Journal de radiologie (2011) 92, 343—357
FORMATION MÉDICALE CONTINUE : LE POINT SUR. . .
Complications vasculaires de la transplantation rénale : conduite diagnostique Vascular complications following renal transplantation: Diagnostic evaluation A. Ardelean , D. Mandry , M. Claudon ∗ Inserm U947, service de radiologie, hôpital d’enfants, CHU Nancy-Brabois, rue du Morvan, 54505 Vandœuvre-lès-Nancy, France
MOTS CLÉS Rein ; Transplantation ; Échographie ; Doppler ; Artère rénale
KEYWORDS Kidney; Transplant; US;
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Résumé Les complications vasculaires de la transplantation rénale sont, après les complications urologiques, les plus fréquentes. Elles peuvent compromettre la fonction du transplant rénal. De survenue précoce, elles comprennent la thrombose de l’artère ou de la veine du greffon, les lésions vasculaires de l’axe iliaque et la nécrose corticale. Les complications plus tardives sont représentées principalement par la sténose de l’artère rénale, la fistule artérioveineuse et, plus rarement, le faux anévrisme. L’échographie Doppler, complétée au besoin par l’injection de contraste ultrasonore, est la méthode de première intention, en urgence comme de fac ¸on programmée. Elle est complétée par l’IRM à titre morphologique et fonctionnel, éventuellement par le scanner pour une évaluation précise de l’axe artériel. L’angiographie est réalisée en vue d’un geste interventionnel. © 2011 Elsevier Masson SAS et Éditions françaises de radiologie. Tous droits réservés.
Abstract Vascular complications after renal transplantation are the most frequent type of complication following urological complications. They may affect the function of the transplant. Early vascular complications include renal artery or vein thrombosis, lesions to the iliac vessels and cortical necrosis. Delayed complications mainly include renal artery stenosis, arteriovenous
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (M. Claudon).
0221-0363/$ — see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS et Éditions françaises de radiologie. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jradio.2011.02.018
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Doppler; Renal artery
A. Ardelean et al. fistula, and rarely false aneurysm. Doppler sonography, sometimes with the use of intravenous contrast, is the imaging modality of choice in the acute setting or routine follow-up. MRI may be performed for additional morphological and functional evaluation while CT may provide additional evaluation of the arterial supply. Angiography is performed prior to endovascular treatment. © 2011 Elsevier Masson SAS and Éditions françaises de radiologie. All rights reserved.
La prévalence de l’insuffisance rénale terminale est en augmentation continue, avec un taux en augmentation de plus de 8 % par an aux États-Unis et un nombre des patients inscrits sur les listes des transplants rénaux ayant quadruplé dans les deux dernières décennies [1]. La situation est identique en France. Introduite il y a plusieurs décennies, la transplantation représente aujourd’hui le traitement le plus efficace de l’insuffisance rénale, permettant de rétablir une fonction normale du rein et l’autonomie du patient. Le profil de la transplantation rénale s’est modifié au cours des dix dernières années : la disponibilité plus faible de reins d’origine cadavérique a entraîné une augmentation progressive des prélèvements issus de donneurs vivants. Dans les deux cas, l’âge maximal du donneur, comme celui du receveur, s’est accru, entraînant l’apparition plus fréquente de complications, en particulier, d’origine vasculaire. Les complications survenant au décours d’une greffe rénale s’expriment souvent de fac ¸on assez univoque : non reprise ou chute de la diurèse, altération de la fonction rénale. . . Les causes sous-jacentes sont multiples, parfois intriquées : urologiques, vasculaires, médicales, néoplasiques. Elles nécessitent à l’étape du diagnostic, comme de la thérapeutique, une approche multidisciplinaire, dans laquelle le radiologue joue un rôle majeur. L’objectif de cet article est d’exposer les complications d’origine vasculaire, principalement sur leur versant diagnostique.
et la qualité du prélèvement chirurgical sont des éléments importants pour les résultats de la greffe. Chez les patients receveurs de greffons cadavériques, l’artère rénale du donneur est prélevée en bloc avec une partie de l’aorte (Carrel patch) et anastomosée en terminolatéral sur l’artère iliaque externe du receveur [2] (Fig. 1). Chez les patients receveurs des greffons de donneur vivant, l’artère rénale est prélevée sans patch aortique et sera anastomosée en terminolatéral sur l’artère iliaque externe. Les anastomoses veineuses sont presque toujours terminolatérales sur la veine iliaque externe. En cas d’artères rénales multiples, ce qui représente environ un quart des cas, plusieurs types d’anastomose peuvent être utilisés : • si les artères ne sont pas trop séparées et d’origine cadavérique, elles sont prélevées sur un patch unique qui est anastomosé sur l’artère iliaque externe ; cela entraîne parfois des courbures importantes de certaines d’entre elles, avec un aspect possible de plicature ; • si les artères sont éloignées ou issues d’un donneur vivant, chacune d’entre elles est implantée sur l’artère iliaque externe. Mais des variantes ont été décrites [2] : une petite artère polaire peut être réimplantée directement sur l’artère principale du greffon ; une artère de calibre supérieur peut être anastomosée en terminoterminal sur l’artère iliaque interne et l’artère de calibre inférieur en terminolatéral à l’artère iliaque externe ; chaque artère rénale peut être anastomosée à une branche séparée de l’artère iliaque interne.
Les techniques d’imagerie mises en œuvre dans l’exploration du rein transplanté
Chez les enfants pesant moins de 20 kg, la fosse iliaque est trop petite pour recevoir le rein d’un donneur adulte ; le greffon est alors placé en situation haute, avec une anastomose terminolatérale sur l’aorte distale et la veine cave inférieure basse [2].
Rappels sur les anastomoses vasculaires réalisées dans le cadre de la greffe rénale En général chez l’adulte, le rein transplanté est placé en situation hétérotopique dans l’espace extrapéritonéal pelvien [2]. Le rein gauche est choisi de préférence parce que la veine rénale gauche est plus longue ; il est alors implanté de préférence en fosse iliaque droite parce que la veine iliaque est en situation plus superficielle et offre un trajet plus horizontal, ce qui facilite la réalisation des anastomoses vasculaires [2]. Les reins des cadavres sont prélevés de fac ¸on séparée ou en bloc, puis une étape de perfusion réfrigérée permet la conservation des reins à +4◦ , de 36 à 72 heures (temps d’ischémie « froide ») [3]. Un temps d’ischémie « froide » prolongé accroît la fréquence et la gravité de l’insuffisance rénale initiale par tubulopathie. Le caractère atraumatique
Les examens d’imagerie utiles dans le suivi de greffe La surveillance par imagerie occupe une place primordiale dans le diagnostic des complications chirurgicales, notamment vasculaires, de la transplantation rénale.
L’échographie, le Doppler et l’échographie de contraste : le trio de base L’échographie, en règle couplée au Doppler, est la base de la surveillance, dès les premières heures après la transplantation rénale. L’échographie de contraste prend une place grandissante dans de nombreux cas où l’évaluation fine de la perfusion rénale est nécessaire, notamment en urgence.
Complications vasculaires de la transplantation rénale : conduite diagnostique
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Figure 1. Schéma représentant les deux principaux types d’anastomose artérielle en transplantation rénale : a : anastomose terminolatérale de l’artère du greffon sur l’artère iliaque externe ; b : anastomose terminoterminale de l’artère du greffon sur l’artère iliaque interne.
Sur un plan pratique, le patient est placé en décubitus dorsal ou latéral [4]. L’ensemble du greffon, les anastomoses veineuses et artérielles superficielles peuvent être ainsi visualisées dans la plupart des cas avec une sonde barrette courbe ou sectorielle de 2 à 5 MHz. Une décontamination très soigneuse de la sonde et l’utilisation d’un gel de contact stérile sont obligatoires pour les examens réalisés dans la période postopératoire [5]. L’exploration échographique du rein transplanté en niveaux gris a pour but de rechercher des anomalies de l’échostructure du parenchyme et du sinus, une dilatation des cavités pyélocalicielles, une collection périrénale ou située à distance du greffon, superficielle ou profonde (urinome, lymphocèle, hématome, abcès. . .) [3,5]. Contrairement à ce que l’on observe sur le rein natif, la visibilité des cavités pyélocalicielles d’un rein transplanté hétérotopique est fréquente en dehors de tout syndrome obstructif, en raison de la situation superficielle et basse du rein transplanté et de l’absence de péristaltisme sur l’uretère prélevé qui est dénervé. L’étude de la vascularisation du greffon en imagerie couleur s’effectue en deux temps : • le repérage et l’analyse du pédicule artérioveineux, en prenant soin d’enregistrer tout le tronc de l’artère rénale et particulièrement son tiers proximal postanastomotique ; cette étude est menée artère par artère en cas de vaisseaux multiples. La fréquence de répétition des impulsions (pulse repetition frequency [PRF]) en Doppler couleur et pulsé est progressivement adaptée aux vitesses rencontrées, parfois élevées en cas de sténose ;
• l’examen inclut ensuite une étude des branches segmentaires et des premières branches de division, puis de la vascularisation périphérique intraparenchymateuse menée dans des conditions de réglage (filtre et PRF) optimales pour l’étude des flux lents [3,5]. Avec une sonde abdominale de fréquence moyenne (2—5 MHz), on note la persistance d’une zone aveugle dans le cortex superficiel sous-capsulaire au sein de laquelle les vaisseaux interlobulaires et glomérulaires ne sont ni visibles ni enregistrables, en raison de leur vitesse de circulation très faible. L’utilisation d’une sonde de haute fréquence (sonde superficielle de 7 à 12 MHz) permet de visualiser le flux au sein du cortex le plus superficiel jusqu’à la capsule, dans des conditions d’examen optimales, mais sur un champ d’exploration limité [6]. En région postanastomotique, au niveau des bifurcations et boucles artérielles, les vaisseaux étudiés présentent un signal homogène, avec parfois de discrètes perturbations hémodynamiques (turbulences et accélérations modérées, inversion paradoxale du codage couleur) qui peuvent dérouter l’opérateur. Certains segments veineux peuvent être comprimés par des croisements artériels. L’analyse spectrale obtenue en Doppler pulsé permet de vérifier les caractéristiques normales du flux artériel, avec enregistrement au niveau pédiculaire de vitesses systoliques normales voisines de 100 cm/s (80—180 cm/sec), en général toujours inférieures à 190 cm/s [5]. Au niveau des artères parenchymateuses, les enregistrements sont similaires à ceux obtenus dans un rein natif ;
346 l’indice de résistance (IR) (IR = vitesse systolique maximale — vitesse télédiastolique minimale/vitesse systolique maximale) calculé à partir des artères interlobaires est l’indice le plus utilisé actuellement pour apprécier les résistances intrarénales. Sa valeur normale est variable d’un rein à l’autre, avec un IR moyen égal à 0,71 ± 0,06 [5]. Comme pour le rein natif, un spectre d’allure normale a une composante systolique caractérisée par un temps d’ascension systolique, ou temps de montée systolique (intervalle de temps compris entre le pied et le sommet du premier pic systolique) très bref, inférieur à 70 ms. Le bilan hémodynamique complet du greffon inclut donc la mesure de différents paramètres Doppler, y compris la vitesse systolique maximale dans l’artère (ou les artères) du greffon, le gradient de la vitesse systolique maximale entre l’artère du greffon et l’artère iliaque en cas d’accélération, l’IR et le temps d’ascension ou de montée systolique mesurés au niveau interlobaire [4,7]. Les indices de pulsatilité (IP < 1) et d’accélération des artères intraparenchymateuses (IA > 3 m/s2 ) [4,8] ne sont en pratique plus utilisés. La veine rénale pédiculaire et les branches intrarénales présentent un flux monophasique, à faible vitesse, partiellement modulé par la respiration chez les patients avec une fonction cardiaque normale. L’écho-Doppler de contraste utilise les nouveaux agents de contraste ultrasonores (microbulles) (Sonovue® , Bracco, Italie) injectés par voie veineuse périphérique [3,5]. En raison de la grande sensibilité des séquences d’imagerie non linéaires dans l’exploitation de la composante harmonique générée par les microbulles à basse puissance d’émission (index mécanique < 0,1), cette nouvelle modalité s’avère très performante pour visualiser en temps réel le flux des vaisseaux, de l’anastomose iliaque jusqu’au niveau du cortex sous-capsulaire. C’est toutefois une utilisation clinique hors du champ d’application officiellement reconnu pour Sonovue® .
Le scanner Il s’agit d’une méthode d’imagerie en général utilisée en complément de l’échographie, exceptionnellement en première intention, et en général dans le cadre de l’urgence. Son excellente résolution spatiale et en contraste, sa grande accessibilité explique sa réalisation plus fréquente que l’IRM, malgré l’exposition aux rayons X et la néphrotoxicité de l’injection de produit de contraste iodé qui peut imposer une séance d’hémodialyse après l’examen [9]. L’examen comprend en général trois phases : • une phase avant injection en cas de suspicion d’hématome, de dissection, ou de lithiase, qui couvre toute la loge de greffe et la vessie ; • une phase réalisée au temps artériel, qui explore la totalité de l’axe aorto-iliaque jusqu’au Scarpa, voire en dessous en cas thrombose étendue au membre inférieur. La dose est administrée en bolus, adaptée en fonction du poids du patient, mais avec un volume minimal de 120 ml chez l’adulte ; • une phase plus tardive, soit réalisée au temps veineux en cas de thrombose, soit au temps excrétoire en cas de suspicion d’effraction urinaire. L’injection de diurétiques au moment de l’injection est utile en dehors du contexte de la post-greffe immédiate ou de l’urgence.
A. Ardelean et al. Les acquisitions sont suivies de reconstructions tridimensionnelles de l’arbre vasculaire, et de reformations multiplanaires, vasculaires, parenchymateuses et urinaires.
L’imagerie par résonance magnétique Méthode d’imagerie complémentaire de l’écho-Doppler, elle présente l’avantage d’être peu « invasive » et de fournir des informations d’ordre morphologique et fonctionnel, avec la possibilité de multiplier les acquisitions. Toutefois, son coût reste élevé et son accessibilité parfois encore limitée. Les contre-indications générales de l’angio-IRM chez un patient transplanté sont celles habituellement décrites : pacemaker, implant cochléaire, certains clips ou corps étrangers ferromagnétiques, claustrophobie, notion d’allergie au gadolinium ; s’y ajoute le risque de fibrose néphrogénique systémique (FNS) chez l’insuffisant rénal sévère, qui fera systématiquement prescrire des chélates de gadolinium cycliques, de plus grande stabilité. Le greffon doit être étudié à l’aide d’antennes de surface et le champ d’exploration choisi doit être large afin de visualiser la loge de transplantation jusqu’au niveau de la vessie. Après une série de repérage dans le plan axial permettant de préciser la situation exacte et l’orientation du greffon, les séquences d’imagerie sont réalisées dans les plans axial, frontal et sagittal. Un protocole classique comprend : • des séquences en spin-écho pondérées T2 indispensables, particulièrement lorsqu’il existe une dilatation des cavités ou une collection périrénale ; • une acquisition d’angio-IRM, en général avec injection de contraste. Centrée sur le pédicule rénal, elle permet d’étudier l’anastomose et le tronc de l’artère rénale, mais reste souvent insuffisante pour une évaluation précise des branches de division segmentaires et sous-segmentaires ; • des séquences dynamiques pondérées en T1 après injection qui lui succèdent ou sont réalisées d’emblée. Elles permettent d’étudier la cinétique et l’intensité de la prise de contraste du cortex aux temps artériel et tubulaire, puis au temps excrétoire. Une acquisition dans un plan perpendiculaire à celui de l’étude cinétique est la règle ; • un urogramme 3D T1 final pour étudier les cavités. Si l’on veut éviter l’effet T2 dû à des concentrations trop élevées de chélates de gadolinium dans les urines, il convient d’injecter du furosémide (10 mg chez un adulte) juste avant le contraste. L’aspect normal du rein transplanté en IRM n’est pas différent de celui des reins natifs, avec une bonne différenciation spontanée corticomédullaire sur les images pondérées en T1 et un hypersignal homogène sur les images pondérées en T2. Les coupes obtenues après injection de gadolinium montrent un rehaussement de signal intense et homogène du parenchyme rénal et l’opacification du système excréteur sur les coupes tardives [3,6]. La mesure de la fonction rénale absolue reste complexe pour le transplant, alors que la mesure de la fonction rénale différentielle est plus aisée pour le rein natif.
L’angiographie Aujourd’hui, sa place reste majeure, mais comme technique de guidage en radiologie interventionnelle, en perspective
Complications vasculaires de la transplantation rénale : conduite diagnostique d’un geste d’embolisation, d’angioplastie, ou de pose de stent.
Classification des complications vasculaires de la transplantation rénale Les complications vasculaires post-transplantation rénale sont fréquentes, avec une prévalence de 3 à 15 % selon les séries. Elles peuvent entraîner une morbidité significative et leur diagnostic précoce joue un rôle essentiel dans le choix thérapeutique qui repose souvent sur la radiologie interventionnelle [2,3]. Il est logique de classer les complications en fonction de leur moment d’apparition après la transplantation : • les complications vasculaires précoces ou aiguës surviennent en général dans la première semaine ; elles incluent la thrombose de l’artère rénale, la thrombose de la veine rénale, les lésions peropératoires du pédicule iliaque artériel ou veineux compromettant la vascularisation du greffon et la nécrose corticale ; • les complications vasculaires tardives se rencontrent à distance de la transplantation rénale ; elles incluent la sténose de l’artère du greffon, la fistule artérioveineuse (FAV), l’anévrisme et le faux anévrisme et les lésions de l’artère iliaque en amont du site d’anastomose. On peut également classer les lésions en fonction de leur caractère occlusif, comme les thromboses, avec un risque rapide pour le parenchyme du rein greffé, qui ne tolère que quelques heures d’ischémie chaude, ou non occlusif comme les sténoses de l’artère, les FAV, les anévrismes. En cas de dysfonction du transplant après greffe, le rôle de l’imagerie est double : • éliminer une cause chirurgicale, urologique ou vasculaire, expliquant une oligoanurie précoce ; • avant d’envisager une cause médicale, nécrose tubulaire aiguë (NTA) [6], ou rejet, et de pratiquer une biopsie, puis d’en surveiller en écho-Doppler l’évolution qui, le plus souvent est rapidement et progressivement favorable (normalisation des indices de résistance) en cas de NTA.
Les complications vasculaires de survenue immédiate ou rapide après la transplantation La thrombose de l’artère du greffon C’est une complication précoce mais rare, qui se traduit par la nécrose globale du greffon — en l’absence d’un réseau collatéral de suppléance — après quelques heures d’ischémie chaude. L’occlusion est, en général, liée à une malposition de l’artère du greffon (plicature ou torsion) favorisée par un vaisseau trop long, par une anastomose artérielle incongruente ou une lésion intimale au cours du prélèvement (dissection). La thrombose artérielle secondaire, plus rare, représente plus souvent l’évolution finale d’un épisode de rejet très sévère de type vasculaire déterminant l’occlusion des artères intraparenchymateuses, de survenue exceptionnelle aujourd’hui grâce aux traitements antirejet actuels.
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L’occlusion d’une artère pédiculaire unique induit un infarcissement massif du greffon, tandis que l’occlusion d’une artère polaire ou d’une branche de division artérielle aboutit à la constitution d’une zone segmentaire de nécrose ischémique bien limitée, ou « infarctus », dont les conséquences dépendent de l’étendue du territoire dévascularisé. Il s’agit d’un diagnostic d’urgence. En échographie mode B, l’échostructure du cortex nécrosé se modifie rapidement, devenant hypoéchogène dans les premiers jours suivant la constitution de la nécrose. Mais le diagnostic est révélé par le Doppler qui montre l’occlusion complète de l’artère rénale, devant l’absence de signaux artériel et veineux intrarénaux (parenchyme, sinus et pédicule) (Fig. 2 et 3). L’infarctus d’aval correspond en Doppler à un territoire plus au moins bien limité du parenchyme rénal dépourvu de signaux en imagerie couleur, au sein duquel le Doppler pulsé n’enregistre aucun signal de flux dans toute l’épaisseur du cortex rénal. L’IRM et le scanner avec injection de produit de contraste sont très performantes pour le diagnostic et l’évaluation de ces infarctus (Fig. 4) ; ils peuvent être indiqués pour le diagnostic positif de la nécrose lorsque le Doppler est non contributif ou douteux et pour l’évaluation précise de l’étendue de la nécrose qui se traduit par un défaut de rehaussement cortical. Cependant, c’est l’échographie de contraste qui devient actuellement la meilleure méthode, facile à mettre en œuvre dans la suite immédiate d’un examen Doppler restant douteux, et confirmant facilement le diagnostic et précisant l’extension de l’infarcissement (Fig. 3).
La thrombose de la veine du greffon Complication rare de la transplantation rénale (0,4—6 % des cas chez l’adulte), c’est une cause fréquente de perte précoce du greffon [4]. La thrombose de la veine du greffon résulte généralement d’une malposition du pédicule (torsion, plicature) ou d’une compression extrinsèque par un hématome. Elle peut aussi être secondaire à une extension d’une thrombose de l’axe veineux iliaque. L’occlusion de la veine d’un rein transplanté entraîne une interruption complète du retour veineux, avec de faibles capacités de drainage par la collatéralité, à la différence de ce qui s’observe chez le rein natif. À noter qu’au stade initial, l’artère reste perméable, avec un flux alterné. Le diagnostic repose sur le Doppler couleur, qui doit être systématiquement réalisé en urgence devant la non-reprise de la diurèse en post-greffe ou devant l’arrêt brutal de la diurèse. La thrombose veineuse précoce doit être évoquée devant des enregistrements artériels très résistifs, associant un bref pic systolique avec un reflux holodiastolique (aspect de « va-et-vient » ou « to and fro » en anglais) et l’absence de signaux veineux dans l’ensemble du greffon (Fig. 5). Il existe également une raréfaction des signaux colorés au niveau des artères périphériques en Doppler couleur, associée secondairement à des modifications de l’échostructure du parenchyme qui traduisent l’infarcissement du parenchyme. Le scanner peut être réalisé en cas de doute diagnostique ou pour apprécier l’éventuelle extension de la thrombose de la veine du greffon à l’axe iliaque veineux, mais il ne doit pas retarder la prise en charge chirurgicale, qui peut, si elle
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Figure 2. Patient présentant une absence de reprise de diurèse dans les suites immédiates d’une transplantation : a : Doppler montrant l’absence de flux artériel dans le rein greffé ; seuls quelques tracés veineux sont obtenus ; b : reformation coronale de la phase artérielle du scanner montrant une dissection étendue de l’artère iliaque et une très faible opacification de l’artère du transplant vascularisé par le faux chenal.
Figure 3. Patiente âgée de 49 ans, transplantée rénale dans le cadre d’un donneur vivant. Diagnostic d’un petit infarctus du pôle inférieur du rein, lié à la thrombose d’une artère polaire grêle après transplantation : a : le Doppler couleur révèle la présence d’une petite plage non vascularisée (croix) ; b : l’échographie de contraste permet de mieux évaluer les contours de la plage infarcie (croix) ; c : excellente corrélation scanographique (flèche).
intervient dans les toutes premières heures qui suivent la thrombose, permettre une récupération au moins partielle.
Les lésions peropératoires du pédicule iliaque artériel ou veineux compromettant la vascularisation du greffon Les lésions vasculaires survenant au décours de la transplantation sur les vaisseaux iliaques sont moins connues ; secondaires à l’abord chirurgical ou à la pose de clamp sur le pédicule sur lequel sont effectuées les anastomoses, elles peuvent cependant compromettre la viabilité du greffon.
Sur l’axe artériel, ce sont principalement des dissections parfois occlusives, plus rarement des fuites ou des faux anévrismes survenant au niveau des sutures. Les thromboses dominent sur le versant veineux. Le Doppler reste l’élément clé du diagnostic, mais l’exploration correcte de l’ensemble de l’axe iliaque peut être rendue difficile en postopératoire immédiat. Le scanner peut, dans ce cas, être nécessaire (Fig. 2).
La nécrose corticale La nécrose corticale est une complication également rare, mais grave. Elle peut intéresser le cortex superficiel, le cor-
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Figure 4. Patient âgé de 70 ans, présentant trois semaines après la transplantation une complication vasculaire de type ischémique liée à la thrombose d’une des deux artères polaires. Large infarcissement inférieur d’aval : a : examen scanographique, avec reconstruction en rendu de volume de l’axe iliaque, montrant la perméabilité d’une seule des deux artères, qui présente une plicature modérée à son origine. Défaut d’opacification de la zone infarcie assez volumineuse. Drain en place ; b : suivi en Doppler puissance trois semaines après, montrant une atrophie du parenchyme du pôle inférieur, avec une pauvreté vasculaire ; la zone infarcie reste de dimensions modérées et la fonction rénale s’est stabilisée à un niveau presque normal.
Figure 5. Thrombose de la veine du greffon diagnostiquée trois jours après transplantation : a : Doppler couleur montrant la présence d’un codage artériel, présent au temps systolique, sans visualisation de flux veineux ; b : les courbes Doppler pulsé, obtenues au niveau des artères segmentaires visualisées en mode Doppler couleur, montrent un tracé typique de reflux holodiastolique, avec un aspect de « va-et-vient » ; c : le scanner confirme la perméabilité de l’artère du greffon et montre un caillot issu de la veine, faisant saillie dans la veine iliaque externe (flèche).
tex profond ou la médullaire, ou partie de chaque. Elle peut être favorisée par une conservation très longue d’un greffon cadavérique ou être secondaire à un rejet aigu sévère. Le diagnostic de nécrose corticale est difficile, car au stade initial, les artères et veines segmentaires, voire interlobaires, restent perméables. L’échographie ne montre que des modifications morphologiques, à type de gros rein globuleux, plus ou moins hétérogène. Le Doppler couleur montre une raréfaction des vaisseaux au niveau du cortex et l’analyse spectrale des artères intrarénales une
augmentation des résistances artérielles, avec de fac ¸on tardive une disparition complète d’un flux positif en diastole. C’est l’échographie de contraste qui objective facilement le défaut de vascularisation d’une bande parenchymateuse sous-corticale, parfois étendue au cortex profond et à la médullaire (Fig. 6). Le scanner, ou mieux l’IRM, permet de préciser l’extension de la nécrose devant un défaut de rehaussement de signal diffus ou par plages de la zone nécrosée. La question reste d’exclure la présence d’un rejet aigu sous-jacent et de pratiquer une biopsie.
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Figure 6. Nécrose corticale mise en évidence par échographie de contraste, chez une patiente présentant une anurie persistant dix jours après transplantation. La nécrose a été reliée à une longue durée de conservation du greffon d’origine cadavérique : a : le Doppler couleur montre une vascularisation apparemment correcte du greffon et les tracés spectraux obtenus au niveau interlobaire sont également normaux, avec un index de résistance modérément élevé à 0,79 ; b : l’échographie de contraste, réalisée en acquisition volumique, révèle l’absence de vascularisation du cortex superficiel, en sous-capsulaire (flèches) ; c : corrélation scanographique confirmant la nécrose étendue, principalement sous-corticale.
Les complications vasculaires survenant à distance après la transplantation La sténose de l’artère du transplant rénal Généralités La sténose de l’artère rénale (SAR) du greffon est la complication vasculaire la plus fréquente de la transplantation rénale, avec une prévalence variant selon les séries entre 1 et 23 % des cas [2,10,11]. Elle est plus souvent rencontrée avec des greffons cadavériques que de donneur vivant [12]. L’introduction large du Doppler dans le suivi de la transplantation a induit la découverte de nombreuses sténoses non ou paucisymptomatiques. Responsable de 1 à 5 % des cas d’hypertension artérielle (HTA) posttransplantation et fréquemment à l’origine de dysfonction du transplant [2], c’est une complication en général facilement curable. Elle peut être diagnostiquée à tout moment après la transplantation, mais survient principalement entre trois mois et deux ans après la transplantation rénale [13]. Les principaux signes cliniques associent une hypertension de début brusque ou lent, réfractaire à une multithérapie, et/ou une insuffisance rénale progressive sous traitement, éventuellement aggravée par l’introduction d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion. Paradoxalement, la tension artérielle peut parfois être basse. La présence d’un souffle systolique est non spécifique, car elle peut simplement être créée par l’anastomose artérielle, sans sténose associée. Une hypertension élevée et une détérioration de la fonction rénale peuvent être secondaires à un traitement par cyclosporine ou tacrolimus, surtout à doses élevées. Il induit une vasoconstriction préglomérulaire, responsable d’une hypoperfusion glomérulaire, d’une rétention hydrosaline et secondairement d’une élévation de la TA [10]. Enfin, l’absence de rejet sous-jacent doit souvent être vérifiée par biopsie [10].
Le site, la morphologie et le délai de survenue de la sténose peuvent donner une orientation sur son origine [10] : • le plus souvent, la sténose se produit au voisinage de l’anastomose. Elle est, en général, liée à un traumatisme des vaisseaux du donneur ou du récepteur pendant l’intervention (tension, clamp, suture. . .). Un discret flap intimal ou une dissection sous-intimale de la paroi vasculaire peuvent aussi induire une hyperplasie intimale réactionnelle qui diminue progressivement la lumière artérielle. Ce type de sténose est de survenue plutôt précoce ; • une courbure marquée de l’artère peut apparaître lorsque l’artère est plus longue que la veine, ce qui est le cas si, par exemple, le rein droit est greffé en fosse iliaque gauche et en cas d’artères multiples. Une courbure marquée entraîne une accélération des vitesses dans l’artère, dont la quantification peut être gênée par la correction de l’angle difficile en cas de rayon court, ce qui peut prêter à confusion avec une authentique sténose associée [10]. Un authentique phénomène de plicature peut se produire, avec une sténose fonctionnelle en phase systolique et relâchement en diastole ; • des sténoses multiples, longues, d’apparition relativement tardive, peuvent traduire des lésions endothéliales liées à un rejet et/ou à l’effet des immunosuppresseurs qui ont été suspectés d’induire des lésions. Le rôle possible du cytomégalovirus a également été décrit [14] ; • une sténose tardive, localisée, survenant plusieurs années après la greffe, suggère en premier lieu une atteinte athérosclérotique de l’artère rénale du greffon, associée ou non à celle de l’artère iliaque. Le modèle du transplant rénal est un modèle à un rein unique. Dans les phases précoces d’une HTA, l’hypoperfusion du rein fonctionnel unique active le système rénineangiotensine et nerveux sympathique, induit une rétention saline (du sodium) et une expansion hydrique extracellulaire. L’expansion volumique et l’augmentation de la
Complications vasculaires de la transplantation rénale : conduite diagnostique tension artérielle améliorent la perfusion rénale, puis inhibent progressivement le système rénine-angiotensine, résultant en une réninémie secondairement normale ou faible [10]. En cas de SAR, la résistance post-glomérulaire est habituellement élevée pour soutenir la pression intracapillaire, malgré une basse pression de perfusion rénale. Ainsi, la filtration glomérulaire peut être normale ou légèrement diminuée, même lorsque la perfusion rénale est sévèrement réduite, déterminant une fraction de filtration glomérulaire élevée évocatrice d’une SAR [10].
L’écho-Doppler Le Doppler couleur est de loin la technique diagnostique la plus performante et reproductible, utile en première intention dans le bilan vasculaire d’une suspicion de SAR post-greffe, non seulement pour détecter une SAR, pour définir son imputabilité en cas de dysfonction ou d’HTA, mais aussi pour le suivi après angioplastie percutanée ou placement de stent [4]. Les signes observés au Doppler couleur et pulsé se divisent entre signes directs, observés au niveau de la sténose, et signes indirects rencontrés en aval, au niveau des artères interlobaires. Les signes directs associent, sur une zone localisée sur l’artère, plusieurs anomalies (Fig. 7—9) : • en mode Doppler couleur : la présence d’un artefact périvasculaire, codage aléatoire de points couleur dû aux vibrations des tissus entourant la sténose, peut être observée à basses PRF en cas de sténose serrée. L’ajustement des PRF adapté à des vitesses élevées permet d’aborder l’analyse de l’artère elle-même, et de montrer une zone d’aliasing, traduisant l’accélération des vitesses dans le défilé sténotique et à un moindre degré en zone post-sténotique. Le parcours en mode pulsé du vais-
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seau permet, à angle constant, de montrer le gradient de vitesses à travers la sténose ; • le mode pulsé montre des vitesses systoliques maximales (VSM) élevées. Le seuil diagnostique, s’il est supérieur à celui habituellement retenu de 1,8 m/s pour l’artère d’un rein natif, reste discuté : un large éventail de valeurs ont été publiées : de 1,5 [15] à 3 m/s [16]. Un seuil de 2,5 m/s semble un bon compromis, avec une sensibilité rapportée à 100 % et une spécificité à 95 % [7]. À noter que des VSM de 2 à 2,5 m/s sont possibles dans une artère normale sans zone localisée d’accélération. Il est aussi possible d’utiliser un équivalent du rapport aortorénal en comparant les VSM dans l’artère du greffon à celle de l’artère iliaque en amont, avec un seuil à 3,5 [4]. Enfin, des turbulences sont retrouvées en zone post-sténotique ; • les signes indirects ne sont observés qu’en cas de sténose très serrée. Ils comprennent un aspect amorti des tracés Doppler interlobaires : l’amortissement (parvustardus) est affirmé devant une augmentation du temps de montée systolique supérieur à 0,07 s [7]. Il peut s’ensuivre une baisse de l’IR, qui, passant sous le seuil de 0,55, aurait une sensibilité de 0,85 [17].
L’imagerie par résonance magnétique Il s’agit d’un excellent examen complémentaire du Doppler, non irradiant et peu agressif pour le transplant, et qui explore le réseau aorto-iliaque, l’artère du greffon et ses principales branches. Le protocole, qui comprend principalement une angio-IRM et des acquisitions pondérées T1 après injection, a été décrit plus haut. Une sténose est reconnue devant une diminution de calibre de l’artère et le plus souvent devant un vide de signal témoignant a priori d’une sténose serrée (Fig. 8c et 10a). Cependant, l’IRM a tendance à majorer le degré de sténose réellement présent et il convient de toujours confirmer une
Figure 7. Patient de 50 ans, transplanté depuis trois ans, présentant une sténose à l’origine de l’artère du greffon : a : Doppler couleur à basses PRF montrant la présence d’un artefact périvasculaire au niveau du pédicule artériel, entre le greffon et l’axe iliaque ; b : le passage en hautes PRF permet d’éliminer la majeure partie de l’artefact périvasculaire, de montrer une zone d’aliasing dans l’artère et d’obtenir des tracés Doppler spectraux qui montrent des vitesses systoliques maximales supérieures à 4 m/sec, une dispersion du spectre et des turbulences.
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Figure 8. Patient de 48 ans, transplanté depuis deux ans, présentant une HTA résistante et une altération de la fonction rénale : a : tracé Doppler obtenu au niveau d’une zone d’accélération, située au niveau de la partie proximale de l’artère du greffon, avec vitesses systoliques maximales supérieures à 4 m/sec ; b : tracés interlobaires montrant un amortissement avec temps de montée systolique allongé à 0,1 s ; c : après drainage des cavités par néphrostomie réalisé en raison de cavités pyélocalicielles dilatées (b) et devant l’absence d’amélioration de la fonction rénale, une angio-IRM est pratiquée, qui confirme la présence d’une sténose serrée proximale. Après angioplastie, les signes cliniques et Doppler se sont corrigés.
Figure 9. Enfant de dix ans, greffé depuis six mois. Hypertension artérielle : a : le Doppler retrouve des signes directs de sténose sur la portion proximale de l’artère, présentant une courbure marquée ; b : l’angioscanner confirme la sténose, constante, de l’artère proximale coudée.
sténose par un Doppler centré. À noter enfin que les clips métalliques placés au voisinage de l’artère peuvent, par une chute du signal, créer de faux aspects de sténose [2].
Scanner Le scanner peut être utile, au prix d’une injection de produit de contraste iodé et d’une exposition aux RX, en cas de sténose complexe ou de plicature (Fig. 9b), pour laquelle il est nécessaire d’avoir la meilleure résolution spatiale possible, en préparation d’un geste interventionnel ou chirurgical. Les artefacts de mouvements sont moins marqués en angioscanner, parce que le temps d’acquisition est généralement plus court que celui de l’angio-IRM.
La prise en charge du patient La question est l’imputabilité d’une sténose de l’artère du greffon mise en évidence en Doppler dans l’apparition d’une hypertension ou d’une dégradation de la fonction rénale. Il convient d’éliminer toute autre cause de dysfonctionnement du transplant, comme une obstruction urinaire ou un rejet. Les arguments peuvent être cliniques (hypertension d’installation rapide, mal compensée), ou fondés sur des arguments d’imagerie : • un degré de sténose élevé ; toutefois, ce degré est souvent difficile à chiffrer en Doppler en raison de la variabilité des vitesses rapportées comme seuil significatif ; si la valeur de 2,5 m/s semble le meilleur compromis pour certains, elle ne donnerait une valeur prédictive positive
Complications vasculaires de la transplantation rénale : conduite diagnostique de sténose significative que de 18 % dans une population à faible risque [7,16]. En IRM, il y a souvent surestimation du degré de sténose. Le scanner permet une meilleure approche morphologique, à l’exception des plicatures où il peut surestimer le rétrécissement de la lumière vasculaire ; • des signes d’aval, représentés par une augmentation du temps de montée systolique interlobaire en Doppler supérieur à 0,07 s, des courbes temps-intensité en IRM ou en échographie de contraste, montrant un retard à l’obtention du pic vasculaire. La scintigraphie au Captopril, peu pratiquée en France dans cette indication, donnerait de bons résultats, avec de surcroît une forte valeur prédictive de sténose significative sur le plan hémodynamique et de la réponse post-angioplastie [18]. Le traitement repose principalement sur l’angioplastie, associée ou non à la pose de stent (Fig. 10b, c). Seules les
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plicatures sténosantes et serrées relèvent a priori de la chirurgie d’emblée. L’imagerie, et surtout le Doppler, a une place majeure dans le suivi post-dilatation. Deux cas particuliers doivent être distingués : • la sténose d’une artère polaire ou segmentaire obéit à la même conduite diagnostique que pour une artère unique. Cependant, son expression clinique et biologique est fonction du territoire qu’elle perfuse ; souvent, si celui-ci est modeste, une sténose très serrée peut être découverte de fac ¸on fortuite et son traitement par angioplastie peut s’avérer délicat en raison du faible calibre du vaisseau ; • la sténose de l’artère du greffon chez l’enfant : une étude chez des enfants transplantés rénaux a montré qu’une VSM de 2,13 m/s indique une sténose significative de l’artère rénale, avec une corrélation à l’HTA et à la créatininémie [19].
Figure 10. Transplantation rénale réalisée par donneur vivant deux ans auparavant. Apparition d’une hypertension sévère, mal contrôlée, avec signes directs de sténose serrée au Doppler : a : Angio-IRM confirmant la présence d’une sténose assez longue de la partie distale de l’artère, avec un vide de signal étendu (flèche), ne permettant pas une analyse correcte de la morphologie de la sténose ; b : angiographie montrant une sténose longue, sur environ 1 cm ; c : excellent résultat au contrôle après angioplastie et pose de stent.
Figure 11. Patient de 70 ans, greffé depuis 15 ans. Altération progressive de la fonction rénale ; a : le Doppler ne retrouve pas d’anomalie a niveau du greffon, mais des signes directs de sténose au niveau de la portion proximale de l’artère iliaque commune homolatérale ; b : confirmation en angio-IRM de la sténose proximale serrée.
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Figure 12. Patient âgé de 54 ans, ayant bénéficié d’une seconde transplantation deux ans auparavant, et présentant, suite à une biopsie unique pratiquée au cours de la première semaine, une volumineuse fistule artérioveineuse (FAV) située au niveau du pôle inférieur du greffon, ayant doublé de diamètre en trois ans : a, b : FAV de 2 cm de diamètre au pôle inférieur du greffon en mode 2D et Doppler couleur avec artefact périvasculaire débordant, malgré des PF élevées, les limites des structures vasculaires ; c : tracé Doppler obtenu dans la branche segmentaire alimentant la FAV, montrant un débit d’environ 1100 cm3 /min ; d : après injection de Sonovue, mise en évidence d’une hypovascularisation marquée, traduisant un phénomène de vol en aval de la fistule, avec atrophie parenchymateuse modérée (flèches).
La sténose de l’artère iliaque haute, en amont du transplant C’est une pathologie de plus en plus fréquente, liée à l’augmentation de l’athérosclérose chez des patients receveurs de plus en plus âgés [20]. Une sténose de l’artère iliaque en amont de l’anastomose doit toujours être recherchée par principe, par Doppler, IRM ou scanner (Fig. 11). Elle peut avoir la même traduction clinique qu’une sténose de l’artère du greffon, mais peut aussi se manifester par des signes de claudication du membre inférieur sous-jacent [21]. Elle se traite, en général, par angioplastie, qui doit être réalisée avec prudence devant la présence du rein transplanté en aval.
La sténose de la veine rénale Elle est le plus souvent d’origine extrinsèque, liée à une malposition de la veine (torsion) ou à une compression
extrinsèque par un segment artériel ou une collection. Généralement, cette complication n’a pas de retentissement hémodynamique significatif ou de conséquence sur la fonction rénale. Le diagnostic repose par la mise en évidence en Doppler d’une franche accélération du flux veineux (augmentation des vitesses d’un facteur de 3 à 4 et plus), associée à la présence de turbulences en aval (flux rétrogrades et spectre désorganisé) [3,5].
La fistule artérioveineuse C’est une complication vasculaire fréquente, rencontrée chez 1 à 18 % des patients selon les séries. En règle postbiopsique, elle a une évolution favorable dans la majorité des cas et 70 % s’occluent spontanément dans les 18 mois. Elle est généralement asymptomatique ; l’hématurie macro-
Complications vasculaires de la transplantation rénale : conduite diagnostique scopique par effraction cavitaire est exceptionnelle et une insuffisance cardiaque n’est observée qu’en cas d’hyperdébit [3,5]. Le diagnostic (Fig. 12) est la plupart du temps fait par l’échographie, qui peut montrer une image liquidienne intrarénale correspondant au sac fistuleux et surtout le Doppler couleur qui révèle, à basses PRF, un artefact périvasculaire débordant les limites anatomiques des vaisseaux dû aux vibrationx des tissus périfistuleux [4] ; à hautes PRF, l’aspect dit en « mosaïque » et l’aliasing étendu traduisent l’augmentation des vitesses secondaires à l’hyperdébit dans l’artère afférente et la veine de drainage. Le Doppler spectral confirme le débit élevé avec des vitesses élevées, des turbulences et un IR bas, en général inférieur à 0,5. L’échographie de contraste peut montrer un vol d’aval, dans le territoire situé en aval de la fistule (Fig. 12d). L’artériographie, devenue aujourd’hui exceptionnelle comme moyen diagnostique, peut être indiquée lorsqu’un traitement par embolisation sélective endovasculaire est nécessaire dans les cas de débit élevé avec retentissement sur la fonction rénale et parfois associés à une HTA, ou dans le cas de FAV compliquée d’une hématurie massive et durable [5].
Le faux anévrisme intrarénal Complication rare de la biopsie (< 1 %) et conséquence d’une plaie artérielle traumatique, le faux anévrisme correspond à une poche néoformée non endothélialisée, alimentée et drainée par l’artère traumatisée avec laquelle elle communique par un court chenal [3,5]. Le faux anévrisme a l’aspect d’une image arrondie pseudokystique, le plus souvent intraparenchymateuse, présentant un caractère battant et pulsatile en échographie. Le Doppler couleur montre un flux tourbillonnaire dans la poche anévrismale. L’enregistrement au niveau de l’orifice de communication montre un tracé en « va-et-vient » très caractéristique [4]. Les indications de l’embolisation sont fonction de la taille, de la situation (affleurant parfois la capsule) et du retentissement sur la fonction rénale et la tension artérielle.
L’anévrisme pédiculaire Complication très rare (< 1 %), il peut être dû à un défaut technique au niveau de l’anastomose artérielle, à un ané-
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Figure 13. Patient âgé de 60 ans transplanté rénal en 1992, chez qui a été découvert, lors d’une échographie de contrôle, un anévrisme situé au niveau de la partie proximale de l’artère rénale du greffon. Reformation vasculaire en rendu de volume montrant parfaitement la topographie de l’anévrisme volumineux qui intéresse la partie proximale de l’artère du greffon, qui est anastomosée sur la face antérieure de l’artère iliaque externe à son origine.
vrisme « mycotique », plus tard à une cause dégénérative. En cas de diamètre élevé, le risque de rupture devient important et peut justifier une réparation chirurgicale [3,5]. Le diagnostic en Doppler couleur est évoqué devant la perte de parallélisme de l’artère rénale proximale, associée à la présence d’un flux tourbillonnaire turbulent. Un angioscanner ou une angio-IRM sont nécessaires pour confirmer le diagnostic et pour fournir une description anatomique précise avant d’envisager un éventuel traitement chirurgical (Fig. 13).
Conclusion La mise en évidence d’une complication vasculaire est relativement aisée avec l’échographie et le Doppler. L’échographie de contraste devient un moyen majeur de diagnostic, notamment en urgence.
Figure 14. Tracé Doppler : a : artère polaire supérieure ; b : artère polaire inférieure ; c : artères interlobaires situées en aval de l’artère polaire supérieure.
356 Les pathologies responsables d’une dysfonction du greffon diffèrent selon que l’on est dans la période posttransplantation ou à distance ; dans les deux cas, le radiologue devra guider la conduite diagnostique et orienter vers un geste de radiologie interventionnelle si nécessaire. POINTS À RETENIR Les complications vasculaires post-transplantation rénale sont fréquentes, avec une prévalence de 3 à 15 % selon les séries. Le profil de la transplantation rénale s’est modifié au cours des dix dernières années : la disponibilité plus faible de reins d’origine cadavérique a entraîné une augmentation progressive des prélèvements issus de donneurs vivants. Dans les deux cas, l’âge maximal du donneur comme celui du receveur s’est accru, entraînant l’apparition plus fréquente de complications, en particulier, d’origine vasculaire. L’échographie, en règle couplée au Doppler, reste la base de la surveillance, dès les premières heures après la transplantation rénale. L’échographie de contraste prend une place grandissante dans de nombreux cas où l’évaluation fine de la perfusion rénale est nécessaire, notamment en urgence. En fonction de leur moment d’apparition après la transplantation, on distingue : • les complications vasculaires précoces ou aiguës : thrombose de l’artère rénale, thrombose de la veine rénale, lésions peropératoires du pédicule iliaque artériel ou veineux compromettant la vascularisation du greffon, nécrose corticale ; • les complications vasculaires tardives : sténose de l’artère du greffon, FAV, anévrisme et faux anévrisme, lésions de l’artère iliaque en amont du site d’anastomose. Pour la sténose de l’artère du greffon, le problème principal reste l’affirmation de son imputabilité dans l’apparition d’une hypertension ou d’une dégradation de la fonction rénale ; les arguments sont cliniques (hypertension d’installation rapide, mal compensée), s’appuyant sur des arguments d’imagerie fonctionnelle. Le traitement repose principalement sur l’angioplastie, associée ou non à la pose de stent. Seules les plicatures sténosantes et serrées relèvent a priori de la chirurgie d’emblée.
Cas clinique Cette patiente âgée de 36 ans, ayant bénéficié d’une transplantation rénale (deux artères, une veine) six mois auparavant, présente une hypertension difficile à équilibrer par le traitement médical. La clairance de la créatinine est normale (62 ml/mn).
A. Ardelean et al. Vous avez ci-dessous (Fig. 14) trois tracés Doppler au niveau de : l’artère polaire supérieure (a), l’artère polaire inférieure (b), des artères interlobaires situées en aval de l’artère polaire supérieure (c).
Questions 1. Que déduisez-vous de ces trois tracés Doppler ? 2. Quel examen complémentaire demandez-vous ? 3. Que proposez-vous comme thérapeutique ?
Réponses 1. Le tracé obtenu au niveau de l’artère polaire supérieure (Fig. 14a) montre une augmentation des vitesses systoliques maximales, qui sont supérieures à 2,5 m/sec, une dispersion du spectre, ce qui traduit une sténose a priori significative. Le tracé obtenu au niveau de l’artère polaire inférieure (Fig. 14b) est par comparaison normal, avec des vitesses systoliques maximales d’environ 1,5 m/sec. Les tracés obtenus en aval de la sténose de l’artère polaire supérieure (Fig. 14c) ne montrent pas d’amortissement franc, avec un temps de montée systolique de 7 m/sec, à la limite supérieure de la normale. 2. Dans ce cas, un complément par scanographie est le meilleur examen pour étudier de fac ¸on précise la morphologie de l’axe iliaque et des deux artères polaires. Celui-ci a confirmé la sténose proximale, fusiforme de l’artère polaire supérieure. 3. Une surveillance clinicobiologique régulière est instaurée ; en cas de résistance au traitement médical antihypertenseur, un nouveau contrôle Doppler doit être pratiqué pour rechercher un amortissement intrarénal franc, avec éventuellement une IRM fonctionnelle. Si cette recherche est positive, une angioplastie prudente sera réalisée. L’altération de la fonction rénale n’est pas ici un bon élément de surveillance, car le territoire relevant de l’artère polaire inférieure reste normalement perfusé.
Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
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