S36
65e Congrès franc¸ais de médecine interne, Clermont-Ferrand, 14–15 et 16 juin 2012 / La Revue de médecine interne 33S (2012) S1–S109
nophilique, une hyperplasie granuleuse éosinophile isolée, sans blaste ou lymphome, avec normalité du caryotype et de l’étude par hybridation in situ en fluorescence. La prednisone en bolus de 1 g par jour pendant 3 jours puis à 1 mg par kg et par jour n’empêche pas la majoration de l’éosinophilie à 51 300/mm3 . L’ajout de l’hydroxyurée à 1 g par jour permet une diminution lente des éosinophiles à 5000/mm3 à 5 mois, puis 700/mm3 à 2 ans, sans récidive, avec sevrage en hydroxyurée et maintien de la prednisone à 5 mg et de l’hydroxychloroquine à 400 mg par jour pour le lupus. Résultats.– Le délai d’apparition entre la prise du piroxicam et la survenue de la réaction cutanée, de l’atteinte cardiaque, de l’éosinophilie et le score de Kardaun à 7 (score de DRESS) permettent de retenir le diagnostic de DRESS au piroxicam, antiinflammatoire non stéroïdien de demi-vie longue. On écarte le diagnostic de SHE du fait du caractère aigu des troubles, en l’absence d’éosinophilie préalable, de cytopénie ou d’organomégalie, d’aspect myéloprolifératif médullaire, d’anomalie clonale avec normalisation lente des éosinophiles. Il ne s’agit ni d’un SCS, en l’absence d’asthme, ni d’une poussée de lupus. La réaction immunoallergique, une fois déclenchée par le médicament, évolue pour son propre compte et peut persister des semaines malgré l’arrêt du traitement inducteur. L’atteinte cardiaque est classique au cours du DRESS par toxicité des éosinophiles et des cytokines. Conclusion.– Les éosinophilies médicamenteuses peuvent mimer un SHE, tant sur les atteintes d’organes associées (cœur, peau, poumon) que sur la chronicité, (parfois plus de 6 mois après l’arrêt du médicament) et ne sont pas toujours cortico-sensibles. Une origine médicamenteuse doit être évoquée avant le diagnostic de SHE ou de SCS. Un traitement par anticorps anti-IL-5 en cas d’évolution longue et sévère mériterait d’être discuté. Pour en savoir plus Ben M’rad M, et al. Medicine 2009;88:131–140. Kardaun SH, et al. Br J Dermatol 2007;156:609–611.
doi:10.1016/j.revmed.2012.03.200 CA081
Insuffisance rénale induite par le mycophenolate mofétil A. Hamzaoui , Y. Kort , S. Belakhal , I. Rachdi , A. Brahem Sfaxi , M. Khanfir Smiti , M. Lamloum , I. Ben Ghorbel , M.H. Houman Service de médecine interne, hôpital La Rabta, Tunis, Tunisie Introduction.– Le mycophenolate mofétil (MMF) est l’une des molécules récemment introduites dans le traitement de la néphropathie lupique. Elle peut être une alternative thérapeutique aux immunosupresseurs classiques. Bien que mieux tolérée que ces derniers, elle est souvent responsable de troubles digestifs et plus rarement d’une insuffisance rénale. Patients et méthodes.– Nous rapportons un cas. Résultats.– Patiente âgée de 30 ans atteinte d’un lupus érythémateux systémique retenu devant l’existence de 5 critères de l’ACR (photosensibilité, érythème en vespertilio, lymphopénie, antiDNA et des AAN à 1/1600). Elle était initialement traitée par nivaquine pour l’atteinte cutanée. L’évolution était marquée par l’apparition d’une atteinte rénale à type de glomérulonéphrite lupique proliférative diffuse de type 4 avec protéinurie initiale à 1,96 g/24 h sans hématurie ni insuffisance rénale. Elle était traitée par prednisone 60 mg/j et 2 séries de 6 boli bimensuels d’endoxan à 500 mg/cure avec négativation de la protéinurie. L’évolution était marquée par une réascension de la protéinurie à 5 g/24 h, déclenchée par une grossesse non programmée soldée par une grossesse arrêtée à 9 SA et la patiente était traitée par une 3e série de 6 boli de cyclophosphamide à 500 mg/cure avec persistance d’une protéinurie à 2 g/24 h. Devant la dose cumulée importante de cyclophosphamide (9 g), il a été décidé d’introduire l’imurel (150 mg/j) qui a été administré pendant 9 mois sans obtenir de négativation de la protéinurie qui persistait à 3 g/24 h avec cependant une fonction rénale qui restait normale (créatinémie à 10 m/dL). Devant l’échec de l’imurel, il a été décidé d’introduire le MMF (2 g/j). Le contrôle biologique à
1 mois montrait une insuffisance rénale (clearance à 27 mL/min) sans hématurie ni élévation de la protéinurie qui était stable à 1,9 g/24 h. Il n’y avait pas d’éléments cliniques ou biologiques en faveur d’une poussée lupique. Il n’y avait pas d’arguments en faveur d’une origine fonctionnelle, obstructive (échographie rénale normale) ou infectieuse (ECBU négatif) à cette insuffisance rénale. L’enquête de pharmacovigilance a conclu à une imputabilité possible du MMF. Celui-ci a été arrêté avec légère amélioration de la fonction rénale (la créatinémie est passée de 28 à 23 mg/dL) à 1 mois de recul. On prévoit de la traiter par rituximab. Conclusion.– Le mécanisme incriminé dans la survenue d’une insuffisance rénale sous MMF est une nécrose tubulaire aiguë ; elle n’est pas rare puisqu’elle surviendrait dans environ 10 % des cas justifiant une surveillance régulière surtout en début de traitement. doi:10.1016/j.revmed.2012.03.201 CA082
Le deuxième effet Kiss Cool du Zolpidem C. Brault , C. Gourguechon , S. Ivanoff , A. Smail , J.-P. Ducroix , P. Duhaut Médecine interne, centre hospitalier universitaire d’Amiens, Amiens, France Introduction.– Le Zolpidem est un apparenté des benzodiazépines, fréquemment prescrit dans le traitement des insomnies, car réputé pour présenter peu d’effets indésirables. Patients et méthodes.– Nous rapportons le cas d’une patiente de 82 ans adressée pour amnésies transitoires et répétées. Résultats.– Il s’agissait d’une patiente avec antécédent de bronchopathie chronique et hypertension artérielle essentielle. Hormis les traitements bronchodilatateurs et antihypertenseurs, on notait la prescription d’escitalopram (Séroplex® ) et d’esomeprazole (Inexium® ). Elle venait en consultation pour un épisode d’amnésie antérograde transitoire attesté par des témoins, d’installation et de résolution brutale. La durée totale de l’épisode était inférieure à 1 heure, sans hallucination sensitive ni comportement inadapté. L’interrogatoire retrouvait une hypersomnie inhabituelle et l’examen clinique un ralentissement psychomoteur isolé avec fonctions cognitives préservées. On retrouvait la prescription 14 jours auparavant de Zolpidem 5 mg au coucher pour une insomnie lors d’une hospitalisation pour une infection urinaire haute. Malgré l’arrêt immédiat du traitement, la patiente a présenté 3 épisodes similaires dans l’intervalle d’une semaine. Par la suite, le ralentissement psychomoteur et l’hypersomnie matinale ont disparu et elle n’a pas présenté de nouvel épisode amnésique. Le diagnostic retenu était celui d’un effet indésirable neuro-psychiatrique du Zolpidem sur des critères d’imputabilités intrinsèques et extrinsèques. Discussion.– Quelques rares études ont déjà rapporté des effets secondaires neuro-psychiatriques tel que des troubles du comportement, des parasomnies, des hallucinations et des amnésies sous Zolpidem, significativement plus fréquent chez les sujets âgés et de sexe féminin [1,2]. L’amnésie antérograde transitoire est un effet indésirable rare avec, habituellement, une régression rapide à l’arrêt du traitement. Plus de 90 % du Zolpidem plasmatique est lié aux protéines. Son métabolisme est dépendant du cytochrome P450, en particulier des iso-enzymes 3A4, 2C9, 1A2, 2D6 et 2C19 (61, 22, 14, 3 et 3 % respectivement) [3]. L’escitalopram est inhibiteur faible des CYP 2C9, 2C19 et 2D6 et est lui-même métabolisé au niveau du CYP2C19. L’esomeprazole est inhibiteur connu du cytochrome 2C19. Cette observation est atypique par la longueur du délai d’apparition et la persistance des épisodes après l’arrêt du Zolpidem. Plusieurs facteurs ont été retrouvés, pouvant expliquer ces atypies : l’association de l’escitalopram et d’esomeprazole, d’un taux d’albumine bas à 26 g/L ont pu favoriser une accumulation plasmatique du Zolpidem [1]. L’existence d’un polymorphisme de type métaboliseur lent d’un ou plusieurs iso-enzymes du CYP450 peut également être évoquée.
65e Congrès franc¸ais de médecine interne, Clermont-Ferrand, 14–15 et 16 juin 2012 / La Revue de médecine interne 33S (2012) S1–S109
Conclusion.– La prescription de Zolpidem doit être prudente chez les sujets âgés de sexe féminin d’autant plus qu’il existe une dénutrition ou coprescription de médicaments inhibant le CYP450 dont les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine et les inhibiteurs de la pompe à protons. Pour en savoir plus [1] Takuji I, et al. J Clin Psychiatry 2010;12(6.). [2] Monsif BH, et al. J Sleep Res 2011;20:559–68. [3] Von Moltke LL, et al. Br J Clin Pharmacol 1999;48(1):89–97.
doi:10.1016/j.revmed.2012.03.202 CA083
Troubles neuropsychiatriques graves à l’arrêt d’une corticothérapie systémique prolongée L. Fardet a , I. Nazareth b , I. Petersen b Service de médecine interne, hôpital Saint-Antoine, Paris, France b Research department of primary care and population health, University College London Medical School, Londres, Grande-Bretagne
a
Introduction.– Environ 1 % de la population générale adulte rec¸oit une corticothérapie orale prolongée à chaque instant. Des troubles psychiatriques mineurs (irritabilité, anxiété) ou plus sévères (épisodes dépressifs, délires) peuvent survenir à l’arrêt de ce traitement. Leur incidence, leur présentation clinique et leurs facteurs de risque sont mal connus. Patients et méthodes.– Les données enregistrées dans la base de données britanniques THIN entre le 1er janvier 1990 et le 31 décembre 2008 et concernant près de cinq millions de patients adultes ont été analysées. Les données des patients exposés durant un à trois ans à une corticothérapie orale ont été extraites. Pour chaque patient exposé à une telle corticothérapie, nous avons calculé l’incidence de cinq troubles neuropsychiatriques graves (dépression, délire/confusion, manie, attaque de panique, suicide/tentative de suicide) au cours de cinq périodes de deux mois (deux périodes précédant l’arrêt de la corticothérapie, une période encadrant l’arrêt de la corticothérapie et deux périodes suivant cet arrêt). Pour chaque patient, le risque relatif de trouble neuropsychiatrique grave au cours de la période d’arrêt de la corticothérapie par rapport aux autres périodes a été estimé à l’aide d’une méthode dite de série de cas (« self-controlled case series methodology »). Enfin, les facteurs de risque de développer de tels troubles à l’arrêt de la corticothérapie ont été analysés à l’aide de modèles de Cox. Résultats.– Vingt et un mille, neuf cent quatre-vingt-quinze patients adultes ayant stoppé une corticothérapie systémique qu’ils avaient rec¸ue durant un à trois ans ont été étudiés. Les taux d’incidence de dépression étaient de 11,1 [10,0–12,3] par 100 personneannées à risque durant la période de deux mois encadrant l’arrêt de la corticothérapie et en moyenne de 10,3 [9,8–10,8] par 100 personne-années à risque durant les autres périodes d’intérêt. Ces incidences étaient respectivement de 3,9 [3,3–4,6] et 1,6 [1,4–1,8] pour les épisodes délirants, 0,4 [0,2–0,7] et 0,3 [0,2–0,4] pour les épisodes maniaques, 0,4 [0,3–0,7] et 0,4 [0,3–0,5] pour les attaques de panique et 0,03 [0,01–0,20] et 0,03 [0,01–0,07] pour les suicides/tentatives de suicide. La méthode de série de cas montrait que le risque de dépression (incidence rate ratio : 1,14 [1,02–1,27]) et d’épisode délirant (incidence rate ratio : 2,14 [1,75–2,63]) était significativement plus élevé au cours de la période d’arrêt qu’au cours des périodes contrôles. Les hommes âgés avaient un risque plus élevé d’épisode délirant. Par ailleurs, le risque de dépression (hazard ratio : 1,99 [1,11–3,55]) et d’épisode délirant (hazard ratio : 6,24 [3,35–11,65]) était fortement associé à l’utilisation de glucocorticoïdes de demi-vie intermédiaire ou longue (ex : dexaméthasone, bétaméthasone). Conclusion.– Comparés à des périodes contrôles au cours desquelles les patients rec¸oivent une corticothérapie ou au contraire à distance de l’arrêt du traitement, la période d’arrêt d’une corticothérapie prolongée est une période durant laquelle est observé un sur-risque modéré d’épisodes dépressifs et un risque plus marqué d’épisodes
S37
délirants. Il ne semble pas y avoir de risque majoré d’épisodes maniaques, d’attaques de panique ou de suicides/tentatives de suicide, avec cependant une limite liée au faible nombre d’évènements observés. Dans la littérature, certains cas d’épisodes neuropsychiatriques observés à l’arrêt d’une corticothérapie sont rapportés à une insuffisance surrénalienne sous-jacente. Notre étude montre que l’utilisation de glucocorticoïdes de demi-vie intermédiaire ou longue, entraînant à une freination majorée de l’axe corticotrope, est associée à un risque plus élevé de symptômes neuropsychiatriques lors de l’arrêt de la corticothérapie. Nous pensons donc qu’une insuffisance surrénalienne doit être impérativement évoquée dans un premier temps chez un patient souffrant de troubles neuropsychiatriques lors de l’arrêt d’une corticothérapie prolongée. Lorsque ce diagnostic a été éliminé, aucune donnée n’est disponible quant à l’attitude thérapeutique à adopter. doi:10.1016/j.revmed.2012.03.203 CA084
Varices coliques d’hypertension portale en rapport avec une thrombose porte iatrogène (EPO recombinante) S. Mowlah a , M.A. Vandenhende a , J. Desblache a , M. Hessamfar a , T. Carteret b , F. Bonnet a , P. Morlat a a Service de médecine interne et maladies infectieuses, groupe hospitalier Saint-André, CHU de Bordeaux, Bordeaux, France b Service de radiologie, groupe hospitalier Saint-André, CHU de Bordeaux, Bordeaux, France Introduction.– Les phénomènes thrombotiques favorisés par l’érythropoïétine recombinante (EPOr) sont décrits dans la littérature en cas de pathologie cancéreuse ou d’insuffisance rénale chronique, mais n’ont jamais été rapportés au cours du traitement d’une hépatite chronique C. L’expression clinique habituelle de la thrombose porte est un tableau de « pseudo-cirrhose décompensée », mais des manifestations coliques peuvent être rarement observées. Patients et méthodes.– Nous rapportons le cas d’une patiente traitée pour une hépatite C ayant développé au cours d’un traitement par EPOr une colite d’hypertension portale compliquée d’une thrombose porte. Résultats.– Il s’agit d’une patiente âgée de 49 ans, suivie depuis 1989 pour une co-infection VIH-VHC (génotype 4) avec une charge virale VIH indétectable, sous tenofovir, emtricitabine et atazanavir. Devant un score métavir A2F2, un traitement par interféron pegylé alpha 2a et ribavirine a été débuté en janvier 2006. Après 9 mois de traitement, la patiente développe une anémie à 9 g/dL et est alors mise sous EPOr de fac¸on hebdomadaire qu’elle poursuit pendant 3 mois. Alors que l’échographie hépatique initiale était normale, l’examen en fin de traitement montre fortuitement une thrombose porte alors asymptomatique. L’hémoglobine est à 12 g/dL et il n’y a pas de thrombocytose. Le bilan de thrombophilie est négatif. Une anticoagulation par fluindione est débutée. L’infection par le VHC est guérie et le restera à long terme. En avril 2007, la patiente présente une anémie aiguë à 6,3 g/dL sur hémorragie digestive basse sans insuffisance hépatocellulaire et la coloscopie montre des signes de colite aiguë prédominant au niveau rectal. L’examen anatomopathologique est non spécifique. L’angioscanner montre une importante circulation veineuse collatérale prédominant au niveau du côlon gauche et confirme l’hypothèse d’une colite d’hypertension portale responsable du tableau de méléna avec déglobulisation. La patiente récidivera un épisode de méléna en 2010. L’anticoagulation est arrêtée début 2011. Aucun nouvel épisode de saignement digestif ne sera noté ultérieurement. Conclusion.– Cette observation rappelle les manifestations ectopiques, parfois bruyantes, des varices d’hypertension portale au niveau colique et suggère la part iatrogène de l’EPOr sur l’apparition de la thrombose porte. Ce phénomène jusqu’alors non décrit dans le cadre du traitement par l’hépatite C peut s’expliquer par un