Éditorial
Kinesither Rev 2008;(75):1
Connaissez-vous des Robinson Crusoé ?
R
égulièrement, nous recevons des articles présentant des « concepts » ou des « idées nouvelles » pour soigner différentes pathologies. Le plus souvent, l’auteur expose diverses explications pour démontrer comment agit son traitement ou sa « méthode ». Jusque-là, me direz-vous, rien de surprenant pour une revue professionnelle. Le problème est que, le plus souvent, l’auteur se base sur des données personnelles ou de la bibliographie très limitée. La sélection des informations pour argumenter son travail est orientée fortement vers les informations convergentes avec ses idées. Les personnes ne pensant pas la même chose que le « concepteur » sont peu considérées. Occasionnellement, l’auteur oppose des arguments. Kinésithérapie la revue étant une revue « relue par ses pairs », nos relecteurs sont parfois très exigeants envers ses auteurs et demandent un peu plus d’arguments, de l’ouverture et de l’objectivité. Certains auteurs se placent d’eux-mêmes en situation de handicap avec une constante incapacité à avoir une lecture positive de ces propositions qui sont pourtant si utiles et si enrichissantes. Ils finissent par croire qu’ils sont incompris voire « censurés par la profession ». Le rédacteur en chef devient le « casque bleu » entre l’auteur et le relecteur pour essayer de faire évoluer l’article. En bas de la première page de chaque article, vous verrez l’annotation « article reçu le », « accepté le » et parfois lorsque de grosses modifications sont demandées « modifié le ». C’est le gage que ces textes ont été analysés et le plus souvent améliorés autant que l’auteur pouvait le faire. Quelle autre revue de la profession pratique cette rigueur ? Nous refusons chaque année une vingtaine de textes, vous ne verrez donc jamais « refusé le » !
Au final quand le texte est publié, ces auteurs se précipitent pour relire « leur travail » et ignorent le plus souvent le reste du contenu de la revue. Vous comprendrez la question posée en début d’éditorial : « connaissez-vous des Robinson Crusoé ? ». En tant que lecteur, votre lecture devrait être similaire en cherchant à lire des articles qui ne sont pas toujours dans « votre courant de pensée ». L’analyse des arguments les plus objectifs défendus dans l’article devrait vous permettre de faire évoluer votre réflexion plutôt que de chercher à tout prix les éléments qui confortent votre représentation imparfaite de la réalité. Car comme diraient les adeptes de la « programmation neuro-linguistique » : « la carte n’est pas le territoire », et notre représentation du monde s’est construite avec les événements de notre histoire, ce n’est pas la réalité. Tous ces éléments ne doivent pas brider la créativité des professionnels qui développent un savoir-faire construit au contact du patient. Mais nous devons rester objectifs dans l’analyse des faits en les décrivant le mieux possible et rester humbles dans l’interprétation des résultats de notre travail en pensant que l’explication donnée peut être erronée. Je termine là mon éditorial, car vous finiriez par croire que je finirais par avoir raison… Pierre Trudelle Rédacteur en chef de Kinésithérapie, la revue
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