publics dans l’échantillon par rapport aux données nationales. Les trois redressements effectués ont été combinés afin d’aboutir à une seule pondération qui a été utilisée pour l’ensemble des analyses. Les analyses statistiques comprenaient la description et la comparaison des résultats en fonction du type de polarité, en fonction du type d’activité du psychiatre enquêteur et du type de la phase actuelle en utilisant pour les variables qualitatives le test du Chi2 , et pour les variables quantitatives un test t de Student ou une analyse de variance si la distribution était proche de la normale ou des tests non-paramétriques (Wilcoxon, Kruskal-Wallis) dans le cas contraire.

Résultats Caractéristiques des psychiatres enquêteurs Le processus de recrutement des psychiatres est présenté dans le Tableau 1. Parmi les 197 psychiatres ayant accepté de participer à l’étude, 175 centres ont été mis en place et 135 ont été actifs. Les psychiatres actifs étaient âgés en moyenne de 49 ans, comprenaient 65 % d’hommes et avaient une activité privée/mixte dans 66 % des cas ; ils ont vu en moyenne leurs patients une fois par mois.

Calcul de la prévalence des troubles bipolaires suivis par des psychiatres Les psychiatres du secteur public recevaient en moyenne (± écart-type) 14,5 ± 11,7 patients atteints de troubles bipolaires chaque mois contre 18,8 ± 19,3 pour les médecins du secteur privé. Nous avons exclu de notre analyse les psychiatres considérés comme « non concernés » par la prise en charge des troubles bipolaires (ayant refusé de participer à l’étude pour « pas ou peu de patients dans la population ciblée »). L’extrapolation des résultats de notre échantillon de psychiatres rapportée à la population globale des psychiatres dénombrés par la DREES au 1er janvier 2009 [15], a permis d’estimer l’activité des psychiatres franc ¸ais prenant en charge des patients souffrant de troubles bipolaires. On a ainsi estimé ce nombre à 184 094 consultations mensuelles (81 907 pour le secteur public et 102 187 pour le secteur privé). En prenant en compte la fréquence moyenne de visites annuelles issue du registre de l’étude (8,9 ± 5,5 pour le secteur public et 13,6 ± 11,7 pour le secteur privé), la population adulte suivie pour des troubles bipolaires pouvait être estimée à 110 065 patients suivis par an par le secteur public et à 90 298 par le secteur privé. Rapportée à la population franc ¸aise adulte de métropole en 2009, la prévalence des patients bipolaires suivis par des psychiatres peut donc être estimée à 0,43 %.

Caractérisation sociodémographique, clinique de patients ambulatoires bipolaires Tableau 1

Processus de recrutement des psychiatres.

Nombre de psychiatres dénombrés par la DREES au 1er janvier 2009 Nombre de psychiatres dans la base de tirage au sort (base TVF octobre 2008) Nombre de psychiatres contactés après tirage au sort Nombre de réponses rec ¸ues Nombre d’accords de participation Nombre de refus Taux de refus pour « pas ou peu de patients dans la population ciblée » parmi les réponses rec ¸ues (%) Taux de refus pour « manque de temps » parmi les réponses rec ¸ues (%) a

215

Total

Psychiatres du secteur public

Psychiatres du secteur privé

12 903

6469

6434

10 714

4901

5813

1075 125 77 48 12,8

1148 170 120 50 15,3

11,2

12,3

2223 295a 197 98a

Nombre de réponses = 308 dont 111 refus mais pas de précision sur le secteur d’activité pour 13 coupons-réponses de refus.

Caractéristiques des patients

patients) ou ceux dont le registre du centre concerné n’avait pas été renvoyé (16 patients). De ce fait, notre analyse concerne 619 patients. Parmi ces derniers, 58 % présentent les critères de trouble bipolaire I et 42 % de trouble bipolaire II (Tableau 2). Les patients inclus avaient un âge moyen de 50 ans et comportaient plus de femmes (62 %). La population de patients bipolaires I avait une moyenne d’âge plus élevée et une proportion plus importante d’hommes. La moitié des

Parmi les 703 patients sélectionnés, dont 85 % de fac ¸on consécutive, 84 patients ont été exclus des analyses car ils ne remplissaient pas les critères du DSM-IV pour le diagnostic du trouble bipolaire I ou II (32 patients). Ont aussi été exclus les patients ayant fait l’objet d’une inclusion rétrospective (31 patients), une durée de suivi inférieure à six mois (cinq

Tableau 2

Caractéristiques sociodémographiques des patients. p*

Total

Bipolaires I

Bipolaires II

Effectifs pondérés

619

359

260

Femmes (%)

61,7

58,3

66,3

0,04

Âge (années) Moyenne (ET)

50,1 (13,6)

51,0 (13,3)

48,7 (14,0)

0,02

IMC en classes (%) Normal (IMC < 25 kg/m2 ) Surpoids (25 kg/m2 ≤ IMC < 30 kg/m2 ) Obésité (IMC ≥ 30 kg/m2 )

50,6 33,4 16,0

48,7 34,2 17,2

53,1 32,4 14,5

Niveau d’études atteint Études supérieures (%)

45,2

42,9

48,4

Statut marital actuel (%) Célibataire (%) Divorcé(e) (%) Marié(e)/Pacsé(e)/Vivant maritalement/Veuf(ve) (%)

23,2 18,1 58,7

23,8 19,2 57,0

22,4 16,5 61,1

Statut professionnel actuel (%) Profession libérale/Salarié/Retraité (%) Sans activité (%) Autre/Étudiant (%)

60,8 35,4 3,8

59,7 36,8 3,5

62,4 33,4 4,2

Actuellement en arrêt maladie (%)

17,1

19,8

13,4

0,06

Antécédents judiciaires (%)

7,9

9,9

5,2

0,03

Sauvegardes de justice demandées (%)

13,5

19,9

4,5

< 0,001

0,51

0,17 0,56

0,63

ET : écart-type. * p : test du Chi2 excepté pour l’âge : analyse de variance non paramétrique.

216 Tableau 3

W. de Carvalho et al. Caractéristiques de la maladie. Total

Bipolaires I

Bipolaires II

Effectifs pondérés

619

359

260

Âge au début des troubles (années) Moyenne (ET)

32,8 (13,6)

33,1 (13,7)

32,4 (13,5)

Durée de la maladie (années) Moyenne (ET)

17,1 (11,5)

17,8 (11,7)

16,1 (11,2)

Délai entre le début des troubles et la 1re consultation psychiatrique (années) Moyenne (ET) Taux de non réponse (%)

p*

0,50 0,05 < 0,001 1,8 (4,7) 15,5

1,2 (3,3) 15,8

2,7 (6,0) 15,1

56,9

55,7

58,4

0,50

48,3 25,2 52,9 10,0 23,9

55,3 24,9 44,6 14,5 24,0

38,5 25,7 64,4 3,8 23,6

< 0,01 0,87 < 0,001 < 0,01 0,94

9,6 (10,6)

10,3 (12,6)

8,8 (7,2)

0,51

93,0 5,6 (5,8)

88,0 5,6 (6,5)

100 5,6 (4,9)

< 0,001 0,51

NA NA

93,8 4,1 (4,8)

100 2,9 (3,0)

40,4 2,9 (4,3)

48,0 3,3 (4,9)

29,8 2,1 (2,0)

Type du 1er épisode apparu au début de la maladie (%) Dépressif Maniaque (BP I)/Hypomaniaque (BP II) Taux de non réponse (%)

54,3 NA 47,0

47,3 52,7 33,4

73,3 26,7 65,8

Cycles rapides (%)

10,7

11,0

10,2

Hospitalisations depuis le début de la maladie (%) Délai écoulé entre le début des troubles et la 1re hospitalisation (en années) moyenne (ET) Nombre d’hospitalisations (%) 0 hospitalisation 1—3 hospitalisations ≥ 4 hospitalisations

86,2 3,8 (7,1)

92,2 3,1 (6,1)

78,1 4,9 (8,4)

14,7 51,8 33,6

8,4 50,1 41,5

22,9 54,0 23,2

Antécédents familiaux de troubles psychiatriques (%). Dont Bipolarité Suicide Dépression Schizophrénie Consommation de toxiques/Alcool Nombre d’épisodes aigus présentés depuis le début de la maladie Tous types d’épisodes Moyenne (ET) Épisodes dépressifs Au moins 1 épisode (%) Moyenne (ET) Épisodes maniaques (BPI) ou hypomaniaques (BPII) Au moins 1 épisode (%) Moyenne (ET) Épisodes mixtes Au moins 1 épisode (%) Moyenne (ET)

< 0,001 < 0,01

0,11 < 0,001 < 0,001 < 0,001

NA : non applicable ; ET : écart-type. * p : test du Chi2 pour les résultats qualitatifs (en classes), analyse de variance non paramétrique pour les résultats quantitatifs.

patients (51 %) avaient un indice de masse corporelle (IMC) normal (< 25 kg/m2 ), 33 % étaient en surpoids et 16 % étaient obèses (IMC ≥ 30 kg/m2 ). Plus de 41 % des patients bipolaires étaient célibataires ou divorcés. L’analyse du lieu de résidence et du type de vie familiale montrait que près d’un tiers des patients vivaient seuls à domicile. Il existait une différence significative selon

le type de bipolarité (p = 0,04) : la proportion de patients vivant en couple à domicile était un peu plus élevée chez les patients bipolaires II (58 % vs 52 %) tandis que la vie en institution était un peu plus fréquente chez les patients bipolaires I (4 % vs 1 %). Plus de 45 % des patients avaient suivi des études supérieures. Plus de 60 % des patients exerc ¸aient ou avaient

Caractérisation sociodémographique, clinique de patients ambulatoires bipolaires Tableau 4

217

Évaluation globale de la maladie. p*

Total

Bipolaires I

Bipolaires II

619

359

260

4,4 (1,3)

4,6 (1,2)

4,1 (1,3)

22,2 61,1

18,0 62,1

27,8 59,7

16,8

19,9

12,5

59,4 (15,5)

57,0 (16,5)

62,8 (13,6)

31,4 38,8 29,8

38,1 35,6 26,3

22,1 43,4 34,5

Comorbidités psychiatriques (isolés ou associés) (%) Troubles obsessionnels compulsifs Abus ou dépendance à une substance (hors tabac) Troubles de la personnalité

45,1 5,0 16,1 32,2

44,1 2,6 18,1 29,2

46,5 8,0 13,3 36,5

Tentatives de suicide depuis le début de la maladie (%) Nombre de tentatives de suicide depuis le début de la maladie : moyenne (ET) Taux de non réponse (%)

36,6 2,6 (2,5)

32,4 2,4 (1,6)

42,4 2,8 (3,3)

20,6

23,1

17,9

Tentatives de suicide portant atteinte au schéma corporel (%) Conduites à risque (%)

19,6

17,6

21,8

0,05

19,7

23,2

14,7

0,01

Répétition d’accidents domestiques (%)

6,6

7,2

5,8

0,14

Effectifs pondérés Niveau global de la sévérité des symptômes (CGI) Moyenne (ET) En classes (%) Normal à légèrement malade (classes 1 à 3) Modérément à manifestement malade (classes 4 et 5) Gravement malade à parmi les plus malades (classes 6 et 7) Score EGF (fonctionnement) Moyenne (ET) En classes (%) ≤ 50 50—65 > 65

< 0,001 < 0,01

< 0,001 < 0,001

0,56 < 0,01 0,04 0,03 0,01 0,78

ET : écart-type. * p : test du Chi2 pour les résultats qualitatifs (en classes), analyse de variance non paramétrique pour les résultats quantitatifs.

exercé une activité professionnelle (salariés 37 %, profession libérale 3 % ou retraités 21 %), et 35 % des patients étaient sans activité professionnelle. Parmi les 95 % de patients ayant au moins une source de revenus, 42 % percevaient un salaire, 22 % une pension de retraite, 14 % l’allocation adulte handicapé (AAH) et 11 % une pension invalidité. Les patients bipolaires II percevaient plus souvent un salaire (49 % vs 37 %, p < 0,01) alors que les patients bipolaires I étaient plus nombreux à percevoir l’allocation pour adulte handicapé (17 % vs 9 % ; p < 0,01). Au total, 17 % des patients étaient en arrêt maladie, les arrêts maladies étant plus fréquents chez les patients bipolaires I (20 % vs 13 %). Près de 8 % des patients avaient des antécédents judiciaires et une sauvegarde de justice avait été demandée pour 13 % des patients (curatelle pour la plupart). La sauvegarde de justice était plus souvent demandée dans le cas des patients bipolaires I (20 % vs 5 %).

Histoire et évaluation de la maladie L’âge supposé de début des troubles était en moyenne de 33 ans (Tableau 3) avec une durée moyenne de la maladie

supérieure chez les patients souffrant de troubles bipolaires de type I (18 ans vs 16 ans). Plus de la moitié des patients étudiés avait des antécédents familiaux de troubles psychiatriques (57 %). Les patients bipolaires I présentaient plus souvent des antécédents familiaux de bipolarité que les bipolaires II (55 % vs 39 %) et de schizophrénie (15 % vs 4 %). À l’inverse, les patients bipolaires II avaient plus fréquemment des antécédents familiaux de dépression que les patients bipolaires I (64 % vs 45 %). En moyenne, les patients avaient présenté dix épisodes aigus depuis le début de la maladie, les épisodes dépressifs étant plus fréquents que les épisodes maniaques (6 vs 4) ou hypomaniaques (6 vs 3). Globalement, 11 % des patients présentaient des cycles rapides. Lorsque le type du premier épisode était connu (53 % des patients), la maladie avait débuté par un épisode dépressif chez 47 % des patients bipolaires I et chez 73 % des patients bipolaires II. Lorsque la maladie avait commencé par un épisode dépressif, il s’écoulait en moyenne sept ans avant le premier diagnostic d’épisode maniaque pour les patients bipolaires I et six ans avant le premier diagnostic d’épisode hypomaniaque pour les patients bipolaires II, alors que lorsque le

218 premier épisode avait été maniaque ou hypomaniaque, il s’écoulait en moyenne quatre ans avant le premier diagnostic d’épisode dépressif pour les patients bipolaires I et deux ans pour les patients bipolaires II. Globalement, 86 % des patients ont été hospitalisés au moins une fois pour leur maladie et 34 % ont eu au moins quatre hospitalisations. En moyenne, quatre ans s’écoulaient entre le début des troubles et la première hospitalisation. Les patients bipolaires I étaient plus nombreux à avoir été hospitalisés (92 % vs 78 %), cette dernière survenait plus tôt (dans 69 % des cas moins d’un an après le début des troubles vs 54 % ; p < 0,01) et le nombre d’hospitalisations était plus élevé (en moyenne 4,7 hospitalisations vs 3,6 ; p < 0,001) que pour les bipolaires II. L’évaluation de la sévérité de la maladie a montré des différences significatives entre les deux types de bipolarité (Tableau 4). Les patients bipolaires I avaient une symptomatologie plus sévère et près de 20 % étaient considérés comme gravement malades et parmi les plus malades contre 13 % pour les bipolaires II. De même, les patients bipolaires I avaient un score d’EGF plus faible (38 % vs 22 % avec un score ≤ 50) que les bipolaires II, montrant une altération fonctionnelle plus importante chez les patients bipolaires I. Des comorbidités psychiatriques étaient rapportées pour 45 % des patients, majoritairement des troubles de la personnalité isolés (56 % des cas). Les patients bipolaires II présentaient plus souvent des critères diagnostiques de TOC (troubles obsessionnels compulsifs) (8 % vs 3 %) et de troubles de la personnalité (37 % vs 29 %) tandis que les patients bipolaires I avaient plus fréquemment un problème d’abus ou de dépendance à une substance (18 % vs 13 %). Un antécédent de tentative de suicide était retrouvé chez près de 37 % des patients, avec un nombre médian de deux tentatives. Ces dernières avaient porté atteinte au schéma corporel dans 20 % des cas. La proportion de patients ayant fait une tentative de suicide était plus importante chez les patients bipolaires II que chez les patients bipolaires I (42 % vs 32 %). Des comorbidités somatiques étaient rapportées pour 40 % des patients, majoritairement l’obésité (16 %), l’hypertension artérielle (15 %), l’hypercholestérolémie (15 %), l’hypertriglycéridémie (10 %), le diabète (6 %), et l’hypothyroïdie (8 %).

Caractéristiques de la phase en cours lors de la consultation Au total, 63 % des patients inclus dans l’étude TEMPPO présentaient un épisode thymique aigu. Il s’agissait le plus souvent d’un épisode dépressif (33 % des patients). On dénombrait 37 % des patients en phase euthymique. La proportion de patients en phase euthymique était plus élevée chez les patients bipolaires I (40 % vs 32 %). À l’inverse, la proportion de patients dépressifs était nettement plus élevée chez les patients bipolaires II (52 % vs 19 %). L’épisode aigu évoluait depuis moins de trois mois pour la majorité des patients (74 % des patients en épisode maniaque et 54 % des patients en épisode dépressif) alors

W. de Carvalho et al. que la durée de la phase euthymique était de plus d’un an pour 54 % des patients (Tableau 5). Le score EGF montrait un fonctionnement global plus altéré lors des phases maniaques avec près de 74 % des patients en phase maniaque présentant un score inférieur ou égal à 50 comparé à 42 % des patients en phase dépressive et 27 % des patients en phase hypomaniaque. Des caractéristiques psychotiques étaient présentes chez 21 % des patients. Cette proportion atteignait 61 % chez les patients en épisode maniaque et 30 % chez les patients en épisode hypomaniaque ou mixte. La proportion de patients présentant des idées suicidaires envahissantes était de 13 % et atteignait environ un patient sur quatre en phase dépressive ou mixte. La consommation de toxiques concernait 40 % des patients au global. Elle était plus fréquente lors des phases hypomaniaques (51 %) et mixtes (57 %), et portait principalement sur le tabagisme. Une modification du comportement sexuel se retrouvait chez un quart des patients, plus fréquemment chez les patients bipolaires II (29 % vs 22 %, p < 0,01). En phase dépressive, il s’agissait le plus souvent d’une baisse de la libido (88 % des patients concernés) et en phase maniaque ou hypomaniaque, d’une augmentation de la libido.

Caractéristiques des patients bipolaires selon le type d’activité des psychiatres Une analyse des données a été réalisée en fonction du type d’activité des psychiatres et les résultats les plus pertinents sont présentés en Tableau 6.

Discussion L’étude TEMPPO a permis de mieux cerner les caractéristiques des patients bipolaires suivis par les psychiatres en France. Dans l’ensemble, cette étude a confirmé que les troubles bipolaires sont sévères et invalidants avec une prédominance d’épisodes dépressifs, une proportion élevée de cycles rapides, de comorbidités psychiatriques et somatiques et de symptômes psychotiques associés. Il ressort également que les patients en phase maniaque présentaient une altération fonctionnelle plus marquée. La répartition régionale des psychiatres actifs était représentative de celle des psychiatres exerc ¸ant en France quelle que soit la région considérée [15]. Comparativement aux données DREES 2008 sur l’ensemble des psychiatres franc ¸ais, les psychiatres actifs de l’étude étaient plus jeunes (moyenne de 49 ans versus 52 ans) et comprenaient plus d’hommes (65 % versus 55 %). Cette caractéristique a déjà été observée dans d’autres études [16]. L’augmentation de 23 % du nombre de psychiatres actifs par rapport à l’effectif prévu au protocole s’explique par l’intérêt rencontré auprès des psychiatres vis-à-vis de cette étude. De ce fait, le nombre plus important de patients inclus a permis d’assurer une plus grande précision dans les estimations et de réaliser des analyses par sous-groupes. Par ailleurs, l’analyse des patients recensés dans le registre de chaque centre a permis de contrôler que dans la majorité des cas (85 %), les patients inclus dans

Caractérisation sociodémographique, clinique de patients ambulatoires bipolaires Tableau 5

Caractéristiques de la phase actuelle selon la phase thymique.

Effectifs pondérés : n (%) Ancienneté de la phase actuelle (%) ≤ 1 mois 1—3 mois 3—12 mois > 1 an Présence de caractéristiques psychotiques (%) Présence d’idées suicidaires envahissantes (%) Hospitalisation pour la phase actuelle (%) Sévérité des symptômes (CGI) (%) Normal à légèrement malade Modérément à manifestement malade Gravement malade à parmi les plus malades Score EGF (%) ≤ 50 50—65 > 65 Au moins 1 consommation de toxiques (%) Tabagisme Dont augmentation de la consommation de tabac Toxicomanie Alcoolisme Plaintes sexuelles (%) Modifications du comportement sexuel (%). Dont Baisse de la libido Augmentation de la libido *p :

219

Total

Dépressive

Hypomaniaque

Maniaque

Mixte

Euthymique

619

205 (33)

75 (12)

49 (8)

62 (10)

227 (37)

p*

< 0,001 17,2 27,6 28,2 27,0

19,0 35,4 31,6 14,0

23,2 37,2 26,2 13,4

48,9 25,5 25,6 —

16,1 43,7 24,5 15,7

6,0 12,6 27,2 54,2

21,3

15,3

30,2

60,6

32,2

12,2

< 0,001

12,7

27,4

5,3

3,7

24,4

0,6

< 0,001

18,2

24,8

14,8

61,5

24,8

2,2

< 0,001 < 0,001

41,4 50,9

16,4 70,9

28,5 64,4

5,4 84,2

18,0 67,4

82,7 16,4

7,7

12,7

7,1

10,3

14,7

0,9

29,5 30,0 40,5

42,3 36,6 21,1

26,8 42,8 30,3

73,7 10,6 15,7

44,5 38,7 16,8

4,9 21,5 73,6

40,4

43,4

50,7

37,5

56,6

30,4

< 0,001

33,7 39,5

32,3 60,5

45,5 32,3

37,5 77,1

45,1 45,8

27,0 6,6

0,01 < 0,001

6,5 15,4

8,2 20,0

9,9 22,4

16,7 8,1

5,4 25,6

1,9 7,8

— < 0,001

19,6 25,1

27,2 34,6

10,6 14,0

14,9 28,9

31,4 38,4

13,5 15,8

< 0,001 < 0,001

74,3 20,8

87,9 10,2

18,1 74,4

7,9 59,8

64,3 34,0

97,3 2,0

< 0,001 —

< 0,001

test du Chi2 .

la partie « étude » étaient bien les cinq premiers patients consécutifs, ce qui valide la représentativité des patients analysés. L’étude TEMPPO a permis d’évaluer l’offre de soin en distinguant, d’une part, celle dédiée aux patients bipolaires prodiguée par le secteur public et, d’autre part, celle dispensée par le secteur privé. L’analyse qui en découle est complexe compte tenu des logiques de fonctionnement spécifiques des protagonistes impliqués qu’ils soient sanitaires et médicosociaux, hospitaliers et ambulatoires, et a fortiori, publics et privés [17]. Ces difficultés sont d’autant plus importantes lorsqu’il s’agit de comparer ces différents paramètres (poids respectif des secteurs de soins privés versus public dans le domaine de la prise en charge des troubles bipolaires) d’un pays à l’autre. On peut néanmoins

faire l’hypothèse qu’il y ait moins de différence de coût entre privé et public en France par rapport à d’autres pays d’Europe [18,19], et qu’une bonne part des patients ont les moyens en France, d’accéder à l’une ou l’autre des consultations, le secteur public restant néanmoins prépondérant dans sa capacité d’offre de lits d’hospitalisation. Aussi, estil naturel de retrouver une surreprésentation des patients sous AAH dans ce secteur [20], soit ici, environ trois fois plus, ainsi qu’un nombre plus élevé de patients hospitalisés (pour rappel, seulement 160 cliniques privées assurent le suivi des pathologies psychiatriques, sur 130 000 lits et places dont la majorité sont en secteur public) [17]. Cette différence est retrouvée par ailleurs dans l’étude pour d’autres dimensions psychiatriques, notamment présence de caractéristiques psychotiques (Tableau 6). Pourtant, la répartition

220

W. de Carvalho et al.

Tableau 6

Caractéristiques sociodémographiques et cliniques des patients selon le type d’activité du psychiatre enquêteur. Privé/mixte

Public

p

Effectifs pondérés

422

197

Obésité (%) Obésité déclarée par le psychiatre (%) Obésité calculée par l’IMC (IMC ≥ 30) (%)

4,2 15,7

11,2 16,3

— —

Statut professionnel Sans activité professionnelle (%)

27,8

42,9



Statut socioéconomique Perc ¸oit l’allocation adulte handicapé (%)

6,3

20,0

< 0,001a 0,15a

Bipolarité Bipolaire I (%) Bipolaire II (%)

55,0 45,0

61,1 38,9

Comorbidités psychiatriques Troubles obsessionnels compulsifs (%) Trouble de la personnalité borderline (%)

7,6 9,7

2,3 3,5

0,01a < 0,01a

Hospitalisation depuis le début de la maladie Au moins une hospitalisation (%) Parmi les hospitalisés, nombre d’hospitalisations (Moyenne [ET])

77,8 3,7 (4,0)

94,0 4,8 (4,9)

< 0,001a < 0,01b

Nombre d’épisodes dépressifs (moyenne [ET])

6,1 (6,7)

5,1 (4,7)

Suivi avec le psychiatre enquêteur (Moyenne [ET]) Nombre de consultations sur les 12 derniers mois Ancienneté du suivi, en années

13,7 (9,8) 5,7 (5,4)

9,9 (5,7) 4,1 (4,2)

0,04b (anvar) < 0,001b < 0,001b < 0,001a

Type de la phase actuelle Dépressif (%) Hypomaniaque (%) Maniaque (%) Mixte (%) Euthymique (%)

39,2 10,6 3,6 10,3 36,3

27,2 13,8 12,4 9,6 37,0

Caractéristiques psychotiques lors de la phase actuelle (%)

15,9

26,7

< 0,01a

Idées suicidaires envahissantes lors de la phase actuelle (%)

16,8

8,5

< 0,01a

Hospitalisation pour la phase actuelle (%)

14,7

21,7

a b

0,03a

Test du Chi2 . Analyse de variance non paramétrique.

des patients entre privé et public dans notre étude montre un nombre plus élevé de ce type de patients suivi par le secteur privé ; cela peut s’expliquer par le fait que notre étude concerne exclusivement les patients suivis en ambulatoire. On notera que le secteur public représente environ la moitié de l’offre de soin dédiée aux patients souffrant de troubles bipolaires aux États-Unis [21]. Le secteur privé représente pour sa part presque la moitié de l’offre de soin en psychiatrie en France et participe grandement aux 80 % d’activité globale de la psychiatrie pour la partie ambulatoire [17]. Pour toutes ces raisons, il est potentiellement intéressant de retrouver au travers de l’étude TEMPPO un nombre absolu plus important de consultations par année de suivi des patients bipolaires dans le secteur privé comparativement au secteur public, avec une surreprésentation des patients bipolaires de type II (différence non significative). Ces résultats sont probablement à

rapprocher des caractéristiques cliniques propres aux patients bipolaires dont la moitié de leur vie est vécue avec présence de symptômes qui sont pour une large part subsyndromiques [22]. De plus, il est intéressant de noter que les patients suivis dans le secteur privé ont plus de comorbidités, notamment TOC, troubles de la personnalité borderline, voire idées suicidaires. Même si ces éléments sont difficiles à analyser quant à leurs intrications sur la durée, nous retrouvons peu ou prou cette notion de diagnostics multiples au sein de la patientèle libérale dans d’autres pays, accompagnée d’un nombre plus élevé de consultations avant la mise en place d’un traitement [6]. D’après les données de l’étude TEMPPO, la prévalence, en France métropolitaine, des patients adultes ambulatoires consultant un psychiatre pour des troubles bipolaires en 2009 a été estimée à 0,43 %. Or la prévalence des troubles bipolaires dans la population générale en France est estimée

Caractérisation sociodémographique, clinique de patients ambulatoires bipolaires en moyenne à 1 % [1,2]. Cela laisse à penser que, seule, près de la moitié des personnes souffrant de troubles bipolaires est suivie par un psychiatre. Quid de l’autre moitié ? Serait-elle suivie en médecine générale comme dépression récurrente (8,3 % des patients suivis par des médecins généralistes seraient bipolaires) [6], dans les services d’addiction pour l’abus ou la dépendance à l’alcool ou en psychothérapie seule pour des troubles de la personnalité ? Présenterait-elle un degré symptomatique moindre lui permettant d’éviter les réseaux de soins ou au contraire la sévérité des troubles du comportement lui fait-elle emprunter d’autres voies (judiciaires/carcérales en particulier) ? Il est difficile de répondre au vu du peu de données, mais il est toutefois communément noté une sous-déclaration par le patient de ses troubles dépressifs, voire même maniaques ou hypomaniaques [23,24]. Par ailleurs, la nature même de l’étude suppose une lecture instantanée de la prise en charge des patients bipolaires sur une période courte de recrutement (cinq mois) sans toutefois capturer la dimension toute évolutive, chronique et erratique de la maladie bipolaire. Bien que la maladie touche habituellement de manière similaire les deux sexes pour ce qui concerne les troubles bipolaires de type I [6,25,26], l’étude TEMPPO comportait un taux supérieur de femmes ce qui se retrouve habituellement dans les études pharmaco-épidémiologiques menées chez des patients bipolaires [12,27—30]. Cela peut s’expliquer par un meilleur suivi en général des femmes et donc une intégration plus facile dans ce type d’étude ainsi que par une prévalence plus élevée de femmes pour le trouble bipolaire de type II. Dans l’étude TEMPPO, l’âge de début rapporté des troubles était similaire pour les patients bipolaires I et II, et en moyenne de 33 ans. Cet âge moyen est semblable à celui retrouvé dans d’autres études [31,32]. Toutefois, la tendance actuelle est de considérer que le début des troubles se produit généralement plus précocement [24]. En effet, il est maintenant avéré qu’il y a un retard au diagnostic d’environ dix ans après le début des symptômes. Quoiqu’il en soit on note une grande hétérogénéité de l’âge de début des troubles bipolaires [23,32]. Beaucoup de patients bipolaires sont célibataires ou divorcés (41 %) et vivent seuls (33 %). Cette constatation est conforme aux précédentes observations rapportant une fréquence plus importante du célibat chez les sujets présentant un trouble bipolaire [6]. Bien qu’ayant pour la plupart suivi des études supérieures, 35 % des patients de TEMPPO sont sans activité professionnelle, montrant le caractère invalidant de cette maladie. Ce taux de sans-emploi des patients bipolaires en France est comparable à celui rapporté lors de l’enquête européenne GAMIAN menée en 2001 dans 11 pays et qui avait fait apparaitre un taux de 22 % de patients bipolaires sans emploi rémunéré, avec une variation suivant les pays de 7 % en Suède jusqu’à 34 % en France [12,33]. Plusieurs autres études menées aux États-Unis et en Europe ont montré un fort taux d’inactivité chez les patients bipolaires comparés à la population générale [23,34,35]. Les patients bipolaires I de TEMPPO semblent plus handicapés dans leur vie du fait de leur maladie, recevant plus souvent l’allocation d’adulte handicapé et ayant plus souvent besoin d’une sauvegarde de justice. Tous ces résultats confirment le fort impact négatif de la maladie sur la vie sociale et professionnelle des patients [23,36,37].

221

Concernant les caractéristiques cliniques dans l’étude TEMPPO, le premier épisode était le plus fréquemment un épisode dépressif, ce qui a été également observé dans une étude espagnole [29]. Quel que soit le type de bipolarité, il n’y avait pas de différence dans le nombre moyen d’épisodes depuis le début de la maladie, comme cela a été rapporté précédemment [31]. Dans TEMPPO, la proportion de patients présentant des cycles rapides (au moins quatre épisodes thymiques aigus dans les 12 derniers mois) était similaire dans les deux sous-types de troubles bipolaires (11 %) et comparable à de précédentes études menées en France où de 9 à 18 % de cycles rapides étaient rapportés chez des patients bipolaires I [4,10]. Le fort taux de tentatives de suicide est un phénomène très préoccupant chez les patients bipolaires et est retrouvé dans une cohorte de patients bipolaires I franc ¸ais avec une prévalence de 35 % faisant une tentative de suicide [27]. Ce taux était dans TEMPPO de 37 % et plus élevé chez les patients bipolaires II (42 %) comparés aux bipolaires I (32 %). Cette différence entre les deux types de bipolarité n’est en revanche pas retrouvée dans une étude américaine [38]. La présence d’idées suicidaires envahissantes était plus marquée pendant les phases dépressives et mixtes, concordant avec de précédentes observations montrant que le risque suicidaire était majoritairement associé avec l’aspect dépressif [39]. L’existence d’une prédisposition génétique vis-à-vis des troubles bipolaires est déjà établie à partir d’études familiales et gémellaires [6,40] et des recherches sont menées pour identifier des gènes de prédisposition [41,42]. L’importance d’antécédents familiaux est confirmée par l’étude TEMPPO puisque plus de la moitié des patients bipolaires (57 %) présentait des antécédents familiaux de troubles psychiatriques et parmi eux, 25 % avaient des antécédents familiaux de suicide. Les patients bipolaires I présentaient plus souvent que les patients bipolaires II des antécédents familiaux de bipolarité et de schizophrénie : cela est en faveur de l’hypothèse d’une base génétique commune partielle entre bipolarité de type I et schizophrénie [43]. Ces résultats rejoignent ceux de l’enquête européenne GAMIAN où 65 % des patients bipolaires avaient des antécédents familiaux et en particulier plus d’antécédents de schizophrénie que les patients non bipolaires [12]. L’étude TEMPPO a également confirmé l’importance des comorbidités psychiatriques des troubles bipolaires [6,44,45] avec majoritairement des troubles de la personnalité isolés (chez 56 % des patients avec comorbidités psychiatriques). Dans une étude sur des patients en phase euthymique, des troubles de la personnalité étaient présents chez 43 % des patients bipolaires, sans différence entre bipolaires I et II [31]. Dans l’enquête américaine ECA, 21 % des patients bipolaires présentaient des TOC comparés à 2,5 % dans la population générale et à 12 % dans les troubles unipolaires [46]. Les TOC semblent associés à des formes atténuées de bipolarité, en particulier l’hypomanie [44], ce qui a été retrouvé dans TEMPPO (8 % chez les patients bipolaires II vs 3 % chez les patients bipolaires I) ainsi que dans une étude américaine [47]. D’importantes études épidémiologiques américaines ont montré que les patients bipolaires ont un taux largement supérieur à la population générale de dépendance ou d’abus

222 de substances (alcool et drogues) [48,49]. Des taux d’au moins 40 % ont été rapportés chez les patients bipolaires [50]. Dans une étude sur un échantillon de patients bipolaires d’un registre volontaire, l’abus de substance était plus fréquent chez les patients bipolaires I (58 % vs 39 %) [28]. Les résultats de TEMPPO sont cohérents avec ces observations mais avec des taux plus faibles (18 % pour bipolaires I et 13 % pour bipolaires II). Pour la phase actuelle de la maladie, le taux de patients bipolaires concernés par un abus ou une dépendance à l’alcool (15 %) et aux drogues (7 %), était supérieur aux taux précédemment rapportés dans une étude américaine (respectivement 2 % et 4 %) [51]. Concernant le tabagisme, 34 % des patients bipolaires étaient concernés dans l’étude TEMPPO, pourcentage similaire à celui observé dans une étude américaine (31 %) [52]. Les comorbidités somatiques dans l’étude TEMPPO sont très fréquentes puisqu’elles concernent 40 % des patients. Deux études européennes ont montré une prévalence du syndrome métabolique supérieure chez les patients bipolaires comparés à la population générale (18 à 32 % vs 15 à 20 %) et pouvant être reliée au traitement [13,53,54]. De même, une prévalence du diabète d’environ 10 % a été montrée chez les patients bipolaires, pouvant être deux à trois fois supérieure à celle trouvée dans la population générale [55]. Les relations entre bipolarité et hypothyroïdie ont été étudiées et s’il est souvent dit que l’hypothyroïdie pourrait être une conséquence du traitement au lithium, il est établi également que les patients bipolaires peuvent présenter des anomalies thyroïdiennes de grade III avant toute mise sous traitement et que la comorbidité cycles rapides/troubles thyroïdiens serait fréquente. Dans ce dernier cas les hormones thyroïdiennes peuvent constituer un traitement alternatif aux thérapeutiques classiques [45,56]. Concernant les limites de l’étude TEMPPO, les redressements appliqués aux données ont permis de prendre en compte les biais identifiés (type d’activité des psychiatres, nombre de patients vus par les psychiatres, fréquence des visites des patients). De plus, les psychiatres interrogés étaient représentatifs des psychiatres franc ¸ais et la consécutivité des patients inclus a assuré l’absence de sélection de patients particuliers. Néanmoins, compte tenu de la technique d’échantillonnage utilisée, on ne peut pas exclure que les patients qui ne consultent pas un psychiatre se différencient des patients suivis par un psychiatre et que les psychiatres n’ayant pas répondu à la sollicitation ou ayant refusé de participer se différencient des participants (8 % des psychiatres sollicités). Cela nécessite d’examiner avec prudence l’extrapolation des résultats à l’ensemble de la population des patients bipolaires vivant en France métropolitaine en 2009. Cette étude a tout de même permis de mieux cerner le profil des patients bipolaires suivis en France en soulignant la sévérité de la maladie, son impact sur la vie des patients (une vie sociale contrariée, une incapacité professionnelle importante, une forte intensité des symptômes et un fonctionnement global diminué, un fort taux de tentatives de suicides, des ennuis judiciaires fréquents par rapport à la population générale) et la nécessité d’un suivi régulier et d’une prise en charge globale de ces patients.

W. de Carvalho et al.

Déclaration d’intérêts L’auteur W. de Carvalho déclare avoir fait des interventions pour BMS, Otsuka, Lundbeck, Janssen et AstraZeneca.

Remerciements À tous les médecins ayant participé à l’étude ; à CEMKA Eval pour la logistique et l’analyse de cette étude et à Elisabeth Kern de la société Lincoln pour son aide à la rédaction de cet article.

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