Des bactéries bien cachées…

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publi-infos ABBOTT DIABETES CARE Des bactéries bien cachées… Mots clés infections nosocomiales – bandelettes de glycémie – contamination bactérienne...

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Des bactéries bien cachées… Mots clés

infections nosocomiales – bandelettes de glycémie – contamination bactérienne – conditionnement.

La nouvelle définition des infections associées aux soins (IAS) élargit la notion d’infection nosocomiale aux actes de soins, de prévention et de diagnostic réalisés non seulement à l’hôpital mais également plus largement dans les lieux de ces actes (EHPAD, HAD, dispensaires…)1. La troisième enquête nationale de prévalence des infections nosocomiales de 2006 de l’InVS2 révèle : - qu’un patient hospitalisé sur 20 est infecté (taux de prévalence de 4,97 %) ; - que les patients infectés sont plus nombreux dans les services de réanimation où le taux de prévalence des patients infectés passe de 4,97 % en moyenne à 22,40 % ; - que les infections nosocomiales (IN) sont à l’origine de 9 000 décès par an, dont 4 200 patients pour lesquels le pronostic vital n’était pas engagé à leur entrée à l’hôpital. Cela représente 80 décès chaque semaine directement imputables aux IN. La survenue d’une IAS est toujours précédée par une étape de transmission d’un microorganisme à partir d’un réservoir humain, animal ou environnemental. Les patients aux défenses immunitaires amoindries peuvent ainsi être victimes d’une transmission de bactéries par l’utilisation inappropriée d’instruments et/ou de dispositifs médicaux à usage unique ou multiple. À ce sujet, les bandelettes-tests de mesure capillaire du taux de glucose (BTG), notamment quand elles sont présentées sans conditionnement individuel (flacon de 50 unités) peuventelles faire l’objet d’une contamination bactérienne lors de leur manipulation ? La réponse à cette question a été publiée récemment dans une revue américaine3. Afin de préciser plusieurs aspects de cette étude, le Docteur Jean-Winoc Decousser répond à nos questions.

Équipe opérationnelle d’hygiène hospitalière, AP-HP, Hôpital Universitaire AntoineBéclère, Clamart. De gauche à droite : Mme Myriam Magneney, Dr Jean-Winoc Decousser, Mme Claudine Duport, Dr Anne-Sylvie Dumenil.

Le Docteur Jean-Winoc Decousser répond à nos questions RFL Si j’en crois mes références bibliographiques, une étude a été conduite par le laboratoire de bactériologie et d’hygiène de l’hôpital Antoine-Béclère (Clamart, Assistance Publique – Hôpitaux de Paris) afin d’étudier la charge bactérienne des BTG présentées en flacon de bandelettes « en vrac ». Pourquoi une telle étude ? JWD Les établissements de soins doivent mettre en place une politique de prévention et/ou de lutte contre les infections nosocomiales (IN). Ceci passe par l’identification des voies de transmissions des microorganismes entre les patients et l’instauration ensuite de mesures visant à casser ces chaînes de transmission. Ce nouveau conditionnement de BTG était associé à un risque potentiel de transmission de germes qu’il fallait objectiver, comprendre et prévenir.

RFL Rappelez-nous la définition d’une infection nosocomiale. JWD C’est une infection acquise au cours de l’hospitalisation, ni présente ni en incubation à l’admission. Depuis 2007, la sémantique s’est enrichie de la notion d’infections associées à l’environnement des soins (IAES) et à celle d’infections associées aux actes de soins (IAAS). Les critères d’éligibilité d’une IAS reposent ainsi sur la délivrance d’un acte de soins dans son sens le plus large. Différentes études ont démontré l’efficience d’une lutte contre ce type d’infections tant du point de vue économique (en millions d’euros économisés) que d’un point de vue éthique (des milliers de vies sauvées/an). Par ailleurs, chaque soignant doit être interpellé par cette aberration que de rendre malade un patient que l’on cherche à soigner.

REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUILLET-AOÛT 2012 - N° 444 //

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Tableau I – Contamination prouvée des BTG conditionnées en flacon. % de cultures positives

Cultures avec flore cutanée

Cultures avec flore intestinale

Réanimation chirurgicale/36

16,6

13,9 %

2,7 %

Réanimation néonatale/78

26,9

26,9 %

0%

30

25 %

5%

35,7

35,7 %

0%

25,7 %

24,3 %

1,4 %

Service/Nbr BTG

Hépato-gastroentérologie/20 Gériatrie aiguë/14 Total

Résultats a. Les bandelettes provenant de flacons neufs n’ont pas révélé de contamination bactérienne initiale, ni d’activité antibactérienne intrinsèque. b. À l’inverse, un quart (25,7 %) des bandelettes provenant de flacons ouverts et utilisés « dans la vraie vie » ont montré une contamination bactérienne. Parmi ces bandelettes contaminées, la charge bactérienne pouvait varier de 10 à 280 bactéries par bandelette et était constituée de bactéries d’origine cutanées (staphylocoques) et intestinales (entérocoques). c. Ni un taux de remplissage de moins de 50 %, ni une utilisation multi-patient n’ont été associés statistiquement à une contamination bactérienne des BTG (respectivement, p = 0,73 et p = 0,31). d. Les recherches spécifiques de bactéries multirésistantes (BMR) (entérobactérie productrice d’une bêta-lactamase à spectre élargi ou un Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline) ou de Clostridium difficile sont restées stériles.

RFL Quel est le rapport avec les BTG ? JWD En 2010, un de nos correspondants de l’équipe opérationnelle d’hygiène (EOH) a déclenché auprès de notre service une alerte quant à la conduite à tenir face à l’arrivée dans les services d’une nouvelle présentation des bandelettes (x 50) pour détermination de la glycémie capillaire. RFL Qu’avez-vous décidé ? JWD Notre équipe a effectué, bien sûr, une analyse de la littérature qui a montré que les lecteurs de glycémie étaient en effet mis en cause lors de la transmission de virus (VHB et VHC), de parasites (P. falciparum), de bactéries (Acinetobacter sp). En revanche, la bibliographie est vierge de données ou de recom-

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Discussion Plusieurs points méritent d’être relevés 1. Le rôle potentiel de la manipulation des bandelettes de glycémie en elles-mêmes dans la transmission de micro-organismes n’avait pas été encore été exploré. 2. Cette étude montre que ces bandelettes peuvent être responsables de la transmission de microorganismes entre patients : 25,7 % de celles-ci sont contaminées par un nombre parfois important de bactéries. Les BTG, lorsqu’elles sont conditionnées en vrac et partagées, entre plusieurs patients, peuvent donc potentiellement être à l’origine de transmissions croisées. 3. La recommandation de l’utilisation de matériel dédié pour les patients en précautions renforcées (isolement) s’en trouve renforcée. 4. Une désinfection doit toujours être effectuée entre deux utilisations d’un matériel à usage multiple pour deux patients différents, quel que soit le statut de ce patient (isolement ou non). Aucune recommandation spécifique n’existe quant à l’utilisation des BTG, en particulier lorsqu’elles

mandations quant au rôle éventuel des BTG elles-mêmes sur la contamination bactérienne. RFL Que vous a inspiré ce constat désertique ? JWD Nous devions répondre à une question simple : les bandelettes peuvent-elles constituer un réservoir pour les bactéries et donc jouer un rôle dans leur transmission ? Pour cela nous avons conduit une étude bactériologique prospective dans plusieurs services de notre établissement. Cette étude a duré six semaines consécutives et a concerné quatre services distincts : l’unité de réanimation chirurgicale, l’unité de réanimation néonatale, le service d’hépatologie-gastroentérologie ainsi que le service de gériatrie aiguë.

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sont conditionnées dans des flacons multi usages. Néanmoins, l’ouverture étroite du flacon est vraisemblablement à l’origine de contaminations successives des bandelettes par les doigts des professionnels de santé, et réciproquement. 5. La contamination bactérienne des BTG était d’origine manuelle ou intestinale. Bien qu’aucune BMR n’ait été identifiée sur les bandelettes, ce mode de contamination croisée potentiel a ainsi été démontré. 6. Une utilisation des flacons multi usages à patient unique systématique et l’élimination des bandelettes non utilisées vont à l’encontre de l’intérêt économique. L’absence de lien statistique entre les taux de remplissage et les quantités de bactéries incite à penser que la contamination interne des flacons n’est pas une fatalité et qu’elle peut être probablement retardée, limitée ou évitée en imposant des règles strictes d’hygiène des mains avant chaque manipulation. L’observance stricte de l’hygiène des mains juste avant toute ouverture du flacon étant difficilement évaluable, il semble légitime d’éliminer les flacons de BTG ouverts après la sortie d’un patient en isolement. 7. Cette étude devrait inciter les fabricants à proposer des DM-DIV adaptés aux bonnes pratiques et, notamment pour les BTG, soit des distributeurs pouvant délivrer des bandelettes individuelles jetables sans contact direct de cellesci avec les mains des soignants (type distributeur de « sucrette »), soit des conditionnements ditionnements individuels.

RFL Passons sur les détails du protocole et venons-en aux résultats. JWD (Deux clics sur son ordinateur suffisent à obtenir le précieux document ; il me tend la feuille) Les voici (voir tableau I). ■■ Compte rendu rédigé par la rédaction de la RFL.

Notes 1. Ministère de la Santé et des Sports, Définitions des infections associées aux soins, mai 2007 http://nosobase. chu-lyon.fr/recommandations/defIN_vcourte.pdf. 2. Enquête nationale de prévalence des infections nosocomiales, InVS, juin 2006. 3. Vanhaeren S, Duport C, Magneney M, et al. Bacterial contamination of glucose test strips: not to be neglected. Am J Infect Control