L'antifongigramme des dermatophytes

L'antifongigramme des dermatophytes

© ELSEVIER Paris 1988 Ann. Inst. Pasteur/MicrobioL 1988, 139, 485-491 L'ANTIFONGIGRAMME DES DEILMATOPHYTES R. Steiman, F . Seigle-Murandi et L. Sage...

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© ELSEVIER Paris 1988

Ann. Inst. Pasteur/MicrobioL 1988, 139, 485-491

L'ANTIFONGIGRAMME DES DEILMATOPHYTES R. Steiman, F . Seigle-Murandi et L. Sage Laboratoire de Botanique, Cryptogamie, Biologic Cellulaire et Gdn~tique UFR de Pharmacie, BP 138~ ~8243 Meylan (France)

SUMMARY ANTIFUNGIGRAM OF DERMATOPHYTES The sensitivity of Microsporum gypseum to five antifungal agents was carried out by the disk diffusion method. The influence of the culture medium composition and physiological state of the microorganism was studied. The differed setting of antifungal di~ks enabled a comparative study of their action on spores and mycelium. Best results were obtained on a complex medium (Casitone) using spores as inoculum. The sensitivity of Microsporum canis, M. gypseum and Trichophyton interdigitale to the five antifungal agents indicated the efficacy of imidazole compounds as compared to amphotericin B and nystatine. KEY-WORDS: Mycosis, Antifungal, Dermatophyte; Culture media, Spores, Mycelium.

INTRODUCTION La recherche d'antibiotiques antifongiques passe tr6s g~n&alement par i'&ablissement in vitro d'antibiogrammes vis-/l-vis de souches cibles. Cette 6tude doit etre conduite en rapport avec une d6termination de la sensibilit6 des champignons pathog6nes aux antifongiques utilis~s en th&apeutique selon des techniques rapides, pr~cises et normalis6es. L'6valuation de la sensibilit6 des levures pathog6nes aux antifongiques est g6n&alement effectu6e par la mesure de la concentration minimale inhibitrice (CMI) [2]. Cette valeur de r6f6rence varie toutefois selon la m6thodo-

Manuscrit requ le 30 mai 1988, accept6 le 22 juin 1988.

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logie utilisde, et un certain nombre d'6tudes ont montr6 l'influcr, ce de l'effet pH, de l'effet inoculum, de la nature du milieu [4i, ou ont compar6 la valeur des diff&entes techniques d'6valuation de la CMI en particulier pour Candida albicans [5]. La standardisation de l'antibiogramme ~ntifongique par la technique de diffusion dans la g61ose a 6t6 r6alis6e, en ce qui concerne les champignons 16vuriformes [8] ou les champignons filamenteux b. croissance rapide [6, 71, e t a abouti/t un certain n o m b r e de recommandations en ce qui concerne les milieux/t utiliser et les densit6s de l'inoculum [3]. Les dermat o p h y t e s n ' o n t pas fait l ' o b j e t de ce type de mise au p o i n t s i c e n'est une standa "dilation des milieux/t utiliser p o u r leur isolement et leur identification [1]. Le b u t du pr6sent travail a 4t6 de rechercher dans quelles c o n d i t i o n s p o u vait ~tre rdalis6e la ddtermination de la sensibilit6 des d e r m a t o p h y t e s aux antifongiques en vue de standardiser l ' a n t i b i o g r a m m e par la m 6 t h o d e de diffusion en g61ose.

MATER!EL ET M E T H O D E S MBieux de cuhure. Trois milieux sont utilis6s comparativement : un milieu synth6tique de compositio~ chimique d6finie et deux milieux complexes [3]. a) M'i#eu synthdiique Institut Pasteur Production (IPP, Marnes-la-Coquette ; lot 07). - - Ce milieu est similaire atJ milieu YMA Difco (R6f6rence 0393). b) Milieu g~losd glucosd de Sabouraud (IPP). c) Milieu complexe Casitone. Les milieux sont rdpartis ~t raison de 15 ml par bo~'te de Pdtri de 90 mm de diambtre. Souehes 6tudi6es. Les souches de dermatophytes choisies sont des souches r4cemment isol6es en milieu hospitalier et sensibles ~ tous les antifongiques : M. gypseum (4 souches), M. canis l~ ..... ~o~ r, t T ; ~ t o r , 4 i ~ o i t r t l p ¢~ wmehe~'~. Inoculum.

Il est pr6par6 ~t partir de cultures d'au moins 15 jours [7]. Les spores sont mises en suspension dans l'eau distill6e st6rile et filtr6es sur gaze stdrile. La densit6 de l'inoculum est mesur6e/~ la cellule de Thomas et ramen6e/t 3 concentrations pour chaque milieu de culture utilis6 (14a, 105 et 106 spores/ml de g41ose molle/l 0,6 %). Apr6s ensemencement des milieux par flottation, les disques antifongiques sont mis en place imm6diatement (action sur les spores), ou leur application est diff6r6e jusqu'~t observation de la germination des ~po,e~, i ~ bootes ~....... L~,,~ :.,~oL'^° a' .,,,~'~°r~,..(act!eu ~u," !e myc61ium).

CMI = concentration minimale inhibitrice.

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Antifongiques. L'amphot6ricine B (Squibb) et !a nystatine (Sigma) sont respectivement dissous dans !e m6thanol acide et l'6thanol/t partir d'une solution m6re pr6par6e extemporan6ment [2]. Le clotrimazole (Sigma) et le k6toconazole (Janssen) sont dissous dans l'6thanol_ ! '6conazole est utilis6 sot,: forme de disques impr6gn6s (IPP). Di~ques d'antifongiques. Des disques impr6gn6s sont pr~par6s compte tenu de la tr6s faible diffusion de l'amphotdricine Bet de la nystatine, et de la moyenne diffusion de d6riv6s imidazoIds: les charges vont de 200 ~t 0,5 ~tg (d6riv6s imidazol6s). A titre comparatif, des disques commercialis6s par l'Institut Pasteur sont introduits dans la s6rie: ils sont charges/l 100 gg ou UI pour l'amphot6ricine B e t la nystatine et/~ 50 ~tg pour les d~riv6s imidazol6s. On r6alise une pr6diffusion de 30 rain/t la temp6rature du laboratoire, apr+s l'application des disques d'antifongiques.

Lecture. Elle est effectu6e en cin6tique de 48 h /l 120 h.

RI~SULTATS ET DISCUSSION Dans une premi6re s6rie d'essais, seule la sensibilit6 de M. gypseum aux 5 antifongiques est recherch6e en fonction de la c o m p o s i t i o n du milieu de culture et de l'6tat physiologique du m i c r o o r g a n i s m e (spores ou myc•lium). L'effet <> est 6galement 6tudi6. Les r6sultats observ6s m o n t r e n t qu'il n ' y a pas d'effet i n o c u l u m dans les pr6sentes conditions exp6rimentales. La teneur en spores n'intervient pas sensiblement sur le diam6tre des zones d'inhibition obtenues (diff6rences nulles ou de l'ordre de 1 m m ) . L'6tude compar6e des 3 milieux de culture indique que le milieu complexe Casitone est le plus favorable/t la r6alisation de nos essais: obtention de zones d'inhibition tr6s nettes, pas de croissance de fond et meilleure sensibilit6 (fig. 1). La m~me observation avait 6t6 faite lors de l'btabliss.ement d ' a n t i b i o g r a m m,~s antifongiques contre des c h a m p i g ~ o n s 16vuriformes [3, 5]. En ce qui concerne les d6riv6s imidazol6s, la sensibilit6 dolt toutefois ~tre nuanc6e puisqu'elle est identique sur les 3 milieux p o u r l'6conazole, identique sur les 2 milieux complexes et sup6rieure au milieu synth6tique I P P p o u r le clotrimazole, la mei!leure sur milieu Casitone p o u r le k6toconazole. La sensibilit6 du d e r m a t o p h y t e aux 2 poly6nes est dans l'ensemble meilleure sur milieu Casitene. Quel que soit le milieu choisi, l'6tat physiologique le plus sensible aux antifongiques correspond ~ !a spore, et cela est particuli6rement net pour les d6riv6s imidazol6s (fig. 1). Les lectures o n t 6t6 faites en cin6tique: les antibiogramrues sont chiffrables dbs 48 h et particuli~rement nets apr6s 96 h, temps off

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MILIEU SYN£HErlQUE IPP Spores

Mycelium

Y

MILIEU DE S A B O U R A U D

Spores

Mycelium

f S

MILIEU COMPLEXE "CASIFONE" vo

6

6

Spores

Mycelium

L6 5

5

2

4

4

3

3

E

2

1

24

48

72

96

120

24

48

72

96

120

Temps lecture (h)

FIG. 1. - -

Influence de la composition du milieu de culture et de I'#tat physiologique (spore ou myc61ium) sur le relevd de l'antibiogramme antifongique de M. g y p s e u m en fonction du temps.

* : amphot6ricine B; [] : nystatine; • : clotrimazole; O: 6conazole; [] : k6toconazole.

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la m o y e n n e des sensibilit6s est la plus g r a n d e si l ' o n p r e n d en c o m p t e les 5 a n t i f o n g i q u e s . Le myc61ium est m o i n s sensible que la spore. Le d6p6t diff6r6 des disqt~es au m o m e n t de la g e r m i n a t i o n m o n t r e que sur milieu Casitone, les r6sultats obtenus sont relativement constants alors que l'on enregistre des variations b e a u c o u p plus i m p o r t a n t e s sur les 2 autres milieux en f o n c t i o n d u t e m p s de lectt, re. On r e m a r q u e enfin que, quelles que soient les conditions retenues, le nitrate d ' & o n a z o l e est la m o l & u l e la plus actwe. Dans une d e u x i 6 m e s6rie d'essais, la sensibilit6 de M. canis, M. gypseum et 72 interdigitale est d & e r m i n 6 e vis-~t-vis de l ' a m p h o t & i c i n e B, de la nystatine, du clotrimazole et du k 6 t o c o n a z o l e utilis6s & diff6rentes c o n c e n t r a t i o n s . L ' & o n a z o l e , n ' a y a n t p u &re o b t e n u c o m m e r c i a l e m e n t , n ' a 6t6 e m p l o y 6 qu'~t la seule c o n c e n t r a t i o n de 50 t~g par disque. Le milieu retenu est le milieu Casitone. k ' e n s e m e n c e m e n t est r6alis6 b. partir de spores (105 s p o r e s / m l ) et les disques ( I P P ou f a b 6 q u 6 s au laboratoire) sont d6pos6s d6s l ' e n s e m e n c e m e n t des milieux. Les r6sultats o b t e n u s sont r e g r o u p & d a n s le tableau I. On n o t e i m m 6 d i a t e m e n t l'inefficacit6 relative des a n t i f o n g i q u e s poly6niques qui diffusent real, s u r t o u t l ' a m p h o t 6 r i c i n e B. Par contre, les d e r m a t o p h y t e s pr6sentent u n e tr6s grande sensibilit6 aux d6riv6s imidazol6s puisque l'on observe des zones d'inhibition i m p o r t a n t e s d6s la c o n c e n t r a t i o n tr+s faible de 0,5 I~tgd ' a n t i f o n g i q u e .

FABLEAU |. A n t i b i o g r a m m e antifongique de M. canis (MC), M. gypseum (MG) et T. interdigitale (TI). -

Charge/ disque (~tgouUl)

-

Amphot6ricme B MCMG TI

0,5 1 1,5 3 3,5 6,25 7 12,5 25 50 100 200 Disque Pasteur (*)

- Leg. inh.-- 1,2 --- 1,3 0,9 -- 1,4 1,0 - - 1,? 1,0

Nystatine

Clotr~mazole

K&oconazo!e

Econazole

MCMG TI

M( MG TI

MCMG YI

MC MG TI

34 2,4 3,4

2,7 1,8 1~8

?,7 2,6 3,6

3,3 2,0 I,~

L9 2,9 4,0 ,~,2 3,0 4,4

3,4 2,2 2,8 3,7 2,4 3,2

4,5 4.5 4,8 5,0

4,0 4,3 4,5 5,2

1,1 1,2 1,5 1,8 2,1 2,6 3,0 2,0

-- 0,8 1,0 i,0 1,2 1,1 1,4 1,2 1,8 1,3 ~,~4 1,2

3,1 3,4 3,4 3,5

4,9 5,5 5,7 5,8

4,5 3,4 5,4

2,9 3,2 3.3 3,6

3,7 4,6 4,8 5,1

4,5 3,3 4,6

5,5 5,3 5,4

(*) Nystatine = 100 UI; amphot&icine B = 100 ~g; clotrimazole = 50 ~g; 6conazolc= 50 p.g; k6toconazole= 50 ~g.

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Les r6sultats obtenus avec les disques IPP et ceux fabriq@s dans le laboratoire sont en bonne concordance. On note et on confirme la sup6.riorit6 d'aetion du nitrate d'6conazole. Il n'y a cependant pas de corr61ation 6tablie in vitro~in vivo: l'antifongique avec le plus grand diametre d'inblbition n'est pas ipso facto le plus efficace en clinique.

CONCLUSION

L'antifongigramme des dermatophytes peut 8tre r6alis6 d'une mani6re simple et rapide sur milieu g61os6, gr/~ce/~ la technique des disques avec mesure du diam6tre des zenes d'inhibition. L'6tude comparative de diverses m6thodes d'6valuation de la sensibilit6 de ces champignons montre que l'effet inoculum n'existe pas dans les pr6sentes conditions exp6rimentales. Par contre, la nature du milieu de culture et l'6tat physiologique des souches doivent 8tre prises en compte et bien d6fini~.

RESUMi~ Les auteurs comparent, par la technique des disques, la sensibilit6 de Microsporum gypseum & 5 antifongiques poly6niques ou imidazol6s en fonction de Ia composition du milieu de culture et de l'6tat physiologique du microorganisme. La raise en place diff6r6e des disques d'antifongiques permet une 6tude comparative de !cur action sur la germination des spores et sur la croissance du myc61ium. Les meilleurs r6sultats sont obtenus sur milieu C a d t o n e , l'inoculum 6tant constitu6 de spores. Dans ces conditions, l'6tude compar6e de Ia sensibilit6 de M. canis, M. gypseum et T. interdigitale aux 5 antifongiques confirme la sup6riorite d'action des imidazol6s et en particulier du nitrate d'6conazole. MOTS-CLES: Mycose, Antifongique, Dcrmatophyte; Milieux de culture, Spores, Mycdlium.

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