De la répercussion sur l’arbre vasculaire artériel carotidien du traitement hormonal substitutif

De la répercussion sur l’arbre vasculaire artériel carotidien du traitement hormonal substitutif

Presse Med 2004; 33: 439-44 A © 2004, Masson, Paris C T U A L I T É S Réflexion Christel Mariën Clinique St Pierre à Ottignies, service du Dr Vi...

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Presse Med 2004; 33: 439-44

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© 2004, Masson, Paris

C T U A L I T É S

Réflexion

Christel Mariën

Clinique St Pierre à Ottignies, service du Dr Vincent Malvaux , rue de Bruxelles, 282, B 1480 Tubize, Belgique Tél. : 322/355 53 18 christelmarien@ hotmail.com

De la répercussion sur l’arbre vasculaire artériel carotidien du traitement hormonal substitutif

Summary

Résumé

Impact of HRT on the arterial carotid vascular tree

Traitement hormonal substitutif (THS) et retentissement artériel, le sujet prête à controverse tant il n’est aujourd’hui encore qu’une vaste terre à défricher, un thème où de nouvelles questions surgissent à la croisée des différentes études jusqu’ici réalisées, et où l’incertitude est peut-être une des seules, voire la seule certitude sur laquelle s’accordent les différents spécialistes de la question. Dans ce climat de polémique, il nous a semblé important de souligner 3 points : • les études américaines, aussi fiables soient-elles, ont été réalisées avec des estrogènes conjugués et la généralisation des résultats à d’autres types d’hormones telles que celles prescrites en Europe est peut-être hâtive ; • d’autres facteurs de risque sont à prendre en considération dans l’éventuelle potentialisation du risque induit par tel ou tel traitement ; • les risques vasculaires veineux et artériels ne reposent pas sur les mêmes mécanismes physiopathologiques. Dès lors, le risque accru dans l’un ou l’autre de ces réseaux n’est peut-être pas à fusionner non plus.

Hormone replacement therapy (HRT) and arterial impact, this is a controversial subject since it is still a large field that needs weeding, a theme in which new questions are raised by the cross results of various studies conducted, and in which doubt is perhaps one of, or even the only, certitude that all the various specialists agree on. In this controversial climat, we feel that three important points should be underlined: • the American studies, however reliable they may be, have been conducted with conjugated estrogens and the generalisation to the results of other types of hormones such as those prescribed in Europe is perhaps a little hasty; • other factors of risk should be taken into consideration in the eventual potentialisation of the risk induced by such treatment; • the venous and arterial vascular risks are not based on the same physiopathological mechanisms. Hence the increased risk in one or the other network system should perhaps not be amalgalmated either.

mai 2002 : une patiente ASA I, âgée de 62 ans, perd brutalement la vue de son œil gauche à l’issue d’une intervention chirurgicale orthopédique réalisée sous anesthésie générale. Une semaine plus tard, le diagnostic est aussi brutal que l’incident : il s’agit d’une thrombose de l’artère centrale de la rétine,ayant provoqué une perte de vision unilatérale gauche, irréversible. Le THS (traitement hormonal substitutif) pris depuis plusieurs années par cette patiente est arrêté sur le champ (encadré 1) .

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La patiente s’interroge : le THS pris ® sans incident jusqu’ici, [Kliogest (estradiol + acétate de noréthisté® rone) pendant 6 ans, Livial (tibolone) pendant 2 ans] peut-il être la cause de cet accident ? Le THS représente-t-il un danger ? Quelle que soit l’ethnie considérée, la morbidité et la mortalité cardiovasculaire sont environ 3 fois plus faibles chez la femme en période d’activité ovarienne cyclique que chez l’homme du même âge. Lorsque la fonction ovarienne s’éteint et que,le cas échéant,le taux d’estrogènes se réduit, soit progres-

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Encadré 1

À propos de ce cas clinique

• En ce qui concerne le cas clinique qui a inspiré cette recherche, il nous semble que le traitement hormonal substitutif pris depuis huit ans par cette patiente ne soit mis en cause que par simplification excessive du problème. Francis Bonnet, de l’Hôpital Tenon à Paris, vient de publier récemment40, un excursus sur ce sujet. Selon son étude, le décubitus ventral en cours d’anesthésie serait un facteur prédisposant, tout particulièrement dans le cadre d’une chirurgie rachidienne. • Ces deux éléments étaient présents en ce qui concerne notre patiente. Selon Francis Bonnet, le mécanisme de cette cécité post-anesthésie serait lié dans 90% des cas à une ischémie optique et seulement dans 6% des cas à une occlusion de l’artère centrale de la rétine qui peut être de différentes natures (gazeuse, graisseuse,…). • Il faut préciser que, selon cette étude, plus de 50% des patients victimes de cet incident ont retrouvé la vue après un mois ! Sur les 405 personnes étudiées, seules 4 ont développé un déficit visuel définitif en dehors d’un contexte de chirurgie ophtalmologique ou neurologique, soit 1 cas pour 125234 anesthésies.

Précisions : ASA I de l’ASA (American society of anesthesiology). Indice de gravité en anésthésie lié à l’état du patient, allant de I (bon état général) à IV (état gravissime)

sivement chez les femmes ménopausées naturellement,soit de façon brutale en cas de ménopause chirurgicale, le risque augmente pour 1-14 rejoindre celui des hommes . De nombreuses études ont été réalisées sur les répercussions cardio-vasculaires de l’administration d’hormones de substitution. Protection coronaire ? Risques accrus de thrombose veineuse ? Répercussion lipidique et/ou hémostatique ? Toutes ces questions rivalisent d’intérêt. Mais nous avons choisi de nous préoccuper ici du retentissement induit par les THS et plus précisément par l’estradiol et les dérivés 17-β-estradiol sur l’arbre vasculaire artériel carotidien.

Vous avez dit THS… ? Les traitements hormonaux substitutifs de la ménopause sont-ils dangereux ? Réponse : De quels traitements parlez-vous ? Dangereux de quel point de vue, pour quelle patiente, dans quel contexte personnel,familial,médical et social ? Et si danger il y a, est-il pour cette patiente supérieur ou moindre aux risques inhérents à l’absence de ce traitement ? (voir encadré 2) 440 - La Presse Médicale

Jusqu’en 1998, les publications scientifiques sur cette problématique se prononçaient clairement en faveur d’un effet cardio-vasculaire protecteur des hormones de substi11-13,15,16 . tution En 1998, une étude randomisée en prévention secondaire chez des femmes coronariennes traitées 3 ans per os par 0,625 mg d’estrogènes sulfoconjugués d’origine équine combinés à 2,5mg d’acétate de médroxyprogestérone (MPA) est publiée et se prononce en faveur d’un risque accru d’événements car2,6,17-19 . dio-vasculaires Le doute est semé… Notons qu’une étude prospective (étude de Framingham) s’était déjà prononcée en ce sens en 1985. Depuis, les estrogènes conjugués et le MPA ont été étudiés dans diverses études : Herrington,WHI,… études qui ne sont guère plus encoura2 geantes… . Néanmoins,estrogènes conjugués et MPA sont une formule de THS peu administrée en Europe, d’où l’urgence de réaliser une étude équivalente à l’étude Hers américaine à partir des molécules plus usitées dans nos régions, comme par exemple l’estradiol et les dérivés 17β-estradiol. Par ailleurs,les effets secondaires des

THS tant du point de vue du profil lipidique, de l’hémostase, que des effets souhaités sur la charpente osseuse,etc.sont tributaires non seulement de la molécule choisie, de la dose de celle-ci, de sa combinaison ou non à un dérivé progestatif et du type de ce dérivé, mais aussi de sa voie d’administration et des antécédents personnels et familiaux de la femme, qui recevra le traitement considéré, d’où l’importance de réaliser une étude qui liste correctement ces différents items afin d’écarter les multiples biais pos2,6,13,19,20 . sibles De telles études ne sont,à ce jour,et à ma connaissance, pas encore disponibles mais il existe néanmoins déjà quelques publications notables sur l’un ou l’autre effet ciblé de ces dérivés,notamment relatives à leur réper10,12,14-16,21,22 . cussion carotidienne

Estradiol et dérivés 17-ß-estradiol Répercussion lipidique favorable, action pro-coagulante à court terme (peut-être protectrice à long terme), influence de l’association à un progestatif (variable selon le type de progestatif), impact lié à la voie d’administration, effet influencé par l’horloge biologique de la patiente et par son histoire vasculaire…, l’estradiol offre un bel exemple de l’importance d’une prescription individualisée. Les œstrogènes naturels micronisés et les sels d’estradiol administrés par voie orale entraînent les mêmes modifications lipidiques que les estrogènes de synthèse, à savoir : • une élévation des triglycérides, phospholipides et du HDL cholestérol ; • une diminution du LDL cholestérol et du cholestérol total, ce qui contribue à réduire le risque 17 vasculaire . 21 Selon une étude américaine l’estradiol 2 mg/j conduirait à la diminution du taux de cholestérol total 10 avril 2004 • tome 33 • n°7

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et du LDL cholestérol sans modifier les taux de triglycérides, de HDL cholestérol ni d’apolipoprotéine B ou A1. Quoi qu’il en soit, cela pourrait jouer en faveur d’une relative protection cardio-vasculaire. Par ailleurs, l’estradiol exercerait un effet augmentant le risque vasculaire via une action pro-coagulante par perturbation de l’équilibre des différents facteurs de coagulation,notamment par la diminution de l’antithrombine III et du plasminogène, 13 à 20 µg/j d’éthinylestradiol . Ceci concourrait à augmenter le risque vasculaire, notamment de 23 thrombose veineuse . Certaines études ont soutenu l’idée que ce risque ne serait accru qu’à court terme notamment par activation plaquettaire alors qu’à long terme l’estradiol micronisé serait 24 plutôt protecteur . L’activation plaquettaire est importante à relever dans le cadre de ce travail sachant qu’en matière de thrombose les facteurs pathogènes sont davantage plaquettaires et endothéliaux pour les thromboses artérielles et davantage plasmatiques et cinétiques pour les thromboses 25 veineuses . Toutefois, cet effet reste dépendant de la dose, de la voie d’administration, de l’association ou non à un progestatif,du type de celui-ci et des éventuels autres facteurs de risque pour chaque patiente.Ainsi, l’effet décrit ci-dessus ne se manifeste plus à la dose de 5 µg/j de ce même éthi13 nylestradiol . 26 D’autres études ont montré une diminution du fibrinogène avec le valérate d’estradiol administré pendant un an, sans différence objectivée entre une administration continue ou cyclique. Administrés par voie transdermique, les estrogènes passent directement dans le sang,atteignent leurs cellules cibles avant le foie et ne sont métabolisés que plus tard, ce qui permet la circulation plasmatique d’estra10 avril 2004 • tome 33 • n°7

diol, alors que la prise d’estrogènes de synthèse par Encadré 2 De la nécessité de ne pas se hâter de conclure voie orale conduit, après métabolisation, à la circula• Plusieurs études2,6,17,18,19 ont montré un risque accru d’événements tion d’estrone, biologiquecardio-vasculaires lors de l’administration d’estrogènes sulfoconjugués ment moins active au niveau combinés à l’acétate de médroxyprogestérone. Ces hormones sont peu des récepteurs estrogéadministrées en Europe. L’attribution ou non de semblables effets 17,27 . niques néfastes aux hormones prescrites en Europe (estradiol ou dérivés 17Si, administrés ainsi, ils β-estradiol) nécessite de nouvelles études. influencent moins vite les • Les effets favorables ou défavorables d’une hormone, quelle qu’elle globulines hépatiques (imsoit, sont influencés par nombre de facteurs autres que ceux inhérents portant facteur de risque à l’hormone elle-même : association à telle autre substance, délai et pour la coagulation et l’hyvoie d’administration, posologie, histoire vasculaire, autres facteurs de pertension artérielle),ils semcomorbidité, antécédents personnels et familiaux… blent cependant exercer un • Les thromboses artérielles et veineuses ne reposent pas sur les moindre effet protecteur vasmêmes mécanismes : les premières étant principalement influencées culaire du fait de leur moins par l’agrégation plaquettaire, les secondes étant davantage influengrande répercussion sur le cées par les différents facteurs de la coagulation. Dès lors, l’effet proprofil lipidique. Précisons coagulant éventuel de l’une ou l’autre hormone ne se manifeste pas quand même que l’augmennécessairement sur les deux réseaux. tation des globulines hépaNB. Diverses études10,12,15,16,22 témoignent d’un effet favorable de l’estiques induite par les estrotradiol sur la circulation cérébrale par diminution de l’index de pulsagènes est 200 à 600 fois plus tilité (PI) au niveau notamment de l’artère carotide interne. puissante avec les estrogènes naturels (estrone et estradiol) qu’avec l’éthinylestradiol des pilules contraceptives faiblement le cas d’une association estradiol + dosées,elles-même 60 fois plus puis- progestérone. santes que les estrogènes de substi- Par ailleurs,en gardant à l’esprit que, dans les thromboses artérielles, l’actution administrés à la ménopause. L’administration par gel ou patch tivation plaquettaire joue un rôle d’estrogènes naturels semble n’avoir prépondérant, il est intéressant de 24 noter que certaines études ont que peu d’effet sur la coagulation. Quant à l’effet du progestatif asso- montré un accroissement de l’acticié, il semble que, selon la molécule vation plaquettaire suite à la choisie,le résultat puisse être diamé- consommation de 2 mg d’estradiol tralement opposé (diminution de pendant 12 semaines. L’agrégation l’antithrombine III avec Orgame- des plaquettes s’en trouverait accrue ® tril , versus augmentation de l’anti- et leur volume majoré. Toutefois, ® thrombine III avec Luthényl ,en cette étude publiée en 2002 se dit passant par une absence de modifi- être la première à avoir évalué in ® cation avec Surgestone ou Luté- vivo cet accroissement de l'activa® 13 ran ) . tion plaquettaire en lien avec la prise D’autres facteurs sont affectés : d'estradiol. • une diminution de la protéine S De plus,les estrogènes exercent une a été observée suite à l’ingestion de influence vasculaire non seulement 2 mg d’estradiol micronisé durant par leur retentissement lipidique 23 12 semaines . Cette diminution favorable sur la paroi, ou par leur s’est manifestée qu’il y ait eu ou non retentissement hémostatique plutôt un progestatif associé ; défavorable sur la coagulation, mais • par contre, une diminution de aussi par une action indépendante la protéine C n’a été objectivée, sur les médiateurs de l’inflamma23 dans cette même étude , que dans tion. L’élévation de la protéine C La Presse Médicale - 441

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réactive contribue à accroître le risque vasculaire par déstabilisation de la plaque athérogène. Ceci avait déjà été observé 28 pour les estrogènes conjugués et se retrouve aussi avec l’estradiol 24 micronisé . Un autre effet,lié à la consommation

le risque cardiaque est maximal le matin,cette diminution tensionnelle nocturne et matinale joue indénia29 blement un rôle protecteur . L’effet tensionnel du THS dépend aussi des antécédents vasculaires. Le risque semble maximal au cours de re la 1 année d’administration du traitement, particulièrement lorsque la patiente a certaines prédispositions (antécédents coronaires, Encadré 3 Variations hormonales après ménopause histoire de thromboses naturelle ou chirurgicale veineuses, mutation du facteur V…). S’il n’y a pas • La transition est particulièrement brutale dans le cas des ménod’antécédent vasculaire pauses chirurgicales3,9,14,37 où la chute d’hormones, loin de se dérouler particulier, le risque d’inprogressivement comme dans le cas de la ménopause naturelle, est farctus du myocarde ou subitement maximale. de thrombose veineuse • Les symptômes classiques de flush, sueurs nocturnes, sécheresse semble néanmoins accru (cutanée, muqueuse, oculaire), de fatigue, de palpitations, céphalées, au cours des deux preinsomnies, irritabilité, étourdissement, douleurs musculo-articumières années.Par contre, laires,…19,37 s’en trouvent particulièrement amplifiés37 et le risque vasmême en présence d’anculaire accru9,14. técédents coronaires, le • Il semble que, du point de vue du développement de l’athérosclérisque vasculaire semble rose, le rapport estrogènes/androgènes joue un plus grand rôle que les moindre que celui d’un valeurs absolues du taux de ces hormones. Le déficit androgénique, e 3,7 placebo au cours des 4 et autre facteur de risque cardio-vasculaire important , semble parfois e 30 5 années de traitement . se réaliser avec une intensité proportionnellement supérieure à la Quant au risque de prechute des estrogènes et, une fois encore, de façon plus instantanée mier infarctus ou de predans le cas de la ménopause chirurgicale3. mier AVC non fatal,un lien • L’association d’androgènes reste cependant d’un usage limité en raipourrait avoir été établi son de la crainte inspirée par le risque d’effets secondaires de masculiavec le THS dans le cas nisation ou d’augmentation du risque vasculaire38. En effet, le bénéd’une femme ménopaufice cardio-vasculaire des androgènes, s’il existe à doses physiologiques, sée, hypertendue, porn’existe plus à doses élevées et reste un thème controversé3,38. teuse de la variante 20210 G  A de la prothrombine mais il faudrait une 31 d’hormones de substitution et étudié grande étude pour le confirmer . avec le 17-β-estradiol transdermique combiné à l’acétate de noréthisté- Estradiol, 17-ß-estradiol et 29 rone,concerne la tension artérielle . arbre carotidien Il semblerait que l’effet dépende de plusieurs facteurs et tout d’abord du RÉPERCUSSION SUR L’INDEX DE rythme nycthéméral de la pression PULSATILITÉ (PI) artérielle (TA). Si celle-ci diminue normalement Différentes formules de prescription pendant la nuit, l’administration de d’estradiol, associé ou non à un proTHS ne change rien. Par contre, en gestatif, ont été étudiées chez des l’absence de diminution nocturne,la femmes ménopausées,sans patholoprise de THS permet le retour du gie particulière connue,ayant pris ce cycle circadien. En se rappelant que traitement pendant 1 an ou plus.Les

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prescriptions ont été corrélées à la diminution de l’index de pulsatilité (PI), témoin de la résistance 32 d’aval , au niveau de l’artère carotide interne et de l’artère uté10,12,15,16,22 . rine Ceci s’est également vérifié pour 10,22 l’artère centrale de la rétine ainsi que pour l’artère cérébrale 12,15,22 , ce qui améliorerait moyenne la vascularisation de certains territoires cérébraux qui pourraient correspondre à ceux identifiés comme potentiellement suspects d’être affectés dans la maladie d’Alzheimer 10,22 . modérée L’artère centrale de la rétine, d’un diamètre de 100 à 200 microns, et l’artère ophtalmique, d’un diamètre de l’ordre du millimètre, sont un reflet anatomique et fonctionnel de la vascularisation artérielle du cerveau. Néanmoins, la diminution du PI de l’artère centrale de la rétine ne s’observe que de façon non significative au niveau de l’artère ophtalmique. Dès lors, il faut être prudent en matière de généralisation trop hâtive et se rendre à l’évidence de la nécessité de réaliser de nouvelles études de ce type portant sur un plus grand 10 nombre de patientes . 22 D’après certaines études , l’administration concomitante d’androgènes n’annulerait pas ce bénéfice même s’il le réduisait quelque peu. 16 Il semblerait aussi que cet effet s’amplifie avec le temps et que sur le PI l’impact serait d’autant plus important que le PI est élevé avant l’initialisation du traitement.Le bénéfice serait donc maximal pour les personnes soumises au risque le 10 plus élevé . 15 Par ailleurs , l’index de pulsatilité réaugmenterait dès l’arrêt du traitement, continuerait de s’élever avec le temps et cette augmentation serait nettement significative après 6 mois d’interruption de la substitution hormonale. Précisons que l’ad-

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jonction d’un progestatif aux dérivés d’estradiol (E2) étudiés vise essentiellement à protéger l’endomètre d’une prolifération hyperplasique voire carcinomateuse sous l’action 27,35 . isolée d’estradiol Précisons aussi que cet effet bénéfique sur la circulation cérébrale s’est également vérifié avec les estro34 gènes conjugués , de même qu’avec un estrogène sélectif tel que 4,33 dont l’effet semblele raloxifène rait encore plus rapidement supérieur (12 mois versus 18 mois).

RÉPERCUSSION SUR L’ÉPAISSEUR DE LA PAROI CAROTIDIENNE

Première cause de mortalité dans les pays industrialisés, la maladie coronaire résulte d’un processus athéromateux évolutif. Le premier marqueur pourrait en être le paramètre échographique de l’épaisseur intimale et médiale de la paroi caroti14 dienne qui augmente suite à la chute hormonale de la ménopause et dont la diminution pourrait être un des bénéfices liés à l’impact favorable des estrogènes de substitution sur la composition lipidique du 1,11,14,36 (encadré 3). plasma Il faut savoir que,chez un patient âgé, même sans antécédent vasculaire, le risque aussi bien d’infarctus du myocarde que d’accident vasculaire cérébral s’élève en fonction de l’accroissement du paramètre échographique que constitue l’épaisseur intimomédiale de la paroi carotidienne.Avec l’âge, la composition élastique de la média se réduit. La paroi en devient plus rigide,ce qui accroît les forces de cisaillement et favorise le processus athéromateux. Les hormones de substitution pourraient favoriser la composante collagénique de la paroi et améliorer la santé vasculaire.Toutefois, il faut distinguer au sein de cette paroi l’épaisseur intimale et l’épaisseur médiale. L’intima est la plus épaisse en l’absence d’hormone de substitution, ce qui n’est

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pas le cas sous substitution hormonale ;elle est plus épaisse dans le cas de l’implant estrogénique que dans celui de l’ingestion orale. Quant à la média, si elle aussi est plus épaisse dans le cas de l’implant que dans le cas de l’administration per os, il faut savoir qu’elle est la plus fine en l’absence d’hormone de substitution. Le rapport intima/média est donc maximal en l’absence de THS alors qu’il s’avère réduit en des proportions comparables en cas d’administration orale ou parentérale d’estrogènes. La progestérone éventuellement associée ne semble pas affecter cette 11 répercussion . Toutefois, dans l’étude réalisée à ce sujet, les estrogènes utilisés étaient des estrogènes conjugués. L’extension de cet effet à d’autres types d’estrogènes nécessite de nouvelles études. Néanmoins gardons bien à l’esprit que ce paramètre, s’il se confirmait dans de nouvelles études, serait particulièrement utile à connaître puisqu’il s’élève avant que ne s’installe la 1 plaque athéromateuse.

Estrogènes et système visuel Si les pilules contraceptives sont fréquemment associées à des complications occulaires, il semble que les hormones de substitution prescrites à la ménopause exercent un tout autre effet. 39 D’après certaines études , les estrogènes amélioreraient la transmission optique par diminution du temps de latence et augmentation de l’amplitude des potentiels évoqués visuels. Ceci a été observé chez des femmes sans pathologie significative auxquelles un 19-norstéroïde tel que la tibolone a été 39 administré pendant 3 mois . Par ailleurs, les associations estroprogestatives ont aussi été étudiées mais,de ce point de vue,il est important de ne pas faire un amalgame de

tout ce qui peut se lire à leur sujet dans la littérature scientifique. Les effets estroprogestatifs sont en effet fondamentalement différents lorsqu’ils sont administrés en tant que contraceptifs oraux ou dans le cadre d’une substitution hormonale postménopausique.Dans le premier cas, les complications oculaires sont fréquentes, les plus graves étant représentées par les complications vasculaires telles que les occlusions veineuses ou artérielles au niveau de la rétine ainsi que par les neuropathies optiques ischémiques aiguës. Le traitement hormonal substitutif serait quant à lui plutôt vasoprotecteur à l’égard de la rétine, que ce soit par impact lipidique, par diminution de l’agrégation plaquettaire (controversée), par diminution de la viscosité plasmatique et du taux de fibrinogène, ou encore par d’autres mécanismes comme par exemple une action favorable sur les parois artérielles. Les estroprogestatifs contribueraient aussi à réduire la tendance à la sécheresse oculaire liée à la carence estrogénique, ainsi qu’à réduire le risque d’évolution vers une cataracte nucléaire sénile et à prévenir le risque de dégénérescence maculaire liée à l’âge. N’omettons pas cependant que la fréquence des cataractes sous-capsulaires postérieures pourrait,quant à elle,être plus importante. Que faire en cas d’incident ophtalmologique ? Alors que tout antécédent vasculaire au niveau de la rétine constitue une contre-indication à la contraception orale, il n’en va pas de même pour les hormones de substitution. Les bénéfices souhaités devraient motiver la recherche d’une meilleure adaptation du traitement à l’histoire clinique de la patiente en modifiant par exemple la dose, la voie d’administration, ou encore le type de progestatif associé, plutôt que d’être annihilés par un arrêt pur et simple 20 du traitement .

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Réflexion

Conclusion Pour conclure et répondre à la question relative à la répercussion sur l’arbre carotidien des hormones de type estradiol et dérivés 17-β-estradiol, il nous faut d’abord reconnaître que ces estrogènes agissent sur le réseau vasculaire par différents mécanismes. Leur impact sur la composition lipidique du plasma semble devenir incontestablement favorable mais ce phénomène ne représente qu’une facette de la protection vasculaire.

Les estrogènes semblent exercer un tout autre effet par une action plutôt pro-coagulante mais,dans le sujet étudié, ce facteur peut être légèrement atténué par le fait que les facteurs plasmatiques sont davantage impliqués dans les thromboses veineuses que dans les thromboses artérielles. Quant à l’impact ciblé des estrogènes sur l’artère carotidienne, il semble qu’ils induisent : primo, une diminution de son index de pulsatilité,reflet de la résistance d’aval ; secundo, un moindre épaississement de sa paroi, marqueur princeps du risque cardio-

vasculaire ;tertio,en ce qui concerne les ramifications à destination oculaire, une vasoprotection rétinienne. La vascularisation cérébrale s’en trouverait améliorée de même que son fonctionnement neurologique,par un effet favorable non seulement sur la circulation mais également sur la neurotransmission par action sur le métabolisme glutamatergique. Quoi qu’il en soit,ce sujet,aussi passionnant que controversé, nécessite de nouvelles études pour corroborer ou annihiler les corrélations ayant pu être établies jusqu’ici. ■

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10 avril 2004 • tome 33 • n°7