La gélifraction des restes fauniques. Expérimentation et transfert au fossile

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Annales de Paléontologie 94 (2008) 121–165

Article original

La gélifraction des restes fauniques. Expérimentation et transfert au fossile The gelifraction of the faunal remains. Experiment and transfer towards the fossil Jean-Luc Guadelli PACEA/IPGQ, UMR 5199 CNRS, université Bordeaux-1, bâtiment B18, avenue des facultés, bâtiment B18, 33405 Talence cedex, France Disponible sur Internet le 16 juillet 2008

Résumé La fragmentation observée dans un gisement archéologique ne pouvant s’expliquer uniquement en termes d’action anthropique, nous avons soumis des restes fauniques (os et dents) à des alternances de gel/dégel au Centre de Géomorphologie du CNRS de Caen. Parallèlement nous avons disposé des fragments osseux et dentaires dans les cinq cellules d’un site artificiel en milieu naturel dans les Alpes du Sud (programme de recherche pluridisciplinaire transfert de référentiels actuels de l’étage nival aux sites paléolithiques [TRANSIT]). Au terme des expériences, nous avons pu mettre en évidence les caractéristiques de certains gélifracts mais leur comparaison directe avec les fragments osseux archéologiques, quoique très prometteuse, n’en est qu’à ses débuts et nécessite d’autres expérimentations similaires. © 2008 Publi´e par Elsevier Masson SAS. Abstract The fragmentation observed in an archaeological site, which cannot be explained only in terms of anthropological action, we subjected faunal remains (bones and teeth) in alternations of frost/thaw at the center of geomorphology of the CNRS of Caen. At the same time, we arranged osseous and dental fragments in five cells of an artificial site in natural environment in the South Alps (program of multidisciplinary research transfert de référentiels actuels de l’étage nival aux sites paléolithiques [TRANSIT]). At the end of the experiments, we were able to bring to light the characteristics of some gelifracts but their direct comparison

Adresse e-mail : [email protected]. 0753-3969/$ – see front matter © 2008 Publi´e par Elsevier Masson SAS. doi:10.1016/j.annpal.2008.05.002

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with the archaeological osseous fragments, although very promising, is there only for its debuts and requires others similar experiments. © 2008 Publi´e par Elsevier Masson SAS. Mots clés : Gélifraction expérimentale ; Fragmentation ; Taphonomie ; Site naturel ; TRANSIT Keywords: Experimental gelifraction; Fragmentation; Taphonomy; Natural site; TRANSIT

1. Introduction Il est maintenant avéré depuis plusieurs années que la fragmentation observée dans un gisement archéologique ne peut s’expliquer uniquement en termes d’actions anthropiques. Toutefois la part relative de l’action des phénomènes naturels n’a que peu été abordée mis à part en termes généraux tels que « weathering », « corrosion », « fragmentation due au poids des sédiments ». . . Par ailleurs, s’il est assez aisé d’observer ou de reproduire expérimentalement l’action de tels ou tels carnivores et les stigmates qu’ils ont laissés sur les os, en revanche, l’étude expérimentale des dommages dus à des causes physiques est beaucoup plus compliquée à mettre en œuvre. Les protocoles sont plus difficiles à concevoir et à appliquer à cause de la multiplicité des paramètres à prendre en compte, le transfert au fossile n’est pas aisé, mais la principale difficulté provient du paramètre « temps » ; les expériences demandent beaucoup de temps et il ne faut pas escompter avoir des résultats transférables au fossile avant l’achèvement complet d’expériences qui demandent plusieurs années. Plus on raccourcit le temps d’expérience plus on court le risque d’effectuer des observations trompeuses, apparemment identiques à celles que l’on collecte en cours de fouilles mais qui, compte tenu du faible coefficient de confiance qu’on doit leur affecter, ne sont en fin de compte que de peu d’intérêts. Nous nous sommes intéressés à l’influence des cycles gel/dégel, car au cours des différentes périodes glaciaires, le gel a été un facteur naturel fondamental que ce soit dans les processus de formation et d’évolution des sites que dans les processus qui ont agi sur les restes fauniques et les artefacts abandonnés dans les gisements. Depuis plus de 30 ans la littérature foisonne de références basées sur des observations de terrain et sur des résultats d’expérimentation concernant l’impact des cycles gel/dégel sur la pierre de construction, sur les silex, sur les processus de formation et d’évolution des sites (par exemple, Bertran, 2006 : Bertran et al., 1992 : Coubat, 1998 : Coutard et Mucher, 1985 : Coutard et Van Vliet-Lanoë, 1994 : Etlicher et Lautridou, 1999 : Font et al., 2006 : Harris et al., 1996 : Lautridou, 1978, 1988 : Lautridou et al., 1984, 1990 : Lautridou et Francou, 1992 : Letavernier et Ozouf, 1987 : Matsuoka, 2001 : Ozouf, 1994 : Texier et al., 1998 : Todisco et al., 2000 : Washburn, 1979. . .). En revanche, mis à part une très courte note de J. Bouchud et Y. Guillien (1953 : p. 90) il n’y avait rien concernant les effets du gel sur la faune, mais il est vrai qu’a priori il semblait malaisé d’aborder cette étude à cause de l’hétérogénéité du matériel. Toutefois il semblait qu’une telle étude expérimentale était potentiellement porteuse d’enseignements, ce qu’avaient déjà discerné J. Bouchud et Y. Guillien (op. cit.) quand ils écrivaient : « Ainsi donc, le gel exerce une action destructrice sur les dents en particulier et sur tous les fossiles creux en général » et qu’il fallait « . . . rechercher sur les dents les marques caractéristiques du gel » (Bouchud et Guillien, op. cit.) avant de tirer des conclusions de portée générale sur l’importance de l’action de l’Homme. La théorie pragmatique de la connaissance de Charles S. Peirce (1878) selon laquelle le sens d’un concept réside dans les prédictions que rend possibles son usage et qui sont vérifiables par l’expérience future trouve sa pleine expression dans notre cas, car le gel était

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considéré comme responsable a priori d’une fragmentation donnée pour naturelle, mais aucune expérimentation n’avait été entreprise pour essayer d’observer la gélifraction ou de la quantifier. Ainsi, afin d’essayer de mettre en évidence les effets du gel à l’exclusion de tout autre facteur, nous avons entrepris des expériences de gélifraction dans les chambres froides au Centre de Géomorphologie du CNRS de Caen en collaboration avec Jean-Claude Ozouf qui y dirigeait le laboratoire de cryoclastie. Le bilan de la gélifraction expérimentale au terme de 3149 cycles de gel/dégel nous permet de mettre en évidence les effets du gel mais, ne pouvant comparer directement les gélifracts expérimentaux et les fragments osseux archéologiques, nous avons, dans le cadre du programme expérimental pluridisciplinaire transfert de référentiels actuels de l’étage nival aux sites paléolithiques (TRANSIT), placé des restes fauniques dans des sites artificiels naturels dans les Alpes du Sud et des échantillons identiques dans les chambres froides du Centre de Géomorphologie du CNRS de Caen (arrêt à 2200 cycles). Le programme TRANSIT a été conc¸u afin de mettre en évidence l’impact des mécanismes périglaciaires sur les assemblages archéologiques (Texier et al., 1998). En effet, les processus géomorphologiques étaient grandement sous-estimés dans l’interprétation de la formation des dépôts archéologiques des sites Paléolithiques européens, malgré une remarque très clairvoyante (qui fut malheureusement trop longtemps oubliée) d’Ed. Lartet et H. Christy en 1864 « . . .Il faut aussi tenir compte des événements consécutifs qui ont pu modifier la répartition des matériaux constituant les dépôts ossifères, et quelquefois même intervertir l’ordre de leur superposition originelle. ». . . (Lartet et Christy, 1864 : p. 3). 2. Méthodologie La première série d’expériences a tout d’abord consisté à soumettre des échantillons (dents, os longs, os courts, bois de renne. . .) à des cycles journaliers de gel/dégel entre −5 ◦ C et +12 ◦ C. La méthode utilisée que nous avons déjà présentée (Guadelli et Ozouf, 1994, 2000) est calquée sur celle employée dans les expériences de gélifractions des roches (Lautridou et Ozouf, 1980, 1982 : Letavernier et Ozouf, 1987 : Ozouf, 1983, etc.). L’hypothèse que nous pouvons formuler d’après les observations sur le terrain et les possibilités de l’enceinte thermique dont nous disposons, nous ont amené à fixer un protocole expérimental dans lequel nous avons pris en compte trois paramètres : • l’intensité du gel ; • la vitesse de descente de la température ; • la teneur en eau des échantillons au début de l’expérience. La durée des cycles de gel et de dégel est de 24 heures : 12 heures pour la descente de la température jusqu’à l’intensité fixée et 12 heures pour la remontée jusqu’à +12 ◦ C (ou +15 ◦ C selon la charge de la chambre de gélifraction). 2.1. L’intensité du gel Au contraire de ce qu’on pourrait le croire au premier abord de nombreuses expérimentations ont montré que ce n’est pas l’intensité et la durée du gel qui induit la gélifraction, mais la fréquence des alternances gel/dégel ; en revanche, l’intensité et la durée du gel induisent la profondeur jusqu’où le gel affecte les sédiments et les éléments qu’il renferme. Nous avons retenu la température de −5 ◦ C, car elle correspond à ce que l’on observe dans la nature dans un contexte

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Fig. 1. Variation quotidienne de la température. Daily variation of the temperature.

périglaciaire actuel à l’entrée d’une grotte ou d’un abri sous-roche. De plus, lors des expériences, un gel de −5 ◦ C dans l’enceinte thermique du Centre de Géomorphologie permet un gel complet d’un bloc rocheux. 2.2. La vitesse de descente de la température La vitesse choisie correspond à ce qu’on observe dans la nature, 5 à 6 ◦ C par heure jusqu’à la température minimale choisie de −5 ◦ C (Fig. 1). Selon A. Cras (2005), dans la nature on observe 70 à 100 cycles de gel par an, mais c’est une moyenne, car il a observé des différences marquées entre les zones plus ou moins exposées au soleil, les adrets étant soumis à des gelées de surface et courtes, les ubacs subissant un engel précoce (fin automne) et de nombreuses alternances gel/dégel tardives (Cras, 2005 : p. 36). Ainsi les 365 cycles expérimentaux annuels simulent de trois ans et demi à cinq ans de gel dans la nature. 2.3. Teneur en eau des échantillons au cours de l’expérience Au cours de l’expérimentation que nous avons menée nous ne nous sommes uniquement intéressés à la cryoclastie (cycles gel/dégel) en « fixant » le paramètre hydroclastie (cycles humidification/séchage) en maintenant les échantillons saturés en eau en rajoutant de l’eau distillée1 ; nous avons considéré comme négligeable l’haloclastie (altération mécanique par des sels), car nous avons toujours utilisé de l’eau distillée mais nous sommes forcés de reconnaître que c’est un pan de l’expérimentation qu’il faudrait explorer à l’avenir, ne serait-ce que pour nous rapprocher au plus près du « naturel actuel » ou du « fossile ». Sans entrer dans de long détails histologiques nous rappellerons simplement que le tissu osseux est constitué de cellules (ostéoblastes, ostéocytes et ostéoclastes), et d’une matrice extracellulaire (92 à 95 % du tissu) qui comprend une matrice organique (22 %), une matrice inorganique (69 %) et de l’eau (environ 9 %, pourcentage qui varie en fonction de l’âge et du degré de minéralisation) (Toppets et al., 2004 : Day, 2005). De même, le cartilage contient de l’eau, dont 30 % est piégé 1

Nous tenons à remercier à ce sujet Y. Delehaye pour son aide.

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dans les fibres de collagènes (Mow et al., 1991 in Brommer, 2005) ; enfin, on peut noter que la teneur en eau est la plus élevée dans la zone superficielle et diminue vers le cartilage profond (Lemperg et al., 1971 in Brommer, 2005). Pour ce qui est des dents, l’émail est la structure la plus dure de l’organisme et c’est aussi le tissu le plus minéralisé car sa richesse en sels minéraux (essentiellement phosphocalciques) atteint plus de 99 % de son poids avec moins de 1 % de matrice organique (Catala et al., 2006). La dentine est, après l’émail, le deuxième tissu le plus dur de l’organisme. Ce tissu est minéralisé à 80 % (contre 70 % pour l’os) par l’hydroxyapatite ; cette composante inorganique s’appelle la Dahllite. Les 20 % restant, la trame organique, est essentiellement de collagène. Contrairement à l’os, la dentine ne contient pas de cellules et elle possède une structure poreuse, car elle est parcourue par des microtubes (tubulis dentinaires ou tubules dentinaux) (50 000/mm2 ) (Catala et al., op cit) dans lesquels circulent les fibres de Tomes qui émanent de cellules (les odontoblastes) qui tapissent la périphérie de la cavité pulpaire. Ces canaux ont des configurations différentes selon les dentines, leurs diamètres sont compris entre 0,8 et 2,2 ␮m et leur configuration tridimensionnelle est déterminée génétiquement et est donc une caractéristique spécifique à l’ordre biologique. Sans tenir compte de l’eau contenue dans les os frais, qui fait défaut dans les échantillons secs ou fossiles, nous avons choisi une teneur en eau initiale obtenue par immersion pendant 48 heures afin d’obtenir un état hydrique de l’échantillon qui correspond à ce qui se produit dans la nature lorsqu’un dégel libère une grande quantité d’eau et qu’un pergélisol empêche toute infiltration. Ainsi nous considérerons que les objets sont supposés être soit en surface de la couche active (qui gèle et dégèle au gré des saisons), soit inclus dedans mais au dessus de la couche de transition, c’est-à-dire au maximum à moins de 34 ± 7 cm de profondeur, qui est la profondeur de cette couche de transition selon J.G. Bockheim et K.M. Hinkel (2005) ; même si la couche de transition dégèle de manière épisodique, nous la considérons comme étant la partie supérieure gelée du permafrost et nous ne tiendrons pas compte des 23 ± 8 cm de son épaisseur (Bockheim and Hinkel, op cit). 2.4. Le déroulement des expériences Les échantillons sont d’abord séchés en étuve, pesés (P1), immergés dans de l’eau pendant 48 heures et pesés à nouveau (P2) ce qui nous permet de calculer la teneur en eau : (P2 − P1) × 100/Volume. Les os et les dents saturés en eau sont maintenus immergés (ou au moins à demi-immergés pour les plus volumineux) dans des cuvettes pendant les alternances de gel/dégel et pour compenser l’évaporation qui se produit lors des expériences le niveau de l’eau est constamment entretenu (Fig. 2). Dans un premier temps nous n’avons pas cherché à connaître la nature des vides de chaque pièce tout en ayant à l’esprit que si la porosité totale, la morphologie des vides et la microfissuration sont fondamentaux pour expliquer les effets de l’action du gel sur les calcaires (Pissart et al., 1993 : Prick, 1997), ces paramètres ne le sont sans doute pas moins dans le cas des échantillons fauniques. Ainsi, par exemple, comme l’eau a tendance à s’écouler en empruntant les fissures vers les parties les plus froides quand le front de gel pénètre dans un échantillon très fissuré, il y a assèchement de l’objet et donc l’engel ne provoque pratiquement aucun effet. L’os compact (ou cortical) est donné pour avoir une porosité de 5 à 30 % et de 30 à 90 % pour l’os spongieux (ou trabéculaire) (Toppets et al., 2004). Malgré la nature très hétérogène du milieu osseux, nous avons effectué des mesures de porosité au porosimètre à mercure sur des séries d’os afin de caractériser non seulement quantitativement mais également qualitativement ces vides. Sans entrer dans les détails des différents volumes (volume total de l’échantillon, volume de

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Fig. 2. Échantillon saturé en eau. Sample saturated with water.

l’échantillon sans sa porosité, volume des pores) qui n’ont pas leurs places ici et présenté de manière un peu simpliste, dans cette mesure on injecte sous pression un volume de mercure dans l’échantillon ; le mercure remplit les vides de la roche et on regarde le volume de mercure injecté pour avoir le volume des pores. Nous ne présenterons pas ici la totalité des mesures pour ne montrer que les résultats pour deux échantillons de la deuxième série, l’un no T2 est de l’os compact provenant d’une diaphyse de fémur de Bos taurus actuel (Fig. 3), et l’autre, no T13 est de l’os compact provenant d’une diaphyse de tibia de Saiga tatarica fossile du Magdalénien du Roc de Marcamps, fouilles M. Lenoir (Fig. 4). Dans le Tableau 1 on constate que l’os cortical provenant d’une diaphyse de fémur présente une porosité allant du simple au double (6,35 à 11,23 %), que celle de l’os cortical près d’une extrémité articulaire est très faible (3,19 %), nous reviendrons ultérieurement sur les conséquences de cette observation, que la porosité de l’os compact d’un fragment crânien est forte (9,76 %) et que celle d’un os cortical d’un tibia fossile est très forte. Il apparaît aussi que l’os compact « moderne » présente deux séries de pores (Tableaux 1 et 2 et Fig. 3), l’une dont le diamètre moyen est de 15,7 ␮m pour l’os compact pris dans de la diaphyse, d’environ 10 ␮m pour de l’os compact pris près d’une portion articulaire, de presque 26 ␮m pour de l’os crânien (Fig. 3 et 5). La série de « petits » pores présente respectivement des diamètres moyens égalent à 0,115, 0,0160, 0,0987 et 0,307 ␮m (Fig. 3 et 6). La Fig. 3 montre aussi l’existence Tableau 1 Pourcentage de porosité en fonction des échantillons Percentage of porosity according to samples No

Hg (%)

Remarques

T2 T4-2 T7 T11 T13

6,35 11,23 3,19 9,76 25,87

Deux familles de pores bien différenciées Deux familles de pores bien différenciées Deux familles de pores bien différenciées Deux familles de pores bien différenciées Différenciation moins nette

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Fig. 3. Courbe de porosité d’une portion d’os compact (fémur de Bos taurus actuel). 0 cycle et 50 cycles. Curve of porosity of a portion of compact bone (thighbone of a modern Bos taurus). 0 cycle and 50 cycles. 127

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Tableau 2 Diamètres des pores pour différents échantillons (os moderne : os compact pris dans de la diaphyse (T2, T4-2), os compact pris près d’une portion articulaire (T7), os crânien (T11) ; os fossile : os compact pris dans de la diaphyse (T13)) Diameters of pores for various samples (modern bone: compact bone taken in the shaft (T2, T4-2), compact bone taken near an articular part (T7), cranial bone (T11); fossil bone: compact bone taken in the shaft (T13)) No

T2 T4-2 T7 T11 T13

Diamètre moyen des « grands » pores

Diamètre moyen des « petits » pores

0 cycle (␮m)

50 cycles (␮m)

0 cycle (␮m)

50 cycles (␮m)

15,7 15,7 9,59 25,7

12,3 et 68,6 12,3 et 68,6 7,50 et 68,6 15,7 et 68,6 68,6

0,115 0,115 0,0160 0,0897 0,240

0,115 0,115 0,006 0,006 0,307

de pores de très grande taille (entre 53,6 et 112 ␮m) qui correspondent sans doute à différents canaux naturels dans l’os : canaux de Havers (50 à 80 ␮m de diamètre), microdommages de fatigue qui peuvent atteindre 80 ␮m de long (Martin et al., 2007), canaux de Volkmann (environ 20–30 ␮m de diamètre), les lacunes qui contiennent les ostéocytes (jusqu’à presque 200 ␮m selon Vashishth et al., 2000 : Fig. 1), canalicules liant les ostéocytes, lacunes de Howship, etc. En revanche, l’échantillon fossile, une portion de tibia de S. tatarica no T13, à 0 cycle ne présente qu’une famille de pores d’environ 0,240 ␮m de diamètre (Tableaux 1 et 2 et Fig. 4–6). Après 50 cycles on observe que la famille des « grands » pores a évolué en deux groupes de tailles, avec des pores de très grand diamètre (68,6 ␮m) et des pores de plus petits diamètres, respectivement 12,3, 12,3, 7,5 et 15,7 ␮m (Tableau 2 et Fig. 3 et 5). Il semble que la première famille pores (à 0 cycle) se soit ouverte pour générer les très grands pores ou des fissures (à 50 cycles) et qu’il se soit créé de nouveaux pores. La famille des « petits » pores ne semble pas avoir évolué, au moins après 50 cycles ; seul l’os crânien se démarque et il faudrait renouveler l’expérience pour valider nos premiers résultats (Tableau 2 et Fig. 3 et 6). Pour ce qui est de l’os fossile, on constate maintenant la présence de très grands pores de 68,6 ␮m de diamètre comme pour l’os frais qui doit sans doute représenter une porosité de fissure (Tableau 2 et Fig. 4 et 5), alors que la famille des « petits » pores a vu son diamètre augmenter (Tableau 2 et Fig. 4 et 6). En conclusion, cette étude toute préliminaire de l’évolution de la porosité en fonction du gel semble montrer qu’il se créé au fur et à mesure des cycles une porosité de plus en plus grande taille qui devient de moins en moins « utile » au gel puisqu’il semble que ce soit une porosité ouverte (libre ou dans notre cas efficace). On peut noter aussi qu’il n’y a pas « d’anarchie » dans la fragmentation, c’est-à-dire qu’il n’y a pas explosion de l’objet de manière aléatoire et qu’en fonction de la pièce considérée la gélifraction est sans doute prédictible. Nous y reviendrons ultérieurement tout en gardant à l’esprit que si, en moyenne, l’os cortical représente 80 % de l’os squelettique total, en revanche, comme il existe une grande disparité dans le squelette, les vertèbres étant, par exemple, formées de 50 % d’os trabéculaire et de 50 % d’os cortical et le col du fémur de 30 % d’os trabéculaire et de 70 % d’os cortical, il y a aussi une grande disparité dans les effets du gel en fonction des éléments squelettiques ; nous voyons ainsi déjà quels sont les biais que cela peut introduire. On peut aussi prévoir que la gélifraction va dépendre de l’âge du sujet, car la porosité de l’os cortical augmente en fonction de l’âge. La quantité d’os déposée diminue régulièrement durant le vieillissement. Il apparaît également que la densité d’ostéocytes diminue avec l’âge (Mullender et al., 1996). Par ailleurs, Vashishth et al. (2000) ont montré que la diminution du nombre de lacunes

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Fig. 4. Courbe de porosité d’une portion d’os compact (tibia de Saiga tatarica fossile). 0 cycle et 50 cycles. Curve of porosity of a portion of compact bone (shin of fossil Saiga tatarica). 0 cycle and 50 cycles. 129

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Fig. 5. Diamètre des pores de la famille des « grands pores ». 0 cycle et 50 cycles. Os moderne : os compact – diaphyse de fémur – (T2, T4-2), os compact – près d’une portion articulaire de fémur – (T7), os crânien (T11) ; os fossile : os compact – diaphyse de tibia (T13). Diameter of the pores of the family of the “big pores”. 0 cycle and 50 cycles. Modern bone: compact bone – shaft of thighbone – (T2, T4-2), compact bone – near an articular portion of thighbone – (T7), cranial bone (T11); fossil bone: compact bone – shaft of shin (T13).

Fig. 6. Diamètre des pores de la famille des « petits pores ». 0 cycle et 50 cycles. Os moderne : os compact – diaphyse de fémur – (T2, T4-2), os compact – près d’une portion articulaire de fémur – (T7), os crânien (T11) ; os fossile : os compact – diaphyse de tibia (T13). Diameter of the pores of the family of the “small pores”. 0 cycle and 50 cycles. Modern bone: compact bone – shaft of thighbone – (T2, T4-2), compact bone – near an articular portion of thighbone – (T7), cranial bone (T11); fossil bone: compact bone – shaft of shin (T13).

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dans l’os cortical est associée avec l’accumulation de microfractures et avec l’augmentation de la porosité due à l’âge croissant des sujets (Baïotto et al., 2004). 3. Les échantillons 3.1. Première série d’échantillons Nous les avons choisis (Tableau 3) de manière à ce qu’ils représentent le maximum de cas possibles : os frais avec ou sans tendons, os fossiles complets ou non, os spongieux, os compacts, os longs, os courts, différents type de dents. Il s’agit de l’expérimentation no 122-1 du Centre de Géomorphologie. • Échantillon no 1 (os frais). Il s’agit d’un métacarpe droit de Bos taurus (Bœuf domestique) actuel. Il ne présente aucune altération de la surface de l’os ni de fissure sur la diaphyse. • Échantillon no 2 (os frais sec). Ce tibia et ce tarse droits en connexion de jeune Capra hircus (Chèvre) actuel possède encore la gaine tarsienne mais les tendons sont secs. • Échantillon no 3 (os frais sec). Il s’agit d’un métatarse gauche de C. hircus (Chèvre) qui ne présente aucune altération de la surface de l’os ni de fissure sur la diaphyse. • Échantillon no 4 (os frais sec). Cette mandibule gauche de jeune Ovis aries (Mouton) actuel porte D2, D3, D4, M1, M2 tandis que M3 n’est pas encore sortie. Les Incisives font défaut. Il existe une série de trois fissures intentionnelles allongées parallèlement à la partie inférieure de la branche horizontale sous le diastème. • Échantillon no 5 (bois frais). Ce fragment d’empaumure de Rangifer tarandus (Renne) actuel provient de Tromsø (Norvège). Sa surface ne porte aucune trace. • Échantillon no 6 (os frais sec). Ce métacarpe droit de R. tarandus (Renne) actuel provient d’Alaska. Les premières, deuxièmes et troisièmes phalanges, de même que les métacarpiens et phalanges 1, 2, 3 accessoires sont en connexion. Les tendons, secs, sont conservés. Nous n’avons décelé aucune trace, ni fissure à la partie que nous pouvions voir de la surface de l’os. • Échantillon no 7 (bois frais). Comme l’échantillon no 5, ce fragment de merrain de R. tarandus (Renne) actuel provient de Tromsø (Norvège). Il a conservé une partie de son velours. La surface de ce fragment de bois ne porte aucune atteinte. Tableau 3 Échantillons sélectionnés pour les expériences. Fossile : Roc de Marcamps, Gironde (Magdalénien, fouilles M. Lenoir) Samples selected for the experiments. Fossil: Roc de Marcamps, Gironde (Magdalenian, excavations Mr Lenoir) No

Échantillons

Espèces

Actuel

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13

Métacarpe droit Tibia droit et tarse en connexion Métatarse gauche Mandibule gauche portant D2-M2 inf. Fragment d’empaumure Métacarpe droit et phalanges en connexion Bois avec restes de velours Deuxième phalange antérieure droite Talus gauche Vertèbre lombaire Fragment de diaphyse d’os long D4 supérieure gauche M1-2 inférieure droite

Bœuf Chèvre Chèvre Mouton Renne Renne Renne Cheval Cheval Cheval Grand Ongulé Boviné Boviné

X X X X X X X

Fossile

X X X X X X

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• Échantillon no 8 (os fossile complet). Cette deuxième phalange antérieure droite d’Equus caballus gallicus provient d’un niveau magdalénien du Roc de Marcamps (Gironde, fouilles M. Lenoir). La surface de l’os ne présente que quelques fines fissures qui, semble-t-il, ne se prolongent pas à l’intérieur de l’os. • Échantillon no 9 (os fossile complet). Ce talus gauche d’E. caballus gallicus ne présente qu’un léger écrasement de la poulie médiale de l’articulation tibiale. • Échantillon no 10 (os fossile incomplet). Cette vertèbre lombaire d’E. caballus gallicus est amputée de son apophyse épineuse et de ses deux apophyses transverses. Le corps vertébral est intact. • Échantillon no 11 (os fossile incomplet). Il s’agit d’un fragment de diaphyse d’os long. Il porte sur la face externe cinq fentes parallèles à l’allongement du fragment ainsi que la trace d’un choc situé sur un bord et dirigé de l’intérieur vers l’extérieur. • Échantillon no 12 (dent complète fossile). Cette D4 supérieure gauche de Boviné est amputée de sa racine mésiovestibulaire. Les fossettes sont vides. Cette dent représente à la fois la catégorie des dents déciduales et celle des dents à fossettes creuses de Cervidé. • Échantillon no 13 (dent complète fossile). Il s’agit d’une M1-2 inférieure droite de Boviné. Les racines font défaut et le flanc vestibulaire du protoconide et de l’hypoconide présente une légère fissure longitudinale. Nous avons volontairement choisi de traiter des échantillons de nature très hétérogène parce que nous ne savions pas si nous allions obtenir des résultats interprétables dans un délai raisonnable. Si nous avions pu poursuivre, la seconde étape de notre expérimentation aurait été naturellement principalement axée sur un type de matériel plus homogène. 3.2. Deuxième série d’échantillons Il s’agit d’échantillons identiques à ceux installés dans les Alpes, à La Mortice, dans le cadre du programme TRANSIT. Il s’agit de l’expérimentation no 122-2 du Centre de Géomorphologie (Tableau 4). 4. Les résultats au terme de 3149 cycles de gel. Première série d’échantillons La chambre froide ayant été arrêtée plusieurs fois pour maintenance, le nombre de cycles de gel/dégel au 2 mars 1999 (date de l’arrêt des expériences) s’élève à 3149 pour la première série d’échantillons et à 2200 pour la deuxième série. De manière générale on notera que pour presque tous les échantillons on a obtenu une sorte de prototype de gélifraction dès le 63e cycle, tandis que pour certain la gélifraction s’est manifestée très tardivement (la vertèbre) ou pas du tout (les fragments de ramure). 4.1. Échantillon no 1. Os frais complet (Métacarpe droit de Bos taurus moderne) Dès le 63e cycle, il s’est développé à peu près à la moitié de la diaphyse une série de fentes longitudinales qui ont régulièrement progressé vers les parties proximales et distales ; la plus longue mesure 142 mm. En revanche, on assiste à un amortissement de ces fissures à l’approche des extrémités proximales et distales ; seul le tubercule proximal a présenté à partir du 1012e cycle un fendillement avec des fissures au maximum de 10 mm de long qui n’a

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Tableau 4 Échantillons sélectionnés pour les expériences. TRANSIT. Fossile : Roc de Marcamps, Gironde (Magdalénien, fouilles M. Lenoir) Samples selected for the experiments. TRANSIT. Fossil: Roc de Marcamps, Gironde (Magdalenian, excavations M. Lenoir) No

Échantillons

Espèces

Actuel

T1 T1-1 T2 T2-1 T2-2 T3 T4 T4-1 T4-2 T5 T6 T7 T8 T9 T10 T11 T12 T13 T14

Portion de diaphyse de fémur 80 × 39 × 11,5 mm Portion de diaphyse de fémur 79 × 38 × 8 mm Portion de diaphyse de fémur 68 × 19 × 7 mm Portion de diaphyse de fémur 79 × 21 × 14 mm Portion de diaphyse de fémur 75 × 18 × 12 mm Portion de diaphyse de fémur 71 × 18 × 7,5 mm Portion de diaphyse de fémur 39 × 32 × 11,5 mm Portion de diaphyse de fémur 41 × 37 × 11 mm Portion de diaphyse de fémur 40 × 33 × 11 mm Portion de diaphyse de fémur 39 × 33 × 9,5 mm Portion de diaphyse de fémur 84 × 54 × 8 mm Portion proximale de fémur Portion distale de fémur Phalange 1 (no IPGQ : 16) Phalange 1 (no IPGQ : 16) Crâne complet P4 inférieure gauche Portion distale de tibia Portion de branche montante de mandibule

Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Bos taurus Ovis aries Saiga tatarica Saiga tatarica Equus caballus

X X X X X X X X X X X X X X X X

Fossile

X X X

pas évolué ultérieurement. En résumé, le métacarpe s’est fissuré mais ne s’est pas fragmenté (Fig. 7). 4.2. Échantillon no 2. Os frais sec (tibia et tarse droits de jeune Capra hircus) Comme pour le métacarpe, la diaphyse du tibia présente quelques fissures longitudinales qui n’ont pas pour autant permis de briser l’os (Fig. 8). En revanche, on observe la « disparition » de certaines parties corticales des zones de conjugaison proximale et distale du tibia. En ce qui

Fig. 7. Métacarpe droit de Bos taurus moderne (échantillon no 1). 3149 cycles. Right Metacarpus of modern Bos taurus (sample no. 1). 3149 cycles.

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Fig. 8. Tibia et tarse droits de jeune Capra hircus moderne (échantillon no 2). 3149 cycles. Right shin and tarsus of modern juvenile Capra hircus (sample no. 2). 3149 cycles.

concerne les os du tarse, nous n’avons observé aucune fragmentation mais comme pour le tibia la « disparition » de certaines parties corticales, cette « disparition » mettant au jour l’os spongieux qui peu à peu se détruit ne laissant aucun fragment mesurable (c’est-à-dire, pour nous que les fragments mesurent moins de 0,2 mm) (Fig. 9). Si la gélifraction n’a pas permis de briser la diaphyse du tibia, en revanche, il semble qu’elle aurait amené, si nous avions poursuivit les expériences, à une disparition plus ou moins complète des os de ce tarse immature. 4.3. Échantillon no 3. Os frais sec (métatarse gauche de Capra hircus) Comme pour le métacarpe et la diaphyse du tibia ce métatarse ne présente que quelques fissures longitudinales d’environ 70 mm de long sur les faces latérale et médiale qui n’ont pas pour autant permis de briser l’os (Fig. 10). Du côté latéral la fente débute à 7 mm sous l’articulation proximale et se poursuit sur 70 mm vers l’extrémité distale en décrivant un léger arc de cercle. Près de l’extrémité proximale et sur 5 mm la fente est sinueuse alors qu’elle est plus rectiligne sur les 65 mm restant. Du côté médial, la fente est moins large que celle du côté latéral, mais elle montre la même courbure. Elle démarre à 13 mm de l’extrémité proximale et se poursuit sur

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Fig. 9. Talus droit de jeune Capra hircus moderne (échantillon no 2). Zones détruites. 3149 cycles. Right shin and tarsus of modern juvenile Capra hircus (sample no. 2). Destroyed zones. 3149 cycles.

45 mm vers le bas. Près de l’extrémité proximale tout autour de l’os on observe quelques rares petites fissures de 5 à 7 mm de long. 4.4. Échantillon no 4. Os frais sec (mandibule gauche de jeune Ovis aries) De manière générale l’os mandibulaire est desquamé et plusieurs « plaques » se sont détachées et se sont fragmentées secondairement (Fig. 11). La branche horizontale présente, au milieu de celle-ci, plusieurs fentes horizontales mesurant de 15 à 30 mm de long à la fois du côté externe et interne. La branche montante présente aussi quelques fissures parallèles à l’axe de celle-ci d’environ 20 à 25 mm de long et on note la présence d’une fine fissure sur l’apophyse coronoïde mais le condyle n’a pas été gélifracté (Fig. 12). La D/2 avait été expulsée au 1815e cycle. Les racines sont complètes et en bon état. La couronne présente plusieurs fentes qui tendent à séparer trois fragments : un mésiolingual, un mésiovestibulaire et un distal. La D/3 est de plus en plus mobile dans son alvéole et elle est en voie d’expulsion ; la couronne présente deux fissures orientées dans le sens vestibulolingual. La D/4 présente du côté lingual de la surface occlusale une fissure orientée dans le sens mésiodistal et cette fissure est en train de provoquer le

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Fig. 10. Portion proximale de métatarse gauche de Capra hircus moderne (échantillon no 3). 3149 cycles. Proximal part of left metatarsus of modern Capra hircus (sample no. 3). 3149 cycles.

détachement de la face vestibulaire de la couronne. La surface linguale du paraconide de la M/1 est détachée. Il y a encore de la dentine adhérant à l’émail, mais on observe la présence de nombreux petits parallélépipèdes de dentine dans la cuvette. Les fossettes tendent à se séparer des conides et nous retrouverons ce schéma de fragmentation sur un autre échantillon. L’hypoconide de la M/2 est fissuré dans l’axe mésiodistal et elle montre des fissures verticales du côté vestibulaire (Fig. 11). Enfin, en ce qui concerne la M/3 encore incluse dans la mandibule nous observons que le protoconide est brisé et que le fragment détaché est lui-même cassé en trois morceaux. La partie supérieure des conides s’est détachée et ces fragments ont été expulsés hors de l’os mandibulaire. 4.5. Échantillon no 5. Bois frais (fragment d’empaumure de Rangifer tarandus) Nous n’avons observé aucune gélifraction sur cet objet. La seule atteinte subie par ce fragment de ramure est une desquamation qui est apparue après le 1800e cycle est qui est peut-être plus d’origine chimique (modification de pH ?) que mécanique.

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Fig. 11. Mandibule gauche de jeune Ovis aries moderne (échantillon no 4). Vues linguale et occlusale. 3149 cycles. Left mandible of modern Ovis aries (sample no. 4). Lingual and occlusal views. 3149 cycles.

4.6. Échantillon no 6. Os frais sec (métacarpe droit de Rangifer tarandus) Cet échantillon a été enterré devant le petit mur dans la pelouse devant le Centre de Géomorphologie car mis dans l’eau la patte a pourri et le personnel du Centre ne pouvait plus entrer dans les chambres d’expérimentations !

Fig. 12. Mandibule gauche de jeune Ovis aries moderne (échantillon no 4). Branche montante. 3149 cycles. Left mandible of modern Ovis aries (sample no. 4). Ramus. 3149 cycles.

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Fig. 13. Deuxième phalange antérieure droite d’Equus caballus gallicus fossile (échantillon no 8). 3149 cycles. Right second anterior phalanx of fossil Equus caballus gallicus (sample no. 8). 3149 cycles.

4.7. Échantillon no 7. Bois frais (fragment de merrain de Rangifer tarandus) Comme pour l’échantillon no 5, nous n’avons observé aucune gélifraction sur cet objet. La seule atteinte subie par ce fragment de ramure est une desquamation qui est apparue après le 1800e cycle est qui est peut-être plus d’origine chimique (modification de pH ?) que mécanique. 4.8. Échantillon no 8. Os fossile complet (deuxième phalange antérieure droite d’Equus caballus gallicus) La phalange a commencé à ce fragmenter (dans le sens proximodistal) au 355e cycle, et très vite une gélifraction secondaire a fragmenté les morceaux. Dès le 637e cycle, le plus gros des fragments ne dépassait pas 37 mm de long. Au 1012e cycle, il ne restait absolument plus rien de reconnaissable de cette phalange, les quatre plus gros fragments mesurant 22 × 15 × 10, 25 × 12 × 6, 20 × 10 × 4, 17 × 8 × 3 mm ; à la fin des expériences le plus gros fragment ne mesure pas plus de 20 mm (Fig. 13). 4.9. Échantillon no 9. Os fossile complet (talus gauche d’Equus caballus gallicus) Au 63e cycle le talus s’est fendu en deux morceaux dans le sens proximodistal et au 355e cycle, le talus a éclaté en de multiples fragments (Fig. 14). Depuis le 1012e cycle il n’y a plus rien de reconnaissable. Le plus gros fragment mesure 20 × 10,5 mm (Fig. 15). 4.10. Échantillon no 10. Os fossile incomplet (vertèbre lombaire d’Equus caballus gallicus) Pendant les 1241 premiers cycles, la vertèbre ne s’est pas fragmentée mais par la suite elle s’est fissurée et cassée. L’apophyse transverse gauche est brisée au ras du corps vertébral ; il ne reste qu’une partie crâniale de cette apophyse. L’apophyse transverse droite a apparemment conservé les mêmes dimensions depuis le début de l’expérience ; il semble donc qu’on arrive à

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Fig. 14. Talus gauche d’Equus caballus gallicus fossile (échantillon no 9). 355 cycles. Left talus of fossil Equus caballus gallicus (sample no. 9). 355 cycles.

Fig. 15. Talus gauche d’Equus caballus gallicus fossile (échantillon no 9). 3149 cycles. Left talus of fossil Equus caballus gallicus (sample no. 9). 3149 cycles.

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Fig. 16. Vertèbre lombaire d’Equus caballus gallicus fossile (échantillon no 10). 3149 cycles. Lumbar vertebra of fossil Equus caballus gallicus (sample no. 10). 3149 cycles.

un état d’équilibre qui ne se modifie que très lentement. Ainsi la fente située à la partie supérieure de l’apophyse articulaire droite n’a que peu évolué depuis le cycle 1241. La fissure inférieure ne progresse que lentement. Il existe une fissure à la partie supérieure de l’apophyse articulaire supérieure gauche. En vue inférieure, la partie inférieure de l’apophyse transverse droite est fendue d’avant en arrière. L’os compact de la partie inférieure de l’articulation crâniale et la partie postéro-inférieure de l’articulation caudale se détruit peu à peu mettant au jour la spongiosa qui lentement s’érode (Fig. 16). 4.11. Échantillon no 11. Os fossile incomplet (portion de diaphyse d’os long) Remarque : compte tenu de ce que nous avons observé de la gélifraction des portions de diaphyse d’os long modernes, nous pouvons considérer cet échantillon comme représentatif de la fracturation au gel qu’il s’agisse d’un fragment moderne (frais ou sec) ou fossile ; la seule différence entre les deux situations étant qu’un os fossile se fragmente plus vite qu’un os moderne, mais les résultats sont les mêmes. Pour cette raison nous décrirons ci-après le détail de cette gélifraction. Dès le 63e cycle, une esquille plate s’est détachée du fragment. Peu à peu cette esquille a été fragmentée secondairement. Au 104e cycle, on note l’apparition de fentes longitudinales de la dimension de l’échantillon qui aboutissent à la formation d’esquilles allongées en allumettes. Toutefois, elles sont précédées par l’apparition d’esquilles plates. Les autres fragments continuent à se désagréger. Au 355e cycle, la portion de diaphyse est réduite à des esquilles allongées, étroites, extrêmement minces. La surface de la cassure n’est jamais lisse mais très irrégulière. De même les bords des cassures ne sont jamais uniformément rectilignes mais irréguliers.

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Fig. 17. Morphotypes de fragments. Morphotypes of fragments.

Nous avons pu mettre en évidence trois différents types de fragments (Fig. 17) : le type « P » est long, étroit, mince et comprend la partie externe et la partie interne de l’os ; le type « I » est long, plus large que le précédent, mince et ne comprend pas la partie interne de l’os ; le type « C » est un fragment long, large et épais. Les fragments « P » et « I » sont les fragments en « assiettes » et les fragments de type « C » sont ceux en « allumettes » et il s’agit sans doute des fragments évoqués par J. Bouchud et Y. Guillien (1953). Au 63e cycle, seuls cinq fragments se sont détachés de la portion de diaphyse. Quatre sont de type « C » (en « allumette »), d’une taille comprise entre 16 et 27 mm de long (moyenne = 22,25 mm), 3 et 5 mm de large (moyenne = 3,75 mm) et 3,1 et 3,6 mm d’épaisseur (moyenne = 3,38 mm) (Fig. 18). Le dernier fragment est de type « I » (en « assiette ») et mesure 33 mm de long, 10 mm de large et 5,6 mm d’épaisseur (Fig. 19).

Fig. 18. Dimensions des fragments de type « C » (en « allumettes ») (échantillon no 11). 63, 355, 3149 cycles. Dimensions of the fragments of type “C” (in “matches”) (sample no. 11). 63, 355, 3149 cycles.

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Fig. 19. Dimensions des fragments de type « I » (en « assiettes ») (échantillon no 11). 63, 355, 3149 cycles. Dimensions of the fragments of type “I” (in “plates”) (sample no. 11). 63, 355, 3149 cycles.

Au 355e cycle, sur les 238 fragments mesurables, 21 sont de type « C », en allumette, d’une taille comprise entre 15 et 75 mm de long (moyenne = 45,29 ± 5,10 mm), pour une largeur de 3 à 22 mm (moyenne = 9,14 ± 3,18 mm) et une épaisseur de 1 à 7,5 mm (moyenne = 3,60 ± 1,98 mm) (Fig. 18). Deux cent deux sont en assiette de type « I », d’une taille comprise entre 5,0 et 65,0 mm (moyenne = 18,40 ± 4,46 mm), pour une largeur de 2 à 28 mm (moyenne = 6,10 ± 2,47 mm) et une épaisseur de 0,7 à 9,0 mm (moyenne = 2,90 ± 2,63 mm). Enfin 15 sont en assiette de type « P » d’une taille comprise entre 22,0 et 68,0 mm (moyenne = 38,87 ± 4,82 mm), pour une largeur de 5 à 22 mm (moyenne = 9,67 ± 3,34 mm) et une épaisseur de 1 à 5,0 mm (moyenne = 2,03 ± 1,35 mm) (Fig. 19). Pour 355 cycles sur cette figure les fragments « I » et « P » ont été réunis). Au 3149e cycle, sur les 1375 fragments mesurables, 631 sont de type « C », allumette, d’une taille comprise entre 12,3 et 62,2 mm (moyenne = 14,43 ± 2,28 mm) de longueur, 2,1 et 9,4 mm (moyenne = 3,61 ± 0,65 mm) de large et 0,8 et 6,0 mm (moyenne = 2,06 ± 0,59 mm) d’épaisseur (Fig. 18). Les 744 fragments restants sont de type « I » en « assiette », d’une taille comprise entre 4,2 et 38,4 mm de long (moyenne = 11,32 ± 2,87 mm), 2,2 et 18,6 mm de large (moyenne = 5,36 ± 1,65 mm) et 0,3 et 4,0 mm d’épaisseur (moyenne = 1,08 ± 0,82 mm) (Fig. 19). En résumé, la Fig. 18 permet de se rendre compte que pour les fragments « C » en « allumettes » la longueur moyenne augmente quand augmente leur nombre puis, au terme de nos expériences, la gélifraction secondaire la réduit des deux tiers. La largeur moyenne suit à peu près ce qu’on a observé pour la longueur moyenne, mais au bout de 3149 cycles elle est revenue à la même valeur que celle observée pour les premiers fragments. L’épaisseur moyenne augmente peu puis se trouve réduite de moitié. Pour ce qui est des fragments de type « I » et « P » (en « assiettes »), la Fig. 19 permet de se rendre compte que la longueur moyenne des fragments diminue assez peu au début (jusqu’à 355 cycles), puis la gélifraction secondaire la fait fortement chuter. En revanche, la largeur moyenne des fragments diminue régulièrement tandis que l’épaisseur moyenne diminue fortement. La comparaison des Fig. 18 et 19 permet de constater que les fragments en « allumettes » (de type « C ») évolue de telle fac¸on qu’au terme de 3149 cycles le « fragment moyen » n’est plus un fragment en « allumettes » long, étroit assez épais, mais en « assiettes » qui est devenu très mince. Dans le détail, les Fig. 20–25 permettent de suivre l’évolution de la taille des fragments (par classes de tailles) en fonction des types de départ et du nombre de cycles. En fin d’expérience pour la longueur (Fig. 20 et 23), la classe 11–15 mm représente plus de 90 % pour les fragments en « allumettes » (type « C ») et les classes 6–10 mm et 11–15 mm plus de 84 % (respectivement 43,41

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Fig. 20. Longueur des fragments de type « C » (en « allumettes ») (échantillon no 11). 63, 355, 3149 cycles. Length of the fragments of type “C” (in “matches”) (sample no. 11). 63, 355, 3149 cycles.

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Fig. 21. Largeur des fragments de type « C » (en « allumettes ») (échantillon no 11). 63, 355, 3149 cycles. Width of the fragments of type “C” (in “matches”) (sample no. 11). 63, 355, 3149 cycles.

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Fig. 22. Épaisseur des fragments de type « C » (en « allumettes ») (échantillon no 11). 63, 355, 3149 cycles. Thickness of the fragments of type “C” (in “matches”) (sample no. 11). 63, 355, 3149 cycles. 145

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Fig. 23. Longueur des fragments de type « I et P » (en « assiettes ») (échantillon no 11). 63, 355, 3149 cycles. Length of the fragments of type “I and P” (in “plates”) (sample no. 11). 63, 355, 3149 cycles.

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Fig. 24. Largeur des fragments de type « I et P » (en « assiettes ») (échantillon no 11). 63, 355, 3149 cycles. Width of the fragments of type “I and P” (in “plates”) (sample no. 11). 63, 355, 3149 cycles. 147

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Fig. 25. Épaisseur des fragments de type « I et P » (en « assiettes ») (échantillon no 11). 63, 355, 3149 cycles. Thickness of the fragments of type “I and P” (in “plates”) (sample no. 11). 63, 355, 3149 cycles.

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et 41,26 %) pour les fragments en « assiettes » (types « I » et « P »). Pour ce qui est de la largeur (Fig. 21 et 24), la classe 1–5 mm représente presque 98 % des fragments en « allumettes » (type « C »), et les classes 1–5 mm et 6–10 mm représentent presque 99 % des fragments en « assiettes » (types « I » et « P ») (respectivement 55,24 % et 43,58 %). Enfin en ce qui concerne l’épaisseur (Fig. 22 et 25) la classe 1,7–2,0 mm représente plus de 90 % pour les fragments en « allumettes » (type « C ») et la classe 0,5–0,8 mm et 0,9–1,2 mm plus de 89 % pour les fragments en « assiettes » (types « I » et « P ») (respectivement 15,99 et 73,12 %). Enfin, bien qu’il serait souhaitable de le vérifier en poursuivant les expériences, il semble que la fissuration en « assiettes » pourrait utiliser les canaux de Havers pour se développer alors que celle en « allumettes » pourrait utiliser les canaux de Volkmann. Ainsi, un des premiers enseignements de ces expériences est que s’il fallait désigner un ou le gélifract typique d’une gélifraction avancée, il ne s’agirait pas d’un fragment en « allumettes » quatre fois plus long que large et cinq à six fois moins épais que long comme le pensait J. Bouchud et Y. Guillien (1953), mais d’un fragment en « assiettes » à peu près deux fois plus long que large et presque dix fois moins épais que long (Fig. 26). 4.12. Échantillon no 12. Dent fossile complète (D4 supérieure gauche de Bovinae) Dès le 63e cycle, la dent a explosée en de nombreux fragments (plus d’une dizaine) d’environ 40 mm de long et de 10 à 25 mm de large pour les plus gros et de 10 à 15 mm de long et 8 à 10 mm de large pour les plus petits. Il existe aussi deux fragments allongés de 27 × 8 mm. Au 355e cycle, les fragments ont continué à se casser et on observe maintenant la séparation de la dentine et de l’émail. Les fragments de cément sont cassés. Au 964e cycle, la dent est réduite à un monceau d’esquilles.

Fig. 26. Portion de diaphyse d’os long fossile (échantillon no 11). 3149 cycles. Fragment of shaft of fossil long bone (sample no. 11). 3149 cycles.

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Fig. 27. D4 supérieure gauche de Bovinae fossile (échantillon no 12). 1418 cycles. Left Upper D4 of fossil Bovinae (sample no. 12). 1418 cycles.

La dentine n’adhère plus à l’émail sauf par très petits plaquages. Les morceaux d’émail sont les plus longs. La dentine s’est cassée en parallélépipèdes de 6–8 mm × 5–7 mm × 2–5 mm. Au 1042e cycle, la dent est complètement fragmentée en morceaux non identifiables s’ils étaient récoltés, mais leurs dimensions étant inférieures à celles des mailles des tamis utilisés sur les chantiers de fouilles il est peu probable qu’ils soient récoltés. La dentine est maintenant fragmentée en petits polyèdres de 1 à 2 mm de côté. La Fig. 27 représente l’allure des fragments après 1418 cycles. 4.13. Échantillon no 13. Dent complète (M1-2 inférieure droite de Bovinae) À partir du 104e cycle, la face linguale de la molaire s’est détachée de la dent en emportant un peu de dentine. Au 355e cycle, le fragment détaché s’est fracturé : la face vestibulaire de la dent s’est détachée, puis cassée longitudinalement, les deux fossettes sont libres. La fossette mésiale emportant toute la face mésiale de la couronne. Au 964e cycle, il ne reste plus que cinq gros fragments, vingt-quatre plus petits et une multitude de morceaux non mesurables. Au 1991e cycle, les portions linguale et vestibulaire n’ont pas évolué. Les trois fragments vestibulaires sont toujours recollables (Fig. 28). Les fossettes ne sont pas cassées. On constate simplement que la dentine a continué à se détacher de l’émail et à se fragmenter en petits polyèdres. Le

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Fig. 28. M1-2 inférieure droite de Bovinae fossile (échantillon no 13). 1991 cycles. Right Lower M1-2 of fossil Bovinae (sample no. 13). 1991 cycles.

cément adhère toujours à l’émail sur quatre des dix fragments d’émail. Sur les 189 fragments, seuls sept sont reconnaissables (dent, genre, espèce), un est reconnaissable (catégorie dentaire (sensu lato), genre, espèce), un est attribuable à un genre et une espèce et un fragment n’est déterminable qu’au niveau de la famille. À partir du 2175e cycle, les fragments d’émail sont toujours recollables et forme une enveloppe d’émail dépourvue de dentine alors que celle-ci est réduite en une multitude de fragments de 2 à 3 mm de long sur 1 à 2 mm de large et d’épaisseur (Fig. 29). 5. Les résultats au terme de 2200 cycles de gel. Deuxième série d’échantillons Nous n’allons pas traiter de tous les échantillons dans le cadre de cet article puisque nous allons retrouver les mêmes effets que ceux décrits précédemment : apparition et développement de fragments en « assiettes » et en « allumettes » (Fig. 30) ; certains fragments en « assiettes » se sont très rapidement détachés (46 cycles pour l’échantillon T2-1) avec quelquefois une zone d’arrachement à l’approche de la spongiosa (Fig. 31). Toutefois, nous allons insister sur des échantillons qui ont présenté des réponses au gel tout à fait particulières. Ainsi, par exemple, nous avons constaté que lorsqu’une portion de diaphyse est seulement constituée d’os compact, les fissures en « assiettes » sont parallèles à la surface de l’os et ne changent pas de direction tout au long du fragment (Fig. 32). En revanche, lorsqu’il y a de la spongiosa à l’approche des extrémités articulaires les fissures en « assiettes » changent de direction, remontent en oblique vers la surface externe de l’os et ne se poursuivent pas vers les extrémités (Fig. 33) ; il est très probable que l’impossibilité de briser un os long au gel provienne de ce phénomène, c’est à dire que les fissures s’amortissent au niveau de la spongiosa. De même, nous avons observé qu’à l’approche des foramens nourriciers, les fissures changent également de direction (Fig. 34).

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Fig. 29. M1-2 inférieure droite de Bovinae fossile (échantillon no 13). 2175 cycles. Right Lower M1-2 of fossil Bovinae (sample no. 13). 2175 cycles.

Fig. 30. Portion de diaphyse de fémur de Bos taurus moderne (échantillon no T5). 469 et 1042 cycles. Fragment of shaft of thighbone of modern Bos taurus (sample no. T5). 469 and 1042 cycles.

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Fig. 31. Portion de diaphyse de fémur de Bos taurus moderne (échantillon no T2-1). Fragmentation en « assiettes ». 46 cycles. Fragment of shaft of thighbone of modern Bos taurus (sample no. T2-1). “Plates” fragmentation. 46 cycles.

6. Les échantillons de l’expérimentation dans le site naturel de la Mortice – le programme « TRANSIT » Comme nous l’avons expliqué précédemment, le programme TRANSIT a été conc¸u afin de mettre en évidence l’impact des mécanismes périglaciaires sur les ensembles archéologiques, et pour ce faire, nous avons installé dans les cinq cellules des ensembles fauniques et lithiques identiques (Texier et al., 1998). Pour ce qui est de la faune parallèlement à l’expérimentation TRANSIT, nous avons mis des échantillons identiques dans la chambre froide du Centre de Géomorphologie de Caen ; il s’agit des échantillons dont nous venons de parler précédemment au chapitre 5. Nous avons déjà évoqué les mouvements et une première approche de la gélifraction des restes fauniques (Texier et al., op cit) et sans entrer dans de longs détails nous signalerons que nous avons observé sur le matériel provenant de La Mortice les mêmes phénomènes que ceux que nous avons observé sur celui déposé en laboratoire. Ainsi, par exemple, l’échantillon C2-701 (portion de diaphyse de fémur de B. taurus moderne, 100 × 18 × 12 mm) récolté en 1993 (deux ans d’expérience : environ 60 cycles) présente une surface externe légèrement desquamée, alors que la surface interne est intacte. La surface externe est parcourue de petites fissures longitudinales d’environ 7 mm de long. Sur les bords des cassures on note le développement de fissures en « assiettes ». Sur le bord où il n’y a que de l’os compact, les fissures sont visibles mais sur la partie où il y a aussi de l’os spongieux il n’y a pas développement de fissures.

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Fig. 32. Portion de diaphyse de fémur de Bos taurus moderne (échantillon no T5). Fragmentation en « assiettes ». 469 cycles. Fragment of shaft of thighbone of modern Bos taurus (sample no. T5). “Plates” fragmentation 469 cycles.

Fig. 33. Portion de diaphyse de fémur de Bos taurus moderne (échantillon no T1-1). Fragmentation en « assiettes ». 469 cycles. Fragment of shaft of thighbone of modern Bos taurus (sample no. T1-1). “Plates” fragmentation. 469 cycles.

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Fig. 34. Portion de diaphyse de fémur de Bos taurus moderne (échantillon no T2). Fragmentation en « assiettes ». 1042 cycles. Fragment of shaft of thighbone of modern Bos taurus (sample no. T2). “Plates” fragmentation. 1042 cycles.

De même, l’échantillon C4-901 (portion de diaphyse de fémur de B. taurus moderne – zone du deuxième trochanter –, 97 × 18 × 8 mm) récolté en 1995 (quatre ans d’expérience : environ 120 cycles), présente une surface externe desquamée et on note la présence de fissures longitudinales d’environ 10 mm. La surface interne est intacte. Les bords latéraux sont parcourus par quelques fissures longitudinales (en « assiettes ») obliques écartées d’environ 1 mm. Le bord frontal, côté os spongieux, ne présente pas de fissure. Le bord frontal, côté sans os spongieux, présente une fissuration en « assiettes » et des fissures transversales qui relient entre-elles les précédentes. Nous n’insisterons pas plus, mais en première approche il faut retenir que nous observons une gélifraction de même nature que celle obtenue en laboratoire. Toutefois, il serait bon de renouveler l’expérience, ne serait-ce que pour étudier, entre autres, l’impact de l’action de l’eau de fonte (altérations chimiques éventuelles, transports. . .) sur les restes fauniques.

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7. Interprétation des résultats et essai de transfert au fossile 7.1. Interprétation des résultats Compte tenu du protocole expérimental que nous avons suivit, il semble que nous puissions dégager de la manière suivante les « grandes tendances » de la gélifraction, afin d’en rechercher les signatures dans les ensembles fauniques fossiles. De manière générale, on constate que les effets du gel sont, en quelques sorte, indépendants de la teneur en eau des échantillons, qu’ils soient modernes ou fossiles. Le métatarse d’O. aries (échantillon no 3, teneur en eau = 26,7 %) présente moins d’atteintes dues au gel que la mandibule d’O. aries (échantillon no 4, teneur en eau = 9,5 %). Nous pouvons effectuer les mêmes constatations pour les spécimens fossiles puisque le talus d’E. gallicus (échantillon no 9, teneur en eau = 42,6 %) est réduit à un monceau d’esquilles alors que la vertèbre (échantillon no 10, teneur en eau = 40,9 %) est beaucoup moins endommagée. C’est la porosité et la nature des pores qui sont importantes et qui vont commander les effets des alternances de gel/dégel. Une porosité ouverte (libre ou dans notre cas efficace) n’entraîne quasiment aucune atteinte, car lorsque le front de gel entre dans la pièce l’eau est pompée, le fragment s’assèche et simplement se refroidit. Ainsi, contrairement à ce qu’on pouvait attendre, une vertèbre dont la teneur en eau est de presque 41 %, mais dont la porosité utile2 est très faible sera moins gélifractée que de l’os compact d’un os long dont la teneur en eau peut aller de 11 à 20 %, mais dont la porosité est de presque 12 %. Le cas des ramures de R. tarandus (échantillons no 5 et 7) est très intéressant et pour l’interpréter il faut évoquer rapidement sa structure. Il s’agit d’un tissu osseux spongieux entouré d’os compact (Goss et al., 1992 : Bubenik et al., 1987, 1997 : Lees, 1982 : Chapman, 1981 : Hyvärinen et al., 1977). De la périphérie vers le centre, nous trouvons sous le velours (lorsqu’il est encore présent) de l’os compact qui comprend une première zone faite d’ostéoïdes, puis une deuxième zone formée d’os compact lamellaire (os ostéonique) haversien, puis de l’os spongieux qui comprend une zone de transition entre l’os ostéonique et l’os trabéculaire et enfin l’os trabéculaire (ou spongieux) lui-même (Rolf et Enderle, 1999). Les bois sont moins denses que les autres tissus minéralisés, mais leur densité varie en fonction des espèces, de l’âge et de l’alimentation des animaux. Comme pour les os, la fraction minérale est principalement constituée d’hydroxyapatite (Pathak et al., 2001), mais l’os compact du bois contient plus de matière organique que l’os compact des os, ce qui lui donne un peu de flexibilité (Hildebrand, 1995) ; il semble cependant que la rigidité des bois ne soit pas constante dans le temps, les plus jeunes sujets ayant des bois plus rigide que les plus âgés (Blob et Labarbera, 2001). De nombreuses études ont montré également que c’est un matériau qui est capable d’absorber une grande quantité d’énergie avant rupture (Brear et al., 1990 : Currey, 1987, 1989 : Mauch et al., 1992 : Rajaram et Ramanathan, 1982 : Spatz et al., 1996 : Vashishth, 2004 : Zioupos et al., 1994, 1996). Les tests en tension montrent que la déformation plastique au moment de la fracture (déformation maximale) est de 2,5–5 %, ce qui représente une valeur élevée en comparaison aux autres tissus hautement minéralisés qui se déforment de 1–3 % (Crigel et al., 2001 : p. 27). Ainsi, la résistance des ramures aux alternances gel/dégel provient à la fois de la présence d’une importante porosité ouverte (libre ou dans notre cas efficace), mais aussi de leur capacité d’absorption des déformations. Afin d’évaluer la perte de ces capacités mécaniques en fonction du temps,

2 Nous parlons ici de porosité utile au sens des pétroliers qui permet le pompage des fluides piégés, l’eau dans notre cas.

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il serait bon de poursuivre les expériences avec des portions de ramures à différents degré de fossilisation. Par ailleurs, les éléments de même nature se gélifractent de la même fac¸on, seule change la vitesse d’apparition des fissures, puis de l’éventuelle cassure des pièces. Un os long ou allongé complet présente des fissures longitudinales ou faiblement obliques qui s’amortissent au niveau des tubercules ou des extrémités proximale et distale. Nous n’avons pas observé en surface de fente transversale dans l’os compact. Cette constatation est à mettre en relation avec le fait que les fissures en « assiettes » de l’intérieur de l’os compact s’amortissent et remontent en surface à l’approche de l’os spongieux et donc à l’approche des extrémités articulaires. Il semble de nouveau que ce soit la porosité et non seulement la teneur en eau qui soit l’élément fondamental dans le mécanisme de gélifraction (ou de non gélifraction) ; ainsi pour un fémur (os qui a fait l’objet de nos expériences) la porosité va du simple au double (6,35 à 11,23 %) pour une teneur en eau de 16 à 20 %, mais celle de l’os cortical près d’une extrémité articulaire est très faible (3,19 %) pour une teneur en eau de 33 à 34 %. En revanche, une portion de diaphyse va se gélifracter et produire d’abord des fragments en « allumettes » quatre fois plus longs que larges et cinq à six fois moins épais que longs et des fragments en « assiettes » à peu près deux fois plus longs que larges et presque dix fois moins épais que longs, puis la gélifraction secondaire aura tendance à produire des fragments en « assiettes ». En ce qui concerne les os d’animaux immatures, il semble que les os longs ou allongés se fissurent de la même fac¸on que les os homologues d’animaux adultes, mais en revanche, les os courts se détruisent sans générer de fragments mesurables (moins de 0,2 mm). On observe la « disparition » de la partie externe compacte des os mettant à nu la partie spongieuse qui se détruit progressivement. Il semble que, pour des raisons différentes (cf. supra) nous puissions effectuer la même remarque pour les dents déciduales et allant au-delà des propos de J. Bouchud et Y. Guillien (1953), nous sommes conduits à ne pouvoir interpréter l’absence, ou la faible représentation, des

Fig. 35. Les Tares. Equus caballus ssp. Dents jugales inférieures en place. Les Tares. Equus caballus ssp. Lower jugal teeth in situ.

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animaux immatures avant d’avoir mis en évidence que le gel n’a eu aucune action sur les restes fauniques. Pour les dents, la gélifraction provoque une destruction de la dentine en polyèdres de plus en plus petits qui se détachent de l’émail alors que ce dernier et même le cément restent beaucoup plus longtemps intact. Il est très possible que pour la dentine la gélifraction utilise les tubules dentinaires pour se développer, mais il s’agit là encore d’une voie de recherche à explorer. Le cas ultime est un tube d’émail dépourvu de dentine et nous en verrons ci-dessous un exemple fossile. 7.2. Essai de transfert au fossile Il est bien évident que nous venons de présenter des résultats expérimentaux qui ont été obtenus en fixant tous les paramètres, sauf un, le gel, et que sur le terrain les choses sont infini-

Fig. 36. Les Tares. Bison priscus. M3 supérieure. Les Tares. Bison priscus. Upper M3.

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Fig. 37. Les Tares. Equus caballus ssp. Coupe d’une M1-2 inférieure gauche. Les Tares. Equus caballus ssp. Section of a left Lower M1-2.

Fig. 38. Sainte-Anne 1. Equus caballus piveteaui. Dent jugale gélifractée. Sainte-Anne 1. Equus caballus piveteaui. Gelifracted jugal tooth.

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ment plus compliquées car tous les paramètres sont susceptibles d’intervenir en même temps et d’interférer entre eux. Toutefois, travaillant sur des ensembles fauniques formés sous des conditions périglaciaires nous avons eu l’opportunité de reconnaître des gélifracts osseux et dentaires qui portaient tous ou parties des stigmates observés dans les chambres froides du Centre de Géomorphologie du CNRS de Caen. Nous sommes toutefois forcés de reconnaitre que nous avons eu les meilleurs résultats avec le matériel dentaire et nous présenterons quatre exemples pris dans la faune récoltés dans les gisements des Tares (fouilles J.-P. Rigaud et J.-P. Texier), de

Fig. 39. Baume-Vallée. Equus caballus germanicus. Fragment de M2 supérieure gélifractée. Baume-Vallée. Equus caballus germanicus. Fragment of a gelifracted Upper M2.

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Fig. 40. Baume-Vallée. Petit Artiodactyle. Portion de diaphyse de radio-ulna. Fragmentation en « assiettes ». Baume-Vallée. Small Artiodactyla. Fragment of shaft of a radio-ulna. “Plates” fragmentation.

Sainte-Anne-1 et de Baume-Vallée (fouilles J.-P. Raynal), tous trois formés sous des conditions périglaciaires. Dans le gisement de plein-air des Tares (Sourzac, Dordogne), les restes fauniques étaient très rares et mal conservés, mais les dents étaient encore reconnaissables (Fig. 35). Elles étaient réduites à un ruban d’émail dépourvu de dentine, laquelle a été remplacée par du sédiment (Fig. 36 et 37). Par ailleurs, nous n’avons pu identifier un seul fragment de dentine dans le sédiment. Sur la Fig. 37, nous présentons la coupe d’une M1-2 inférieure gauche de Cheval au niveau du paraconide et du métaconide : nous y voyons que le ruban d’émail est très nettement visible, même s’il est microfissuré, et que la dentine a été remplacée par un sédiment qui, dans certaines dents présente lui-même des stigmates liés au gel. La grande chance est que le sédiment ait été très argileux (Fig. 35) et qu’il ait conservé coalescents les fragments d’émail ; comme dans l’expérience les alternances de gel/dégel ont transformé les dents en des tubes d’émail vidés de dentine et remplis de sédiments3 . Un autre exemple provient de la couche j1 (stade 6) du site de Sainte-Anne 1 (Polignac, HauteLoire), où nous avons identifié une dent jugale de Cheval (Fig. 38) qui a été intensément gélifractée mais dont les différents éléments sont restés plus ou moins coalescents (Guadelli, 2007). Dans ce cas la dentine a été réduite en de très petits polyèdres qui sont restés en place, mais l’émail a été fragmenté sans doute sous l’effet de mouvements intrasédimentaires. Là encore, la chance est que les fragments sont restés ensembles pour pouvoir à la fois identifier la dent et reconnaître l’origine de la fragmentation. Enfin dans le gisement de Baume-Vallée (Solignac-sur-Loire, Haute-Loire) nous avons isolé plusieurs fragments typiques de la gélifraction. Ainsi, par exemple, un fragment vestibulaire de M2 supérieure de Cheval présente du côté interne des restes encore adhérant de dentine fragmentée en petits polyèdres (Fig. 39) ou encore une portion de diaphyse de radio-ulna de petit artiodactyle qui présente une importante gélifraction en « assiette » (Fig. 40). 3

Guadelli, J.-L. (en préparation). La gélifraction des dents. Expérimentations et transfert au fossile.

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8. Conclusion Le célèbre principe d’Heisenberg selon lequel « toute tentative pour connaître la valeur d’un paramètre a pour conséquence de perturber d’une fa¸con imprévisible les autres paramètres du système » se trouve ici pleinement applicable, car si les expériences que nous avons menées au Centre de Géomorphologie du CNRS de Caen nous ont amené à mettre en évidence quelques constantes dans la gélifraction et dans l’allure des gélifracts, ces expériences ont peut-être posé plus de questions qu’elles n’ont apporté de réponses et il serait indispensable de les poursuivre en « fixant » d’autres paramètres ou en étudiant la gélifraction, alors que deux ou plus paramètres interfèrent. La seule limitation au nombre de paramètres qui peuvent entrer en jeu plus ou moins en même temps reste notre capacité à faire la part des choses ; il en découle le fait paradoxal que le transport du laboratoire sur le terrain (comme, par exemple, la partie gélifraction du programme TRANSIT) complique plus l’interprétation qu’il ne la simplifie, car tous les paramètres influent à la fois et en l’état actuel nous ne sommes pas à même de savoir qui est responsable de quoi. Nous pensons que la poursuite des expériences en laboratoire doit rester la priorité, le transfert exhaustif des résultats au fossile restant une seconde étape d’autant plus éloignée que les expériences en laboratoire resteront rares. De même, les référentiels de gélifracts à partir de fragments fossiles interprétés a priori parce que le site a été formé sous des conditions périglaciaires restent, là encore, très dangereux à utiliser, voire même inutile à constituer. Quoi qu’il en soit nous pouvons résumer nos expériences de la manière suivante : il y a peu de chances (voire pas du tout) qu’un os long ou allongé complet ne se brise sous l’effet des alternances gel/dégel ; cette constatation provient sans doute (au moins en partie) du fait qu’il y a changement de direction des fissures dans la masse de l’os compact vers l’extérieur dès qu’il y a de la spongiosa et donc vers les extrémités proximale et distale. La gélifraction des fragments d’os long amène sur le long terme essentiellement à la production de fragment « en assiettes », les fragments « en allumettes » en abondance traduisant sans doute une fragmentation peu avancée. La gélifraction de dents amène à la production de très petits polyèdres de dentine qui se séparent de l’émail, lequel, en l’absence de mouvement ultérieur, se fragmente essentiellement dans le sens longitudinal, et si les conditions sédimentaires sont optimales les fragments d’émail restant coalescents, la dent est réduite à un tube d’émail qui se remplit de sédiment ; si les conditions ne sont pas optimales (par exemple, mouvements sin-sédimentaires) toute la dent se fragmente secondairement en petits polyèdres. Enfin, nous avons également mis en évidence que les dents et certains os d’animaux immatures sont susceptibles de disparaître sans laisser de traces, ce qui est à même de grandement modifier l’interprétation de l’image des pièces squelettiques préservées en termes de traitement des carcasses, de transports sélectifs, etc. Toutefois nous ne répèterons jamais trop que nos expériences ne sont qu’une première étape qu’il faudrait poursuivre et compléter, ce qui, actuellement, est malheureusement difficilement envisageable. En d’autres termes, nous avons commencé à débroussailler une question en posant une hypothèse alimentée par l’expérience dans le but d’essayer de simplifier un problème pour en imaginer les mécanismes, mais en vérité, sa dépendance de l’étendue du champ expérimental, de la finesse des instruments, du choix des variables, et du temps de l’expérience la rend dans le contexte actuel impropre à réaliser à nouveau avec les mêmes facilités qui nous ont été données au Centre de Géomorphologie de Caen par J.-C. Ozouf et J.-P. Lautridou.

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Remerciements Nos remerciements vont naturellement à Jean-Pierre Lautridou qui nous a accueilli au Centre de Géomorphologie du CNRS dont il était le directeur, à Jean-Claude Ozouf qui nous a accompagné tout au long de ces expériences, mettant à notre disposition ses compétences et son temps, à Yves Delehaye qui s’est « occupé » au jour le jour des échantillons, mais aussi à Jean-Pierre Coutard avec qui nous avons également eu de fructueux échanges. Nous souhaitons enfin insister sur les qualités humaines des scientifiques que nous venons d’évoquer, qualités sans lesquelles nous n’aurions peut-être pas été en mesure de présenter aujourd’hui les résultats de ces expériences. Nous ferons cependant une mention spéciale à Jean-Claude Ozouf dont les grandes compétences n’ont d’égales que son amabilité ; cet article aurait du être cosigné par lui mais comme nous n’avons pas eu l’opportunité de le lui soumettre pour avis, nous ne nous sommes pas permis d’ajouter son nom mais nous lui devons une grande partie des résultats que nous présentons. Nous tenons aussi à remercier J.-P. Texier et J.-P. Raynal de m’avoir confié l’étude des faunes provenant des Tares pour le premier et de Sainte-Anne-1 et Baume-Vallée pour le second. Références Baïotto, S., Geiger, D., Zidi, M., 2004. Influence de la répartition des ostéocytes sur le remodelage osseux. In: Ribreau et al. (Éds.), Mécanotranstuction 2004 : biologie, physiologie, mécanique. Gamac, pp. 109–117. Bertran, P., 2006. Dépôts de versants et application au Paléolithique. Processus de formation des sites dans les porches de grotte et d’abris en Aquitaine. Habilitation à Dirigé des Recherches, PACEA/IPGQ. Bertran, P., Coutard, J.-P., Francou, B., Ozouf, J.-Cl., Texier, J.-P., 1992. Données nouvelles sur l’origine du litage des grèzes : implications paléoclimatiques. Géographie Physique et Quaternaire 46, 97–112. Blob, R.W., Labarbera, M., 2001. Correlates of variation in deer antler stiffness: age, mineral content, intra-antler location, habitat, and phylogeny. Biological Journal of the Linnean Society 74, 113–120. Bockheim, J.G., Hinkel, K.M., 2005. Characteristics and significance of the transition zone in drained thaw-lake basins of the arctic coastal plain, Alaska. Arctic 58, 406–417. Bouchud, J., Guillien, Y., 1953. Le gel comme facteur de fossilisation. Bulletin de la Société Préhistorique Franc¸aise L, 90. Brear, K., Currey, J.D., Pond, C.M., Ramsay, M.A., 1990. The mechanical properties of the dentine and cement of the tusk of the narwhal Monodon monoceros compared with those of other mineralized tissues. Archives of Oral Biology 35, 615–621. Brommer, H., 2005. Towards detection of functional failure of Equine articular cartilage. The metacarpophalangeal joint under scrutiny. Thèse de l’Université d’Utrecht. Bubenik, G.A., Schams, D., Coenen, G., 1987. The effect of artificial photoperiodicity and antiandrogen treatment on the antler growth and plasma levels of LH, FSH, testosterone, prolactin and alkaline phosphatase in the male white-tailed deer. Comparative Biochemistry and Physiology, Part A, Physiology 87, 551–559. Bubenik, G.A., Schams, D., White, R.J., Rowell, J., Blake, J., Bartos, L., 1997. Seasonal levels of reproductive hormones and their relationship to the antler cycle of male and female reindeer (Rangifer tarandus). Comparative Biochemistry and Physiology, Part B, Biochemistry and Molecular Biology 116, 269–277. Catala, M., André, J.-M., Katsanis, G., Poirier, J., 2006. Histologie : organes, systèmes et appareils. PCEM2 - DCEM1. 2006–2007. Université Paris-VI, faculté de médecine Pierre-et-Marie-Curie, 100 p. http://www.chups.jussieu.fr/ polys/histo/histoP2/histop2.pdf. Chapman, D.I., 1981. Antler structure and function: a hypothesis. Journal of Biomechanics 14, 195–197. Coubat, M., 1998. Rôle des processus périglaciaires et niveaux dans l’érosion des marnes noires en milieu subméditerranéen reboisé. L’exemple du bassin-versant du Saignon. La Motte du Caire, Alpes de Haute-Provence, Institut de Géographie Alpine, université de Grenoble-1. Coutard, J.-P., Mucher, H.J., 1985. Deformation of laminated silt loam due to repeated freezing and thawing cycles. Earth Surface Processes and Landforms 10, 309–319. Coutard, J.-P., Van Vliet-Lanoë, B., 1994. Cryoexpulsion et cryoreptation en milieu limono-argileux. Expérimentation en laboratoire. Biuletyn Peryglacjalny, Varsovie 33, 5–20.

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