La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale

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JEMEP-223; No. of Pages 13

Ethics, Medicine and Public Health (2017) xxx, xxx—xxx

Available online at

ScienceDirect www.sciencedirect.com

RÉFLEXIONS

La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale The clinic basis of ethics in medical practice C. Hamonet (MD, PhD) a,∗,b, C. Baeza-Velasco (PhD) c, C. Hervé (MD, PhD) d a

Faculté de médecine de Créteil, université Paris Est Créteil, 8, rue du Général-Sarail, Créteil, France b Centre ELLA santé, 29, bis rue d’Astorg, 75008 Paris, France c Laboratoire de psychopathologie et processus de santé, institut de psychologie, université Paris Descartes, 71, avenue Edouard-Vaillant, 92774 Boulogne-Billancourt, France d Laboratoire d’éthique médicale et de médecine légale, faculté de médecine, université Paris Descartes, 45, rue des Saints-Pères, 75006 Paris, France Rec ¸u le 21 avril 2017 ; accepté le 24 avril 2017

MOTS CLÉS Clinique ; Éthique ; Éthique médicale ; Handicap ; Histoire de la médecine ; Phénotype ; Syndrome d’Ehlers-Danlos



Résumé Le malade, la médecine, le handicap et la mort forment un ensemble homogène dont les interactions subissent constamment de profonds remaniements. Ils sont très influencés par le développement des moyens techniques utilisés pour le diagnostic et les traitements. Une des conséquences négatives est la dévalorisation de la clinique, c’est-à-dire du rôle d’une relation rapprochée avec le patient, activement impliqué dans le processus du diagnostic et les décisions thérapeutiques. C’est le moment, face à cette situation, de scruter avec un regard nouveau, l’historique de l’invention de la médecine clinique d’Hippocrate à Osler, en s’arrêtant sur Maïmonide, Sydenham et Boissier de Sauvages. Cette rétrospective permet d’organiser la poursuite de cette démarche en l’enrichissant d’une vision plus globale, plus sociale, de l’Homme en souffrance. Nous proposons une évolution de la vision de la santé mettant en valeur la personne humaine en articulant harmonieusement et positivement lésions corporelles, maladie, conséquences fonctionnelles et situations de handicap. Elle provoque une nécessaire évolution de la sémiotique médicale qui est regardée comme incompréhensible par des sémioticiens comme Barthes. Cette approche anthropologique en quatre dimensions apporte une cohérence dans la clinique et ne peut que renforcer le dialogue du patient avec son médecin. Une maladie héréditaire, fréquente (incidence 2 %), responsable d’une atteinte diffuse du tissu conjonctif, le syndrome d’Ehlers-Danlos, représente aujourd’hui un véritable défi difficile à relever dans le contexte des pratiques médicales actuelles : le diagnostic repose sur la seule clinique en

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Hamonet).

http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001 2352-5525/© 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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C. Hamonet et al. l’absence de marqueur biologique. Une étude récente a pourtant permis de mettre en avant la supériorité de la clinique par la réalisation d’un modèle mathématique à partir des données cliniques collectées auprès de 626 patients. Ces considérations permettent une évolution de la notion de santé, illustrant la définition de 1947 de l’Organisation mondiale de la santé en proposant la notion d’un état relatif d’équilibre entre les capacités d’une personne et les contraintes du milieu où elle vit (René Dubos). © 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

KEYWORDS Clinic; Ethic; Medical ethic; Disability; History of medicine; Phenotype; Ehlers-Danlos syndrome

Summary Patient, disease, medicine and disability form a homogeneous container which interactions receive constantly important updates. They are influenced by the development of new technical aides used for diagnoses and treatments. One of the negative results of this process is the downgrading of clinic and of the role played by a close relationship with the patient, himself deeply involved in the diagnose process and the therapeutic decisions. As we are facing this situation, it is time to push for a fresh insight into the history of the invention of clinic medicine from Hippocrates to Osler, stopping by with Maïmonide, Sydenham and Boissier de Sauvages. This look back allows us to organise the future of clinic by enriching it with an understanding of the suffering of humankind both more global and more social. We propose an evolution of the future of Health based on the human personality, linking between them harmoniously and positively body injuries, diseases, functional and situational consequences of disabilities. This will trigger a necessary evolution of medial semiotic, which is considered as impossible to understand by some semioticians such as Barthes. This anthropological approach in four dimensions brings a coherence in clinic and will only improve the communication between a patient and his physician. The Ehlers-Danlos syndrome, a hereditary disease frequent (2 % incidence) causing a widespread affection of the connective tissue, represents today a real challenge, difficult to address in the current environment of medical practice. The diagnoses are entirely based on clinic as no biological tracer exists. A recent study has however evidenced the superiority of clinic through a mathematical model gathering the data collected from 626 patients. These considerations allow for an evolution of the concept of health, as defined in 1947 by the WHO proposing the concept of a state of balance between the capacity of an individual and the obligations coming from his environment (René Dubos). © 2017 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

« Il n’y a pas de meilleur livre pour le médecin que le malade » Giorgio Baglivi, 17e siècle

« Il est plus difficile de détruire un préjugé qu’un atome » Einstein

Introduction La santé, la maladie, la médecine, le handicap et la mort forment un ensemble homogène dont les interactions subissent constamment de profonds remaniements. Ils sont influencés par la progression des connaissances biologiques et le développement des moyens techniques utilisables pour le diagnostic, la prévention et les traitements. Le

développement du numérique et la diffusion, instantanée et universelle, des connaissances jouent un rôle considérable d’accélérateur et d’amplificateur. Cette évolution des connaissances et des pratiques provoque un profond remaniement de la relation des patients avec la médecine et, plus particulièrement, avec leurs médecins. Le comportement des médecins change, illustrant la phrase de Sigerist, citée par Georges Canguilhem [1] dans sa thèse de doctorat en médecine « Le normal et le pathologique » (1943), « la médecine est des plus étroitement liée à l’ensemble de la culture, toute transformation dans les conceptions médicales étant conditionnée par les transformations dans les idées de l’époque ». Ces évolutions ont profondément remanié ce lien spécifique entre le médecin et le malade sur lequel s’est construite la médecine en s’appuyant sur une modalité de dialogue qu’il a été convenu d’appeler la clinique. Au-delà d’une fac ¸on d’investiguer un corps en souffrance et de rechercher des particularités ayant la valeur de signes, c’est une forme spécifique de la communication et des échanges directs, intimes, entre deux personnes, un patient qui demande et un médecin qui propose. Ceci

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale inclut, de la part du médecin, l’écoute et l’analyse du discours, l’observation du corps et de ses mouvements, le toucher, le palper, la pression, la percussion, la mobilisation des membres, l’auscultation, la prise du pouls, de la tension artérielle, de la température du corps et l’odorat. L’utilisation du goût ayant disparu au fil des siècles. Par contre, la vérification de l’aspect des urines figure toujours dans l’examen clinique, même si l’appellation de « mire », n’est plus utilisée pour désigner un médecin. Cet ensemble méthodologique qu’est l’examen clinique, est le passage incontournable pour une approche diagnostique puis de surveillance de qualité. Il est la substance même de l’éthique en médecine. Il ne s’agit pas seulement du comportement éthique du médecin mais aussi de celui du patient qui, lui aussi, est impliqué dans la démarche du « soi-même comme l’autre » de Paul Ricœur [2]. Les nouvelles procédures de la pratique du diagnostic et des soins mettent à mal ces bases de la science médicale, provoquant des insatisfactions et des plaintes chez les patients et des démarches, brutales, incertaines ou erronées chez les médecins. C’est ce que nous proposons d’explorer.

Essai sur la naissance de la clinique, des bases du raisonnement médical et de l’éthique du médecin et du patient Dès le début et tout au long de son Histoire, l’Homme a recherché et inventé diverses solutions pour échapper à la souffrance et à l’angoisse de la mort. Les prémices de cette Histoire de la médecine sont gravés dans la pierre au frontiscipe de ce que l’on appelait, naguère, la nouvelle Faculté de Médecine, rue des Saints-Pères, à Paris. Faisant suite à l’obscurantisme, à la magie, à la sorcellerie on voit, au fil des époques et des effigies représentées, émerger une pratique organisée de l’examen du corps vivant, combinée à une volonté de comprendre s’appuyant sur l’étude du vivant mais aussi du cadavre. Petit à petit, s’est construite une science médicale basée sur l’écoute et l’observation dans une relation très particulière entre celui qui deviendra le médecin et « le malade ». Ce dernier, appelé plus récemment par anglicisme, « le patient » décrit ce qu’il ressent. Le médecin donne une signification à ces symptômes ou plaintes, ce qui les transforme en « signes ». L’examen, dit « physique » ou « clinique », du patient apporte d’autres éléments visibles, palpables ou audibles, qui complètent les données de « l’interrogatoire ». Cet ensemble est la première étape du « diagnostic positif », réalisant un « tableau clinique » qui peut être suffisamment évocateur et différencié d’autres « cas cliniques » proches que l’on écarte en procédant au « diagnostic différentiel ». Dans le cas contraire, il faut recourir à des examens « paracliniques » ou « complémentaires » qui apportent des éléments nouveaux à ce tableau pour l’intégrer dans un syndrome ou une maladie avec plus ou moins de probabilité. L’invention de la clinique, telle que la médecine l’a adoptée, revient à Hippocrate et ses élèves [3]. Il est aussi l’inventeur du mot qui est issu, selon Littré [4], de Clinicos, grec, « clinicus », latin et signifie couché. En effet, l’échange entre médecin et malade est décrit initialement dans le contexte de « l’examen au lit du malade » qui

3 marquera fortement l’Histoire de l’apprentissage des médecins. Le malade est couché, puisqu’il est malade, et le médecin est debout, ce qui induit, a priori, une position de domination entre celui qui sait et celui qui apprend ou subit. La justesse des observations d’Hippocrate se confirme jusqu’à maintenant. C’est le cas pour la maladie de Bouillaud ou rhumatisme articulaire aigu qu’il avait décrite, associant des manifestations des voies respiratoires supérieures (rhume) et articulaires, ce qui a donné l’étymologie de rhumatisme et rhumatologie. Il en est de même de « l’hippocratisme digital » des insuffisants respiratoires chroniques. Un des grands mérites de l’approche clinique d’Hippocrate est d’avoir isolé dans ses observations les aphorismes, équivalents de nos tableaux cliniques contemporains qui regroupent les symptômes nécessaires car suffisamment spécifiques pour guider le médecin vers une pathologie. D’autres signes étant plus aléatoires, « accidentels ou communs à d’autres maladies » selon l’interprétation qu’en donne Sydenham [5]. On retrouve cette tendance dans la fac ¸on actuelle de distinguer dans les critères diagnostiques, les signes principaux et les signes secondaires [6]. Cette affirmation de la clinique comme étant la « science du malade » et la base même de la Science médicale est toute entière contenue dans la formule l’anatomopathologiste du 17e siècle, Georgio Baglivi : « il n’y a pas de meilleur livre pour le médecin que le malade » [7]. Elle sera reprise en 1900 par William Osler [8] : « écoutez attentivement votre malade, il vous conduira au diagnostic ». Il sera, en parfait disciple d’Hippocrate, un très actif promoteur de l’enseignement pratique de la médecine « au lit du malade ». Il est universellement salué comme un clinicien exceptionnel. L’abord de l’éthique en médecine impose de s’arrêter longuement sur Moïse Ibn Maïmoun, dit Maïmonide (12e siècle) né à Cordoue, médecin et rabbin, ayant exercé à Fez et au Caire. C’est lui qui clôture la longue fresque de la rue des Saints-Pères, inaugurant la naissance de l’éthique médicale dont les principes sont contenus dans sa prière qui évoque, elle aussi le « lit du malade » [9] dont voici quelques extraits : « soutiens la force de mon cœur pour qu’il soit toujours prêt à servir le pauvre et le riche, l’ami et l’ennemi, le bon et le mauvais. Fais que je ne voie que l’Homme dans celui qui souffre. Fais que mon esprit reste clair auprès du lit du malade et qu’il ne soit distrait par aucune chose étrangère afin qu’il ait présent tout ce que l’expérience et la science lui ont enseigné, car grandes et sublimes sont les recherches scientifiques qui ont pour but de conserver la santé et la vie de toutes les créatures. Fais que mes malades aient confiance en moi et mon Art pour qu’ils suivent mes conseils et mes prescriptions. Éloigne de leur lit les charlatans, l’armée des parents aux mille conseils, et les gardes qui savent toujours tout : car c’est une engeance dangereuse qui, par vanité, fait échouer les meilleures intentions de l’Art et conduit souvent les créatures à la mort. Si les ignorants me blâment et me raillent, fais que l’amour de mon Art, comme une cuirasse, me rende invulnérable, pour que je puisse persévérer dans le vrai, sans égard au prestige, au renom et à l’âge de mes ennemis. Prête-moi, mon Dieu, l’indulgence et la patience auprès des malades entêtés et grossiers. Fais que je sois modéré en tout, mais insatiable dans mon amour de la science. Éloigne de moi l’idée que je peux tout. Donne-moi la force, la volonté et

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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Figure 1. Encyclopédie des sciences médicales. Encyclopaedia of medical sciences.

l’occasion d’élargir de plus en plus mes connaissances. Je peux aujourd’hui découvrir dans mon savoir des choses que je ne soupc ¸onnais pas hier, car l’Art est grand mais l’esprit de l’homme pénètre toujours plus avant. » (Fig. 1—3). Au 17e siècle, un progrès considérable est accompli avec l’arrivée de Thomas Sydenham [5], inventeur du terme épidémiologie. Il considérait que la connaissance de l’histoire des maladies est une donnée essentielle (« On ne peut rien faire de grand dans le pronostic, et spécialement dans la partie curative de la maladie, sans une histoire exacte et bien circonstanciée des maladies »). Il a été qualifié par les britanniques « d’Hippocrate anglais » et, effectivement, il a fait une excellente analyse méthodologique des concepts hippocratiques. C’est avec lui que la notion de maladie trouvera sa définition. Il la décrit comme le regroupement « d’un faisceau de symptômes » [5]. Il aura cette modernité d’affirmer que « pour définir la maladie en général, il faut connaître auparavant ce que c’est que la santé (parce que la première est relative à la seconde) » [5]. L’influence des Botanistes sur la médecine se fera fortement sentir à partir du 17e siècle. Il est vrai que plusieurs

Figure 2. Nosologie de Sauvage, base de la clinique médicale. Sauvage’s nosology, basis of medical clinical analysis.

d’entre eux (Linné, Boissier de Sauvages) étaient à la fois Botanistes et Médecins. On leur doit, ainsi qu’à Cullen [10], la mise en place d’une méthodologie d’identification des maladies qui prendra le nom de nosologie méthodique. Cette « Science des maladies dans laquelle les maladies sont rangées par classes, selon le système de Sydenham et l’ordre des Botanistes », selon le titre de l’Ouvrage de Franc ¸ois Boissier de Sauvages [11], Docteur en médecine, Professeur royal de botanique en l’université de Montpellier, membre de la Société physico-botanique de Suède. Cette nosologie de Boissier, comparable à celle des autres auteurs sur le même sujet, décrit 11 classes au sein desquelles, se distinguent des ordres et espèces. Chacune de ces classes a une entrée clinique : les vices, les fièvres, les inflammations, les spasmes, les anhélations (difficultés respiratoires), Les faiblesses, les douleurs, les maladies extravagantes et folies, les flux, les cachexies. C’est ce modèle descriptif de regroupement des maladies qui a été, avec quelques modifications (suppression des vices, remplacement des fièvres par « maladies infectieuses et parasitaires » qui devient la première

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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Figure 3. Éléments de médecine pratique de Cullen. Practical medicine elements.

classe), qui a été maintenu dans la Classification internationale des maladies (CIM) de l’Organisation mondiale de la santé [12]. Ce sont les tableaux accompagnant la description des diverses classes de maladies qui sont à l’origine de l’expression si usuelle en médecine de « tableau clinique ». L’évolution des connaissances médicales et celle de l’organisation de la médecine s’est faîte vers une médecine éclatée avec parcellisation des pratiques par organes ou groupe d’organes. L’intrusion puis la prépondérance de la biologie et de l’imagerie dans la valorisation des signes retenus a dangereusement éloigné le patient de sa contribution à son propre diagnostic. C’est ce que Zweig, ce fantastique observateur de la sensibilité humaine, dénonc ¸ait dans « La guérison par l’esprit », dès 1931 : « . . . Dans les hôpitaux, ces magasins généraux de misère humaine, les maladies sont classées par catégories avec leurs spécialistes et les médecins n’y traitent plus que des ‘‘cas’’, n’examinent

5 plus, généralement, que l’organe malade, sans même jeter un regard sur la physionomie de l’être humain aux prises avec la souffrance » [13]. La participation du patient à la construction du diagnostic est même très largement été mis en défaut. Le médecin d’aujourd’hui est influencé par l’arsenal d’examens complémentaires sophistiqués mis à sa disposition. C’est sur leurs résultats qu’il calque son raisonnement diagnostique et quand il se trouve confronté à des symptômes qu’il ne sait pas interpréter, surtout si ces « bilans » biologiques ou d’imagerie reviennent « négatifs », il les rapporte volontiers à un trouble psychique et parle de « somatisation », mettant en doute l’organicité du récit du patient. . . Ce dernier se retrouve alors trop facilement dans la catégorie d’une de ces terminologies ambiguës, dont la médecine a le secret, de « fonctionnel ». Il est d’ailleurs remarquable qu’un des tout premiers cours que rec ¸oivent les étudiants en médecine soit sur précisément « le malade fonctionnel », illustration du malade imaginaire de Molière. On ne peut pas considérer cela comme une initiation à l’éthique clinique ! Le destructeur « c’est dans la tête » a la vie dure comme nous l’observons dans nos consultations au quotidien, illustrant la phrase d’Einstein : « il est plus difficile de détruire un préjugé qu’un atome ». Ainsi, on observe le développement d’une médecine détachée de la personne sensible et fragilisée par la maladie, mais attachée à connaître l’état de ses organes. Le patient n’est plus écouté et se trouve dépossédé de ce rôle qui lui revient dans une alliance médecin/patient puisqu’on le suspecte a priori. L’efficacité du médecin en est considérablement réduite puisqu’elle est basée, avant tout, dans la confiance qu’il lui fait ainsi qu’à son entourage pour reconstituer la nécessaire histoire des symptômes. Associer de l’empathie nécessaire pour qu’il se sente pris en considération et crée un lien supplémentaire. Cette dérive, loin de la clinique, a été considérablement aggravée par l’introduction d’une médecine basée sur les preuves à l’origine de la désuétude subie par la clinique et introduisant, à tort, l’idée qu’en l’absence de « preuves » biologiques ou d’imagerie, il n’y a pas d’identification possible. Cette orientation vers le « tout biologique » ou le « tout imagerie » pour affirmer un diagnostic met la médecine en échec lorsqu’il n’y a pas d’autre moyen de parvenir au diagnostic que par la clinique. C’est précisément ce qui arrive avec le syndrome d’Ehlers-Danlos, maladie héréditaire systémique du tissu conjonctif. Les difficultés sont accrues du fait de descriptions partielles (dermatologiques, rhumatologiques, cardiologiques) négligeant un très grand nombre de manifestations qui sont rapportées à d’autres pathologies. Pratiquement jamais diagnostiquée (le retard moyen est de 22 ans), cette maladie a la réputation d’être rare alors qu’elle est fréquente (incidence 2 %). Le fait d’être héréditaire y a contribué, l’habitude, entretenue par les médias, étant d’associer les qualificatifs de rare et d’orpheline. Ceci a contribué, davantage encore, à l’isoler, puisque beaucoup, ont été persuadés que le diagnostic relève de centres spécialisés dans les maladies rares. Une difficulté est très vite apparue, en l’absence de test génétique, les diagnostics sont présentés comme une probabilité et non comme une certitude en l’absence de test génétique disponible. Les patients sont donc privés de reconnaissance par les organismes sociaux, de traitements appropriés et aussi de conseil génétique, pourtant indispensable dans une

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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maladie que les parents transmettent systématiquement à leurs enfants dans la forme la plus commune.

Une approche éthique de la clinique intégrant maladie et situations de handicap L’approche éthique de l’Homme malade doit, pour être complète, englober l’environnement dans lequel il vit. Ceci est parfaitement illustré par Sartre [14] : « Pour nous, l’Homme se définit avant tout comme un être ‘‘en situation’’. Cela signifie qu’il forme un tout synthétique avec sa situation biologique, économique, politique, culturelle, etc. On ne peut le distinguer d’elle car elle le forme et décide de ses possibilités, mais, inversement, c’est lui qui lui donne son sens en se choisissant dans et par elle. » Une conséquence des maladies, peut être ce que la médecine désigne sous le nom de « séquelles » plus ou moins invalidantes, plus ou moins handicapantes pour être socialement inclus. Cette dimension de la santé est trop souvent négligée. Elle est pourtant primordiale puisque le vrai objectif de la médecine est d’aboutir à une « vie sans handicap », sans ou malgré la maladie et ses conséquences et pas simplement un « restitutio ad integrum » biologique. Il convient donc de définir ce concept médico-social de la santé. Handicap c’est un mot d’origine anglaise (« hand in cap », « la main dans un chapeau ») utilisé, dès le 17e siècle, à Londres. Samuel Pepys [15], chroniqueur anglais, en fait mention pour la première fois à propos d’un rituel qu’il a observé à la Mitter Tavern. Il y est utilisé pour conclure un échange « à part égale » entre deux objets de valeurs inégales en déposant la différence en argent, fixée par un arbitre, dans un chapeau. Introduit dans le vocabulaire médico-social par les travailleurs sociaux pour remplacer les termes dévalorisants d’infirmité ou d’invalidité, le mot fait son entrée dans le Droit franc ¸ais en 1957, à propos d’une Loi sur les travailleurs handicapés. Repris dans la Loi du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées, sans le définir. Il est présent dans la Loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Il est repris également par l’Organisation mondiale de la santé dans la version franc ¸aise (CIH) de la « Classification internationale du fonctionnement, des handicaps et de la santé » de 2002. Le terme est délaissé par les anglophones qui lui préfèrent « disability », handicap étant considéré comme discriminant. Maladie et handicap sont deux mots dont la cohabitation a été difficile et, le plus souvent, on a confondu et l’on confond encore, dans le langage courant médical et extra médical, la lésion corporelle et le handicap dans un amalgame qui n’est pas favorable à la personne concernée. C’est le cas lorsqu’on parle de handicap neurologique, de handicap respiratoire. La dénomination d’hémiplégique, de paraplégique ou de traumatisé cérébral, en faisant du mot médical un adjectif que l’on impose à la personne en lui attribuant, a priori, tous les inconvénients dont une telle lésion peut être responsable. On fait ainsi de la personne concernée, a priori, une « infirme » et donc une « invalide ». Le poids culturel et social est lourd et

contribue à faire considérer les personnes concernées comme des citoyens de deuxième zone. La formation médicale centrée sur la maladie et la « perte » subie par le corps humain induit nécessairement un langage inversé qui fait considérer comme un signe « positif » (pour le diagnostic), un manque qui est « négatif » pour le patient. Il est alors difficile, pour le médecin, préoccupé par un « diagnostic lésionnel », de prendre en considération les capacités restantes de la personne et d’identifier les aspects « positifs » de l’examen clinique. Et, pourtant, ce sont ces capacités qui vont permettre des compensations et la maîtrise d’un environnement adapté. Cette acquisition d’une nouvelle autonomie du grec « otos nomos, qui jouit de ses propres lois » [7] va permettre à la personne, victime d’une lésion corporelle, de retrouver ce qui est la valeur humaine la plus éthique qui soit : la liberté de choisir et de décider. Pour cela, il faut une méthodologie nouvelle qui ne sépare pas systématiquement le « normal du pathologique » et qui considère tout patient comme un être humain plutôt que comme un ensemble de tissus, d’organes ou de molécules à identifier qui ne considère pas seulement la maladie mais le malade [16], même s’il n’est pas aux normes de la société dans laquelle il vit et quelles que soient les altérations subies par son corps. Plus encore, le but est d’inverser la fac ¸on de parler des manifestations cliniques observées en de changer le langage des médecins pour lesquels un signe « positif » (tel un « lâcher de ballons » signant la présence de métastases pulmonaires d’un cancer) est très négatif pour le patient de même que le « beau signe » que l’on fait voir au jeune étudiant. Notre recherche clinique a pour base un longue et méticuleuse observation auprès des multiples patients très diversifiés sur le plan symptomatologique qui avaient tous en commun d’être considérés comme étant « handicapés ». Elle a été initiée dans les milliers de consultations médicales hospitalières, effectuées, en France et en Algérie, mais aussi à l’occasion d’évaluations à domicile [17] nous a permis d’élaborer progressivement une méthodologie d’analyse globalisant maladie et handicap. Cette démarche a été solidement confortée, par l’analyse de la limite des pratiques utilisées dans les commissions médico-administratives franc ¸aises (COTOREP), issues de la Loi d’orientation sur les personnes handicapées de 1975 [18] et, surtout d’expertises médico-légales d’évaluation des victimes d’accidents [19,20], notamment des personnes traumatisées cérébrales. Progressivement, un modèle à trois, puis à quatre dimensions a été élaboré et validé avec diverses collaborations, nationales et internationales, notamment en médecine légale [21—23] et en neuropsychologie [24]. Un lien entre maladie et handicap, et leur évaluation clinique, a pu ainsi être établi. Il rejoint le schéma proposé par Saad Z. Nagi en aux États-Unis dès 1965 [25] reliant maladie chronique, handicap (« disability ») et réadaptation.

Lésions → Capacités fonctionnelles → Situations de handicap et subjectivité [26] Les lésions concernent le corps vivant incluant donc sa physiologie. Les capacités sont les fonctions de l’être humain

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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Figure 4. Schéma du handicap. Disability outline.

lui donnant une autonomie fonctionnelle. Celles-ci lui permettront de faire face aux situations auxquelles il se trouve confronté pour q’elles ne soient pas des situations de handicap (terme préférable à celui de handicap). La quatrième dimension est celle de la subjectivité qui regroupe la perception par la personne de son corps (lui semble-til monstrueux ?), de ses fonctions (se perc ¸oit-elle comme faible, fragile ?), des situations de handicap (se sent-elle exclue ?). Fig. 4 : schématisation du handicap, Université Paris Valde-Marne/Université de Porto 1990.

La dimension corporelle lésionnelle C’est la partie visible, symbolisée par une amputation, une déformation sévère du dos, une paralysie d’un membre inférieur ballant ou bien, seulement visible au microscope, comme les altérations du collagène dans le syndrome d’Ehlers-Danlos au microscope (le collagène dans la maladie d’Ehlers-Danlos), voire au microscope électronique. Ce sont ces altérations structurelles du corps qui seront à l’origine des dysfonctionnements de la personne. C’est l’image de ce corps meurtri que la tradition, à travers la notion d’infirme (de « firmus », latin, fort) qui associe la notion de marginalité, de pauvreté, de mendicité, voire de malhonnêteté pour survivre et, même, d’impureté à l’instar des lépreux dans la Bible qui devaient crier impur, impur quand ils se déplac ¸aient dans le camp [27]. La notion de culpabilité reste souvent attachée à cet état « anormal » du corps, ce que Mary Douglas, anthropologue italo-britannique, souligne très bien dans son ouvrage : « Purity and danger » [28]. Dans la perspective chrétienne, l’état psychologique qu’engendre la faute rituelle (rupture de l’ordre éthique inspiré par Dieu) s’identifie à la honte devant la « saleté », le sexe, etc. On peut ajouter le sang dont la signification est ambivalente puisqu’il est aussi « purificateur ». Ce rejet, par l’impureté, s’inscrit dans les origines mêmes de la culture humaine comme en témoigne ce passage du Lévitique : « Tout homme qui a en lui une tare ne peut approcher, qu’il soit aveugle ou boiteux, défiguré ou disproportionné, ou bien un homme qui a une fracture du pied ou une fracture de la main, ou s’il est bossu ou atrophié, s’il a une tâche dans son œil, s’il est galeux ou dartreux s’il a un testicule broyé, tout prêtre

7 qui a une tare. . . ne s’avancera pas pour offrir les sacrifices par le feu à Iahvé » [27]. Aujourd’hui, l’infirmité est devenue une « déficience », mais c’est toujours la même perception négative d’une altération corporelle relayée par le langage médical et perc ¸u comme telle par la personne désignée ainsi que par son entourage. L’infirmité a revêtu, récemment, un nouvel habit linguistique socialement jugé comme plus « correct » mais la sémantique reste la même. C’est pourquoi il vaut mieux parler de lésions, ou d’altérations, termes plus neutres, moins péjoratifs pour le patient, que de déficiences ou d’anomalies. Ces lésions ou altérations peuvent concerner toutes les composantes d’un corps humain y compris son génome. Si on met à part l’étude du cadavre et des prélèvements histologiques ou sanguins, elles concernent un corps vivant, c’est-à-dire qu’elles incluent les altérations de la physiologie (respiratoire, digestive, de la circulation sanguine, du système nerveux etc.) dans l’analyse sémiologique. Ainsi la prise de la température, de la tension artérielle, du pouls, l’observation de l’aspect des urines (autrefois le privilège « Mires ») font partie de l’analyse clinique lésionnelle. À l’opposé se trouve le handicap invisible. L’apparence de la personne est « normale » pour ceux qui ne savent pas observer et pourtant, les difficultés peuvent être profondes : c’est le cas des personnes traumatisées cérébrales avec un syndrome frontal qui sont euphoriques et répondent que tout est bien pour elles, alors qu’elles sont désemparées, incapables de prendre une initiative et d’assurer une activité suivie. Dans de tels cas la présence d’un proche, témoin du quotidien de la personne est nécessaire pour une évaluation clinique adaptée. Ailleurs, il s’agit des personnes avec un syndrome d’Ehlers-Danlos que nous avons déjà évoquées qui souffrent horriblement sans que les traits de leur visage qui sont lisses et souples, du fait de l’atteinte du conjonctif, ne se crispent. Dans le premier cas, on ne peut pas croire le patient, dans le deuxième cas c’est l’inverse.

La dimension fonctionnelle. Description d’une « clinique fonctionnelle » C’est l’ensemble des fonctions humaines. Certaines caractérisent l’Homo sapiens universel : tenir debout, marcher en bipédie, parler, prendre avec ses mains, penser, ressentir des émotions, rêver etc. D’autres sont communes avec le monde animal (voir, entendre, sentir, contrôler ses urines, s’adapter à l’effort. . .) Ces fonctions ou capacités qui donnent à l’Homme son autonomie, donc sa liberté, ne doivent pas être confondues avec la physiologie qui utilise aussi le terme de fonction pour la physiologie respiratoire, la physiologie cardiaque etc. C’est l’individualisation sémantique de cette entité qui permet d’introduire une sémiologie fonctionnelle qui est clinique et se traduit dans les exemples choisis par de l’essoufflement (dyspnée). Elle participe à l’appréciation de l’état de santé ou de maladie. Elle doit être quantifiée pour apprécier sa sévérité et donc ses conséquences sur le besoin de « dépendances ». Une quantification avec une échelle de Likert à 5 échelons a été validée [21], elle s’appuie sur le degré de dépendance.

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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La mesure de la sévérité des limitations fonctionnelles par la mesure de la dépendance, selon une échelle de Likert (Application à la fonction de se déplacer) 0 — pas de difficulté. 1 — Pénibilité (incertitude légère lors de la marche ou douleurs modérées), lenteur. 2 — Dépendance d’une aide technique (utilisation d’une canne ou d’un déambulateur ou d’un fauteuil sans aide humaine pour s’y installer et le piloter). 3 — Dépendance humaine partielle (présence d’un accompagnant pour sécuriser la marche ou s’installer dans un fauteuil qui peut ensuite être piloté). 4 — Dépendance humaine totale. Impossibilité de se déplacer, nécessité d’être porté, nécessité de quelqu’un pour faire avancer un fauteuil roulant.

La dimension situationnelle. Description d’une « clinique situationnelle » Elle apprécie les difficultés rencontrées, du fait des limitations fonctionnelles, pour faire face aux contraintes du cadre de la vie quotidienne (faire sa toilette, aller aux toilettes, s’habiller, manger et boire, se déplacer dans son logement, écrire, utiliser portable et ordinateur, conduire, prendre un transport en commun. . .), la vie familiale et affective (couple, enfants, amis. . .), la vie professionnelle, la vie de loisir : sports, sorties, lectures etc., la vie cultuelle : cérémonies, prières, chants. . . La quantification de 0 à 4 est identique à celle des fonctions : pas de difficulté, pénibilité, lenteur, dépendance d’une aide technique situationnelle, d’une aide humaine partielle, d’une aide humaine totale.

La subjectivité, le point de vue de la personne, son vécu Il est tenu compte des circonstances de survenue des lésions responsables des limitations fonctionnelles ? (responsabilité, culpabilité, désir de vengeance de la victime contre l’agresseur ?), comment elle perc ¸oit son corps ? (est-il monstrueux ?), comment elle perc ¸oit ses limitations ? (sensation d’être faible ? d’être fragile ?), comment elle perc ¸oit ses situations de handicap (sensation d’être exclu ?), comment elle voit l’avenir ? (investissement dans la réadaptation ?). Cette subjectivité est largement influencée par les perceptions de souillure, d’injure corporelle et d’honneur, secondaires à la survenue, accidentelle ou par maladie, de lésions du corps. Ce que souligne Mary Douglas [28] en citant Paul Ricoeur (« . . . avec la souillure nous entrons dans le règne de la terreur »). La notion d’honneur et d’estime de soi [29,30] a également une importance considérable (l’atteinte du corps est « l’injure suprême », Y. Lambert-Faivre, « Tout affront physique est un affront à l’honneur. . . », J. Pitt-Rivers). Cette perception des altérations de sa santé, pour des raisons culturelles, la perception de la maladie est culpabilisante : « La souillure, comme la transgression de l’interdit, sont sources proches ou lointaines de maladies », « La maladie est un état dangereux

entre la vie et la mort, une dégradation de l’être » [28]. Ceci permet aussi de comprendre pourquoi certains patients appellent une solution radicale, chirurgicale : « Le sacrifice expiatoire efface la faute et sa souillure, nettoie en quelque sorte la salissure provoquée par la transgression de l’interdit. Comme le bistouri purificateur du chirurgien va extirper le mal qui souille et détruit » [28]. Ces contributions aux liens entre maladie et situations de handicap permettent de mieux lier les causes et conséquences d’un mauvais état de santé, de guider le médecin dans l’organisation des soins et de la réadaptation fonctionnelle et sociale tout en facilitant la coopération médecin/patient. La compréhension de ce qu’est le handicap apparaît en tout cas beaucoup plus opérationnelle que celle proposée par l’Organisation mondiale de la santé : « Dans le contexte de la santé : les fonctions organiques désignent les fonctions physiologiques des systèmes organiques (y compris les fonctions psychologiques). Les structures anatomiques désignent les parties anatomiques du corps, tels que les organes, les membres et leurs composantes. Les déficiences désignent des problèmes dans la fonction organique ou la structure anatomique, tels qu’un écart ou une perte importante » [31].

Ehlers-Danlos-Tserchnogoubov, une maladie héréditaire dont l’identité clinique, bien réelle, est mise en doute Tschernogoubov, à Moscou en 1891 et Ehlers, à Copenhague, en 1900, sont les premiers descripteurs [32] d’un syndrome qui est actuellement très largement sous diagnostiqué, puisqu’il est encore considéré comme une maladie rare alors que son incidence, en France, est de 2 %. Maladie héréditaire, systémique du tissu conjonctif, le syndrome d’Ehlers-Danlos est actuellement rarement et très tardivement diagnostiqué avec plus de 20 ans de retard en moyenne, alors que dans la petite enfance, dans la plupart des cas de notre cohorte de 2677 patients, des signes évocateurs (ecchymoses, entorses, chutes, fragilité cutanée, troubles digestifs, respiratoires, hypermobilité) sont présents. Cette situation comporte beaucoup de risques et de souffrances pour les patients. Du fait de la fragilité des tissus, ce sont les risques d’hémorragies, de complications abdominales (occlusions, nécroses, péritonites compliquant une cholécystite lithiasique) et vasculaires (possibilité d’anévrysmes artériels, de dissections dans toutes les formes cliniques du syndrome). L’absence de description complète de la maladie est à l’origine de sa méconnaissance généralisée qui va jusqu’à la négation de son existence. L’erreur de Danlos (qui a décrit un cas de pseudo xanthome élastique), a été à l’origine d’un préjugé tenace comme souvent en médecine. L’introduction, dans la tradition médicale orale, la notion fausse d’une très étirabilité importante, au nom de laquelle, bon nombre de médecins, éliminent un diagnostic, pourtant évident par ailleurs, en tirant sur la peau de la face dorsale de la main du patient. On peut en dire autant d’un signe populaire dans ce syndrome, l’hypermobilité qui a servi à le désigner sous la dénomination de « syndrome d’hypermobilité articulaire » a pris une place trop importante puisqu’elle peut avoir disparu sous les effets

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale de l’âge et qu’elle peut être remplacée par des rétractions, notamment des muscles postérieurs des membres inférieurs. Malgré cela, en s’appuyant sur l’utilisation d’un test de cotations articulaires (Beighton), très critiquable c’est le chiffre d’un score sur 9 points qui est retenu avec un seuil de positivité non démontré de 4/9 ou 5/9. Cette pathologie illustre parfaitement la phrase d’Edgar Morin « les chiffres ne révèlent qu’une partie de la réalité ». De fausses affirmations de bénignité, surtout dans les milieux rhumatologiques à [33,34], ont la vie dure et persistent sournoisement, entraînant de nombreux accidents iatrogènes dont certains ont coûté la vie au patient. L’absence de test génétique, si on exclut quelques formes très rarement rencontrées, dans cette maladie héréditaire aboutit à son rejet notamment de la part des généticiens, même avec un tableau clinique éloquent, et un caractère familial certain. Il n’est pas besoin de test génétique pour montrer le caractère héréditaire de cette maladie puisque, comme nous le rencontrons constamment dans nos consultations, tous les enfants dont au moins un parent est atteint héritent de la fragilité du collagène. Malgré cette évidence clinique, on observe une obstination, de la part de médecins conseils d’assurance maladie, d’exiger le test génétique qui n’existe pas et dont on n’a pas besoin. Cette maladie apparaît comme

9 l’illustration même de la dévalorisation de la clinique dans l’esprit des médecins, privant un nombre très important d’enfants et d’adultes des soins et des prestations sociales de compensation de leurs situations de handicap.

Les mathématiques au secours de la clinique Un travail original a été mené pour valider les critères cliniques du diagnostic du syndrome d’Ehlers-Danlos et présenté à l’Académie nationale franc ¸aise de Médecine [35]. Dans le cadre d’une consultation spécifique de patients avec un syndrome d’Ehlers-Danlos, nous avons retenu 626 patients faisant partie d’une cohorte de 2577 personnes, avec un syndrome d’Ehlers-Danlos hypermobile, examinés avec une même grille clinique de 79 items quantifiés selon une échelle de sévérité de Likert. L’objectif était de définir une typologie clinique et un phénotype plus complets de la maladie, de créer un modèle mathématique clinique permettant de parvenir avec certitude au diagnostic. Cette maladie pose de fac ¸on aiguë l’impossibilité de réduire la génétique à des corrélations entre phénotype et génotype : tout se passe comme si l’information n’était pas linéaire ce qui est pour le moins paradoxal puisque le support physique

Figure 5. Les distributions des indices de sévérité des axes 1, 3, 4 et 5 sont homogènes et semblables. Severity index number lay down are consistent and similar.

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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10 de l’information génétique est linéaire (ADN et chromatine/épigénétique). L’observation des difficultés fonctionnelles des patients nous a permis de construire une hypothèse physiopathologique s’appuyant sur un désordre généralisé des réponses des capteurs aussi bien de la sensibilité somatique (épicritique, protopathique ou proprioceptive) que la sensibilité viscérale et du système neurovégétatif et les sensorialités visuelle, auditive, olfactive et vestibulaire. Ces altérations de la physiologie des capteurs ont pour origine, leur positionnement au sein de tissus conjonctifs qui ont perdu leurs capacités à réagir à des variations de contraintes mécaniques ou thermiques. Il s’y ajoute une fragilité augmentée. Six groupes de signes ont été constitués en quatre axes dont quatre (Axe 1 : fragilité de la peau, Axe 3 : désordres proprioceptifs sensitifs et sensori-moteurs, Axe 4 : dysautonomie dont la fatigue, les troubles digestifs et vésico-sphinctériens Axe 5 : troubles de la perception sensorielle de l’audition, de la vision, de l’olfaction, du contrôle vestibulaire) ont leurs axes corrélés deux à deux. Ils appartiennent donc à la même entité clinique et apportent la preuve de l’unicité de la description proposée de la maladie d’Ehlers-Danlos. Les deux autres axes (hémorragies,

C. Hamonet et al. troubles cognitifs), du fait des critères de sévérité qui ont été choisis, ne pouvaient être exploités mathématiquement. La Fig. 5 donne la distribution des indices de sévérité des axes 1, 3, 4, 5 ; et la Fig. 6 la corrélation des axes du Syndrome d’Ehlers-Danlos dans quatre groupes de symptômes. À partir de cette formulation mathématique du tableau clinique, il devient possible de calculer la position d’un patient par rapport à l’axe du syndrome d’Ehlers-Danlos et de déterminer le degré de certitude du diagnostic mais aussi la sévérité des symptômes (Fig. 7).

Discussion : l’Homme, la médecine et la santé Le point de vue des patients Ce que l’on entend souvent, de la part des patients, sur la médecine et les médecins est assez univoque : « on ne nous croit pas, on ne nous écoute pas », « On ne prend pas la peine de nous examiner ». Beaucoup de patients ont la sensation d’un échange très technique, que l’on soigne leur maladie mais pas le malade qu’ils sont. Il n’y a pas de

Figure 6. Homogénéité de la sévérité des signes du groupe 1 (peau, phanères et dents) et 5 (l’hypersensorialité : audition, odorat, vertiges, vision), 1 et 3, 1 et 4, 4 et 5. Severity consistency in signs of group 1 and 5, 1 and 3, 1 and 4 and 4 and 5.

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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Figure 7. Cartographie des 3 groupes (SED, témoins, GMS) en fonction de la sévérité et de la distance à l’axe SED. Three groups cartography regarding severity and distance with the axis SED.

clinique dans de tels récits, il n’y a pas, non plus, d’éthique. Ils développent, assez souvent, une défiance vis-à-vis des médicaments et de leurs effets indésirables. En revanche, ils apprécient, paradoxalement volontiers les prescriptions d’examens complémentaires (prises de sang ou imagerie). Le « si vous ne savez pas, Docteur, faîtes une radio » est devenu le volumineux paquets d’IRM ou de scanners que l’on offre, bras tendus, au médecin, comme une projection d’eux-mêmes, en lui demandant de les examiner pour en tirer, par une sorte de magie, la réponse aux questions qui se posent. Ils sont tout surpris par ce retour brutal à la clinique quand on leur dit : « posez ¸ cà là, je vais d’abord vous écouter et vous examiner ». Bien souvent, on oublie l’imagerie car la clinique a repris sa place et suffit pour débrouiller le problème de dos avec la collaboration du patient.

Classifications et formes cliniques La notion de classes a été introduite en médecine [11] pour permettre au médecin de s’appuyer sur des repères cliniques qui l’orientent vers un diagnostic. Boissier de Sauvages écrit : « lorsqu’il s’agit de sa propre vie, ou de celle d’un fils, d’un ami ; un médecin achèterait au poids de l’or l’histoire exacte de la maladie qu’il a à traiter, pour qu’elle lui servit comme de Boussole dans la pratique » [11]. La nosologie apparaît comme un guide pour la pratique de la médecine et a pour héritiers les précis, les traités de médecine. Les classifications, nécessaires pour administrer la santé par exemple la classification internationale des maladies (CIM), pour une épidémiologie mondiale dans le cadre de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’est répandue créant, de fait, un biais dans la démarche diagnostique et la reconnaissance médico-sociale de la maladie. C’est ainsi que l’OMS a entrepris de classer les handicaps comme on classe les maladies [36]. Le résultat est catastrophique puisqu’il ne tient pas compte des

aspects multidimensionnels que nous avons développés [37] ni des liens existants entre lésions corporelles, limitations fonctionnelles et situations de handicap. De plus, il ne tient pas compte de la dimension essentielle qu’est le point de vue de la personne. La terminologie utilisée est incompréhensible et conduit à toutes sortes d’erreurs dont les premières victimes sont les personnes en situation de handicap. Pire, l’utilisation de cette classification pour évaluer (donc reconnaître et mesurer le handicap) conduit à l’échec d’une loi [38] qui se donnait comme objectif l’égalité des droits et des chances. Le tout est soumis à une bureaucratie touffue, handicapante en soi. L’autre exemple flagrant d’une anarchie sémantique par les classifications est celle qui est proposée par les généticiens dans la maladie d’Ehlers-Danlos où trois, puis 11, puis 6 types ont été proposées, non pas sur une classification clinique mais sur des données moléculaires de modification des collagènes. Les caractéristiques cliniques présentées dans chacune de ces formes n’offrant pas de différences cliniques suffisamment caractéristiques pour les distinguer. Surtout, la forme de très loin la plus fréquente, dite forme hypermobile (type III) peut présenter les signes décrits dans les autres formes. Au total, une telle présentation est difficilement utilisable par le médecin généraliste et apparaît plutôt comme un obstacle que comme une aide au diagnostic.

La santé, le sain, le normal le pathologique Cette recherche du lien entre l’éthique et la clinique conduit nécessairement à reconsidérer les notions de normal et de pathologique et la fac ¸on d’en parler des médecins. Erving Goffman dans « Stigmate » [38] leur attribue l’invention de la distinction entre un corps qu’ils considèrent comme normal et celui qui ne l’est pas : « Cette vision de ‘‘l’Homme normal’’ trouve peut-être son origine dans la vision médicale de l’être humain ». C’est la description de la médecine

Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001

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12 que fait Canguilhem [1] : « La norme est définie par la biologie, véritable ‘‘droit canon’’ de la médecine (Canguilhem). On est ‘‘hypo’’, ‘‘hyper’’ ou ‘‘normo’’ ». C’est aussi la démarche de l’evidence-based medicine qui compare des séries de patients à des groupes témoins, présumés normaux. C’est aussi, la fac ¸on de pratiquer la clinique en comparant le côté pathologique au côté « sain ». De même en chirurgie on sépare zone saine et zone pathologique. Toute la médecine apparaît comme construite sur cette dualité. De même la guérison est souvent présentée comme un retour à la « norme biologique » ou par la « restitution ad integrum », un « retour à l’état antérieur » (sous-entendu, « l’état normal »). Le rôle du médecin est donc de déceler un état pathologique, à le différencier d’un état normal. L’état de santé est défini de fac ¸on positive et éthique par l’OMS en 1947 : « un état de bien-être total, physique, psychologique et social et pas seulement l’absence de maladie ou d’infirmité ». Si on inclut dans la notion de santé les aspects situationnels tels que nous les avons décrits on peut faire évoluer et rationaliser la définition de l’OMS et rejoindre la proposition de René Dubos [39] sur une définition relative de la normalité et de la santé : « État physique et mental relativement exempt de gênes et de souffrances qui permet à l’individu de fonctionner aussi longtemps que possible dans le milieu où le hasard ou le choix l’ont placé ». Il fait également une place pour les personnes avec un état de « mal-aise » [39] sans être malades qui représentent les états de pénibilité mais aussi les limitations fonctionnelles liées aux effets de l’âge. Elle se rapproche de la définition du handicap [37] qui inclut les personnes avec une maladie mentale : « Constitue une situation de handicap, le fait, pour une personne, de se trouver, de fac ¸on temporaire ou durable, limitée dans ses activités personnelles ou restreinte dans sa participation à la vie sociale du fait de la confrontation interactive entre ses fonctions physiques, sensorielles, mentales et psychiques lorsqu’une ou plusieurs sont altérées et, d’autre part, les contraintes physiques et sociales de son cadre de vie ». La réponse est la réadaptation [37] : « La réadaptation est l’ensemble des moyens médicaux, psychologiques et sociaux qui permettent à une personne en situation de handicap ou menacée de l’être, du fait d’une ou plusieurs limitations fonctionnelles de mener une existence aussi autonome que possible ». Ces nouveaux concepts applicables à la santé connaissent un développement universel avec l’introduction de la notion d’inclusion déjà évoquée par René Lenoir [40], par opposition à exclusion en remplacement d’insertion à l’Onu en 1986 [41] et l’introduction de la notion de handicap dans la Déclaration des Droits de l’Homme. « Reconnaissant que la notion de handicap évolue et que le handicap résulte de l’interaction entre des personnes présentant des incapacités et les barrières comportementales et environnementales qui font obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres ».

Conclusion : redonner un sens au signe, changer le vocabulaire sémiologique Il n’y a pas de médecine sans clinique. Elle est le fondement même d’un lien éthique qui s’établit entre l’Homme

C. Hamonet et al. souffrant et le médecin. La spécificité et la qualité de ce lien conditionne l’efficacité même de l’Art de soigner. Il doit intégrer les évolutions des techniques, des modes de communication et des mentalités. L’effort le plus important pour lutter contre la dérive actuelle vers une instrumentalisation et une déshumanisation des pratiques de santé, doit venir des médecins. Il faut éviter ce type d’écueil venu du désir de performance technologique : sur une chaîne de dosage ultramoderne et surdimensionnée d’un grand hôpital parisien, la troponine utilisée pour le diagnostic de l’infarctus du myocarde est réalisée en bout de chaîne, soit après 70 minutes « parce que l’on a choisi la précision aux dépens de la rapidité », ce qui oblige ceux qui se présentent aux urgences à attendre. Cette approche technologique de la précision a peut-être déjà été mortelle. Il faut préciser que le dosage est obtenu en 12 minutes dans l’ambulance du SAMU. L’écoute du patient reste la clé du diagnostic [42]. La méconnaissance d’une pathologie ne doit pas se traduire par un rejet qui est perc ¸u par le patient comme un mépris [43]. Cette situation est bien illustrée par la phrase de l’Anthropologue David Le Breton [44], à propos des médecins : « Un grand savoir sur le corps. . . Un piètre savoir sur l’Homme souffrant ». La cause de cette incompréhension entre le patient et celui qui le soigne trouve principalement son origine dans la construction imparfaite de la sémiotique médicale qui reste (et est de plus en plus avec l’imagerie nouvelle) une sémiologie du corps et non pas de l’Homme. C’est ce qui a fait écrire à Roland Barthes [45], dans un chapitre consacré à la médecine, qu’il ne comprenait rien à la séméiologie médicale pour des questions de vocabulaire d’abord, mais surtout parce que ce n’était pas de la sémiologie ! La nouvelle sémiologie que nous proposons, intégrant dans la même analyse, le corps, les fonctions ou capacités humaines, les situations et la subjectivité est une réponse à cette critique très dure pour la médecine. Nous savons cependant, combien l’ancrage des mots et des idées est puissant et combien il est difficile, particulièrement chez les médecins, de faire évoluer cela lorsque l’origine remonte à leurs premiers pas dans la médecine. C’est probablement là qu’il faut faire porter les efforts.

Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

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Pour citer cet article : Hamonet C, et al. La clinique base de l’éthique dans la pratique médicale. Ethics, Medicine and Public Health (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.jemep.2017.05.001