Journal de Radiologie Diagnostique et Interventionnelle (2016) 97, 17—23
FORMATION MÉDICALE CONTINUE : LE POINT SUR. . .
Évaluation de l’œdème myocardique par T2-mapping en IRM cardiaque夽 P. Montant a, M. Sigovan b,∗, D. Revel b, P. Douek b a
Service de cardiologie, centre hospitalier Alpes Léman, 558, route de Findrol, 74130 Contamine-sur-Arve, France b Service de radiologie, hôpital Louis-Pradel, 28, avenue Doyen-Lépine, 69677 Bron cedex, France
MOTS CLÉS T2-mapping ; Imagerie par résonance magnétique ; Cœur
Résumé L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est une technique de référence en imagerie cardiaque du fait de son rapport signal—bruit élevé, de ses hautes résolutions spatiale et temporelle, et enfin de la séquence de rehaussement tardif. Cependant, les séquences actuellement disponibles sont insuffisantes pour évaluer certains processus pathologiques comme l’œdème myocardique. Le T2-mapping est une séquence générant une image paramétrique sur la base du temps de relaxation transversal T2 de chaque voxel. Le temps de relaxation T2 est allongé en présence d’œdème. Cet article résume les connaissances actuelles du T2-mapping dans l’évaluation de l’œdème myocardique par IRM cardiaque. © 2016 Publié par Elsevier Masson SAS pour les Éditions françaises de radiologie.
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.diii.2014.07.008. Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Diagnostic and Interventional Imaging, en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (M. Sigovan). 夽
http://dx.doi.org/10.1016/j.jradio.2016.01.004 2211-5706/© 2016 Publié par Elsevier Masson SAS pour les Éditions françaises de radiologie.
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Abréviations BEM IRM OMV RT ZAR
Biopsie endomyocardique Imagerie par résonance magnétique Obstruction micro-vasculaire Rehaussement tardif Zone à risque
Introduction L’œdème myocardique est une composante physiopathologique importante de nombreuses cardiopathies aiguës, ischémiques ou non inschémiques (infarctus du myocarde, myocardite, syndrome de Tako-Tsubo, rejet de greffe. . .). À ce jour, seule l’IRM cardiaque permet une évaluation non invasive de l’œdème myocardique par l’utilisation de séquences pondérées T2. Ces séquences sont basées sur le fait que la relaxation transversale est allongée en présence d’œdème, du fait d’un contenu majoré en eau, mais surtout du fait d’une proportion accrue d’eau libre [1,2]. L’œdème apparaît en hypersignal sur ces séquences, la plus commune étant la séquence STIR (séquence spin-écho rapide avec triple inversion-récupération pour supprimer le signal de la graisse et du sang circulant et ainsi améliorer le contraste entre œdème, myocarde sain et cavité ventriculaire gauche). Les séquences pondérées T2 sont, cependant, associées à de nombreuses limitations les rendant peu robustes pour l’évaluation de l’œdème myocardique [3]. Ainsi, un faible rapport signal—bruit (d’où un contraste médiocre entre zone saine et zone œdémateuse), une grande dépendance aux inhomogénéités de champ magnétique, une perte de signal liée au mouvement cardiaque au travers du plan en cas de préparation sang noir, un hypersignal du flux lent sous-endocardique, la susceptibilité aux artéfacts de mouvement ou encore la nature subjective de l’interprétation [3,4]. Certains auteurs ont cherché à pallier ces limites par le développement d’une séquence hybride sang blanc TSE-SSFP en pondération T2 [5,6]. Le T2-mapping, ou cartographie du temps de relaxation transversal T2, est une séquence permettant de construire une image paramétrique sur la base du temps de relaxation transversal de chaque voxel. Cette revue reprend les connaissances actuelles du T2-mapping dans l’évaluation remnographique de l’œdème myocardique à 1,5 T.
Principes de la séquence de T2-mapping L’imagerie par résonance magnétique est basée sur l’enregistrement de l’énergie restituée par les protons à l’environnement lors de la phase de relaxation, énergie préalablement accumulée lors de la phase d’excitation. Cette relaxation comprend une composante longitudinale caractérisée par le temps de relaxation T1 (temps nécessaire pour recouvrer 63 % de l’aimantation initiale), et une composante transversale caractérisée par le temps de relaxation T2 (temps nécessaire pour recouvrer 37 % de l’aimantation initiale). Les valeurs T1 et T2 varient en fonction des caractéristiques biochimiques des tissus et représentent donc une aide au diagnostic remnographique.
La mesure du temps de relaxation T2 est réalisée par une séquence appelée T2-prepared SSFP [7]. Cette séquence, synchronisée à l’ECG sur le mode prospectif, génère 3 images pondérées T2, sur base d’une séquence balancedSSFP lancée après une préparation de l’aimantation. Cette préparation est appliquée sur une durée croissante (0, 24 et 55 ms) permettant d’appliquer des temps d’écho croissants, le temps de répétition étant de 3 intervalles RR afin que la relaxation longitudinale soit achevée (Fig. 1). Une courbe de relaxation transversale peut ainsi être construite en 7 intervalles RR, soit un temps d’acquisition de 7 secondes pour un patient à une fréquence cardiaque de 60 battements par minute. La valeur T2 (en ms) est calculée au niveau de chaque voxel permettant de créer une image paramétrique. Une correction de mouvement (MOCO) peut être appliquée. La cartographie T2 peut être étudiée visuellement en échelle de gris (ou de couleur) mais également faire l’objet de mesures rapides au niveau de régions d’intérêt. À 1,5T, la valeur T2 du myocarde normal a été mesurée à 52 ± 3 ms par Giri et al. sur 14 volontaires sains et à 55 ± 5 ms sur 73 volontaires sains par Wassmuth et al., la valeur étant indépendante de la surface corporelle ou de la fréquence cardiaque [7,8]. Ces valeurs ont été confirmées par plusieurs autres travaux (Verhaert et al., Manrique et al., Usman et al., Thavendiranathan et al. et Gouya et al. ont ainsi rapporté des valeurs de respectivement 55 ± 2, 56 ± 5, 52 ± 3, 54 ± 3 et 56 ± 4 ms sur des volontaires sains) [9—13]. Une étude a décrit une valeur T2 myocardique normale significativement plus élevée en 4 cavités (60 ms) qu’en petit axe (56 ms), probablement du fait d’un effet de volume partiel et d’un mouvement myocardique résiduel [8]. Enfin, la valeur T2 était dans cette étude inversement corrélée à l’épaisseur de la paroi, la région d’intérêt dessinée par l’observateur risquant d’inclure des voxels de la cavité ventriculaire gauche ou de la graisse épicardique en cas de paroi fine, phénomène à risque de « faux positifs » en pratique clinique [8]. La valeur normale du T2 myocardique a été mesurée plus basse à 3T (39 ± 5 ms) [14]. À la lumière de la littérature, il apparaît que la faisabilité et la reproductibilité de la séquence de T2-mapping soient excellentes. Ainsi, 100 % des images de l’étude de Verhaert et al. étaient analysables [9]. Une séquence plus ancienne (HASTE), utilisée par Manrique et al., était associée à un taux d’images analysables similaire [10]. Les reproductibilités intra-observateur et inter-observateur ont été rapportées élevées, de respectivement de 1 ± 1 et 1,6 ± 1,5 ms, le coefficient de variation en test-retest n’étant que de 7 % [8]. Ugander et al., réalisant une mesure de la zone à risque (en g, produit du volume myocardique dont la valeur T2 en ms est > 2DS la valeur du myocarde sain et de la densité du myocarde estimée à 1,05 g/cm3 ), ont également retrouvé une excellente reproductibilité intra- et inter-observateur, de respectivement 0,6 ± 2,6 et 1,4 ± 4,4 g [15]. La résolution spatiale est rapportée entre 2 × 1,5 × 6 mm à 2,5 × 2 × 8 mm [8,9,15].
Physiopathologie de l’œdème myocardique L’eau est à l’état normal répartie en un compartiment intracellulaire (77 %) et un compartiment intravasculaire
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Figure 1. Principe de la séquence T2-mapping — construction d’une cartographie T2 : A. Trois images sont acquises avec des durées différentes du module préparatoire T2 et avec un temps de répétition long permettant à la relaxation longitudinale d’être achevée. Sept battements cardiaques sont nécessaires pour l’acquisition en une apnée. Les trois images servent de base à la constitution d’une courbe de relaxation transversale et enfin au calcul de la valeur T2 de chaque voxel. B. Schéma du module préparatoire avec augmentation du temps (t) entre les différentes impulsions. C. Schéma de la séquence single shot balanced-SSFP utilisée qui permet une optimisation du contraste entre le myocarde et la cavité.
(23 %). Bien que les molécules d’eau diffusent au travers des membranes cellulaires et vasculaires, la composante interstitielle de l’eau intramyocardique est négligeable grâce au travail de pompes membranaires Na+/K+ ATPdépendantes ou encore du fait de liaisons entre molécules d’eau et protéines intracellulaires [16]. Différents dommages myocardiques aigus déséquilibrent cette balance hydrique et conduisent à une accumulation d’eau intracellulaire (œdème cytogénique) puis interstitielle (œdème vasogénique). L’œdème est une composante importante de nombreuses cardiopathies aiguës, comme l’infarctus du myocarde, la myocardite, le syndrome de Tako-Tsubo ou encore le rejet de greffe. La physiopathologie est multifactorielle et fonction de l’étiologie (par exemple, réduction de l’activité des pompes membranaires par déficit en ATP et clivage des liaisons eau-protéine par l’acidose dans l’ischémie, vasadilatation et majoration de la perméabilité capillaire dans les processus inflammatoires) [16,17]. Au-delà d’être un marqueur de dommage myocardique aigu, l’œdème est associé à une dysfonction systolo-diastolique du ventricule gauche, participe à la physiopathologie de l’obstruction micro-vasculaire ischémique (OMV), et est associé au risque de développement ultérieur de fibrose myocardique [18—20]. Dans l’infarctus aigu du myocarde, la zone à risque (ZAR) est définie comme le territoire potentiellement infarci en l’absence de reperfusion (territoire vascularisé par l’artère coronaire occluse). Elle peut être subdivisée en 2 composantes, un core nécrotique (zone infarcie non viable) et un croissant de « myocarde sauvé » (zone non infarcie viable). L’imagerie
de l’œdème péri-lésionnel a longtemps été une piste pour mesurer la ZAR, piste actuellement remise en question [21,22]. La présence d’eau étant source d’un allongement du temps de relaxation transversal T2, la séquence T2-mapping paraît prometteuse pour détecter et quantifier l’œdème myocardique.
Principaux domaines d’application du T2-mapping dans l’évaluation de l’œdème myocardique Œdème myocardique d’origine ischémique Il ressort de la littérature détaillée ci-après que la valeur T2 est significativement augmentée au niveau des segments infarcis, sans recouvrement avec la valeur T2 du myocarde adjacent ou du myocarde de volontaires sains. La sensibilité de détection de l’œdème d’origine ischémique est excellente, bien supérieure à celle de l’imagerie pondérée T2. La Fig. 2 illustre une coupe petit axe du ventricule gauche chez un patient présentant un tableau d’infarctus du myocarde, imagé dans notre centre. Une information complémentaire est ainsi apportée au rehaussement tardif par l’étude de l’œdème péri-lésionnel de l’infarctus du myocarde. Cette excellente sensibilité paraît prometteuse pour l’évaluation de patients avec précordialgies aiguës sans sus-décalage du segment ST ni
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Figure 2. Coupe petit axe du VG chez un patient présentant un tableau d’infarctus du myocarde. À gauche : le temps tardif post-gadolinium démontre une prise de contraste transmurale localisée au niveau de l’apex épargnant la paroi inférolatérale et inféroseptale en rapport avec la lyse myocytaire et avec la diffusion du contraste au niveau du secteur interstitiel (flèche). À droite : cartographie T2 avec en orange une augmentation du temps de relaxation T2 au niveau de l’apex du VG en rapport avec l’œdème secondaire à l’infarctus aigu (flèche).
élévation de la troponine, l’œdème myocardique étant précoce dans l’ischémie [23,24]. Par ailleurs, la détection d’un œdème myocardique pourrait être utile pour l’évaluation de patients avec précordialgies aiguës, électrocardiogramme non diagnostique, coronaires saines mais élévation de la troponine, sachant toutefois que le diagnostic étiologique de l’œdème reste impossible en l’absence de pattern caractéristique à l’ischémie.
Valeur T2 en zone à risque et en zone saine Chez l’animal, Ugander et al. ont observé un T2 allongé dans la région infarcie par rapport au muscle sain (71 ± 6 ms vs 49 ± 3 ms) [15]. Chez l’homme, Verhaert et al. ont retrouvé sur 27 patients admis pour infarctus et imagés à 2,1 ± 1,3 j un T2 dans la zone infarcie de 69 ± 6 ms contre 56 ± 3 ms en zone saine (p < 0,0001), cette dernière valeur n’étant pas différente de celle observée chez les contrôles (56 ± 2 ms, p = NS) [9]. Le recouvrement des valeurs T2 entre zones infarcie et saine est quasi nul. En présence d’OMV, le T2 est comparable à celui du muscle sain (n = 13, 59 ± 6 ms). Manrique et al., sur une population de 24 patients admis pour infarctus avec sus-décalage du segment ST reperfusés, imagés dans les 7 jours, relatent des résultats comparables (infarctus 85 ± 24 ms, myocarde sain 63 ± 10 ms, p = 0,0001), avec cependant un T2 du myocarde sain plus élevé dans la population de patients que chez les volontaires sains (56 ± 5 ms, p < 0,0001), témoignant du fait que l’œdème ne se limite pas à la ZAR [10]. La valeur T2 sous-endocardique n’a pas été mesurée différente de la valeur sous-épicardique en zone infarcie, observation discordante avec la physiologie, l’œdème étant supérieur d’un facteur 9 en zone infarcie qu’au niveau du myocarde sauvé [22]. Ceci est un argument contre l’utilisation du T2-mapping pour l’évaluation de la ZAR par T2-mapping.
par T2-mapping en comparaison à la technique de référence par microsphères (26 ± 2 g et 23 ± 1 g respectivement) [15].
Œdème myocardique d’origine non ischémique Concernant l’œdème myocardique d’origine non ischémique, la valeur T2 est significativement plus élevée au niveau des zones d’œdème qu’au niveau du myocarde sain, et ce dans des situations pathologiques variées (myocardite, syndrome de Tako-Tsubo, rejet de greffe, cardiopathie acromégale). La Fig. 3 illustre une coupe petit axe du ventricule gauche chez un patient présentant des signes évocateurs de myocardite virale, imagé dans notre centre. Une valeur seuil de 59 ms est ainsi associée à une sensibilité et une spécificité de détection de l’œdème de 94 et 97 % respectivement, chiffres dépassant largement ceux des séquences pondérées T2 [12]. Les résultats sont notamment prometteurs pour le suivi des patients greffés cardiaques, à la recherche de signes de rejet. En effet, la BEM, gold standard actuel pour le diagnostic de rejet, est un geste invasif et dont les résultats sont limités aux carottes biopsiques (risque de faux négatif en cas de processus localisé, impossibilité à définir l’extension du phénomène). Une cartographie T2 pourrait être réalisée en première intention, avec réassurance en cas de résultat normal (T2 < 56 ms) et au contraire indication de BEM en cas de résultat pathologique [25]. Cette équipe relate de plus l’histoire de patients avec T2 pathologique (> 56 ms) contemporain d’une biopsie rassurante (grade 0 ou 1) mais développement ultérieur d’un rejet ≥ 2, observation probablement liée au caractère focal et donc partiel du diagnostic histologique, l’IRM permettant une évaluation globale.
Rejet de greffe cardiaque Détection des segments infarcis En comparaison au rehaussement tardif (RT), Verhaert et al. ont retrouvé une sensibilité de détection par patients de 96 % (analyse visuelle, 26/27 patients), contre 72 % en T2STIR (18/25 patients, 2 échecs d’acquisition pour apnée) [9]. La sensibilité n’a pas été évaluée par segments ou par seuillage. Sur modèle animal, Ugander et al. n’ont pas retrouvé de différence significative concernant l’estimation de la ZAR via une quantification de l’œdème péri-lésionnel
Marie et al. ont mesuré la valeur T2 du septum interventriculaire de patients bénéficiant d’une biopsie endomyocardique (BEM) dans les 7 jours, sans traitement immunosuppresseur dans l’intervalle [25]. Cent vingt-trois IRM ont été réalisées, 19 patients présentant un rejet de grade ≥ 2 de la classification Society for Heart Lung Transplant. Le T2 était de 50 ± 5 ms, 51 ± 5 ms et 51 ± 8 ms (p = NS) dans les groupe 0, 1A et 1B (i.e. respectivement pas de rejet, rejet focal discret et rejet diffus discret). Au contraire, la valeur était
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Figure 3. Coupe petit axe du VG chez un patient présentant des signes évocateurs de myocardite virale. À gauche : le temps tardif post-gadolinium démontre une prise de contraste localisée au niveau de la région moyenne du septum en rapport avec la lyse myocytaire et avec la diffusion du contraste au niveau du secteur interstitiel (flèche). À droite : cartographie T2 avec en orange une augmentation du temps de relaxation T2 qui s’étend sur tout le septum et la paroi antérieure du VG (flèche).
plus élevée en cas de rejet de grade 2 (57 ± 5 ms, p < 0,05, rejet focal modéré) et plus encore en cas de rejet de grade 3 (65 ± 8 ms, p < 0,05, rejet multifocal modéré ou rejet diffus modéré). Aucun patient n’a présenté de rejet sévère (grade 4). Un rejet de grade ≥ 2 est ainsi associé à un T2 de 60 ± 7 ms, valeur plus élevée que pour les grades 0—1 (51 ± 6 ms, p = 0,0001), permettant de définir une valeur seuil de 56 ms (> 2DS de la valeur normale) pour la détection du rejet associée à une sensibilité de 89 %, une spécificité de 70 %, une valeur prédictive négative de 97 %, la valeur prédictive positive n’étant que de 35 %. Usman et al. se sont également penchés sur le sujet (25 patients). Le T2 enregistré était plus élevé chez les 3 patients présentant un rejet (62 ± 3 ms vs 52 ± 2 ms), et s’est systématiquement normalisé après traitement immunosuppresseur, laissant entrevoir que l’IRM permettrait non seulement le diagnostic de rejet mais également le suivi du traitement immunosuppresseur [11].
Autres situations cliniques associées à de l’œdème Usman et al. ont réalisé un travail portant sur 65 patients comportant 20 contrôles, 25 greffés cardiaques, 12 infarctus aigus, 6 myocardites aiguës et 1 syndrome de Tako-Tsubo [26]. La valeur T2 relevée est comparable dans les différentes situations tant en zone saine (de l’ordre de 52 ms) qu’en zone pathologique (de l’ordre de 65 ms). En particulier, le T2 a été retrouvé à 67 ± 8 ms dans les myocardites aiguës et à 68 ± 4 ms dans les syndromes de Tako-Tsubo (segments apicaux et médians). Thakrar et al. ont observé sur 25 patients présentant une myocardite aiguë une valeur T2 plus élevée au niveau des segments présentant un RT (70 ms) qu’au niveau des autres segments (60 ms) [27]. Thavendiranathan et al. ont retrouvé, sur 30 contrôles et 30 patients avec myocardite aiguë (n = 20) ou syndrome de Tako-Tsubo (n = 10), une valeur T2 plus élevée dans le myocarde atteint que dans le reste du myocarde, cette dernière
étant comparable à celle observée chez les volontaires sains (respectivement 65 ± 3 ms vs 54 ± 2 ms, p < 0,001 et 66 ± 4 ms versus 54 ± 3 ms, p < 0,001) [12]. Une valeur seuil de 59 ms est ainsi associée à une sensibilité et une spécificité de détection de l’œdème de 94 et 97 % respectivement. Les auteurs soulignent que la région anormale détectée visuellement par T2-mapping dépasse la région dysfonctionnelle ou présentant un RT et que l’imagerie pondérée T2 (STIR) n’était analysable que chez 47 % des patients (apnée, arythmie, artefacts). Sur les 14 patients restants, 2 T2-STIR apparaissaient normales alors que le T2-mapping était pathologique. Enfin, Gouya et al. ont réalisé un travail sur la cardiopathie acromégale, associée à un œdème myocardique réversible sous traitement (adénomectomie transsphénoïdale ou analogues de la somatostatine) [13]. Sur 15 patients, le T2 avant traitement était de 71 ± 12 ms, significativement plus élevé que chez les contrôles (56 ± 4 ms, p = 0,0003), et a diminué à 58 ± 7 ms après traitement (p = 0,0007), rejoignant une valeur non significativement différente des contrôles.
Limites Les études sont peu nombreuses, monocentriques, et portent sur de faibles échantillons de patients. L’étude de l’apex est difficile (effet de volume partiel). Les parois fines sont à risque de « faux positifs » (risque d’inclusion de voxels de la cavité ventriculaire gauche ou de la graisse épicardique). L’interprétation est visuelle et donc à risque de subjectivité, soulignant l’intérêt de valeurs seuils comme proposées par certains auteurs, tout en sachant qu’il s’agit non pas de phénomènes « tout-ou-rien » mais de processus pathologiques se présentant comme un continuum entre zone saine et épicentre pathologique [12,25]. Une approche hybride est peut-être à retenir, à savoir d’associer l’impression visuelle à la mesure du T2 au niveau de régions
22 d’intérêt choisies par le clinicien, technique applicable en pratique clinique quotidienne. Le diagnostic étiologique reste hors de portée, les études n’ayant pas permis de différencier des patterns particuliers selon les différentes causes d’œdème myocardique. Enfin, si les principaux constructeurs proposent la séquence T2-mapping, celle-ci reste optionnelle et donc non systématiquement disponible.
Conclusion Le T2-mapping permet de mesurer le temps de relaxation transversal T2 au niveau de chaque voxel puis de créer une image paramétrique (l’intensité reflétant la valeur T2 mesurée). La cartographie obtenue peut être étudiée visuellement en échelle de gris (ou de couleur) et faire l’objet de mesures rapides (régions d’intérêts). Il ressort de la littérature actuellement disponible que le T2-mapping est une technique hautement faisable et reproductible, permettant de détecter et de quantifier l’œdème myocardique, d’origine ischémique ou non ischémique, à la manière de l’imagerie T2* dans l’évaluation de la surcharge ferrique (séquence turbo-spin-écho multi-échos). Les avantages de cette séquence en comparaison à l’imagerie pondérée T2 sont nombreux (temps d’acquisition court, haute reproductibilité, absence de faux positifs liés au flux lent sous-endocardique, possibilité de quantification et donc diagnostic moins empreint de subjectivité. . .). Des limites persistent, cependant, et de larges études multicentriques sont nécessaires pour valider son utilisation en pratique quotidienne.
Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
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