Cancer/Radiother 6 (2002) 300–302 www.elsevier.com/locate/canrad
Note technique
Étude d’un film récemment commercialisé pour la dosimétrie des faisceaux de photons de haute énergie Study of a new film for high energy photon beam dosimetry C. Bramoullé *, H. Aget, P. Louisot Unité de radiophysique, Corad, CHU Bretonneau, 2, boulevard Tonnellé, 37044 Tours, France Reçu le 5 février 2002; accepté le 15 mai 2002
Résumé Le présent travail propose une étude des caractéristiques dosimétriques d’un nouveau type de film proposé par la société Kodak, l’extended dose range, EDR2. Nous avons établi la courbe de réponse en fonction de la dose et nous l’avons comparée à celle des films X-OMAT V (Kodak). Nous montrons qu’elle est linéaire sur une gamme allant de 0,5 à 4 Gy et que cette linéarité est conservée quelle que soit l’énergie des faisceaux et quelle que soit la profondeur dans les tissus. Les films EDR2 sont donc un outil très utile pour la dosimétrie des faisceaux de photons de haute énergie et notamment dans le cas de gradient de dose élevé, comme pour les traitements par modulation d’intensité. © 2002 E´ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Dosimetric properties of a new film, the Extended Dose Range - EDR2, manufactured by Kodak, have been studied. We have established the response of the film versus dose and compared it with that of X-OMAT V films. We found a linear response with dose, for the range from 0.5 to 4 Gy. No dependence of this curve with beam quality and with depth is observed. EDR2 films are useful for dosimetric study of high-energy photon beam, especially when high dose gradient occurs such as for Intensity Modulated Radiotherapy Treatment. © 2002 E´ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. Mots clés : Dosimétrie par film ; Radiothérapie ; Modulation d’intensité Keywords: Film dosimetry; Radiotherapy; IMRT
Un nouveau type de film a été proposé récemment par la société Kodak l’extended dose range, EDR2 [5]. La société annonce une réponse en fonction de la dose linéaire sur une gamme de dose très étendue et une faible sensibilité à la qualité du rayonnement. Ces propriétés permettraient d’en faire un outil de choix pour la dosimétrie des faisceaux de photons de haute énergie des traitements à gradient de dose
élevé comme par exemple ceux utilisant la modulation d’intensité. Dans cette étude, nous nous proposons d’étudier les caractéristiques dosimétriques de ce nouveau type de film et de les comparer à celles des films Kodak X-OMAT V, utilisés en routine dans la plupart des services de radiothérapie. 1. Matériel et méthode
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (C. Bramoullé). © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. PII: S 1 2 7 8 - 3 2 1 8 ( 0 2 ) 0 0 1 6 8 - 3
Les films EDR2 et X-OMAT V sont conditionnés dans une pochette assurant leur protection à la lumière et facili-
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tant leur utilisation. Tous les deux peuvent être développés dans une machine automatique selon un cycle habituel de 90 s et une température de révélateur de 34 °C. Les films ont été irradiés dans un faisceau de photons de cobalt 60 (Theratron 780) ainsi que dans un faisceau de rayons X de 6 MV (accélérateur SL 18, Elekta). Ces films ont été placés perpendiculairement à l’axe des faisceaux dans un fantôme composé de plaques en polystyrène équivalent-tissu, d’épaisseur variable. Pour étudier la réponse des films en fonction de la dose et de la qualité du rayonnement, ils ont été placés : • à la profondeur du maximum de dose, c’est-à-dire à 5 mm et à 20 mm pour les faisceaux de cobalt 60 et de 6 MV respectivement ; • aux profondeurs de 50 et 150 mm dans le milieu pour un faisceau de cobalt 60, et irradiés à dose croissante allant de 0,20 Gy à 6 Gy. La dimension de champ utilisée était de 5 × 5 cm au niveau du film. La distance source film était de 80 cm pour le faisceau de cobalt 60 et de 100 cm pour le faisceau de rayons X de 6 MV. Après irradiation, les films ont été développés par un système de développement automatique (FPM 3000, Fuji), la température étant de 34 °C et le temps de 90 s. La lecture de la densité optique des films a été réalisée à l’aide d’un photodensitomètre MacBeth.
2. Résultats 2.1. Réponse des films X-OMAT V et EDR2 en fonction de la dose La réponse en densité optique des films EDR2 est quasi linéaire sur la totalité de la gamme de dose étudiée soit de 0 à 4 Gy et linéaire de 0,5 à 4 Gy (Fig. 1). Pour les films X-OMAT V, la réponse est linéaire sur une gamme plus restreinte : 0 à 0,4 Gy et présente une légère incurvation au-delà de cette dose. De plus, ils présentent une saturation au-delà de 2 Gy (Fig. 1).
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Fig. 1. Comparaison de la réponse des films X-OMAT V et EDR2 en fonction de la dose. Comparison of responses of films X-OMAT and EDR2 according to depth.
optique des films EDR2 sont présentées sur la Fig. 2 et sont identiques sur une gamme allant de 0 à 4 Gy. L’écart relatif maximal calculé est de 3 % pour une dose de 0,25 Gy. Pour une dose de 4 Gy, l’écart relatif est de 0,6 %. 2.3. Étude de réponse des films EDR2 en fonction de la profondeur dans les tissus Nous avons établi les courbes de réponse pour les films EDR2 pour trois profondeurs (5, 50 et 150 mm), pour un faisceau de cobalt 60. Les courbes sont présentées sur la Fig. 3. Elles sont très proches les unes des autres, l’écart étant maximum pour la dose maximale de 4 Gy. L’écart relatif calculé entre les valeurs de densité optique mesurées à 4 Gy pour les trois profondeurs varie de 0,5 % à 1,6 %. On peut en conclure que la réponse des films EDR2 ne varie pas en fonction de la profondeur dans les tissus.
2.2. Comparaison de la réponse des films EDR2 pour deux qualités de rayonnement Un des paramètres les plus influents sur la sensibilité d’un film est l’énergie du faisceau. Nous avons étudié l’influence éventuelle de l’énergie des photons sur la sensibilité des films EDR2 en les irradiant par deux qualités de rayonnement différentes (cobalt 60 et rayons X de 6 MV). Les films n’ayant pas été développés en même temps et afin de s’affranchir d’éventuelles variations dans le développement, les densités optiques ont été normalisées à 1 pour une dose de 2 Gy. Les courbes de la variation de la densité
Fig. 2. Comparaison de la réponse des films EDR2 pour deux qualités de rayonnement. Comparison of responses of film ERD2 according to two qualities of rays.
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Fig. 3. Comparaison de la réponse des films EDR2 irradiés dans un faisceau de cobalt 60 en fonction de la profondeur. Comparison of the responses from cobalt-60 irradiated films as a function of depth.
3. Discussion et conclusion La réponse des films X-OMAT V, de part leur sensibilité aux rayonnements de basse énergie, dépend du spectre en énergie des photons c’est-à-dire de leur énergie nominale, et de la profondeur dans les tissus. Plusieurs études ont été réalisées pour quantifier cette variation pour différentes énergies nominales du faisceau [1,2,4,7,8]. Pour une même qualité de faisceau, les conclusions diffèrent selon l’étude mais de façon générale, elles montrent que la densité optique varie de 4 à 10 % en fonction de la profondeur. Plus récemment, une étude [3] a montré qu’il est possible d’utiliser la même courbe de réponse en fonction de la dose à condition d’utiliser des films d’un même lot, que la profondeur de tissu soit faible (inférieure à 15 cm) et que la dimension du champ d’irradiation n’excède pas 15 × 15 cm. Notre expérience [6] montre qu’une courbe de réponse spécifique est nécessaire pour chaque énergie dans le cas du cobalt 60, des faisceaux de rayons X de 6 et 15 MV. Ces travaux montrent que l’utilisation des films X-OMAT V pour la dosimétrie des faisceaux de photons de haute énergie est limitée, du fait que la réponse en fonction
de la dose n’est pas linéaire et que la densité optique varie avec la profondeur de tissu et avec la dimension du champ d’irradiation et ceci pour une même dose. Notre étude a montré qu’il existe une relation linéaire entre la densité optique et la dose pour les nouveaux films EDR2 pour une large gamme allant de 0,5 à 4 Gy et que cette relation linéaire est conservée quelle que soit l’énergie des photons primaires étudiés et quelle que soit la profondeur considérée dans les tissus. L’utilisation pour la dosimétrie relative ne nécessite donc pas de courbe de conversion pour passer de la densité optique à la dose relative. L’utilisation pour la dosimétrie absolue devrait nécessiter une courbe unique de conversion à condition bien entendu que les conditions de développement du film soient constantes. Ce film devrait être très utile pour la dosimétrie sur fantôme des traitements pour lesquels un fort gradient de dose est attendu tel par exemple les traitements par modulation d’intensité.
Références [1] [2]
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