Le mystère de la marque jaune

Le mystère de la marque jaune

Rev Méd Interne 2002 ; 23 : 665-6 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S024886630200629X/SCO Image Le mystè...

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Rev Méd Interne 2002 ; 23 : 665-6 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S024886630200629X/SCO

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Le mystère de la marque jaune P. Perneya*, D. Bessisb, V. Roquesa, Z. Joomayea, J.J. Guilhoub, F. Blanca a

Service de médecine interne E, hôpital St-Éloi, 80, avenue Augustin-Fliche, 34295 Montpellier cedex 5, France ; service de dermatologie et phlébologie, hôpital St-Éloi, 80, avenue Augustin-Fliche, 34295 Montpellier cedex 5, France

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(Reçu le 9 avril 2002 ; accepté le 15 avril 2002) Xanthomatose / Gammapathie monoclonale / Myélome Xanthomatosis / Monoclonal dysglobulinemia / Myeloma

L’HISTOIRE Une femme de 50 ans était hospitalisée en 1990 pour une cholécystite aiguë lithiasique imposant une cholécystectomie. Ses antécédents comportaient une appendicectomie à l’âge de 20 ans et un xanthelasma palpébral connu depuis 1984. Un pic monoclonal à IgG kappa était mis en évidence lors d’une électrophorèse systématique. Le dosage pondéral des IgG kappa était alors à 20,4 g/l (N < 8) alors que celui des IgA et IgM, respectivement à 0,9 g/l et 0,49 g/l, étaient normaux. L’hémogramme était normal. Le myélogramme et la biopsie ostéomédullaire révélaient une plasmocytose sans atypies à 4 %. Les radiographies du crâne et du bassin, le taux sérique de la TSH et le bilan lipidique étaient normaux avec cholestérolémie à 2,12 g/l et taux sérique des triglycérides à 0,81 g/l. Les lésions s’étendaient en 1991 avec une xanthomatose du décolleté et des régions axillaires. Le bilan lipidique était toujours normal mais le pic monoclonal augmentait à 25 g/l. En 1994, on notait une généralisation de la xanthomatose avec l’apparition d’un nodule orangé, ovalaire de la face antérieure de la cuisse droite. L’histologie de ce nodule était évocatrice d’un xanthogra-

Cette observation a fait l’objet d’une présentation sous forme de poster au congrès de la SNFMI de juin 2000. *Auteur correspondant. Tél. : +33-04-67-33-70-26 ; fax : +33-04-67-33-78-69. Adresse e-mail : [email protected] (P. Perney).

nulome. La cholestérolémie et le taux sérique des triglycérides étaient toujours normaux. Il n’y avait pas d’infiltration maligne lors d’une nouvelle biopsie ostéomédullaire. LE DIAGNOSTIC Une xanthomatose plane généralisée associée à une gammapathie monoclonale (Fig. 1). LES COMMENTAIRES Les principales causes de la xanthomatose plane généralisée sont les hyperlipidémies héréditaires primaires et les hyperlipidémies secondaires associées à une hépatopathie, un syndrome néphrotique ou au myxœdème. Les xanthomes plans peuvent aussi survenir, dans de rares cas, chez des malades normolipémiques [1,2]. Ils sont alors le plus souvent associés à une leucémie, un lymphome ou une gammapathie monoclonale. La survenue de xanthomes plans étendus doit donc faire évoquer l’association avec une dysglobulinémie, surtout en cas de normalité du bilan lipémique. Dans 50 à 80 % des cas, il s’agit d’un myélome, survenant parfois plusieurs années après les lésions cutanées [3]. Ceci implique donc une surveillance hématologique régulière. Dans les autres cas, il peut s’agir d’une maladie de Waldenström ou d’une gammapathie monoclonale bénigne. Celle-ci doit faire craindre l’évolution ultérieure vers un myélome.

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P. Perney et al.

Dans certains cas, l’extension des lésions cutanées peut être un marqueur d’évolutivité de la maladie. La physiopathologie expliquant l’évolution parallèle de la xanthomatose et de la gammapathie monoclonale impliquerait une activité anticorps de l’immunoglobuline monoclonale spécifiquement dirigée contre les lipoprotéines [4]. Il en résulte une formation de complexes immunoglobuline monoclonalelipoprotéines, interférant avec le métabolisme normal des lipoprotéines et leur fixation sur le récepteur cellulaire. Ces complexes, reconnus par des waste receptors, s’accumulent dans les macrophages du derme et correspondent aux lésions histologiques du xanthome. Cependant, le mécanisme de captation des lipoprotéines reste normal dans les autres cellules expliquant l’absence d’hyperlipidémie.

RE´ FE´ RENCES

Figure 1. Le mystère de la marque jaune.

1

Parker F. Normocholesterolemic xanthomatosis. Arch Dermatol 1986;122:1253–7.

2

Jordon RE, Mc Duffie FC, Good RA, Day NK. Diffuse normolipaemic plane xanthomatosis. An abnormal complement component profile. Clin Exp Immunol 1974;18:407–15.

3

Bazex A, Dupré A, Christol-Jalby B. Xanthomatoses et dysglobulinémies. Bull Soc Fr Dermatol Syphiligr 1970;77:607–20.

4

Meunier P, Gorin I, Delmer A, Escande JP. Xanthomes plans disséminés normolipémiques et dysglobulinémie monoclonale. Ann Dermatol Venereol 1996;123:93–5.