La gastrostomie : des soins adaptés au service du quotidien

La gastrostomie : des soins adaptés au service du quotidien

Table ronde Les stomies digestives Disponible en ligne sur La gastrostomie : des soins adaptés au service du quotidien Gastrostomy: Appropriate care...

133KB Sizes 274 Downloads 420 Views

Table ronde Les stomies digestives

Disponible en ligne sur

La gastrostomie : des soins adaptés au service du quotidien Gastrostomy: Appropriate care for every day

www.sciencedirect.com Mots clés : Gastrostomie

S. Beucher*, M. Cavayé Stomathérapeutes. Service de gastro-entérologie pédiatrique. Hôpital Trousseau (AP-HP), Paris, France

E

754

n pédiatrie, la confection d’une gastrostomie est une pratique courante. Les techniques opératoires sont maintenant bien décrites et standardisées. Pour les soins, les documents sont peu nombreux, les recommandations ont un niveau de preuve scientifique faible [1], les protocoles dépendent du service d’où ils émanent, les pratiques s’appuient le plus souvent sur l’expérience professionnelle. Quant au parcours de soins des enfants porteurs d’une gastrostomie, il n’est pas toujours identifié, organisé, planifié et pluridisciplinaire.

1. Les soins et la surveillance post-opératoires D’une manière générale, les soins sont ceux d’un suivi postopératoire avec une surveillance des paramètres cliniques, de la cicatrisation du plan cutané et du trajet stomial. Ils participent à la diminution du risque d’apparition de complications secondaires. Toutefois, des soins spécifiques sont dépendants du mode opératoire. La laparotomie permet la mise en place d’un bouton de gastrostomie (à dôme rigide ou ballonnet gonflable) en première intention. La cœlioscopie permet de réaliser une gastrostomie en insérant un bouton à profil réduit par l’orifice d’un des trocarts. La technique par voie endoscopique ou gastrostomie percutanée endoscopique (GPE) permet la mise en place d’une sonde. Elle est mobilisée toutes les 3 h pendant les 24 premières heures, toutes les 6 h les 24 heures suivantes, puis 1 fois par jour afin de favoriser l’accolement et la cicatrisation du trajet fistuleux. L’infection et la nécrose sont les 2 complications précoces de cet abord. La sonde initiale reste en place au minimum 10 semaines puis est remplacée selon les recommandations de l’Afssaps [2]. La gestion de la gastrostomie reste encore très interdépendante de l’équipe qui a posé le dispositif de gastrostomie. Dans les services, les soins doivent être protocolés, enseignés, suivis et notifiés.

2. Les soins de gastrostomie après cicatrisation Une fois le trajet fistuleux constitué c’est-à-dire environ au bout de 2 semaines, le soin de gastrostomie est un soin d’hygiène simple et quotidien : lavage à l’eau et au savon doux et neutre, rinçage, séchage ; la douche et le bain sont conseillés. Une rotation * Auteur correspondant. e-mail : [email protected]

754 © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Archives de Pédiatrie 2010;17:754-755

du dispositif doit être effectuée pour éviter tous risques d’adhérences, surveiller et prévenir les lésions cutanées. L’utilisation d’antiseptique et de pansement occlusif est à proscrire. Cette gestion concise et précise de la gastrostomie expliquée aux équipes soignantes et aux parents est la meilleure garantie de sa durée [1,3-5].

3. Les complications Les complications peuvent avoir des causes multiples : le patient lui-même, la technique de pose choisie, le matériel ou les soins apportés à la gastrostomie.

3.1. Les complications post-opératoires Elles sont rares, liées à l’enfant (âge, pathologie) et à la technique opératoire (anesthésie, expérience de l’opérateur) : hémorragie, infection (péritonite, fasceïte nécrosante), fistule gastro-colique, hernie, prolapsus gastrique, iléus paralytique, pneumopéritoine... Pour éviter où prévenir au maximum ce type de complications la surveillance post-opératoire est capitale.

3.2. Les complications cutanées 3.2.1. Le tissu de granulation ou granulome C’est une réponse inflammatoire cutanée à la présence d’un corps étranger. Cette excroissance charnue, rose et suintante est très vascularisée. Ce tissu n’est pas douloureux, mais favorise les fuites péristomiales. Les soins d’hygiène doivent être plus fréquents. Sur prescription, l’application de nitrate d’argent est possible. Il peut être complété par un dermocorticoïde (Tridisonit® 0,05 %) appliqué sur une interface (type Adaptic®-Jelonet®). Si ces traitements sont inefficaces une excision chirurgicale ou du laser peuvent être envisagés. Parallèlement, il faut vérifier que le bouton ou la sonde sont bien adaptés à l’enfant et contrôler la porosité du ballonnet. L’usage d’antibiotiques locaux qui sélectionnent les germes est à proscrire.

3.2.2. La « rougeur » péristomiale Terme souvent utilisé pour exprimer une atteinte cutanée, la « rougeur » reste toutefois à définir : dermabrasion, infection ou brûlure liée à des fuites de liquide gastrique. Dans tous les cas, l’étiologie doit être systématiquement recherchée afin de réaliser les soins cutanés adaptés.

La gastrostomie : des soins adaptés au service du quotidien

3.2.3. L’infection de paroi Elle se traduit par une rougeur péristomiale, une induration, une chaleur, une douleur au toucher avec ou sans écoulement, une hyperthermie. Un prélèvement peut être pratiqué avant l’utilisation d’antiseptique mais la mise en place d’une antibiothérapie per os est obligatoire.

4. Le parcours de soin

Un antifungique local et un traitement général (Mycostatine®) sont prescrits. Après traitement, le bouton sera changé car il est souvent colonisé par des micro-organismes [6].

La coordination des soins, l’organisation du retour à domicile et la traçabilité du suivi au long cours sont des facteurs déterminants d’assurance qualité-soins. L’enfant et sa famille doivent être informés dès la période préopératoire du déroulement de l’hospitalisation ; encadrés et éduqués à l’apprentissage de la mise en place de la nutrition et l’utilisation du matériel annexe ; formés [5] aux soins de gastrostomie. Les réseaux de soins seront sollicités pour accompagner ces familles qui peuvent rencontrer des difficultés d’aspect pratique ou d’ordre psychologique.

3.2.5. La métaplasie gastrique

5. Conclusion

3.2.4. La mycose

C’est la colonisation du trajet fistuleux par de la muqueuse gastrique. Le traitement est chirurgical.

3.3. Les autres complications 3.3.1. Les « fuites » péristomiales Elles provoquent un inconfort, voire de la douleur chez l’enfant en cas de brûlure cutanée par l’acidité gastrique. Il faut rechercher l’étiologie des fuites : constipation, minceur de la paroi abdominale, gastroparésie surtout chez les enfants IMC, hyperpression due à des pleurs, toux, crises d’épilepsie, nutrition entérale. Le matériel peut être en cause : une sonde trop lourde, trop rigide entraine un élargissement de la stomie, mais aussi une malposition, un mauvais gonflement du ballonnet. Il n’existe aujourd’hui aucun consensus sur les soins. On retrouve l’emploi de poudre type Orahésive®, de pâte Orabase® ou d’anneau d’Eakin®, au stade de la dermabrasion de pommade à base d’oxyde de zinc ou de Sucrafalte [7], plus ajout si besoin un antiacide par la sonde (Ogastoro®). En cas de fuites importantes, l’utilisation des pansements hydrocolloïdes ou hydrocellulaires n’est pas recommandée, car ils maintiennent un milieu humide acide sur la lésion. Croire que l’augmentation de la charrière du tube diminuera les fuites est une erreur, elle ne fait que repousser le problème.

3.3.2. La migration du matériel Le mauvais positionnement du ballonnet des sondes peut entraîner une obstruction du pylore ou de l’œsophage, une incarcération du matériel. Pour prévenir ces complications, lors du soin quotidien vérifier le bon emplacement de la collerette externe sur la sonde : – retrait accidentel du tube – c’est une urgence. Une sonde doit être rapidement replacée.

Si aujourd’hui la gastrostomie est la technique de choix pour une nutrition entérale à moyen et long terme, la prise en soins des enfants gastrostomisés mérite toute notre attention. Évaluer nos pratiques, engager de nouvelles études scientifiques semblent nécessaires pour harmoniser les usages. Connaître et transmettre les bonnes pratiques de soins au personnel soignant, à la famille et son entourage garantira la longévité de cette technique indispensable à la vie de certains enfants. Un suivi pluridisciplinaire et l’identification d’un chemin clinique permettra une prise en charge efficiente et de qualité.

Références 1. Agence Nationale d’Accréditation et d’évaluation de Santé (ANAES). Soins et surveillance des abords digestifs pour l’alimentation entérale chez l’adulte en hospitalisation et à domicile. Recommandations pour la pratique des soins. Mai 2000. 2. Agence Française de Sécurité des produits de santé (Afssaps). Recommandations relatives au remplacement des dispositifs de Gastrostomie Percutanée Endoscopique (GPE). DM-RECO 05/03. 3. Le Sidaner A. Précautions à prendre avant, pendant et après la gastrostomie. Actua Endoscopia 2005;35 suppl 2;529-31. 4. Launay V, Gottrand F, Turck D. La gastrostomie percutanée endoscopique chez l’enfant. Actua endoscopia 1994;24:351-61. 5. Reinberg O, de Buys Roessingh A, Vasseur Maurer S et al. Gastrostomies, PEG, sondes et boutons : pour ne plus confondre et les gérer ! Pediatrica 2008;19:42-5. 6. Dautle MP, Wilkinson TR, Gauderer MW. Isolation and identification of biofilm microorganisms from silicone gastrostomy devices J Pediatr Surg 2003;38:216-20. 7. Hayashi AH, Lau HY, Gillis DA. Topical sucrafalte: effective therapy for the management of resistance péristomial and perineal excoriation. J Pedriatr Surg 1991;26:1279-81.

755