Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2015) 7, 146-147 ISSN 1877-1203
Revue des
Maladies
Respiratoires Organe Officiel de la Société de Pneumologie de Langue Française
Actualités Mission CPLF 2015
Disponible en ligne sur
Congrès de Pneumologie de Langue Française Lille, 31 janvier - 1er février 2015 Fil rouge : Interactions poumon et autres organes Fil orange : Asthme Numéro coordonné par O. Sanchez
www.sciencedirect.com 85189
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel du laboratoire
www.splf.org
Mai Vol. 7 2015
N°
2
PNEUMOPATHIES INTERSTITIELLES
Effet de l’emphysème sur la réduction du déclin de la CVF avec le nintédanib dans les études INPULSIS Does emphysema influence the effect of nintedanib in IPF? Article rédigé par C. Goyard*, d’après la communication de V. Cottin1 1Centre national de référence des maladies pulmonaires rares, Service de pneumologie, Hospices civils de Lyon, Hôpital Louis-Pradel, 28, rue du Doyen-Lépine, 69000 Lyon, France
MOTS CLÉS
Fibrose pulmonaire idiopathique ; Emphysème ; Nintédanib ; Essai randomisé contrôlé ; Syndrome emphysème-fibrose
kEyWORDS
Emphysema; Idiopathic pulmonary fibrosis; Nintedanib; Randomized controlled trial; Combined pulmonary fibrosis and emphysema syndrome
Résumé Une analyse post-hoc en sous-groupes a été réalisée à partir des données groupées des deux essais INPULSIS afin de savoir s’il y avait un impact de l’emphysème sur la réduction du déclin de la capacité vitale forcée (CVF) avec le nintédanib. Les patients étaient divisés en deux groupes en fonction de la présence ou non d’emphysème déterminée à l’inclusion par une lecture qualitative centralisée de la tomodensitométrie thoracique haute résolution. Au total, 420 patients présentaient de l’emphysème et 641 en étaient indemnes. Il n’y avait pas de différence significative d’efficacité du nintédanib sur la réduction du déclin de la CVF selon la présence ou non d’emphysème à l’inclusion : différence de 102 ml/an (IC 95 % : 43,2-160,9) pour les patients avec emphysème contre 115,4 ml/an (IC 95 % : 73,8-157,1) pour les patients sans emphysème (p = 0,5199). Le nintédanib ralentit la progression de la maladie en réduisant le déclin de la fonction respiratoire chez les patients présentant une fibrose pulmonaire idiopathique, indépendamment de la présence d’emphysème à l’inclusion. © 2015 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract A post-hoc subgroup analysis was conducted on pooled data from the two INPULSIS trials to evaluate the impact of emphysema on the reduction by nintedanib of FVC decline over one year in patients with ideopathic pulmonary fibrosis. The patients were separated into two groups according to the presence or absence of emphysema, determined at enrolement by a centralized analysis of high-resolution computerised tomography of the chest. In total, 420 patients had some emphysema and 641 did not. There was no significant difference in the reduction of FVC decline with nintedanib according to the presence of emphysema at baseline: the difference was 102 ml/year (IC 95 % : 43.2-160.9) in patients with emphysema, vs 115.4 ml/year (IC 95 % : 73.8-157.1) in patients without emphysema (p = 0.5199). Nintedanib slows disease progression by reducing the decline in lung function in patients with idiopathic pulmonary fibrosis, independently of the presence of emphysema at baseline. © 2015 SPLF. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
*Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (C. Goyard). © 2015 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Effet de l’emphysème sur la réduction du déclin de la CVF avec le nintédanib dans les études INPULSIS
Introduction Les études INPULSIS [1] sont deux essais similaires de phase III, randomisés, contrôlés contre placebo, qui comparaient le nintédanib (150 mg x 2/j) au placebo, avec une randomisation de 3 pour 2. Le critère d’évaluation principal était la variation du déclin annualisé de la capacité vitale forcée (CVF) en ml/ an, et les deux critères d’évaluation secondaires étaient le temps jusqu’à la première exacerbation et la variation du questionnaire de Saint-Georges sur les 52 semaines. Les patients de plus de 40 ans avec un diagnostic de fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) posé depuis moins de 5 ans, sur un scanner thoracique avec un aspect de pneumopathie interstitielle commune (PIC) et/ou une biopsie pulmonaire, étaient inclus lorsque la CV était supérieure à 50 % de la théorique et la DLCO comprise entre 30 et 79 % de la théorique. Un rapport VEMS/CVF < 70 % entraînait l’exclusion de l’étude. Les données des deux études ont été groupées. Le déclin de la CVF était statistiquement réduit dans le groupe nintédanib (-114 ml/an pour le groupe traité contre -223 ml/an dans le groupe placebo ; p < 0,001). Le délai écoulé jusqu’à la première exacerbation observée par l’investigateur n’était pas statistiquement modifié dans l’analyse groupée, et la variation du score de Saint-Georges entre le début de l’étude et la fin du suivi de 52 semaines n’était pas modifiée dans l’une des études ; alors qu’elle était positivement améliorée sous nintédanib dans l’autre.
Objectif L’objectif de ce travail était d’évaluer dans une analyse complémentaire post hoc en sous-groupes s’il y avait un impact de l’emphysème sur l’effet thérapeutique de nintédanib. Les données groupées des deux études étaient réunies. La présence d’emphysème était évaluée à l’inclusion par l’analyse qualitative de la tomodensitométrie thoracique haute résolution revue de manière centralisée par un radiologue unique. Les patients étaient séparés en deux groupes selon qu’ils présentaient ou non de l’emphysème associé à la fibrose pulmonaire idiopathique. Les critères d’évaluation principaux et secondaires étaient les mêmes que dans les études INPULSIS.
Résultats Au total, 420 patients présentaient de l’emphysème à l’inclusion (254 dans le groupe nintédanib et 166 dans le groupe placebo), et 641 patients n’en présentaient pas (384 dans le groupe nintédanib et 257 dans le groupe placebo). Il n’y avait pas de différence démographique entre les patients, qu’ils aient ou non de l’emphysème : l’âge moyen était de 65,8 ans contre 67,4 ans, il s’agissait majoritairement d’hommes (en moyenne 89,0 % vs 72,9 %). En revanche, la proportion de fumeurs était plus élevée chez les patients présentant de l’emphysème : 90 % vs 60 %. La présentation fonctionnelle à l’inclusion était légèrement différente : la CVF était de 82,5 % dans le groupe emphysème contre 77,7 % dans le groupe sans emphysème. L’effet thérapeutique était identique et statistiquement significatif que les patients aient ou
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non de l’emphysème (interaction entre l’effet thérapeutique et la variable emphysème, p = 0,5199) : le taux annuel ajusté de déclin de la CVF était de 105,1 ml/an avec le nintédanib et de 207,2 ml/an avec le placebo (différence de 102 ml/an (IC 95 % : 43,2-160,9) ) pour les patients avec emphysème contre 118,8 ml/an avec le nintédanib et 243,2 ml/an avec le placebo (différence de 115,4 ml/an (IC 95 % : 73,8-157,1)) pour les patients sans emphysème à l’inclusion. Concernant le délai jusqu’à la première exacerbation, les résultats étaient superposables aux essais initiaux (différence significative dans l’un et non dans l’autre), sans différence significative en fonction de la présence ou non d’emphysème. Il n’y a donc pas d’interaction de l’emphysème sur la proportion des patients faisant une exacerbation. Il n’y avait pas de différence de score de Saint-Georges selon que les patients aient ou non de l’emphysème. Il n’y a donc pas d’interaction de la présence de l’emphysème sur la qualité de vie. Enfin, les données de tolérance étaient comparables. La proportion de patients ayant présenté un événement indésirable grave était identique dans les deux groupes.
Discussion L’étude n’avait pas une puissance suffisante pour évaluer spécifiquement l’effet de l’emphysème. Cependant, il n’a pas été montré de différence d’effet thérapeutique du nintédanib en fonction de la présence ou non d’emphysème, ce qui est rassurant pour la prise en charge thérapeutique de ces patients. Toutefois, les patients avec un emphysème très important et supérieur à la fibrose n’étaient pas inclus dans cette étude (VEMS/CVF < 0,7).
Conclusion Le nintédanib ralentit la progression de la maladie en réduisant le déclin de la fonction respiratoire chez les patients présentant une FPI, indépendamment de la présence d’emphysème à l’inclusion. Le délai jusqu’à la première exacerbation et la variation du score de qualité de vie de Saint-Georges sont comparables chez les patients présentant ou non de l’emphysème à l’inclusion.
Liens d’intérêts V. Cottin : rémunération pour participation à des congrès, actions de formation, participation à des groupes d’experts : Actélion, Bayer, Biogen Idec, Boehringer Ingelheim, Gilead, GSK, Intermune, Novartis, Pfizer, Roche, Sanofi. C. Goyard déclare n’avoir aucun lien d’intérêt avec cet article.
Référence [1] Richeldi L, du Bois RM, Raghu G, Azuma A, Brown KK, Costabel U, et al. INPULSIS Trial Investigators. Efficacity and Safety of Nintedanib in Idiopathic Pulmonary Fibrosis. N Engl J Med 2014;370:2071-82.