Hypoparathyroïdie fonctionnelle chez des femmes post-ménopausées avec fracture de fragilité

Hypoparathyroïdie fonctionnelle chez des femmes post-ménopausées avec fracture de fragilité

Revue du rhumatisme 79 (2012) 57–62 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Article original Hypoparathyroïdie fonctionnelle chez des femmes...

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Revue du rhumatisme 79 (2012) 57–62

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Hypoparathyroïdie fonctionnelle chez des femmes post-ménopausées avec fracture de fragilité夽 Adamah Amouzougan a , Florence Chopin a,b , Silvy Laporte c , Laurence Vico b , Thierry Thomas a,∗,b a b c

Inserm U1059, service de rhumatologie, centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, 42055 Saint-Étienne cedex 2, France LBTO-Inserm U1059, université Jean-Monnet, 42023 Saint-Étienne, France URCIP, EA3065, université Jean-Monnet, 42023 Saint-Étienne, France

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Accepté le 7 avril 2011 Disponible sur Internet le 15 décembre 2011 Mots clés : Densité minérale osseuse Fractures de fragilité Hyperparathyroïdie Ostéoporose post-ménopause Vitamine D

r é s u m é Introduction. – L’hyperparathyroïdie secondaire est parfois absente en dépit d’une authentique insuffisance en vitamine D (IVD) et le concept d’hypoparathyroïdie fonctionnelle avec effet protecteur du statut osseux a été proposé. Ainsi, nous avons testé l’hypothèse selon laquelle sa prévalence était très faible dans une population de femmes avec fractures périphériques de fragilité. Méthodes. – Nous avons conduit notre étude chez des femmes post-ménopausées, admises pour ce type de fracture dans notre unité « fracture liaison service ». Toutes disposaient d’une densité minérale osseuse (DMO), d’une évaluation biochimique et avaient rec¸u une visite médicale. Résultats. – Deux cent trente-sept femmes (72,9 ± 11,6 ans) furent incluses parmi lesquelles 90,4 % présentaient une IVD 25(OH)D inférieure ou égale à 30 ng/ml. Néanmoins, 87,9 % de celles-ci présentaient un niveau de PTH normal inférieur ou égal à 64 ng/l. Dans cette population avec IVD (n = 214), nous n’avons pas identifié de niveau de PTH en plateau lié à l’25(OH)D depuis qu’une récente étude a rapporté une augmentation du risque fracturaire uniquement quand la 25(OH)D était inférieure à 15 ng/ml, nous avons considéré cette valeur comme nouveau seuil. Nous avons observé une différence significative dans la DMO de la hanche entre les patientes avec 25(OH)D soit inférieure ou égale à ou supérieure à 15 ng/ml. Cependant, 81,2 % des précédentes présentaient des taux de PTH normaux sans différence de DMO que le taux de PTH soit supérieur aux valeurs normales ou contenu dans celles-ci. Conclusion. – Dans une population de femmes post-ménopausées avec fracture de fragilité, nous avons observé qu’une 25(OH)D inférieure ou égale à 15 ng/ml était associée à une DMO de la hanche significativement plus basse. Même en utilisant ce faible seuil, nous avons trouvé une forte prévalence d’hypoparathyroïdie fonctionnelle et elle n’était pas associée avec quelque différence, que ce soit au niveau de la DMO de la hanche ou du rachis. De fac¸on générale, nos résultats ne confirment pas l’hypothèse d’un effet protecteur de ce type de profil biologique. © 2011 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

1. Introduction En plus du rôle important et bien identifié qu’elle a dans le métabolisme du calcium et la santé osseuse, la vitamine D a montré, ainsi que décrit dans une littérature abondante, qu’elle pouvait jouer un rôle dans le début de développement d’une large variété de maladies comme la sclérose en plaques, les maladies autoimmunes et les cancers de la prostate ou du colon [1,2]. Cependant, l’insuffisance en vitamine D (IVD) (25[OH]D) est très fréquente dans la population générale. Le seuil limite définissant l’IVD varie d’une

夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc¸aise de cet article, mais la référence anglaise de Joint Bone Spine (doi:10.1016/j.jbspin.2011.04.005). ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (T. Thomas).

étude à l’autre, ce qui influence considérablement la prévalence de l’IVD dans la population générale. Cette dernière varie de 14 à 75 % quand la valeur seuil normale de (25[OH]D) varie de 12 à 30 ng/ml [3]. La prévalence est même plus élevée chez les femmes atteintes d’ostéoporose, de 60 [4] à 76 % [5] dans cette population dont jusqu’à 98 % vivent en institutions [6]. Il est généralement admis que l’hyperparathyroïdie secondaire à une IVD augmente le remodelage osseux conduisant à long-terme à une perte osseuse, particulièrement au niveau de l’enveloppe corticale [7]. De plus, l’IVD est également inducteur de sarcopénie, de troubles de l’équilibre de la marche et augmente le risque de chute [8,9]. Ces phénomènes conduisent à une augmentation du risque de fracture [10,11] et la supplémentation combinée de la vitamine D avec le calcium a montré son efficacité dans la réduction du risque fracturaire ostéoporotique en permettant aux patients de ne pas être placés en institution [12].

1169-8330/$ – see front matter © 2011 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rhum.2011.04.015

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De nombreuses études ont montré une corrélation significative entre les taux sériques de vitamine D et de parathormone (PTH) en cas d’IVD [13–15]. L’augmentation des taux de PTH intacte paraît être en relation avec l’IVD quand le taux de 25(OH)D est inférieur ou égal à 30 ng/ml [3]. Toutefois, cette hyperparathyroidïe secondaire est quelquefois absente en dépit d’une authentique carence en 25(OH)D. Ainsi, le concept d’hypoparathyroïdie a été proposé chez les femmes post-ménopausées avec hypovitaminose D et taux sérique de PTH inapproprié avec rôle paradoxal protecteur du statut osseux, en raison du manque de mécanismes compensateurs, mais délétères, de ce profil métabolique [14]. En fait, l’hypoparathyroïdie fonctionnelle a été associée à une densité minérale osseuse totale de hanche supérieure, en comparaison à l’hyperparathyroïdie secondaire [14]. Ainsi, nous avons évalué la prévalence d’hypoparathyroïdie fonctionnelle dans une population de femmes atteintes d’ostéoporose post-ménopausale admises dans notre institution pour fracture périphérique de fragilité (par exemple, poignet, extrémité supérieure humérale ou fémorale) avec l’hypothèse que cette prévalence était vraiment faible dans cette population. Nous avons également étudié le profil biologique et densitométrique des patients ostéoporotiques en fonction de la prévalence de l’hypoparathyroïdie fonctionnelle.

2. Méthodes 2.1. Patients La population de cette étude était constituée de femmes postménopausées, âgées en moyenne de 79,23 ± 12 ans, admises à l’hôpital universitaire de Saint-Étienne (latitude 45,44◦ N) entre juin 2003 et mai 2007, pour une fracture à basse énergie du poignet, de l’extrémité supérieure humérale ou fémorale dans une unité « fracture liaison service » dédiée aux patientes ostéoporotiques. Une mesure de DMO de la hanche et du rachis a été effectuée par DXA chez toutes les patientes, ainsi que l’évaluation du métabolisme biologique phosphocalcique et une visite médicale. Sur un total de 1098 femmes, 151 furent exclues en raison de l’absence de visite, du manque de consentement ou d’un décès, 162 femmes avec anomalies biologiques (par exemple, TSH, créatininémie) ou un traitement modifiant le remodelage osseux incluant la L-thyroxine, les biphosphonates, le ranélate de strontium et l’association calcium/vitamine D ; de plus, 534 furent exclues en raison de l’absence de DMO due à des raisons diverses (par exemple, très mauvais statut médical, démence, état grabataire ou troubles lombaires ou de la hanche) ou autres valeurs manquantes (n = 14). Deux cent trente-sept femmes (âge moyen 72,9 ± 11,6 ans) furent retenues dans l’étude (Fig. 1).

2.2. Densité minérale osseuse mesurée par DXA La DMO de surface (DMO, g/cm2 ) fut mesurée 45 jours après l’apparition de la fracture au niveau du rachis lombaire (L2-L4) et de la hanche totale sur le côté non fracturé par absorptiométrie aux rayons X à double intensité DXA (Delphi, Hologic, France). 2.3. Dosages biologiques Après une nuit de diète, les échantillons sanguins étaient recueillis dans des tubes secs en verre et les échantillons sériques étaient conservés à −20 ◦ C avant l’étude. Les tests sanguins étaient réalisés soit 45 jours après la fracture au moment de la visite de contrôle, soit durant l’hospitalisation dans le service d’orthopédie. Les paramètres biologiques suivants furent mesurés : vitesse de sédimentation (VS), numération formule, électrophorèse des protéines, calcium sérique, phosphate sérique, 25(OH)D, PTH, TSH, CTX (télopeptide C terminal) et créatinine. Les taux sériques de vitamine D (25[OH]D2 + D3) furent déterminés en utilisant une méthode radio-immunologique chimioluminescente automatisée (Liaison/DiaSorin, Saluggia, Italie) avec coefficients de variation intra- et inter-test de 2,9 et 6,3 % respectivement. Nous avons considéré les taux sériques de 25(OH)D insuffisants quand ils étaient inférieurs ou égaux à 30 ng/ml [3,4]. Les taux indétectables de 25(OH)D furent considérés pour des valeurs égales à 3 ng/ml. Les taux sériques de PTH intacte (valeurs normales : 20–64 ng/l) furent déterminés en utilisant une méthode radio-immunologique avec chimioluminescence (Immulite 2000/Siemens DPC, New Jersey, États-Unis) avec des coefficients inter- et intra-tests inférieurs à 9 %. Sur la base des valeurs normales, nous avons défini l’hyperparathyroïdie comme un taux de PTH supérieur à 64 ng/l et l’hypoparathyroïdie fonctionnelle comme la combinaison d’un taux de PTH dans les valeurs normales et d’un taux de 25(OH)D inférieur ou égal à 30 ng/ml. Par la suite, nous avons utilisé une définition plus restrictive avec un taux de PTH supérieur à 46 ng/l, comme décrit par Souberbielle et al. [4] dans une population saine de 140 hommes et 140 femmes avec un taux sérique de 25(OH)D de 12 ng/l. Le télopeptide C-terminal sérique (CTX) était mesuré avec une technique immunoenzymatique de type sandwich (CrossLaps-S Elisa, Nordic Bioscience Diagnostics A/S, Herlew, Denmark). Les coefficients de variations intra- et inter-essais étaient respectivement inférieurs à 5 et 8,1 %. Les valeurs de CTX sérique pour les femmes post-ménopausées étaient de 742 à 7579 pmol/l. Les valeurs normales pour les autres paramètres étaient les suivantes : calcémie 2,0–2,5 mmol/l ; phosphatémie 0,87–1,5 mmol/l ; TSH 3G 0,18–4 mUI/l (Immulite 2000/Siemens DPC, États-Unis). 2.4. Analyse statistique

Femmes incluses dans l’unité “fracture liaison service” n=1098 Femmes exclues: n=861 Femmes enrolées dans l’étude n=237

Femmes avec 25(OH)D >30 ng/ml n= 23

Femmes avec 25(OH)D <30ng/ml n= 214

L’analyse statistique a été réalisée en utilisant le logiciel Statview, version 5,0 (SAS Institute Inc. Cary, NC, États-Unis). Les résultats étaient exprimés en moyenne ± la déviation standard. La comparaison entre les groupes a été réalisée au moyen d’un test t non-apparié. Une analyse de variance (Anova) avec un test de Bonferoni a été conduite pour l’ajustement de l’analyse. Nous avons utilisé le coefficient de corrélation de Pearson pour déterminer la corrélation entre les variables quantitatives. Une valeur de p < 0,05 était considérée significative. 3. Résultats

Femmes avec insuffisance en vitamine D et PTH normale n= 188

Fig. 1. Diagramme de l’étude.

Femmes avec insuffisance en vitamine D et PTH élevée n= 26

3.1. Caractéristiques anthropométriques Il n’existait pas de différence statistiquement significative concernant l’âge, le poids et la taille entre les deux groupes

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Tableau 1 Caractéristiques de la population. Sous-groupes définis par les taux sériques de 25(OH)D et de PTH 25(OH)D > 30 ng/ml n = 23 Caractéristiques anthropométriques Âge au moment de la fracture (ans) Taille, cm Poids, kg Valeurs sériques biologiques Calcium, mmol/l Phosphore, mmol/l CTX, pmol/l 25(OH)D, ng/ml PTH, ng/l DMO, g/cm2 Rachis lombaire Hanche

71,4 ± 11,5 160,0 ± 6,7 61,0 ± 8,2 2,36 1,14 5958,5 39,86 31,60

± ± ± ± ±

0,13c 0,17 3480,9 7,57a,b 11,36b

0,845 ± 0,137 0,744 ± 0,112

25(OHD) < 30 ng/ml et PTH normal n = 188 72,5 ± 12,0 160,0 ± 6,6 63,2 ± 15,2 2,31 1,32 5701,05 13,95 34,22

± ± ± ± ±

0,16 0,46 3246,6 7,69b 13,18b

0,827 ± 0,166 0,737 ± 0,169

25(OH)D < 30 ng/ml et PTH élevé n = 26 76,9 ± 8,4 158,5 ± 6,0 65,2 ± 11,8 2,27 1,07 6113,6 7,72 101,66

± ± ± ± ±

0,15 0,23 3558,3 5,54 36,52

0,830 ± 0,124 0,766 ± 0,170

Les données sont exprimées en moyenne ± DS. a p < 0,001 versus sous-groupe avec 25(OH)D supérieure à 30 ng/ml et PTH normale. b p < 0,001 versus sous-groupe avec 25(OH)D supérieure à 30 ng/ml et PTH élevée. c p < 0,05 versus sous-groupe avec 25(OH)D inférieure à 30 ng/ml et PTH élevée.

(Tableau 1). Il n’existait pas non plus de différence pour ces paramètres entre les sous-groupes de patients avec IVD ou taux sérique de PTH normal ou élevé. Les 237 patients inclus dans l’étude étaient plus jeunes que la population générale (72,9 ± 11,6 vs 79,23 ± 12 ans respectivement) comme attendu et en raison de la présence de nombreux critères d’exclusion.

Parce que l’hyperparathyroïdie secondaire était trop peu fréquente, nous avons pensé que le seuil de vitamine D utilisé était inapproprié dans notre population âgée. En trac¸ant les taux de 25(OH)D et de PTH sérique, nous avons observé la relation

3.2. Paramètres biochimiques Vingt-trois des 237 femmes (9,7 %), âgées en moyenne de 71,4 ± 11,5 ans, présentaient des taux de 25(OH)D normaux alors que 214 (90,3 %), d’âge moyen 73 ± 11,6 ans avaient une IVD. Il n’existait pas de différence statistiquement significative de la calcémie, de la phosphatémie et du CTX entre les femmes avec IVD et les femmes avec taux sérique de vitamine D normal (Tableau 1). Nous avons identifié une corrélation négative entre les taux sériques de 25(OH)D et de PTH dans la population totale (r = −0,29 ; p < 0,0001) (Fig. 2). Une corrélation négative entre les taux sériques de 25(OH)D et de PTH était encore observée chez les femmes atteintes d’IVD (r = −0,35 ; p < 0,0001) (Fig. 2). Toutefois, seulement 12,5 % des femmes avec IVD présentaient des taux sériques de PTH élevés, reflétant une hyperparathyroïdie secondaire. Il n’existait pas de différence statistiquement significative concernant la calcémie, la phosphatémie, le CTX entre ce sous-groupe de femmes et le groupe de femmes avec IVD et taux normal de PTH. Une augmentation légère mais non significative du remodelage osseux a été observée chez les précédentes par rapport aux dernières. Au total, le remodelage osseux, ainsi qu’évalué par le taux de CTX, était élevé mais l’interprétation de ces valeurs était biaisée par la présence de la fracture récente et aucune autre conclusion ne pouvait être établie. Nous avons également observé une différence statistiquement significative de la calcémie entre les femmes avec IVD et taux de PTH élevé et les femmes avec taux de vitamine D normal avant et après ajustement sur l’âge (2,27 ± 0,15 mmol/l vs 2,36 ± 0,13 mmol/l respectivement ; p = 0,026). Le taux de 25(OH)D était significativement plus élevé chez les patientes avec IVD et taux de PTH normal par rapport aux femmes présentant un taux de PTH élevé (13,9 ± 7,7 ng/ml et 7,7 ± 5,5 ng/ml respectivement, p < 0,001) et significativement plus faible que chez les patientes avec 25(OH)D normal (p < 0,001). De plus, 11,2 % des patientes avec IVD et taux de PTH normal avaient des taux de 25(OH)D indétectables.

Fig. 2. Corrélation entre vitamine D sérique (25[OH]D) et PTH intacte sérique : (a) dans la population totale de l’étude (r = −0,29 ; p < 0,0001) et ; (b) dans le sousgroupe de patients avec insuffisance en vitamine D définie par 25(OH)D inférieure à 30 ng/ml (r = −0,35 ; p < 0,0001).

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Tableau 2 Valeurs moyennes de PTH intacte sériques pour différents taux de vitamine D sérique. 25(OH)D, ng/ml

n

PTH intacte, ng/l

≤5

37

70,35 ± 43,06

5–10

51

40,85 ± 25,63

10–15

45

38,68 ± 20,73

15–20

35

34,26 ± 13,49

20–25

32

31,57 ± 13,97

25–30

14

31,54 ± 11,04

Les données sont exprimées en moyenne + DS.

suivante : PTH intacte (ng/l) = 74,59 × 25(OH)D (ng/ml)−0,315 (Tableau 2 ; Fig. 3). Dans notre population, le taux de PTH intacte n’atteignait pas de plateau. En fait, nous avons été incapables de déterminer un point d’inflexion graphique en termes mathématiques puisque la pente du pouvoir de régression restait négative et ne changeait pas la direction de la croissance. De plus, nous n’avons pas observé de corrélation significative entre le taux de PTH et l’âge dans les groupes, indépendamment des critères de définition utilisés, suggérant l’absence de mécanisme lié à l’involution des glandes parathyroïdes avec l’âge. Sur la base de données récentes montrant que dans la population âgée le risque de fracture augmente quand la 25(OH)D est inférieur à 15 ng/ml [18], nous avons divisé notre population en deux groupes basés sur ce taux de 25(OH)D (Fig. 3). Nous n’avons pas observé de différence statistique de phosphatémie et de CTX entre les deux groupes alors que la calcémie était significativement plus élevée chez les femmes avec 25(OH)D supérieure ou égale à 15 ng/ml en comparaison aux femmes avec 25(OH)D inférieure à 15 ng/ml avant et après ajustement sur l’âge ; p < 0,05 (Tableau 3). Finalement, en utilisant un seuil supérieur de 46 ng/l pour la PTH normale, comme proposé par Souberbiell et al., à partir d’une population de référence sans déficit en 25(OH)D [4], nous n’avons observé aucune différence en termes de calcémie, phosphatémie et CTX entre les patientes avec IVD et taux de PTH normal (n = 144) et celles avec IVD et taux de PTH élevé (n = 70), même après ajustement sur l’âge, la taille et le poids. Il est à noter qu’en utilisant la même définition dans notre population, le seuil supérieur de PTH était très proche, mesuré à 44 ng/ml. Les taux sériques moyens de 25(OH)D étaient plus élevés et les taux de

Tableau 3 Caractéristiques des sous-groupes définis par un taux de 25(OH)D de 15 ng/ml. 25(OH)D ≤ 15ng/ml n = 133 Valeurs biochimique sériques Calcium, mmol/l Phosphore, mmol/l CTX, pmol/l 25(OH)D, ng/ml PTH, ng/l DMO, g/cm2 Rachis lombaire Hanche

2,29 0,98 6029,2 8,11 48,32

± ± ± ± ±

0,16a,b 0,20 3506,1 3,96a,b 32,97a,b

0,818 ± 0,165 0,724 ± 0,161c

25(OH)D > 15 ng/ml n = 104

2,34 1,22 5846,7 25,92 32,34

± ± ± ± ±

0,16 0,10 3235,4 10,09 13,24

0,844 ± 0,150 0,761 ± 0,168

Les données sont exprimées en moyenne ± SD. a p < 0,05, significativement différent. b p < 0,05, significativement différent après ajustement sur l’âge. c p < 0,05, significativement différent après ajustement sur l’âge, la taille et le poids.

PTH moyens étaient plus bas dans le groupe d’avant que chez les dernières (14,78 ± 7,54 ng/ml vs 9,91 ± 7,06 ng/ml ; p < 0,0001 et 28,66 ± 9,23 ng/ml vs 70,72 ± 32,80 ng/ml ; p < 0,0001, respectivement). 3.3. Valeurs de densité minérale osseuse Aucune différence statistiquement significative n’était observée au niveau des DMO du rachis lombaire et de la hanche entre les patientes avec taux de 25(OH)D normal ou insuffisant inférieur ou égal à 30 ng/ml, indépendamment du taux de PTH avant et après ajustement sur des facteurs confondants comme l’âge, le poids et la taille (Tableau 1). Nous avons observé des données similaires quand nous avons utilisé un seuil de PTH normal plus élevé de 46 ng/l sans différence significative de la DMO du rachis lombaire et de la hanche entre les patients avec IVD et avec taux normal de PTH et ceux avec IVD et taux de PTH élevé, même après ajustement sur l’âge, la taille et le poids (0,742 ± 0,173 g/cm2 vs 0,736 ± 0,163 g/cm2 ; p = 0,73 et 0,821 ± 0,164 g/cm2 vs 0,841 ± 0,156 g/cm2 ; p = 0,41, respectivement). En utilisant 15 ng/ml comme seuil (Tableau 3), une tendance vers une plus faible DMO de la hanche était observée chez les patientes avec des taux insuffisants de vitamine D, en comparaison à celles présentant des taux normaux (0,724 ± 0,161 g/cm2 vs 0,761 ± 0,150 g/cm2 ; p = 0,09). Cette différence devenait significative après ajustement sur l’âge, le poids et la taille (p = 0,018). Cependant, les patientes présentant une IVD inférieure ou égale à 15 ng/ml et PTH normale étaient celles dont la DMO de la hanche était la plus faible, en comparaison à celles disposant d’un taux de PTH élevé (0,715 ± 0,157 vs 0,766 ± 0,174, respectivement ; p = 0,15) ou encore taux de vitamine D normal (0,761 ± 0,168 ; p = 0,04). 4. Discussion

Fig. 3. Relation entre les valeurs de PTH intacte sérique et de 25(OH)D chez les femmes avec insuffisance en vitamine D définie par 25(OH)D inférieure ou égale à 30 ng/ml (PTH intacte [ng/l] = 74,59 × 25(OH)D (ng/ml)-0,315 ; p < 0,001).

L’IVD est hautement prévalente chez les femmes présentant une ostéoporose sévère et la fréquence de 90 % observée, dans cette étude, est cohérente avec les études précédentes [14,19,20]. À l’inverse, l’hyperparathyroïdie secondaire liée à l’IVD était rare dans notre population en dépit d’une corrélation modérée et pressentie négative entre les taux sériques de vitamine D et de PTH [4,14,15]. La très forte prévalence du soi-disant profil biologique d’hypoparathyroïdie que nous rapportons ici (79,3 %), se situait en fait dans les valeurs les plus hautes (par exemple, 65 à 75 %) des études précédemment publiées conduites chez des populations de femmes post-ménopausées ostéoporotiques [14,19,21].

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Ces résultats ne confirment pas l’hypothèse d’un rôle protecteur de ce type de profil biologique. En fait, parce que l’hyperparathyroïdie secondaire à une IVD a été considérée comme un mécanisme important de la fragilité osseuse, avec perte principale de l’os corticale [22], on se serait attendu à une faible prévalence d’hypoparathyroïdie fonctionnelle dans cette population. De plus, nous n’avons pas observé de différence significative des valeurs de DMO lombaire ou de la hanche entre les patientes avec IVD et taux normaux de PTH. Ces données contrastent avec celles décrites par Sahota et al. [14,16], puisqu’elles montrent des valeurs de DMO de la hanche significativement élevées chez les patientes avec hypoparathyroïdie fonctionnelle en comparaison à celles atteintes d’hyperparathyroïdie secondaire. De fac¸on remarquable, au lieu d’une valeur seuil de vitamine D de 30 ng/ml, Sahota et al. [14] ont défini leur valeur seuil à 12 ng/ml. La définition d’IVD demeure une grande source de débat [13,23–25]. Le seuil recommandé de 30 ng/ml a été déterminé sur la base de plusieurs considérations cliniques et biologiques. Sur la base de résultats d’études interventionnelles utilisant la vitamine D dans la prévention de la fracture primaire, Bischoff-Ferrari et al. ont suggéré que la concentration cible la plus avantageuse en 25(OH)D débute à 30 ng/ml [17]. De plus, les taux sériques de PTH intacte sont supposés augmenter quand les taux de 25(OH)D sont inférieurs à 30 à 50 ng/ml [3,7,26] mais l’âge, la fonction rénale [27], la prise de calcium [28,29], le taux de magnésium [30,31] peuvent être des facteurs confondants. En fait, dans une population de femmes ménopausées âgées de 64 ± 9 ans, Heaney et al. [26] ont conclu que l’effet optimal de la vitamine D sur l’absorption intestinale du calcium était à la concentration sérique de 25(OH)D de 34,6 ng/ml. De la même fac¸on, dans de grandes séries de femmes âgées de 66 ± 10 ans avec IVD définie comme suit 25(OH)D inférieur ou égal à 16 ng/ml, la malabsorption calcique apparaissait seulement quand le 25(OH)D était inférieur à 4,4 ng/ml [32]. L’évaluation de l’absorption du radiocalcium montrait une absorption plus faible de 28 % chez les femmes de 75 ans compares aux autres, suggérant un déclin lié à l’âge dans le transport du calcium actif [33]. À la suite de ces incohérences ; nous nous sommes alors demandés pourquoi 79,3 % de la population de notre étude ne présentait pas une réponse compensatoire à l’IVD puisque la définition de l’IVD que nous avons utilisée (30 ng/ml) était en fait inappropriée à cette population âgée de 72,5 ± 12 ans et présentant une ostéoporose sévère. Cela est concordant avec les données de l’étude de Garnero’s dans la cohorte OFELY [34]. Depuis qu’une étude récemment publiée a montré que dans une population âgée, le risque de fracture augmentait quand le 25(OH)D était inférieur à 15 ng/ml [18], nous avons arbitrairement utilisé cette valeur limite, plus proche de la valeur utilisée par Sahota et al. [14]. Nous avons étudié deux sous-populations qui n’étaient pas statistiquement différentes pour la plupart des paramètres. De fac¸on intéressante, la DMO de la hanche était supérieure dans le sous-groupe avec 25(OH)D > 15 ng/ml, en comparaison au groupe avec 25(OH)D inférieur ou égal à 15 ng/ml et cette différence devenait significative après ajustement sur l’âge, le poids et la taille. Ces données étaient consistantes avec celles d’autres études qui définissent l’IVD par un seuil de 12 à 15 ng/ml, indépendamment de l’âge [14,16,20]. Cependant, cela n’était pas lié au taux de PTH et la DMO de la hanche était en fait la plus basse dans le groupe de patients présentant un taux bas de 25(OH)D mais un taux normal de PTH. Nous avons finalement redéfini la valeur normale du taux de PTH sérique en utilisant le seuil supérieur de 46 ng/ml proposé par Souberbielle et al. À partir des données d’une population normale sans déficience en 25(OH)D [35]. Nous n’avons, à nouveau, pas observé de différence entre la DMO de la hanche ou lombaire parmi les patients avec IVD et taux de PTH normal ou élevé.

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Notre étude comporte plusieurs limites. Les valeurs sériques en magnésium n’étaient pas disponibles parce que ce dosage n’est pas effectué en routine. Ainsi, nous ne pouvons pas exclure que, dans certaines circonstances, l’hypomagnésémie a altéré la relation entre les valeurs de 25(OH)D et de PTH [30,31]. Nous n’avons aucune information concernant la prise de calcium qui peut également altérer cette relation. Nous n’avons pas pris en compte la variation saisonnière de la vitamine D. Toutefois, l’inclusion de patients via notre unité « fracture liaison service » fut effectuée même après la période de l’étude et ni les patients ni nous n’avons observé de tendance saisonnière pour la 25OH dans cette population âgée. Dans notre population de femmes post-ménopausées dans la septième décade, qui venaient de manifester une fracture non vertébrale de fragilité, l’hypoparathyroïdie fonctionnelle était un profil biologique hautement prévalent, puisque retrouvée chez presque 80 % de cette population. C’est seulement lorsque nous avons considéré une définition de seuil plus faible à 15 ng/ml que nous avons observé des différences significatives de la DMO de la hanche, suggérant que dans cette population, des effets osseux délétères peuvent apparaître pour des valeurs nettement plus faibles que classiquement admis. Cependant, en utilisant ce seuil, nous avons encore trouvé une prévalence très élevée d’hypoparathyroïdie fonctionnelle et ce n’était associé à aucune différence de DMO de la hanche ou du rachis. Au total, nos données ne soutiennent pas l’hypothèse selon laquelle ce profil aurait des effets protecteurs sur l’os. D’autres études dans de plus larges populations âgées, incluant des patientes avec des fractures de fragilité, doivent aborder de fac¸on plus approfondie cette question importante pour la pratique clinique. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Remerciements Nous remercions Jean-Claude Souberbielle pour ses suggestions et commentaires si précieux. Références [1] Garland CF, Garland FC, Gorham ED, et al. Geographic variation in breast cancer mortality in the United States: a hypothesis involving exposure to solar radiation. Prev Med 1990;19:614–22. [2] van der Mei IA, Ponsonby AL, Dwyer T, et al. Past exposure to sun, skin phenotype, and risk of multiple sclerosis: case-control study. BMJ 2003;327:316–21. [3] Chapuy MC, Preziosi P, Maamer M, et al. Prevalence of vitamin D insufficiency in an adult normal population. Osteoporos Int 1997;7:439–43. [4] Souberbielle JC, Cormier C, Kindermans C, et al. Vitamin D status and redefining serum parathyroid hormone reference range in the elderly. J Clin Endocrinol Metab 2001;86:3086–90. [5] Isaia G, Giorgino R, Rini GB, et al. Prevalence of hypovitaminosis D in elderly women in Italy; clinical consequence and risk factors. Osteoporos Int 2003;14:577–82. [6] Fardellone P, Sebert JL, Garabedian M, et al. Prevalence and biological consequences of vitamin D deficiency in elderly institutionalized subjects. Rev Rhum Engl Ed 1995;62:576–81. [7] Von Muhlen DG, Greendale GA, Garland CF, et al. Vitamin D, parathyroid hormone levels and bone mineral density in community-dwelling older women: the Rancho Bernardo Study. Osteoporos Int 2005;16:1721–6. [8] Cranney A, Horsley T, O’Donnell S, et al. Effectiveness and safety of vitamin D in relation to bone health. Evid Rep Technol Assess 2007;158:1–235. [9] Glerup H, Mikkelsen K, Poulsen L, et al. Hypovitaminosis myopathy without biochemical signs of osteomalacic bone involvement. Calcif Tissue Int 2000;66:419–24. [10] Garnero P, Hausherr E, Chapuy MC, et al. Markers of bone resorption predict hip fracture in elderly women: the EPIDOS Prospective Study. J Bone Miner Res 1996;11:1531–8. [11] Melton LJ, Khosla S, Atkinson EJ, et al. Relationship of bone turnover to bone density and fractures. J Bone Miner Res 1997;12:1083–91.

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