Etude cinétique de la réaction de carburation du molybdène par le méthane

Etude cinétique de la réaction de carburation du molybdène par le méthane

Chemical Engineering Science. 1973, Vol. 28, pp. 195 I-1960. Pergamon Press. Printed in Great Britain Etude cinktique de la rCaction de carburat...

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Chemical

Engineering

Science.

1973, Vol. 28, pp. 195 I-1960.

Pergamon Press.

Printed in Great Britain

Etude cinktique de la rCaction de carburation du molybdhne par le mkthane T. V. HIEP Departement

et S. KALIAGUINE

de Genie Chimique, Universite Laval, Quebec, Canada

(Received

3 August

1972; accepted

14 December

1972)

Rt%umC-La cinetique de carburation du molybdene par le methane a et& BtudiCe experimentalement dans un reacteur differentiel a lit Ruidise. On a procedi, par microscopic Clectronique, a I’examen du solide a divers degres de conversion. On a montre que le phinomtne de creation de pores par fissuration provoquait une acceleration considerable de la reaction. Les vitesses initiales sont analysees en termes de croissance des germes superficiels de carbure. On a trouve que la vitesse de croissance lintaire des germes diminuait en fonction du temps de reaction. On propose un modtle expliquant cette diminution. INTRODUCTION

cinetique des reactions homogenes, celles des reactions catalytiques, heterogenes, ainsi que celle de certaines reactions purement heterogtnes comme les reactions liquide-gaz [l, 21, ont connu de tels succes que I’on peut les considerer aujourd’hui comme des outils et des sources d’informations technologiques de premiere importance. Ces succl?s expliquent que de nombreux efforts soient faits actuellement dans le domaine du Genie chimique pour parvenir a une comprehension aussi complete de la cinetique des reactions gaz-solide non catalytiques du type: L’ANALYSE

g1G1-t 01

8 g‘&z + &?s,

(1)

ob g,, g,, s1 et sZ peuvent respectivement etre nuls. Ce type de reaction presente une enorme importance industrielle tant par les realisations existantes, que par le potentiel de reactions exploitables. On ne citera pour exemple des premieres que les nombreuses realisations des industries metallurgiques, reductions d’oxydes, grillages de sulfures, calcinations, deshydratations, etc. Les exemples des secondes sont probablement encore plus nombreux. Les reacteurs a flamme[3-41 deja utilises en particulier pour la synthese du bioxyde de titane pourraient s’averer une solution Cconomique pour certaines

des tres nombreuses transformations tentees dans les chalumeaux a plasma[5]. On peut Cgalement titer les reactions de transfert chimique [6] qui ont deja trouve une application dans le domaine de la metallurgic extractive du zirconium. En depit du fait que les methodes experimentales servant a mesurer la vitesse de ces processus soient rarement appropriees, en d&pit du fait que la comprehension des phenombnes observes soit t&s souvent incomplete, certains ont eu le courage de presenter des modeles de la conversion dune particule, utilisables en Genie chimique[7-IO]. Ces modbles comportent deux cas limites, le “unreacted core model”[7] et le modele pseudohomog&ne[S]. Les autres sont des variantes ou des combinaisons de ces deux cas limites. IIs different par I’image qu’ils donnent de la surface de separation entre les trois phases S1, S, et la phase gazeuse. L’aire de cette surface est le parambre cinetique nouveau qu’il importe de considerer lorsque I’on traite des reactions du type[l]. Dans le modele U.C.M. cet interface est defini comme une surface continue separant une zone de conversion nulle d’une zone constituee uniquement de produit. Les gaz diffusent au travers de la couche de produit supposee poreuse. Dans le cas d’une particule spherique par exemple on obtient une image simple de la variation de I’aire de I’interface reactionnel avec la

1951

T. V. HIEP

et S. KALIAGUINE

conversion: lorsque celle-ci augmente, la sphere non reagie diminue de diambtre, et done de surface. Dans le modele pseudo-homogene applicable quand la particule est initialement poreuse, I’interface reactionnel est suppose reparti uniformement dans tout le volume de l’echantillon. On voit done que les modeles classiques minimisent l’importance du parambre fondamental que represente I’aire de I’interface. Cette remarque vaut Cgalement pour l’ensemble des modbles plus complexes obtenus en considbant des combinaisons des deux modeles cites dans lesquels les diverses zones reactionnelles sont supposees disposees selon divers arrangements geometriques [8, 1 l- 161. I1 faut cependant noter que recemment, Hashimoto et Silveston [ 171 sont parvenus a rep&enter la variation de la surface des pores d’un Cchantillon de carbone active au tours de sa gazeification en utilisant la technique du bilan de population. Ce travail constitue certainement un premier pas vers une analyse realiste de ces phenomenes. Cependant dans ce cas aucun nouveau produit solide n’est forme de sorte que la totalite de la surface des pores constitue I’interface reactionnel. Dans le cas contraire, I’analyse de la distribution des dimensions des pores ne permet que la determination des vitesses initiales de rCaction[ 181. Par ailleurs il existe une autre approche de ces problbmes dont la synthese a CtC faite par Delmon[ 191 et qui semble ne pas retenir I’attention dans la litterature du Genie chimique. Selon cette approche, applicable a tous les phenombnes par lesquels une phase solide est c&e, la transformation s’effectue en deuxetapes: (a) apparition de germes de la nouvelle phase a la surface du solide 4. Cette &ape permet d’expliquer l’existence de pkriodes d’induction [18-211. (b) croissance de la nouvelle phase autour de ces germes dans la matrice du solide S,. Les modeles ainsi obtenus en supposant differentes lois pour les vitesses d’apparition et de croissance des germes donnent done une representation t&s precise de la variation de

I’aire de Enter-face reactionnel au tours de la reaction. Par contre on peut reprocher a ce type d’analyse de negliger la variation de porosite de l’echantillon avec la conversion, ce qui revient a negliger l’influence possible des profils de concentration des reactifs gazeux dans la structure solide. Le modele pseudo-homogbne parexemple donne une t&s grande importance a ce phenom&e qu’il traite d’une man&e analogue au developpement de Thiele[22] de la diffusion interne en catalyse gaz-solide. I1 est done evident qu’un grand pas en avant sera reali& lorsque les deux approches pourront &tre conciliees. On voit qu’il est important que des efforts experimentaux soient consentis actuellement afin que ce but puisse Etre atteint dans un futur aussi rapproche que possible. Le travail presente ici trouve son origine dans une presentation anterieure [23] dans laquelle il avait CtC montre que la vitesse de la conversion du methane par le CO, et la vapeur d’eau sur du molybdbne metallique partiellement carburt, etait entierement determinCe par la pyrolyse du methane a la surface du molybdene. Nous avons done entrepris d’analyser la cinetique de la rCaction heterogene de carburation de ce metal par le methane: CHw, + 2Mow --, Mo,Cw + 2H2w. DISPOSITIF

(2)

EXPBRIMENTAL

Le dispositif experimental est t&s semblable a celui decrit anterieurement [23]. Un double tube concentrique en alumine recristallisee obture par un disque de porcelaine frittee, et sit& dans l’axe d’une resistance de graphite, permet de realiser un lit fluidise de petites dimentions, a haute temperature. La principale modification au systbme anterieur est I’addition dune seconde sonde d’echantillonnage gazeux, refroidie a l’eau et situee en amont du disque distributeur a quelques centimbres de celui-ci. La chambre de combustion du montage anterieur a Cgalement CtCsupprimee. Les avantages de ce type de reacteurs sont analogues a ceux du reacteur a lit semi-fluidise propose par Delmon. La temperature y est uni-

1952

RCaction de carburation du molybdkne par le mtthane

forme, de m&me que la conversion des differents grains du fait de la forte agitation des solides. Par contre il presente le m&me desavantage a savoir que la distribution du temps de sejour des differents elements du volume gazeux dans le reacteur y est ma1 definie. Dans le travail present& ici nous avons tour& la difficult6 en maintenant constants le poids du lit et le debit de fluidisation. De cette facon les phenomenes de bullage et de renardage sont maintenus identiques a euxmemes d’un essai a l’autre. I1 en resulte une erreur relative constante sur la mesure des pressions partielles d’hydrogene et de methane a la surface des grains. Un travail actuellement en tours permettra de preciser ulterieurement l’amplitude de ces erreurs ainsi que l’effet dune variation du debit gazeux.

CONDITIONS ET PROCBDURE EXPeRIMENTALES

Le lit fluidise est en fait un lit mixte constitue d’un melange de particules de molybdene et de silice inerte. Le molybdene, d’une purete de 99.8 pour cent, est sous forme de particules quasiment spheriques, dont la surface specifique mesuree par BET a l’azote est de l’ordre de O-6 m2/g. Le diambtre de ces particules, classifrees par tamisage, est compris entre 74 et 89 F. Exceptionnellement des classes de diametres compris entre 89 et 104 p ou 147 et 174 p ont Cgalement CtCemployees. Le masse du molybdbne est de 3 ou 5 g alors que la masse totale du lit est de 65 g. Le diambtre des particules de silice est calcule pour que la vitesse minimale de fluidisation soit sensiblement la mCme pour les deux poudres. L’alimentation gazeuse est un melange d’azote et de methane dont le debit total, constant pour tous les essais, est de 1550 cmYmin. (25°C 760 760 mHg.) ce qui correspond a 3 a 4 fois le debit minimum de fluidisation. Le pourcentage en volume du methane a CtC fixe successivement a 10, 15 et 20 pour cent. La temperature du lit, mesuree a l’aide dun thermocouple Platine-30% Rhodium/Platine-6% Rhodium, est maintenue constante au tours d’un

essai. Pour l’ensemble des mesures une gamme comprise entre 900 et 960°C a CtCchoisie. Pour suivre la procedure experimentale le lecteur se referera a la Fig. 1. Dans la periode qui precede un essai l’alimentation d’azote et de methane passe sur un lit constitue uniquement par la charge de silice. L’analyse chromatographique des Cchantillons preleves en amont (courbe a, entre rI et t2) et en aval (courbe b) du lit revelent l’existence dune leg&-e conversion du methane a l’entree et a la sortie du reacteur. La difference entre les courbes a et b est probablement due a une faible conversion heterogene du methane sur la silice car l’examen au microscope revele que ces grains sont legbrement noircis aprb l’essai complet. La courbe b horizontale sert de point de reference pour mesurer la conversion obtenue ulterieurement sur le molybdene. Au temps r2 on coupe le debit du methane et on injecte le molybdene dans le lit par transport pneumatique dans un courant d’azote. Puis on laisse l’equilibre thermique se retablir. Enfin, au temps r0 on retablit le debit du methane et on mesure les conversions a l’entree et a la sortie du reacteur (courbes a et c). RkSULTATS

EXPl?RIMENTAUX

QUALITATIFS

Des essais preliminaires ont permis d’etablir les conditions dans lesquelles le reacteur peut etre considere comme differentiel. En fait, pour

1953

I I:

4

I

I

t,

f

Temps

fB

Fig. 1. Allure des courbes expbimentales.

T. V. HIEP et S. KALIAGUINE

tous les essais prCsentCs ici, la conversion totale instantanie du mkthane introduit n’a jamais d&pass6 2 pour cent. Dans ces conditions la distance verticale entre les courbes b et c sur la Fig. 1 est proportionnelle B la vitesse instantaGe de conversion du mCthane % la surface du molybdbne. La Fig. I indique les deux types de courbes expkrimentales obtenues. Pour les plus hautes tempkratures et les plus fortes concentrations de mbhane, on obtient des courbes du type I. Ce type est caracttrisk par une premikre branche dkroissante suivie d’un ou quelquefois de plusieurs pits, suivie enfin d’une branche B dkcroissance plus lente. Lorsque la tempkrature est plus basse et la concentration de mkthane plus faible, les courbes sont du type II, soit continuellement dkcroissantes. Afin de prkiser les phCnomi?nes responsables de ces diffkrents comportements nous avons rCalisC les Ctudes suivtintes. En coupant le debit de mdthane en des points tels que A et B (Fig. 1) nous avons pu obtenir des Cchantillons prksentant difkents degrCs de conversion. Ces kchantillons ont CtC examinks au microscope Clectronique B balayage et analysCs par diffraction des rayons-X. Les clichks 2(a) et 2(b) montrent I’allure du molybdkne initial. La Fig. 2(b) reprksente une plage sur la surface extkrieure d’une particule dont le diam&re extkrieur est de I’ordre de 80 p. Les clichks 3(a) et 3(b) pkentent un Cchantillon obtenu en un point tel que A, c’est-g-dire B la fin de la pkriode initiale oh la vitesse est rapidement dkcroissante. On note sur la face CclairCe du cristal prCsentC au clichC 3(a), I’apparition d’une sCrie de protubkances, indiquant I’existence de ce que Delmon appelle une germination de surface. Nous pensons que ces germes sont constituks de carbure MO& car seul le spectre de ce composk apparait sous forme de petits pits sur le diagramme de Rayons-X en superposition sur le spectre principal de molybd&ne. (En particulier ce diagramme n’indique la prksence d’aucun carbone libre.) On peut voir que ce phknomkne n’est pas un dCfaut local quelconque, en comparant les cliche% 2(b) et 3(b). L’existence

de tels germes au voisinage de toutes les a&es des cristaux modifie radicalement l’aspect de leurs contours. Trois constatations peuvent i?tre faites $ partir du clicht 3(a): (1) Les germes sont relativement distants les uns des autres, ce qui signifie qu’en un point tel que A, le phCnom&ne d’ingestion des germes les uns par les autres est encore relativement peu important. (2) La distribution de la dimension des germes n’est pas t&s disperke. La dimension moyenne de ces germes est de I’ordre de quelques centaines d’Angstroms. (3) Ces germes ne sont certainement pas constituks d’une seule couche d’atomes car ils prksentent Cgalement une Cpaisseur de I’ordre d’une centaine d’Angstroms. Les cliches 4(a) et 4(b) correspondent & un Cchantillon pris en un point tel que B (Fig. 1). Les germes ont disparu car la quasi totalit de la particule est maintenant transformke en carbure Mo,C comme I’indiquent les rayons-X. On remarque I’existence d’un important rCseau de fissures dans les diffkrents blocs cristallins. Nous pensons que ces fissures sont responsables de I’accCICration schCmatisCe par le pit compris entre les points A et B sur la Fig. 1. Lorsque la conversion du mCta1 devient importante, la variation de densit du solide impose des contraintes sur les rCseaux, de sorte que ces fissures se produisent le long des lignes de moindre rkistance (par exemple aux joints de grains) dans le molybdkne. Ce phCnombne a pour effet de crCer de nouvelles surfaces de molybdkne accessibles au mkthane et done d’accCICrer la carburation. ANALYSE

QUANTITATIVE

DES

RkULTATS

Phe’nom2ne defissuration Par inthgration numkrique progressive des courbes c (Fig. l), en prenant l’horizontale b comme niveau de rkfbrence, on peut $ l’aide d’un bilan mat&e, calculer le degrC de conversion a! du molybdbne prksent dans le rkacteur en fonction du temps.

1954

RBaction de carburation du molybdbne par le mCthane

La Fig. 5 presente de telles courbes. L’echelle de temps a CtC remplacee par une Cchelle de temps reduit definie par:

e=&

(3)

oti to.2est le temps au bout duquel une conversion Q de 20 pour cent est atteinte. On voit qu’avec une telle Cchelle toutes les courbes qu’elles soient de type I ou de type II sont pratiquement confondues. Cette constatation souligne l’interet du reacteur differentiel, car avec un reacteur integral ou une thermobalance, les courbes obtenues sont des courbes integrales analogues a celles de la Fig. 5, qui n’auraient pas permis de distinguer entre les courbes de types I et II. Parmi les nombreux modbles suggeres par Delmon [ 191, pour la variation de la conversion (Y en fonction temps, la loi de Prout et Tompkins [25] donne une representation assez satisfaisante 40 50 60 70 de nos resultats. La Fig. 6 montre en effet que Temps, min ceux-ci suivent la loi: Fig. 6. Diagrammes de Prout et Tompkins pour la carburation du molybdbne.

In&= ou les constantes

k,t+k,

(4)

k, et k2 prennent

successive-

060 u

g

i 050

F

ji 0.40 i +

0.30

$ Ii?! z? 0.20 D 0.10

0

0

I

2

3

Temps &duit, 8 Fig. 5. Conversion

du molybd&ne en fonction rkduit.

du temps

ment deux valeurs difFerentes pour la mCme courbe [ 191. Cette loi a CtC initialement Ctablie pour un modele de germination en chaines branch&es, qu’il nous pa&trait irrealiste d’invoquer ici. La principale caracteristique analytique de cette loi est qu’elle permet de rep&enter une acceltration de la reaction lorsque la conversion augmente. Une telle acceleration peut cependant resulter de l’apparition des fissures mentionnees precedemment. L’accord entre la loi de Prout et Tompkins et nos resultats provient done dune analogie purement mathematique entre l’effet de la germination en chaines branchees et celui de la fissuration. On notera cependant que cet accord est reali& aussi bien pour les courbes de type I que pour celles de type II, ce qui indique que ces dernibres ne sont pas incompatibles avec le phenomtne de fissuration. Du reste les photographies analogues aux cliches 4(a) et 4(b) pour les courbes de types II indiquent bien la presence de fissures.

1955

T. V. HIEP VITESSE

DE

PROPAGATION

DES

et S. KALIAGUINE

GERMES

L’examen des micrographics Clectroniques nous permet d’isoler sur chacune des courbes de vitesse une zone initiale comprise entre les temps to et tA (Fig. 1) pour laquelle on peut considerer que seuls les phenomenes de germination du carbure a la surface initiale du metal sont produits. Rozovskii et ses collaborateurs[26] par exemple ont observe des courbes tres analogues a nos courbes de type I I en Ctudiant la vitesse de carburation du fer par le monoxyde de carbone aux environs de 200°C dans un reacteur differentiel. Ces auteurs ont attribue la decroissance initiale de la vitesse a la formation d’une couche superficielle de carbure offrant une forte resistance a la diffusion des reactifs gazeux. On voit en examinant le clicle 3(a), que ce modele, analogue au modele U.C.M., ne s’applique pas dans notre cas. En effet en un point tel que A (Fig. l), une proportion importante de la surface initiale du molybdene est encore non reagie et au contact direct de I’atmosphere gazeuse. II nous faut done chercher un modele qui rende I’image d’une germination de surface compatible avec nos courbes experimentales entre to et tA. Nous avons tent6 d’appliquer les differents modeles proposes par Delmon [ 191 et Garner [27] a nos dontrees. Pour ce faire nous avons suppose successivement pour la vitesse de creation des germes, une apparition instantanee, une apparition a vitesse constante et une loi puissance. Pour la forme des germes nous avons considere des disques, des spheres et des chaines branchees avec ou sans grossissement lateral. Tous ces modbles supposaient une vitesse lineaire de croissance des germes constante, et tenaient compte du phenomene d’ingestion ou de recouvrement des germes entre-eux. Toutes ces tentatives ont Ctt vaines, car aucun de ces modbles ne prevoit de decroissance de la vitesse de reaction avant que le phenomene d’ingestion ne soit important. Cette caracteristique commune a tous les modeles cites ci-dessus, est une consequence directe de I’hypothese selon laquelle la vitesse

lineaire de croissance des germes est constante. En effet tant que les germes grossissent independemment les uns des autres, cette croissance s’accompagne d’une augmentation de leur surface exterieure. Supposer une croissance lineaire constante revient done a supposer une vitesse croissante pour I’augmentation de leur volume. On voit done qu’il y a incompatibilitt entre nos courbes a vitesse initiale decroissante d’une part et d’autre part I’hypothbse d’une vitesse lineaire de croissance des germes constante en fonction du temps. Cette hypothese semble pourtant bien naturelle. Elle exprime simplement que tous les parametres cinetiques autres que I’aire de I’interface rtactionnel, sont supposes constants en fonction du temps dans le reacteur. Pour resoudre cette difficult6 nous avons imagine le modele suivant: Supposons que les molecules du gaz G, soient adsorbees a la surface du solide S, et que cette couche adsorbte presente une grande mobilite de surface (voir schema de la Fig. 7). A la limite, lorsque la vitesse de ce transfer-t de surface est infiniment grande vis-a-vis de la vitesse de reaction, la probabilite pour qu’une particule G, heurte la ligne de demarcation du germe au temps t + At est independante de la position de G, sur la surface au temps t. Dans ces conditions la probabilite de collision entre une particule G, et I’interface reactionnel n’est plus proportionnelle a la concentration de surface des particules adsorbees comme ce serait

1956

I

Fig. 7. Schema du modkle de reaction de surface.

R&action de carburation du molybdkne par le mtthane

reaction puisque les phenomenes de recouvrele cas si la couche adsorbee Ctait fixe. Cette ment des germes n’ont pas CtCconsider&. probabilite est proportionnelle au nombre total La Fig. 8 montre une comparaison entre les de particules adsorbees sur la surface du molybvitesses calculees a I’aide de I’Eq. (8) et une de dene non reagi. En d’autres termes la vitesse nos courbes experimentales. Les valeurs des colineaire de croissance du germe est proportionnelle a cette surface de molybdene vierge si la efficients a et A ont CtC obtenues de la facon suivante. Dans un premier temps on utilise tous concentration de surface est constante en foncles points experimentaux obtenus dans la partie tion du temps. Nous avons done employ6 cette hypothbse au initiale decroissante d’une courbe, pour effectuer sein du modele suivant inspire de nos observaune regression non lineaire autour de I’Eq. (8). tions au microscope. Nous avons suppose une On recommence ce calcul en supprimant le germination instantanee a t = 0 sur des sites point experimental obtenu en dernier dans I’ordre potentiels dont la concentration de surface est yO. chronologique. On compare alors les deux estimations de chacun des coefficients a et A et au Les germes ont CtC representes par des disques besoin on recommence la procedure jusqu’a ce de rayon R et d’epaisseur H. Ces deux dimenque deux estimations successives soient concorsions sont les mi$mes pour tous les germes. Leur a CtC croissance a CtC representee par les deux Cqua- dantes. En general cette convergence obtenue lorsque le nombre de points experimentions suivantes: taux utilises Ctait de trois ou quatre. dR &At) Les resultats pour a et A, port& dans un plan (5) dt = ks S,,(O) d’Arrhenius sont presentes a la Fig. 9. On peut voir sur cette figure que les constantes a et A dH (6) respectivement proportionnelles a k, et k, varient dt= k, regulierement avec la temperature et la pression avecR=OetH=Oat=O. partielle du methane. En definitive I’utilisation de I’Eq. (5) qui exLe volume des germes de carbure par unite de prime la diminution de la vitesse lineaire de surface est done: croissance du germe avec la conversion permet une representation coherente de nos resultats r+(t) = y,mR2H. (7) experimentaux. Le modele de couche adsorb&e Si I’on neglige les phenomenes d’ingestion de mobile qui nous a conduit a I’Eq. (5) doit done germes, on peut dbs lors Ctablir la relation: etre consider6 comme une possibilite logique d’interpretation des resultats. Cette possibilite 2at tan h (at) n’est cependant pas unique. On peut par exemple (8) imaginer que les points oh les germes prennent cos h2 (at)

1

Oil

et a = k,G

La relation (8) ne peut rep&enter les dontrees expkimentales que de facon asymptotique au voisinage des periodes initiales de

I 6

20 Temps.

25

30

Jb

40

min

Fig. 8. Illustration de la mbthode de rkgression asymptotique.

T. V. HIEP

et S. KALIAGUINE

naissance sont des sites privilegies pour l’adsorption du methane sur le molybdbne. Dans ces conditions la croissance des germes ferait disparaitre de la surface du molybdene non reagi les sites d’adsorption les plus actifs. I1 en rBsulterait une diminution continue de la constante moyenne de l’equilibre d’adsorption du methane. L’Eq. (5) devrait alors i?tre consideree comme une rep& sentation empirique de I’effet sur la vitesse de la diminution correspondante de la concentration de surface du methane adsorb6

-02r-----l-w

avons Ccrit le schema reactionnel CH,+f CH,lf

suivant:

* CH,I

(11)

2Mo @ MO&+ 2Hz + 1

(12)

oti I represente un site d’adsorption du methane sur le molybdbne. Si I’on suppose que la reaction d’interface (12) impose sa vitesse,

$f = kl s,, CCH,- k,p2,,C, SMdO)

(13)

ol Ccn, et CI sont respectivement les concentrations de surface du methane et des sites libres. Apt& les transformations usuelles en catalyse de ce type d’Eqs. (28) on obtient:

dR -k sMo(t) y_ dt3s,,(o)

- -7.0

d 1+ G-lIPCHI .

(14)

a C

Le terme (l/K)p&, a CtCnCgligC ult&-ieurement et en combinant les Eqs. (5), (10) et (14):

Une regression non-lineaire a trois parametres

l/r,

K-’

Fig. 9. Courbes d’Arrhenius pour les vitesses des germes.

de croissance

Ces deux explications demeurent possibles et la conclusion importante que I’on peut tirer de ces resultats est qu’il a CtC montre que la vitesse lineaire de grossissement des germes pouvait varier avec l’avancement de la reaction et que cette variation pouvait s’exprimer a I’aide de la relation (5). Pour tenter d’analyser les variations de k, avec les pressions partielles et la temperature, nous 1958

0

0.2

0.3

0.4

0.5

‘b” Obtenue par rggression, mini Fig. 10. Test de validit

de I’Eq.

(15).

0.6

Reaction de carburation du molybdene par le methane

sur I’ensemble de nos valeurs de la constante amour de 1’Eq. (15) donne:

a,

k = 1a96 X lOlo min-’ E = 5 3,200 Cal/mole K CHI = O-37 atm-‘. La Fig. 10 montre que cette dernibre regression fournit des estimations valables de nos valeurs de a. La Fig. 11 donne une comparaison entre nos valeurs experimentales de la vitesse initiale de carburation avec les valeurs calculCes par I’Eq. (8) en utilisant les valeurs de A presentees a la Fig, 8 et celles de a calculees par 1’Eq. (15). On voit que I’erreur moyenne est de I’ordre de 7 pour cent. CONCLUSlON

Notre etude de la carburation du molybdene par le methane Porte sur le double aspect de I’analyse cinetique d’une part et d’autre part de l’analyse de micro-photographies electroniques. Elle souligne a notre sens l’urgence que soit reconnu en genie chimique, I’importance des phenomenes de germination de surface sans lesquels aucune simulation realiste des phenomenes cinetiques purement heterogenes ne saurait Stre effect&e. Par ailleurs il est certain que ces phenomenes

ne sont pas les seuls qu’il faille prendre en consideration, et qu’une comprehension detaillee des phenombnes de transfer-t au voisinage de I’interface soit egalement indispensable. Notre analyse des phenomenes de germination responsables des variations initiales de la vitesse de carburation du methane, par exemple, est surement incomplete. Nous avons en effet utilise I’Eq. (6) pour rep&enter la variation d’epaisseur des germes. Cette equation est un pis aller qui masque en fait notre manque de connaissance des processus de transfer-t du carbone dans cette direction. Les phCnomenes de fissuration que nous avons observes agissent Cgalement sur la germination et sur le transfert des constituants gazeux. L’avenement de techniques sures pour la determination des distributions de dimensions de pores [29] permettra certainement dans I’avenir d’analyser plus en detail ce phenomene. Les modeles qui en resulteront, ouvriront probablement un nouveau chapitre du domaine de la cinetique appliquee. Remerciements-Ce projet a Cte rendu possible grace a la contribution financitre du Conseil National des Recherches du Canada. Les auteurs remercient Cgalement M. G. Seibel de “Pulp and Paper Research Institute of Canada” a Montreal, qui a realist5 les microphotographies Clectroniques.

NOTATION

A

tl E

constante (Eq. 8) constante (Eq. 8) concentration de surface Cnergie d’activation, Cal/mole coefficient stoechiomttrique Cpaisseur d’un germe, cm constante d’equilibre d’adsorption coefficient (Eq. 4), constante de vitesse masse molaire pression partielle, atm rayon d’un germe cm, constante des gaz parfaits surface du molybdene metallique au temps f, cm2 surface specifique, cm2/g coefficient stoechiometrique temps, min

H” K k M

R” &fow ov

I

I

0

I

0004

da/df

Expgrimental,

I

,

I

so

0008 min-’

s

t

Fig. 11. Test de validite des Eqs. (8) et (15) combinees.

1959

T. V. HIEP

y,,

volume des germes par unit6 de surface, cm3/cm2

o

Lettres

et S. KALIAGUINE

p

m-ecaues

v

1

8

(Y conversion du molybdkne

nombre de sites potentiels surface, cm-2 masse volumique, g/cm3 temps r&duit

par unit6 de

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kinetics of carburization of molybdenum by methane has been studied in a fluidized bed differential reactor. Scanning electron microphotographs of the reacting solids, at various conversion levels, have been analyzed. It has been shown that pore formation resulted in considerable increase in reaction rate. Initial rates are analyzed in terms of growth of superficial carbide nucleus. The rate of growth of the germs was found to decrease with time of reaction. A model is proposed to explain this decrease.

1960