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E´ditorial
Et al. P. Cochata,*, L. Vaucoreta, J. Sarlesb a Service de pe´diatrie, centre de re´fe´rence des maladies re´nales rares, universite´ ClaudeBernard Lyon 1, hospices civils de Lyon, Lyon, France b Service de pe´diatrie multidisciplinaire, hoˆpital d’enfants de la Timone, 264, rue Saint-Pierre, 13385, Marseille cedex 5, France
es logiciels d’e´criture n’ont pas encore inte´gre´ toutes les finesses de notre langue. . .
A` titre d’exemple, on lit parfois « et all » ou « and all », influence´s par la langue anglaise, alors qu’il s’agit de « et al. », abre´viation de « et alii » (« et les autres »), e´quivalent franc¸ais de « et coll. » (« et collaborateurs »). « Et al. » est reconnu internationalement, ce qui implique de l’e´crire en italique (lorsqu’on e´crit dans une langue diffe´rente de celle du texte) et de toujours terminer par un point, qui signe l’abre´viation et qui n’entraıˆne pas de majuscule a` sa suite, comme « etc. » pour « et cætera » (« et le reste »). Ces particularite´s se retrouvent dans toutes les langues et, si la connotation internationale vient souvent de l’anglais, elle peut aussi trouver son origine dans le latin ! Parmi les coquilles les plus fre´quentes, on trouve : « gellule » au lieu de « ge´lule » (faute d’orthographe pratique´e par 3 e´tudiants en me´decine sur 4) ; « occulaire » pour « oculaire » ; « pallier a` un proble`me », alors qu’il s’agit d’un verbe transitif (« pallier un proble`me ») et « de´buter un traitement » alors qu’il s’agit d’un verbe intransitif (« le traitement a de´bute´ le matin » ou « instaurer un traitement ») ; « frustres », ne´ologisme meˆlant « fruste » (qui est le mot correct) et « rustre » (qui signifie manque d’e´ducation, grossier) pour de´signer la pre´sentation atte´nue´e d’une maladie ou d’un symptoˆme ; « quelque soit » juxtapose deux mots corrects et n’est donc pas corrige´ par les logiciels d’orthographe alors qu’il faut e´crire « quel/quelle que soit » ; diagnostic (« une erreur de diagnostic ») et pronostic sont souvent employe´s comme substantifs, mais peuvent aussi eˆtre adjectifs, s’allongeant alors pour donner « diagnostique »
* Auteur correspondant. Service de pe´diatrie, centre de re´fe´rence des maladies re´nales rares, hoˆpital Femme-Me`re-Enfant, hospices civils de Lyon, 59, boulevard Pinel, 69677 Bron cedex, France. e-mail :
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(« une erreur diagnostique ») et « pronostique ». On lit aussi parfois « hors » au lieu de « or », « appareille´ » au lieu de « apparie´ », « aste´rix » au lieu de « aste´risque », « septique » au lieu de « sceptique » et « sense´ » au lieu de « cense´ », homonymes dont la confusion n’est pas acceptable. . . A` cela s’ajoutent quelques formulations tole´re´es oralement, mais inadapte´es a` l’e´crit ; ainsi « au jour d’aujourd’hui » est un ple´onasme et « bilanter » n’existe pas. Les examens paracliniques « retrouvent » tre`s souvent leurs re´sultats (qu’ils n’avaient pourtant jamais perdus) ou les « objectivent », alors qu’ils ne font que les « montrer », les « re´ve´ler » ou les « mettre en e´vidence ». D’autres formules ont e´te´ re´cemment admises par les experts de la langue franc¸aise, mais demeurent ine´le´gantes a` l’e´crit, telles « possiblement » pour « vraisemblablement », « tout a` fait » pour « entie`rement », « en fait » pour « en re´alite´ » ou « par contre » pour « en revanche ». Certaines erreurs sont des re´miniscences de l’anglais, comme « ure`thre » au lieu de « ure`tre » ou « peroxisome » au lieu de « pe´roxysome », voire de purs ne´ologismes comme « nouveau-ne´ hypotrophe » au lieu de « hypotrophique ». Mais d’autres mots ont bel et bien deux orthographes : « ne´onatalogie » et « ne´onatologie », « ane´vrysme » et « ane´vrisme ». On peut aussi parfois de´plorer un mauvais usage du nombre : « des diarrhe´es » au lieu de « de la diarrhe´e » ou « des selles diarrhe´iques », a` l’instar de la lacticode´shydroge´nase qui, abre´ge´e, devient presque toujours « les LDH ». On peut en rapprocher l’emploi abusif de mots tels que « hygie´nodie´te´tiques » ou` hygie`ne et die´te´tique sont exceptionnellement meˆle´es, ou bien « anglo-saxon » pour de´signer ce qui est anglais ou de langue anglaise, par e´gard pour les quelques nuances ame´ricaines. . . Il peut aussi s’agir de tournures incorrectes, comme par exemple « ces documents ont attrait a` un patient » au lieu de « ces documents ont trait a` un patient » ou « de part sa fonction » au lieu de « de par sa fonction » ou encore « en temps que me´decin » au lieu de « en tant que me´decin ». . . De meˆme, il est fre´quent de
Et al.
relever certaines formes de ple´onasmes, comme « dans environ 10 a` 20 % des cas » que l’on peut justement limiter soit a` « dans 10 a` 20 % des cas », soit a` « dans environ 15 % des cas » ou bien « le risque potentiel de complications » qui devrait eˆtre formule´ « le risque de complications » ou « les complications potentielles ». On constate aussi parfois un me´susage des mots, comme « fuir » et « fuiter », le premier signifiant « s’e´couler, s’e´chapper » et le second « eˆtre divulgue´, en parlant de quelque chose qui doit rester confidentiel », mais il est vrai que les deux donnent « des fuites ». Dans un domaine plus technique, les noms de me´dicaments sont aussi source d’inexactitudes, soit parce que le nom commercial (qui commence par une majuscule) prime sur la de´nomination commune internationale (qui commence par une minuscule), soit parce que certaines fautes sont influence´es par la phone´tique (propanolol au lieu de propranolol, Un-AlphaW au lieu de Un-AlfaW). Dans les articles scientifiques, les titres doivent eˆtre pre´cis : « introduction » ne signifie pas « ge´ne´ralite´s » et « bibliographie » ne signifie pas « re´fe´rences » (documents ge´ne´raux pour le premier, documents appele´s dans le texte pour le second). Tous les mots doivent e´galement l’eˆtre : la « pre´valence » (qui mesure le nombre de cas d’une maladie dans une population a` un instant donne´) n’est pas l’« incidence » (qui mesure le nombre de nouveaux cas d’une maladie dans une population pendant une pe´riode donne´e). Les abre´viations, meˆme lorsqu’elles semblent universelles ou sont introduites entre parenthe`ses, ne doivent pas eˆtre trop nombreuses ; cela rend souvent la lecture indigeste, voire incompre´hensible, notamment par des e´trangers (« les PNN, la VS, la CRP et la PCT sont e´leve´s en cas de PNA »). Lorsqu’elles sont employe´es, elles sont invariables : elles ne prennent donc pas de « s » au pluriel. Pour rester sur le the`me du nombre, le pluriel est la re`gle a` partir de 2 et non pas au-dela` de 1 : on doit e´crire « 1,8 an » et « 2,2 ans ». Certains mots peuvent parfois avoir plusieurs orthographes au pluriel, par exemple ne´onatals (pre´fe´rable selon l’Acade´mie franc¸aise) ou ne´onataux ; mais le sens peut eˆtre totalement modifie´ au pluriel, comme « banals » (commun, ordinaire) et « banaux » (qui be´ne´ficiaient du droit de banalite´) ! L’e´tiologie ne saurait eˆtre la cause d’une maladie. Elle est la science des causes et, comme physiologie ou anatomopathologie, elle n’admet pas de pluriel : les douleurs abdominales n’ont pas « des e´tiologies », mais « l’e´tiologie des douleurs abdominales inclue tl’ulce`re duode´nal et bien d’autres causes ». De meˆme, la posologie est la science des doses. Il n’y a pas « diffe´rentes posologies possibles », mais une seule « posologie qui pre´conise les doses a` prescrire ». Quant au genre, il est ge´ne´ralement bien e´tabli et il faut savoir que certains mots peuvent eˆtre masculins ou fe´minins, comme « enzyme » ou « enfant ». En revanche, il existe une certaine souplesse pour utiliser indiffe´remment singulier ou pluriel apre`s un pourcentage, ou apre`s
une de´nomination collective (la moitie´, un tiers, un grand nombre, la majorite´). La fre´quentation croissante de la litte´rature scientifique et des congre`s en langue anglaise fait parfois passer dans l’usage professionnel des mots anglais qui ont pourtant un e´quivalent franc¸ais tout aussi explicite. La « compliance » n’est rien d’autre que l’observance et les triglyce´rides a` chaıˆnes moyennes doivent eˆtre abre´ge´s par le sigle TCM et non MCT. Le style global du texte est parfois alourdi par quelques qualificatifs inutiles : « il est tre`s fre´quent que ces accidents soient re´ellement graves » peut eˆtre avantageusement remplace´ par « il est fre´quent que ces accidents soient graves ». Il peut l’eˆtre e´galement par des locutions pompeuses : un « syndrome fe´brile » ou une « hyperthermie » ne sont jamais qu’une « fie`vre ». Il prend parfois un caracte`re e´motionnel de´place´ : « le malade a subi une e´chographie puis be´ne´ficie´ d’un acte chirurgical ». A` l’inverse, certaines ellipses, qui pourraient alle´ger le texte mais ne sont grammaticalement pas correctes, ne sont pas repe´re´es par les logiciels de correction : ainsi « l’aˆge au diagnostic » devrait s’e´crire « l’aˆge au moment du diagnostic ». Le style typographique a son importance ; les textes sont ge´ne´ralement imprime´s en caracte`res romains et l’emploi de l’italique re´pond a` des re`gles pre´cises. Il convient en effet d’e´crire en italique ce qui n’est pas dans la langue du corps du texte (exemple : « place du coping en pe´dopsychiatrie ») et cela s’applique aussi aux de´nominations latines comme les termes anatomiques ou la taxinomie (ou taxonomie !) des eˆtres vivants (Proteus mirabilis) qui comportent, en outre, une majuscule au nom du genre et une minuscule a` celui de l’espe`ce. Quant aux ge`nes, ils s’e´crivent toujours en italique, en lettres majuscules chez l’homme (WT1) et minuscules chez l’animal (wt1). L’usage de la majuscule est souvent excessif, a` l’instar de l’anglais ou de l’allemand et ne doit eˆtre applique´ — outre le de´but des phrases — qu’aux noms propres, ce qui n’est pas le cas des mois de l’anne´e qui prennent une majuscule en anglais (November) et pas en franc¸ais (novembre). En revanche, on e´crit en « estonien » comme le font les « Estoniens ». La ponctuation est, elle aussi, parfois errone´e. Il convient par exemple d’e´viter de lister des mots et de terminer par «,. . . » et encore moins par « etc, . . . », qu’il est pre´fe´rable de limiter a` «, etc. ». Il serait fastidieux de s’attarder sur les accents, tant les erreurs sont fre´quentes, ne serait-ce que par l’e´vitement souvent choisi pour contourner ledit proble`me. Il n’est toutefois pas rare d’inverser « ge`ne » et « geˆne », ou de faire migrer l’accent circonflexe de « symptoˆme » a` « syndrome ». Le tre´ma me´rite une place a` part, car « aigue ¨ » — si commun en me´decine — est souvent mal orthographie´, le tre´ma signifiant que la voyelle qui pre´ce`de doit eˆtre prononce´e se´pare´ment. Il arrive aussi que le tre´ma soit utilise´ en exce`s, comme dans « moe ¨lle » au lieu de « moelle ». . . Les nombres posent souvent proble`me, en chiffres ou en lettres. Ge´ne´ralement, les chiffres s’e´crivent en chiffres arabes
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et les nombres en lettres. L’utilisation de rapports dans les unite´s de mesure peut induire en erreur et il convient ainsi d’e´crire 45 mL/min pour 1,73 m2 plutoˆt que 45 mL/min/1,73 m2. Le temps des verbes enfin doit re´pondre a` des re`gles pre´cises. Le pre´sent narratif est illogique et source d’ambiguı¨te´s dans un article scientifique. L’imparfait de´crit des choses qui durent, le passe´-compose´ de´crit des e´ve´nements termine´s. Le passe´ simple, bien venu dans les contes, ne convient pas dans une observation clinique. Quant au futur qui exprime toujours la poste´rite´ par rapport a` celui qui s’exprime, donc a` l’auteur au moment ou` il re´dige, il n’a de raison d’eˆtre que dans une conclusion appelant des souhaits pour l’avenir. La concordance des temps s’impose. Dans une « observation clinique », ce qui pre´ce`de la prise en charge proprement dite doit eˆtre re´dige´ au plus-que-parfait et le passe´-compose´ ou l’imparfait ne doivent intervenir qu’a` partir du moment ou` l’auteur connaissait le patient. Dans les chapitres « mate´riel et me´thodes » et « re´sultats », tous les temps des verbes doivent eˆtre au passe´. De meˆme, les re´sultats d’e´tudes publie´es doivent toujours eˆtre rapporte´s au passe´. Cela dit, il est possible de rapporter au passe´ des re´sultats d’e´tudes publie´es et d’utiliser a` la suite le pre´sent pour parler de faits commune´ment admis ou de ge´ne´ralite´s. « Ce que l’on conc¸oit bien s’e´nonce clairement et les mots pour le dire arrivent aise´ment » (Nicolas Boileau, De l’Art
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Poe´tique, 1674), mais nous espe´rons surtout n’avoir froisse´ aucun lecteur et aucun auteur !
De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.
Pour en savoir plus Archives de pe´diatrie. http://www.sfpediatrie.com/fileadmin/ mes_documents/pdf/Archives_de_P%C3 %A9diatrie/. Bescherelle. http://www.bescherelle.com. Convention de Vancouver. http://www.nlm.nih.gov/bsd/ uniform_requirements.html. Dictionnaire historique de la Langue franc¸aise, sous la direction d’Alain Rey, E´dition 2010. Dictionnaire me´dical Masson, E´dition 1997. Le bon usage – Grevisse – Duculot, E´dition 2011. Le Petit Larousse, E´dition 2011. Recommandations standardise´es pour la soumission des articles aux revues biome´dicales. http://ispb.univ-lyon1.fr/ internet/vancouv.html. Wikipedia. http://fr.wikipedia.org.