Isoprostanes: nouveaux marqueurs du stress oxydant. Aspects fondamentaux et cliniques

Isoprostanes: nouveaux marqueurs du stress oxydant. Aspects fondamentaux et cliniques

Lexique Isoprostanes : nouveaux marqueurs Aspects fondamentaux et cliniques du stress oxydant. J.L. Cracowski, F. Stanke-Labesque, G. Bessard Les ...

370KB Sizes 0 Downloads 111 Views

Lexique

Isoprostanes : nouveaux marqueurs Aspects fondamentaux et cliniques

du stress oxydant.

J.L. Cracowski, F. Stanke-Labesque, G. Bessard

Les F2-isoprostanes sont des isomeres des prostaglandines F2, produites in vivo par peroxydation radicalaire de I’acide arachidonique. Ces molecules, chimiquement stables, sont produites en quantite abondante en situation clinique de stress oxydant. La quantification des deux isoformes principales (isoprostaglandine F2alpha type-Ill et VI) dans les liquides et tissus biologiques comme marqueurs de peroxydation lipidique apparaCt comme une avancee importante dans I’exploration du role du stress oxydant en pathologie humaine. La quantification des F2-isoprostanes comme marqueur intermediaire semble egalement interessante pour le developpement de nouvelles therapeutiques anti-oxydantes. 0 2000 editions scientifiques et medicales Elsevier SAS isoprostanes

I stress

oxydant

Summary - Isoprostanes: new markers of oxidative stress. Fundamental and clinical data. A novel family of prostaglandin F2 isomers, called FZ-isoprostanes, produced in large quantities in vivo by a free radical peroxidation of arachidonic acid, has recently been described. The quantification of the two major isoforms (isoprostaglandin FZalpha type-l/l and VI) in biological fluids and tissues as markers of lipid peroxidation appears to be an important advance in our ability to explore the role of free radicals in the pathogenesis of human disease. In addition, F2-isoporstanes quantification seems promising as intermediate endpoints for clinical studies of antioxidant therapies. 0 2000 l?ditions scientifiques et medicales Elsevier SAS isoprostanes

I oxidative

stress

I human

Le stressoxydant est un phenomene implique a la fois dansla physiologic du vieillissement et dansde nombreuses pathologies inflammatoires, neurodegeneratives ou atheromateuses.Cependant, la mise en evidence de ce phenomenein vivo est limitee par l’absencede marqueurs a la fois sensible,specifique, de dosageaise, rep&able et non invasif [ 11. Recemment, des isomeres des prostaglandines Fz, appelesFz-isoprostanes,produits in vivo par peroxydation radicalaire de l’acide arachidonique ont CtCdecrits [2]. Les Fz-isoprostanes,molecules chimiquement stables, sont produites en quantite abondante dans des

diseases

situationscliniques de stressoxydant. DesCtudes preliminaires permettent d’envisager leur dosagecomme marqueur du stress oxydant dans le cadre de recherches physiopathologiques,maisegalementen clinique comme marqueurpronostique ou d’evaluation therapeutique. MlkANISMES

DE FORMATION

Les F1-isoprostanes sont produitespar l’action de radicaux libres oxygen& sur l’acide arachidoniqueesterit%,responsablede sa peroxydation. Elles sont libereespar un mecanismephospholipasedependant.circulent dans le plasma

305

Isoprostanes

Prostaglandine

a cinq carbones avec les deux chaines laterales : isomtrie cis et non trans. Cela signifie que les deux chaines carbonees sont orientees du m&me cot6 par rapport au plan du cycle. Les structures de la prostaglandine F2 et de son isoprostane correspondante (isoprostaglandine F,, type III) sont representees sur la jigure 1. Recemment, une nomenclaturea CtCproposeeafin de nommer tous les isoprostanesquel que soit leur precurseur [3]. Certains auteurs conservent cependant les anciennes denominations, et les termes 8-iso-prostaglandine F,, ou 8-epiprostaglandine F,, peuvent etre retrouves dans de nombreuses publications. Une autre nomenclature a Cgalement CtCproposeepar Taber danslaquelle l’iPF26111est nommee 15Fz,-IsoP [4].

FZa

02

COOH

Isoprostaglandine

F,, type III

ACTIVITE

Les isoprostanes,en particulier l’isoprostaglandine F,, type III et l’isoprostaglandine E, type III possedentune action biologique a type de vasoconstriction, d’action mitogenique et d’agregation plaquettaire. Ces actions semblent principalement mtdiees par la stimulation des recepteursdu thromboxane A,. L’existence de recepteurs specifiques aux isoprostanes est possible, mais non demontree. Une question non resolueest de savoir si les effets biologiques desisoprostanes,observesin vitro, ont une importance en physiologie et physiopathologie humaine. QUANTIFICATION

Isoprostaglandine

F,, type VI

Figure 1. Structure molhlaire de la prostaglandine F!,, de I’isoprostane correspondante (iso-prostaglandine F,, type III, Cgalement nommCe 8-iso-PGF2,0u 15.F2,-IsoP) ; et de l’iso-prostaglandine Fza type VI. Ces dew isoprostanes sent retrouvkes en quantitk importantes dans les tissus et liquides biologiques.

sous une forme libre, et sont excretees dans les urines sous forme native ou mttabolisee. Du fait de la repartition ubiquitaire de l’acide arachidonique, la synthese des F,isoprostanes peut survenir dans toutes les membranes cellulaires, au site de production des radicaux libres. La liberation de ces composes ne sera par consequent pas specifique d’une pathologie, mais du processus oxydatif. STRUCTURE

ET NOMENCLATURE

La caracteristique la plus importante, qui differencie une isoprostane d’une prostaglandine, est la jonction du cycle

BIOLOGIQUE

DES ISOPROSTANES

Deux methodespermettent de quantifier les isoprostanes dansdesliquides biologiques : la spectrometriede masse et les methodes immunologiques. Quelle que soit la methode utilide, la quantification necessite une &ape initiale de purification de l’echantillon afin d’extraire les composesCtudies, Ctapecritique pour la quantification. Une nouvelle methode (LCAWMS) a rtcemment Ctt developpee, permettant de simplifier la preparation des Cchantillons. Les isoprostanes ont et6 initialement identifies en utilisant la spectromttrie de masse,methode sensibleet specifique. Des mtthodes de dosageimmunologique ont et6 developpeesdepuis : enzymatiques (Elisa) ou radioimmunologiques. Ces methodes devraient permettre d’btendre la recherche dans ce domaine en permettant un acces au dosage plus facile. L’isoprostaglandine F,, type III est l’isoprostane la plus frequemment dosee. 11 s’agit en effet d’une molecule stable, presente en quantit6 plus abondante que les prostaglandines ou thromboxanes dans les liquides biologiques. Parmi les autres isoformes, l’isoprostaglandine F,, type VI est retrouvee en quantite plus abondante que l’isoforme III, permettant un dosage plus facile. Ces dosagespeuvent etre realis& dans tous les liquides et tissus biologiques.

306

J.1.. Cracovwki

Tableau I. Quantification Pathologic

des isoprostanes

humaine.

Annie

Tabagisme Hyperhomocysteinemie Diabete Demences type Alzheimer Maladie de Parkinson Schizophrenic Cirrhose htpatique Hepatopathies alcooliques Hypercholesterolemie Atherosclerose Comparaison plaques instables/ plaques stables Angor stable Infarctus du myocarde revascularisC (thrombolyse ou angioplastie) Circulation extracorporelle Rupture d’anevrisme aortique Insuffisance cardiaque BPCO

Mucoviscidose Detresse respiratoire aigue du nouveau-n6 Sclerodermie LEAD Syndrome des anticorps antiphospholipides Intoxication au paracetamol Pr&&Iampsie

en pathologie

1995, 1996, 1999 1999 1995,1999 1998, 1999 1998 1998 1999 1999 1996, I 997, 1998 1997,1999 1999

Nature du pr&?vement Plasma, urines, prelbvements

Prelevements Prelevements

d’endarteriectomie d’endarteriectomie

carotidienne carotidienne

iPF:,III iPF,,-III iPF -111 iPF,6 lzp et VI iPFi6111 et VI iPFrdIII et VI iPF,,-III et VI iPFidIII et VI iPF,6111 et VI iPF, -111 et VI i@F,6111

,’ -+

Urines Urines Urines Plasma Liquide pericardique Urines Liquide exhale bronchique Liquide de lavage broncho-alveolaire Liquide exhale bronchique Plasma Liquide d’aspiration tracheale

1996 1997, 1999 1997

Urines Plasma, urines Urines

1996 1996

Urines Plasma, urines

BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive, SDRA : syndrome de detresse respiratoire iPF,dIII : iso-prostaglandine F,, type III @-iso-prostaglandine Fr ). iPFrdVI : iso-prostaglandine metabolite des Fr-isoprostanes. (References foumies snr demandeq.

Cependant, une generation artefactuelle intervient dam tow les prelevements contenant des membranescellulakes (plasma, tissus), ce qui necessitedes modalites de prelevement rigoureuses et contraignantes : congelation dans I’azote liquide immediatement apres le prelevement, puis conservation a - 80 “C. L’avantage du dosage dans les urines. le liquide cephalorachidien ou dans le liquide exhale bronchique est la tres faible quantite de lipides presents, permettant un recueil avec une conservation simplifiee. VARIATIONS

I.soprostanesdash

vasculaires

Plasma Plasma, urines Tissu cerebral, liquide cephalorachidien Tissu cerebral Tissu cerebral Urines Urines Urines

1997 1997 1997 1999 1998 1998 1999 1998 1998 1999 1998

et al

PHYSIOLOGIQUES

Une etude chez des volontaires sainsa mis en evidence I-absence de variation nycthemerale de l’excretion urinaire de l’isoprostaglandine F,, type III. De plus. les concentrations urinaires ne varient pas selon le regime alimentaire ; mais sont augmenteesapres 24 heures de .jeGne. Les F,-isoprostanes sont detectables dans tous les liquides biologique\ de sujets sains. demontrant

iPFZdIII iPF,-III iPFr6111 iPFr6111 iPFZ6111 iPFLw-III iPF,6111 iPFr6111 iPF,6III iPF,-M iPF26fII, VI iPFZ6111, VI

c fl (plasma) L (urines) aigue. LEAD : lupus erythemateux aigu dissemine. Fr, type VI. iPF,-M : acide tetranordicarboxylique,

I’existence d’un stress oxydant x(basal P, incompletement supprime par les defenses anti-oxydantes. L’excretion urinaire de F,-isoprostanes est corklee avec I’age 151. Ces donnies supportent I’hypothese d’une augmentation du stress oxydatif au tours du processusnormal de vieillissement. Contrairement aux prostaglandines et thromboxanes. il est Ctabli que la prise d’anti-inflammatoires non steroidiens n’induit pas de diminution de I’excretion urinaire de ce compose chew l’homme, bien qu’une generation cyclooxygenase dependantepuisseetre observee experimentalement. ISOPROSTANES ET PHYSIOPATHOLOGIE La majorite desetudesrealiseesa ce jour sont des etudes physiopathologiquesdanslesquellesla quantification des isoprostanesest utilisee comme marqueur de peroxydation lipidique. Les pathologiesCtudieeset leurs resultats sont indiquesdansle taldemr 1.

307

Isoprostanes

PERSPECTIVES

CLINIQUES

La quantification des Fz-isoprostanes comme marqueur du stress oxydant ouvre de nombreuses perspectives cliniques. Au plan physiopathologique, leur quantification permet d’analyser de faGon precise le role de la generation de radicaux libres en pathologie humaine. Les variations physiologiques de ces composes restent cependant ma1 connues : les differences selon le sexe, le statut hormonal et l’activite physique n’ont jusqu’a present pas CtC Ctudices specifiquement. Par ailleurs, l’interet du dosage d’isoprostanes provenant de precurseurs autres que l’acide arachidonique (F3 et F,-isoprostanes) reste a evaluer. Au plan clinique, la correlation entre le dosage des F,isoprostanes et les stades Cvolutifs de differentes pathologies [6-81 permet d’envisager le dosage des F,-isoprostanes comme marqueur d’evolutivite. Aucune-etude pronostique n’est a ce jour disponible du fait de la necessite d’un suivi de larges cohortes de patients. Un des problemes poses actuellement est l’absence de standardisation du dosage entre les differentes methodes et, pour chaque methode, l’absence de standardisation des methodes d’extraction, n’autorisant pas la comparaison des resultats en valeur absolue entre les differentes Cquipes. Enfin, l’utilisation des F,-isoprostanes comme marqueur d’evaluation therapeuiique va se developper dans les an&es a venir. Du fait des nombreuses donnees experimentales suggerant une implication de la generation de radicaux libres oxygen& en physiopathologie humaine, differentes therapeutiques anti-oxydantes ont CtC ou sont en tours d’evaluation. Cependant, il n’existe a ce jour pas de donnees biologiques permettant d’optimiser a la fois les posologies et les associations de therapeutiques anti-oxydantes employees. Plusieurs etudes pilotes ont rtcemment CtC realisees. Dans l’hypercholesttrolemie, l’administration de vitamine E a la posologie de 100 et 600 mg/j pendant une duke de deux semaines permet une diminution respective de 34 et 58 % de l’excretion urinaire d’isoprostaglandine F,, type III [9]. De m&me,

chez des sujets diabetiques de type II, la prise de 600 mg/j de vitamine E pendant une duree de deux semaines permet une reduction de 37 % l’excretion urinaire d’isoprostaglandine Fzu type III [lo], tandis qu’une diminution de 32 % est observee apres un mois de traitement chez des sujets presentant une cirrhose hepatique. La quantification des F,-isoprostanes comme marqueur intermediaire parait particulierement interessante pour le developpement de nouvelles therapeutiques anti-oxydantes. RkFkRENCES 1 Moore K. Roberts II LJ. Measurement of lipid peroxidation. Free Rad Res 1998 ; 28 : 659-7 1. JD, Hill KE, Burk RF. Nammour TM, Badr KF, Roberts 2 Morrow LJ. A series of prostaglandin F,-like compounds are produced in viva in humans by a non-cyclooxygenase, free radical-catalyzed mechanism. Proc Nat1 Acad Sci USA 1990 : 87 : 9383-7. 3 Rokach J, Khanapure SP, Hwang SW, Adiyaman M, Lawson JA, Fitzgerald GA. Nomenclature of the isoprostane: a proposal. Prostaglandins 1997 ; 54 : 853-73. 4 Taber DF, Morrow JD, Robert II LJ. A nomenclature system for the isoprostanes. Prostaglandins 1997 ; 53 : 63-7. G, Creminon C, Lawson J, Fitzgerald GA, 5 Wang Z, Ciabattoni Patron0 C, et al. Immunological characterization of urinary S-epiprostaglandin F,,excretion in man. J Pharm Exp Therapeut 1995 ; 275 : 94- 100. 6 Ferro D. Basili S, Pratico D, Iuliano L, FitrCerald GA, Violi E Vitamin E reduces monocyte tissue factor expression in cirrhotic patients. Blood 1999 ; 93 : 2945-50. I Mallat Z, Philip I, Lebret M, Chatel D. Maclouf J, Tedgui A. Elevated levels of &iso-Prostaglandin Fza in pericardial fluid of patients with heart failure. Circulation 1998 : 97 : 1536-9. GA. 8 Pratico D, Basili S, Vieri M, Cordova C, Violi F, Fitzgerald Chronic pulmonary disease is associated with an increase in urinary levels of isoprostane Fro, an index of oxidant stress. Am J Respir Crit Care Med 1998 ; I58 : 1709-14. 9 Davi G, Alessandrini P Mezzetti A, Minotti G, Bucciarelli T, Costantini F, et al. In viva formation of 8-epi-prostaglandin F!, is increased in hypercholesterolemia. Arterioscler Thromb Vast Biol 1997 : I7 : 3230-5. G, Consoli A, Mezzetti A, Falco A, SantaIO Davi G, Ciabattoni rone S, et al. In vivo formation of 8-iso-prostaglandin F,, and platelet activation in diabetes mellitus: effets of improved metabolic control and vitamin E supplementation. Circulation 1999 ; 99 : 224-9.