Les mutations à l’état hétérozygote du gène du récepteur de l’hormone de croissance : quelle signification ?

Les mutations à l’état hétérozygote du gène du récepteur de l’hormone de croissance : quelle signification ?

Arch Pédiatr 2002 ; 9 : 230-1 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0929693X01007576/EDI Éditorial Les muta...

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Arch Pédiatr 2002 ; 9 : 230-1 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0929693X01007576/EDI

Éditorial

Les mutations à l’état hétérozygote du gène du récepteur de l’hormone de croissance : quelle signification ? M. Tauber* Unité d’endocrinologie, génétique et gynécologie médicale, hôpital des enfants, 330 avenue de Grande-Bretagne, 31026 Toulouse cedex 3, France (((Reçu le 16 octobre 2001 ; accepté le 26 octobre 2001))) hormone de croissance (gène du récepteur) / génétique growth hormone receptors / child / growth disorders

C’est en 1966 que Laron et al. [1] en Israël décrivirent la première famille de patients présentant un retard statural extrêmement sévère associé à une dysmorphie faciale particulière dont la biologie faisait évoquer une résistance à l’hormone de croissance (GH). Depuis, le syndrome de résistance à GH, ou d’insensibilité à GH (GHIS) a été largement documenté [2]. Cette affection est due à une mutation du gène du récepteur de GH situé sur le chromosome 5 et cloné en 1987 [3]. Dans les cas typiques de syndrome de Laron, la transmission est autosomique récessive. À coté de cette forme classique, on a pu montrer que le syndrome de résistance à GH regroupait un ensemble de situations très différentes, génétiques et également acquises. En pédiatrie, on insiste actuellement sur la résistance partielle à GH [4] et son rôle éventuel dans les retards staturaux dits « idiopathiques » [5] chez lesquels des mutations du gène du récepteur de l’hormone de croissance ont été décrites à l’état hétérozygote. Le fait que les mutations soient retrouvées uniquement à l’état hétérozygote soulèvent le problème de leur rôle réellement délétère. En effet dans le cadre strict du syndrome de Laron, les parents hétérozygotes obligatoires ont une taille normale. Mais il faut signaler que les mutations retrouvées, à l’état hétérozygote ne sont pas le plus souvent non décrites dans les syndromes classiques de Laron. Pour ces nouvel*Correspondance et tirés à part.

les mutations l’étude fonctionnelle in vitro doit confirmer l’effet délétère et établir les bases physiopathologiques : – défaut de liaison au récepteur (mesures d’affinité, de capacité de liaison) ; – défaut d’expression par anomalies du « traffıcking » intracellulaire ; – défaut post récepteur par anomalies de la transduction du signal. Il faut ensuite réaliser des cotransfections pour savoir si l’effet pathogène se retrouve à l’état hétérozygote. MÉCANISMES HYPOTHÉTIQUES PERMETTANT D’EXPLIQUER L’EFFET DÉLÉTÈRE D’UNE MUTATION Cette démarche théorique implique qu’on a exclu l’existence d’une autre mutation délétère sur l’autre allèle du gène à l’exclusion des régions promotrices. Effet dominant négatif C’est l’explication la plus souvent avancée en ce qui concerne les facteurs transcriptionnels ou les récepteurs, l’allèle muté empêchant ou diminuant l’action de l’allèle sauvage. Ceci est confirmé par le résultat des cotranfections en étudiant l’activité du récepteur « hybride » en fonction du rapport sauvage muté. Ce cas de figure a été décrit dans un cas typique de syndrome de Laron [6].

Mutations du gène du récepteur de l’hormone de croissance

Seul l’allèle muté est exprimé Soit parce qu’il existe une mutation sur l’autre allèle, diminuant l’expression de l’allèle sauvage, et qui n’a pas été retrouvé car les régions promotrices sont mal connues et donc mal analysées, soit parce que l’allèle muté lui-même diminue l’expression de l’allèle sauvage ou favorise son instabilité. Ceci a été décrit chez une famille de syndrome de Laron (communication personnelle) où seul l’allèle muté est exprimé pour une raison inconnue. En effet l’étude du cDNA du récepteur ne retrouve que l’allèle muté. POTENTIALISATION DE L’EFFET DÉLÉTÈRE DES MUTATIONS À L’ÉTAT HÉTÉROZYGOTE L’existence d’un polymorphisme Nous avons pu montrer que chez deux patients présentant une mutation du gène du récepteur de GH à l’état hétérozygote, l’autre allèle porte un polymorphisme du gène GHR décrit comme plus fréquent chez les sujets présentant une petite taille « idiopathique » [5], les hétérodimères constituant le récepteur actif et résultant de ces deux allèles mutés étant moins efficaces. Autre pathologie La taille est sous la dépendance de plusieurs gènes qui interagissent entre eux, et dont en tant que cliniciens nous n’observons que l’effet résultant. Il peut s’agir d’une anomalie d’un gène codant un facteur ou une protéine de l’axe somatotrope ou d’un gène en dehors de l’axe somatotrope très impliqué également dans la croissance par exemple un gène impliqué dans des pathologies osseuses avec retard statural. Ainsi nous avons retrouvé chez une patiente présentant une dyschondrostéose ou maladie de LeriWeill prouvée, une mutation du gène du récepteur de GH probablement responsable d’une taille très petite (– 4 ET) par rapport à – 2 ET observée dans la pathologie osseuse dont elle est porteuse. C’est devant un taux abaissé d’IGF-I que nous avons recherché chez elle une anomalie de l’axe. Pour illustrer l’hypothèse d’une autre anomalie de l’axe somatotrope, on peut facilement comprendre qu’une dimi-

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nution de la transcription du gène d’IGF-I pourrait aggraver l’effet peu délétère d’une mutation du récepteur de GH. De plus, une mutation sur une protéine impliquée dans la transduction du signal pourrait également être un facteur amplificateur de l’effet délétère. CONCLUSION L’étude des mutations du gène du GHR que ce soit dans les syndromes de résistance complète ou dans les syndromes de résistance partielle améliore les connaissances physiologiques et physiopathologiques en ce qui concerne la fonction, la régulation de ce gène ainsi que sur ses interactions avec d’autres gènes. Il est intéressant de constater que ce ne sont pas les mêmes mutations qui sont impliquées dans ces deux types de résistance et que certains polymorphismes pourraient avoir des conséquences cliniques (vrai ou faux polymorphisme). Ceci justifie l’étude moléculaire de ce gène dans des cas cliniques et biologiques bien documentés orientant vers une résistance partielle à GH, et nous avons retrouvé après notre première publication [7] trois autres mutations [8] dont nous poursuivons l’étude fonctionnelle. RE´ FE´ RENCES 1 Laron Z, Pertzelan A, Mannheimer S. Genetic pituitary dwarfism with high serum concentration of growth hormone. A new inborn error of metabolism. Int J Med Sci 1966 ; 2 : 152-5. 2 Rosenfeld RG, Rosenbloom AL, Guevara-Aguirre I. Growth hormone (GH) insensitivity due to primary GH receptor deficiency. Endocr Rev 1994 ; 15 : 369-90. 3 Leung DW, Spencer SA, Cachianes G, Hammons RG, Collins C, Henzel WJ, et al. Growth hormone receptor and serum binding rotein : purification, cloning and expression. Nature 1987 ; 330 : 537-43. 4 Savage MO, Johnston LB. Partial growth insensitivity. J Pediatr Endocrinol Metab 1999 ; 1 : 251-7. 5 Goddard AD, Covello R, Luoh SM, Clackson T, Attie KM, Gesundheit N, et al. Mutations of the growth hormone receptor in children with idiopathic show stature. N Engl J Med 1995 ; 333 : 1093-8. 6 Ayling RM, Roos R, Towner P, Van Lane S, Finidori J, Montoussamy S, et al. A dominant-negative mutation of the growth hormone receptor causes familial short stature. Nat Genet 1997 ; 16 : 13-4. 7 Tauber MT, Porra V, Dastot F, Molinas C, Amselem S, Cholin S, et al. Heterozygous mutation in the WSXWS equivalent motif of the growth hormone receptor in a child with poor response to growth hormone therapy. Growth Horm IGF Res 1998 ; 8 : 211-6. 8 Porra V, Jouret B, Molinas C, Marin F, Beith E, Tauber M. Possible explanations for the deleterious effect of heterozygous mutations of the GH receptor gene. Bruxelles : ESPE ; 2000. p. 2138.