Revue européenne de psychologie appliquée 54 (2004) 189–205 www.elsevier.com/locate/
Article original
L’opérationnalisation du concept de conscience réflexive du psychothérapeute Operationalisation of the concept of therapist reflexive consciousness B. Lamboy a,*, A. Blanchet b, Conrad-Lecomte c a
Direction des affaires scientifiques, institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) 42, boulevard de la Libération, 93203 Saint-Denis cedex, France b Université de Paris-VIII, France c Université de Montréal, Canada Reçu le 2 février 2003 ; accepté le 1 avril 2004
Résumé Cette étude méthodologique vise à identifier et valider des indicateurs de la conscience réflexive du psychothérapeute. Les indicateurs langagiers ont été construits à partir des manuels de grilles d’analyse existantes (la grille d’analyse du contre-transfert, la grille d’élaboration verbale de l’affect et l’experiencing scale) et grâce à un modèle linguisticopragmatique des états mentaux dans le discours. Une étude empirique portant sur 1762 propositions cotées avec les trois grilles et les indicateurs langagiers a permis de confirmer la validité de ces indicateurs. Comme attendu, les propositions cotées réflexives par les grilles sont caractérisées par la présence d’indicateurs langagiers. Cette méthode d’analyse linguistique de type indicateurs langagiers s’avère donc concluante. Elle est présentée comme une alternative aux grilles d’analyse de contenu habituelles. Elle permet d’accroître les qualités métrologiques des instruments fondés sur le langage en améliorant, en particulier, la fiabilité de la cotation. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract This methodological study aims at identifying and at validating linguistic indicators of the therapist reflexive consciousness. The indicators were built from the textbooks of existing grid of analysis (Grille d’Analyse du Contre-transfert, Grille d’Élaboration Verbale de l’Affect et Experiencing Scale) and thanks to a linguistic-pragmatic model of the mental states in the speech. An empirical study concerning 1762 propositions quoted the three grids and the linguistic indicators allowed to confirm the validity of these indicators. As waited, the reflexive propositions are characterized by the presence of linguistic indicators. This linguistic method turns out thus decisive. It is presented as an alternative to the usual grids of analysis of contents. It increases the metrological qualities of the instruments based on the language by improving, in particular, the reliability of the quotation. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Conscience réflexive ; Psychothérapeute ; Analyse de discours ; Indicateurs langagiers Keywords: Reflexive consciousness; Therapist; Speech analysis; Linguistic indicators
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (B. Lamboy). © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.erap.2004.04.001
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1. Introduction Depuis une dizaine d’année, la conscience réflexive de soi est apparue dans la littérature comme une composante essentielle du processus psychothérapeutique. Entendue de façon générique comme le fait de prendre son propre fonctionnement psychique comme objet d’attention et de réflexion, la conscience réflexive (du psychothérapeute et du client) est associée à l’efficacité thérapeutique. Ce processus psychique revêt donc un intérêt majeur pour tout chercheur intéressé par les facteurs communs de changement en psychothérapie. Il s’avère donc essentiel de pousser plus en avant la connaissance de ce phénomène. Jusqu’à maintenant, les travaux sur la conscience réflexive en psychothérapie se sont présentés sous la forme de réflexions théoriques ou analyses de pratiques effectuées par des chercheurs-psychothérapeutes. Les recherches empiriques dans le domaine sont peu nombreuses. Quelques études de type qualitatif s’appuyant sur des entretiens ont été réalisées (Jennings et Skovholt, 1999 ; Neufeldt et Nelson, 1998; Skovholt et Ronnestad, 1992). De nombreux auteurs appellent à des études empiriques de type vérificatoire afin de pouvoir véritablement tester les hypothèses issues de la clinique. Se pose alors la question des instruments de mesure et plus généralement celle de l’opérationnalisation du concept de conscience réflexive du psychothérapeute. Il n’existe à ce jour aucun instrument de mesure de la conscience réflexive du psychothérapeute. Cet article empirique de type méthodologique propose de faire un pas dans cette direction en élaborant des indicateurs de la conscience réflexive du psychothérapeute à partir d’instruments d’analyse déjà existants et d’un modèle linguisticopragmatique des états mentaux dans le discours. 2. La conscience réflexive de soi en psychothérapie 2.1. Repères historiques Même si historiquement l’objet auquel réfère le concept de conscience réflexive peut être considéré comme faisant partie depuis toujours de l’univers psychothérapeutique, ce n’est que très récemment que l’adjectif réflexif ou le nom réflexivité ont été accolés à ceux de psychothérapeute ou d’efficacité thérapeutique. Le début de cette association semble remonter au milieu des années 1980 (Abbey et al., 1985; Kottler et Blau, 1989; Olsen, 1986). Il faut en fait attendre les années 1990 pour voir rattacher significativement le terme de réflexif à celui de thérapeute. Aujourd’hui, le nombre croissant d’écrits sur le sujet fait de la réflexivité un objet d’intérêt majeur dans le monde thérapeutique (Aron, 2000; Neufeldt et al., 1996; Rennie, 1998). 2.2. Conscience réflexive de soi et effıcacité thérapeutique Le développement de la conscience réflexive du client est présenté comme un objectif principal de la psychothérapie
(Aron, 2000). La capacité de conscience réflexive de soi est ainsi reconnue comme un indice de santé mentale ; son absence est associée à des fonctionnements et structures psychopathologiques ; son accroissement correspond à un des critères de succès thérapeutique (Auerbach et Blatt, 1996; Aron, 2000; Bach, 2001). Le développement des aptitudes réflexives du client au cours d’une thérapie serait lié aux facultés réflexives du psychothérapeute (Aron, 2000). Aussi, de plus en plus, la conscience réflexive est présentée comme une compétence professionnelle déterminante dans l’efficacité thérapeutique (Lecomte, 1999). Les thérapeutes efficaces se caractérisent par leur capacité réflexive (Jennings et Skovholt, 1999 ; Lecomte, 1999; Miller, 1993; Zeddie, 1999). Plusieurs programmes de formation à la psychothérapie accordent de l’importance au développement de la conscience réflexive ; les psychothérapeutes en formation initiale ou continue sont encouragés à accroître leurs habiletés réflexives (Caroll, 1997; Coburn, 1997; Jacobs et al., 1995; Hazel, 1997; Horton, 1997; Lecomte et Richard, 1997; Neufeldt et al. 1996; Nelson et Neufeldt, 1998 ; Peterson, 1995; Savard, 1997; Skovholt et Ronnestad, 1992; Vanja et Dagmar 1997). 2.3. Principales théories sur la conscience réflexive dans le champ thérapeutique Pour la plupart, ces réflexions cliniques qui valorisent la conscience réflexive ne sont ni associées à une véritable élaboration théorique ni à des recherches empiriques standardisées. Seuls quelques auteurs ont tenté d’aller plus loin dans la compréhension de ce concept. Il est possible de distinguer quatre principaux courants de pensée qui approfondissent l’étude de la conscience réflexive et dessinent les contours d’une théorie. 2.3.1. Les « héritiers de Schön » Un grand nombre d’auteurs mettant en rapport la conscience réflexive du psychothérapeute et l’efficacité thérapeutique appréhendent le concept de réflexivité à travers la perspective développée par Schön et Argyris (Argyris et Schön 1974; Schön, 1994). Dans la plupart des cas, les idées et mots clés tels que « reflective practitioner », « reflection in action », « reflective practice » sont transposés directement de leur univers d’origine, les sciences de l’éducation, au monde thérapeutique. L’emphase est généralement portée sur un des aspects de la théorie de Schön et Argyris : la réflexion du praticien face à une situation problématique (Kottler et Blau 1989), les savoirs implicites des praticiens (Peterson, 1995), l’attitude de chercheur chez le praticien (Peterson, 1995), la relation entre la pratique et la recherche (Vanja et Dagmar, 1997). Au sein de cette mouvance, une synthèse théorique a été tentée par Neufeldt, Karno et Neslon (1996). À partir d’entretiens effectués auprès d’experts tels que Schön, Skovholt et Ronnestad, les auteurs ont cherché à élaborer une théorie intégrative de la réflexivité telle qu’elle se manifeste chez les conseillers en situation de supervision
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clinique. La « reflectivity » ou « reflection » est entendue globalement comme un processus interne d’attention et de pensée. Ce mode particulier de pensée se déploie pendant ou après les entretiens thérapeutiques, tout particulièrement lors de séances de supervision. Le thérapeute réflexif réfléchit de façon critique, ouverte et non-défensive à ses émotions, pensées et actions qui ont eu lieux au cours de l’entretien. Cette réflexion intègre les acquis personnels et professionnels antérieurs, les connaissances théoriques et les expériences subjectives. Elle se déploie essentiellement lors de situations problématiques. Elle est facilitée par les interventions du superviseur et est dépendante des habilités (cognitives) du supervisé. Elle vise une meilleure compréhension des phénomènes thérapeutiques et du fonctionnement du thérapeute. Les transformations cognitives et comportementales qui en découlent améliorent la pratique du thérapeute et favorisent son développement professionnel. Les auteurs préconisent la mise en place de recherche empirique afin de vérifier la validité de ces propositions théoriques. Chez les chercheurs de langue française, Saint Arnaud (1992) est un des principaux auteurs a avoir introduit les théories de Schön et d’Argyris dans le monde francophone de l’intervention psychologique. 2.3.2. L’approche de Rennie Rennie se rattache au courant thérapeutique humaniste — expérientiel. Sa perspective est influencée par l’approche centrée sur la personne issue de Rogers, la thérapie expérientielle de Gendlin (Gendlin, 1984, 1996) et l’approche du processus expérientiel développée par Rice et Greenberg (Greenberg, 1984; Greenberg et al., 1993). Rennie utilise le mot de « reflexivity » pour référer à « notre habileté à penser à propos de nous, à penser à propos de nos pensées. À sentir à propos de nos sensations, à nous traiter comme les objets de notre attention et à utiliser ce que nous avons trouvé comme le point de départ dans la décision de ce que nous allons faire après » (Rennie, 1998 : 2). Rennie (2000) fait la différence entre deux principaux états de conscience. Dans l’état non réflexif ou en dehors de la conscience de soi, la personne est totalement immergée dans ses états mentaux (pensées, émotions, sensations...). Elle n’a pas conscience de faire ce qu’elle fait ; elle le fait tout simplement. Dans l’état réflexif, la personne tourne son attention sur elle-même ; elle peut ainsi prendre conscience de ses états internes et de ses comportements. Considérée comme la qualité la plus significative des êtres humains, la réflexivité est aussi bien étudiée sous la perspective du client (Rennie, 2000) que celle du psychothérapeute (Rennie, 1998, 2000). 2.3.3. Le courant psychanalytique intersubjectif Ce courant développe les concepts de « self-reflexivity » ou « reflexive self-awareness » à partir des conceptions de Bach (1985, 1994, 2001). Bach, reprenant la distinction de James entre le « I » et le « me », distingue deux états de conscience, deux types d’opération mentale. Dans le « subjective self-awareness », le sujet perçoit le monde de façon
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expérientielle et subjective (« subjectively experiencing »). Il est plongé dans ses états d’être subjectifs et n’est pas conscient de lui-même en tant que sujet pensant et agissant. Dans le « objective self-awareness » ou « reflective awareness », le sujet se perçoit objectivement de l’extérieur (« objectively reflecting »). Il se prend lui-même (ses pensées, ses actions...) comme objet de pensée, de reflexion. Le sujet fluctue normalement entre ces deux états de conscience. Auerbach, Blatt et Aron (Auerbach, 1998; Auerbach et Blatt, 1996, 1997; Aron, 2000, 2001) introduisent les notions de « selfreflexivity » ou « reflexive self-awareness » pour évoquer l’articulation entre ces deux processus mentaux, la « capacity to move easily between subjective and objective perspectives on the self » (Aron, 2001 : 142). Les psychopathologies sont considérées comme des déficiences au niveau de cette intégration psychique. Dans l’hystérie, par exemple, le mode subjectif est l’état de conscience prédominant. Inversement, dans les pathologies de type obsessionnel ou schizoïde, le sujet se représente le monde principalement à travers l’« objective self-awareness » (Bach, 2001). La « self-reflexivity » est placée au cœur du processus thérapeutique. Son développement est un objectif thérapeutique majeur. Pour Aron (2000), la réussite d’une thérapie se mesure par un accroissement des capacités réflexives du patient. Ce processus chez le client est favorisé par l’utilisation des habiletés réflexives du thérapeute. C’est donc dans un contexte intersubjectif que la conscience réflexive de soi se déploie. Un pont est ainsi établi avec les théories modernes intersubjectives (Benjamin, 1995 ; Aron, 1996). Des rapprochements sont aussi effectués avec les travaux de Fonagy et Target sur le fonctionnement mental réflexif ou mentalisation (Fonagy et Target, 1995, 1996). Dans le prolongement, Lecomte (Lecomte et Richard, 1997; Lecomte, 1999) tente une synthèse théorique en articulant ces travaux psychanalytiques avec les perspectives humanistes–expérientielles (Gendlin, 1984) et cognitivistes (Mahoney, 1992). Lecomte (1999) a recours aux termes de « conscience réflexive de soi en action » pour qualifier le point d’ancrage optimal du développement de la compétence professionnelle en psychothérapie. Ainsi, un psychothérapeute qui développerait une « position empathique introspective » et prendrait conscience de ses expériences subjectives et de ses modalités de régulation (personnelle et interactive) tendrait à optimaliser ses interventions. 2.3.4. La perspective psychanalytique phénoménologique de Bouchard et Normandin C’est dans le cadre de l’élaboration d’une théorie sur le contre-transfert que Normandin (1991) développe la notion de réflexivité du thérapeute. La réflexivité est entendue comme une forme d’activités mentales contretransférentielles, où le thérapeute, en position d’observateur– participant, prend conscience et interprète ses réactions internes, en rapport avec sa personne et la pathologie du patient. L’activité réflexive est opposée à deux autres formes d’activités mentales contre-transférentielles : le contre-transfert objectif-rationnel, où le thérapeute, détaché émotionnelle-
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ment et positionné dans la sphère rationnelle, adopte une attitude d’observateur–non-participant et le contre-transfert réactif où le thérapeute est inconscient de ses réactions défensives et de sa participation subjective au sein du processus thérapeutique. Cette approche de la réflexivité s’inspire de deux principaux courants théoriques : le courant psychanalytique Kleinien à travers le concept d’identification projective et l’approche phénoménologique (Husserl) — humaniste (Perls) avec les notions d’intentionnalité et de cycles de conscience. L’activité réflexive est présentée comme l’attitude optimale en psychothérapie. Ce modèle théorique a été élaboré en vue de construire un instrument de mesure : la grille d’analyse du contre-transfert (GAC) (Normandin, 1991). 2.4. Opérationnalisations du concept Au-delà des développements théoriques, quelques chercheurs ont proposé des outils de mesure de la conscience réflexive ou de phénomènes connexes dans le champ thérapeutique. Un seul instrument appréhende le phénomène sous l’angle du thérapeute. Il s’agit de la grille d’analyse du contre-transfert (GAC) (Normandin, 1991) dont la théorie vient d’être exposée. Cet outil se présente sous la forme d’une grille d’analyse de contenus discursifs administrée par des juges externes. Des verbatims de thérapeutes (entretiens, prises de note...) sont codés en trois principales catégories qui représentent les trois formes de contre-transfert : réflexif, réactif, rationnel. La catégorie réflexive est ensuite subdivisée en différentes modalités hiérarchisées (émergence, immersion, élaboration, intervention). C’est principalement au niveau du pôle patient, sous différentes appellations, que le phénomène de conscience réflexive a été opérationnalisé. Dans ce sens, Aron (2000) fait référence à deux outils : l’« Experiencing scale » (ES) (Klein et al., 1969) et la « Reflective-Self Functionning Scale » (RSF) associée à l’« Adult Attachment Interview » (Fonagy et al. 1996). L’ES a été construite dans un contexte thérapeutique humaniste à partir de la théorie centrée sur la personne de Rogers et de la théorie de l’Experiencing de Gendlin. Le construit d’experiencing (Gendlin, 1984, 1996) est relié à celui de conscience subjective personnelle (Klein et al., 1969 : 50). L’ES vise à évaluer la capacité d’un individu à se référer, dans l’instant présent, à son expérience subjective implicite. Elle est l’une des mesures de processus thérapeutique les plus utilisées (Hill et Corbett, 1993; Levitt et Angus, 1999). La RSF (Fonagy et al., 1996) vise à évaluer les capacités métacognitives de l’adulte. Cette opérationnalisation de la conscience réflexive s’inscrit dans le domaine de la psychologie développementale, clinique et cognitive. Elle est rattachée aux notions de connaissances métacognitives (Flavel et al. 1996) et de théories de l’esprit (Astington et al., 1988; Frye et Moore, 1991; Whiten, 1991; Baron-Cohen et al., 1993). L’instrument se situe dans le prolongement des tra-
vaux de Main (1991) portant sur les modèles d’attachement, la régulation métacognitive et la mentalisation. La mentalisation, dont la grille de Fonagy et Target est une opérationnalisation, est entendue comme la capacité de voir et de comprendre l’individu (soi-même et les autres) en termes d’états mentaux (émotions, croyances, intentions et désirs). La « Grille de l’Élaboration Verbale de l’Affect » (GEVA) (Lecours, 1997) cherche à évaluer les capacités de représentation et de symbolisation de l’affect chez l’adulte. À partir des travaux de Bion (1962), Marty (1990, 1991) et de Luquet (1981), deux axes théoriques distincts ont été isolés pour rendre compte du niveau d’élaboration mentale de l’affect : le canal d’expression de l’affect (somatique, moteur, lié à l’imagerie, lié à la verbalisation) et la tolérance (ou réflexivité) de l’affect (impulsion disruptive, impulsion assumée, extériorisation, appropriation de l’expérience affective, création de lien de signification).
3. Réflexion sur l’opérationnalisation du concept Les instruments présentés au chapitre précédent correspondent globalement à un même type d’outil. Il s’agit de grilles d’analyse de contenu utilisées par des juges externes qui mettent en rapport des activités mentales avec des productions langagières. Les instruments qui s’appuient sur le langage pour étudier certaines dimensions du psychothérapeute peuvent être classés en différents types. 3.1. Typologie des instruments (ou études empiriques) portant sur les discours des psychothérapeutes Cette typologie a été élaborée à partir des grandes catégories d’étude du langage (Caron, 1989; Garcia Negroni, 1999; Giacobbe, 1999) et de la classification des discours thérapeutiques proposée par Blanchet (1991). Elle se situe dans le prolongement de la classification des analyses linguistiques dans le domaine thérapeutique présentée par Russel et Staszewski en 1988 (in Stinson, Milbrath, Reidbord, et Bucci, 1994). Seulement les études empiriques qui se sont intéressées aux discours des psychothérapeutes ont été prises en considération. De façon schématique, les procédures méthodologiques qui s’appuient sur le discours thérapeutique peuvent être subdivisées en deux catégories : celles qui conceptualisent uniquement l’objet thérapeutique étudié et qui n’explicitent pas le rapport entre ce dernier et les formes langagières (« les approches non linguistiques ») ; et celles qui prennent en considération à la fois l’outil, i.e. le langage, et l’objet d’investigation de nature thérapeutique (« les approches linguistiques »). « Les approches non linguistiques » se centrent sur la réalité extralinguistique qui est « plus ou moins dissimulée dans un corpus donné » (Ghiglione et Blanchet, 1991, p. 29). Elles regroupent, selon Blanchet (1991), les recherches de type « herméneutique clinique » et « catégoriel ». « Les
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approches non linguistiques de type herméneutique » visent à expliciter les concepts-clés de la démarche thérapeutique présentée à partir du discours du client et du psychothérapeute (e.g., Rogers, 1945, pour l’Approche Centrée sur la Personne ; Deusch et Murphy, 1960 et Donnet et Green, 1973, pour la psychanalyse ; Beck, 1976, pour la thérapie cognitive in Blanchet, 1991). « Les approches non linguistiques de type catégoriel » cherchent à discriminer les activités externes (attitudes, interventions...) ou internes (processus mentaux, émotionnels...) des thérapeutes à partir des discours et d’une grille catégorielle préétablie : par exemple, les processus d’interaction en groupe (Bales, 1950), les attitudes des thérapeutes (Porter, 1950), les interventions des thérapeutes (Allen et al., 1996; Bergman, 1951; Hardy et al., 1999; Snyder, 1987; Stiles, 1987; Strauss, 1998), les inférences des thérapeutes (Bouchard et al., 1987). Toutes ces analyses appréhendent essentiellement le langage en terme de contenu. Cette démarche implique intrinsèquement de nombreux processus inférentiels. Le discours est interprété à l’aune d’un cadre théorique préexistant et externe aux phénomènes langagiers. La « vérité » découverte est affaire de co-construction entre le discours, la théorie de l’objet sous-jacente, l’analyste et les codeurs. L’objet d’étude thérapeutique est surimposé sur l’objet manifeste langagier. D’un point de vue psychométrique, ce type d’instrument est faible, en particulier, en ce qui a concerne la fidélité. En revanche, la prééminence de l’objet thérapeutique fait que la pertinence clinique est assurée. « Les approches linguistiques » ont une théorie de l’objet manifeste, comme préalable à l’étude de l’objet thérapeutique. Elles se centrent sur les phénomènes langagiers et les analysent à l’aide de référents théoriques et d’outils méthodologiques adaptés à ces observables. Les éléments linguistiques appréhendés varient selon les études. À l’instar des théories linguistiques, les analyses discursives peuvent être regroupées en deux grandes orientations : les approches linguistiques formelles et les approches linguistiques fonctionnelles (Caron, 1989). « Les approches linguistiques formelles » mettent l’accent sur les structures formelles du langage c’est-à-dire sur les signes et leur combinaison « universelle ». Elles considèrent ainsi les dimensions phonologique, lexicale, ou/et syntaxique de la langue. On retrouve, selon la classification de Blanchet (1991), les recherches de type « mesure des variables linguistiques », « structure temporelle des interactions » et « l’approche micro-analytique ». Dans ces études, différents éléments langagiers sont pris en considération tels que la fréquence des actions langagières et leur durée, la fréquence et la durée des pauses (Chapple, 1949), divers paramètres phonologiques (Pittenger et al., 1960), le coefficient de richesse lexicale, le nombre de mots à la minute, le pourcentage de verbes au temps présent et au temps passé (Jaffe, 1961), la longueur du discours des praticiens (Kächele, 1992), les types de verbes (Anderson et al., 1999), les mots affectifs (Hölzer et al., 1997). Ces investigations posent le problème de l’articulation entre les indices isolés et l’émergence d’une éventuelle signification plus glo-
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bale permettant d’apporter de nouvelles connaissances sur les processus thérapeutiques. Elles encourent le risque de perdre en intelligibilité et en compréhension ce qu’elles sont susceptibles de gagner en fiabilité et en exactitude méthodologique. « Les approches linguistiques fonctionnelles » tendent à palier à ce genre de problèmes. Elles associent les formes linguistiques et les significations mentales (Caron, 1989). Ces approches intègrent la dimension psychologique au sein des analyses linguistiques. Sont ainsi pris en considération les aspects sémantique et pragmatique1 du langage. Dans sa classification des recherches sur les discours thérapeutiques, Blanchet (1991) fait référence à l’analyse pragmatique. Celle-ci est représentée par différents types de démarches tels que la micro-analyse pragmatique (e.g., Labov et Fanshel, 1977), l’analyse d’indices langagiers (e.g., Mirabel-Sarron et Blanchet, 1992 ou Ghiglione et Blanchet 1991), l’approche procédurale (e.g., Blanchet, 1997), l’analyse conversationnelle (e.g., Proïa, 1994). Dans leur analyse de la 25e séance d’une thérapie de type « ego-analyse », Labov et Fanshel (1977) visent à « reconstruire les actes de langage échangés par les acteurs de la thérapie » (Blanchet, 1991, p. 30-31). Ghiglione et Blanchet (1991) calculent la fréquence d’occurrence de divers indices langagiers (verbes factifs, marqueurs de situation, déictiques d’adresse, modalisations de négation, joncteurs de causalité...), et les mettent en rapport avec des processus cognitifs et comportementaux présents en situation thérapeutique. Dans son approche procédurale Blanchet (1994) propose une classification des interventions langagières des thérapeutes selon deux axes : l’objectif discursif recherché et le type de relation unissant le discours du thérapeute à celui du patient. Proïa (1995), grâce à une double référence pragmatique et psychanalytique, construit un modèle conceptuel sur les mécanismes conversationnels qui ont cours en situation d’entretien psychanalytique. Toutes ces approches se fondent sur une description objective des discours en tant que phénomènes langagiers et psychologiques. Elles ont l’avantage d’être systématiques et reproductibles tout en répondant à l’intérêt thérapeutique du chercheur. Elles associent ainsi rigueur méthodologique et pertinence clinique. 3.2. Les instruments en lien avec la conscience réflexive Les instruments présentés dans le premier chapitre (GAC, RSF, ES, GEVA) ont pu être identifiés comme des mesures de la conscience réflexive (Aron, 2000) (Bouchard 2001, communication personnelle). C’est toujours par le biais du langage que cette mesure est effectuée. Ces outils se présentent tous sous forme de grilles d’analyse de contenu. Celles-ci ont été construites dans un contexte clinique. Selon la typologie exposée précédemment, elles appartiennent à 1 La pragmatique correspond à « l’étude du langage en situation, qui intègre le rôle des utilisateurs et les situations où il est utilisé » (Grand Dictionnaire de Psychologie, 1994).
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une « approche non linguistique de type catégoriel ». Les catégories, qui sont en fait les différentes dimensions du concept, sont regroupées dans une grille de codage. C’est donc à partir d’une connaissance conceptuelle de l’objet d’étude que se réalise l’analyse. Le langage n’est utilisé que dans la mesure où il véhicule des contenus thématiques qui peuvent être interprétés et mis en correspondance avec les catégories conceptuelles de la grille. Cette méthode centrée uniquement sur l’objet assure une pertinence clinique à l’outil mais peut poser question au niveau méthodologique. En effet, la surimposition de l’objet psychologique sur la forme linguistique, sans préciser le rapport entre les deux, risque d’entraîner de nombreux processus inférentiels. La fidélité des grilles risque d’être confondue avec l’uniformité des codeurs (même approche clinique, même formation à la cotation...). Ceci pourrait expliquer les fluctuations des coefficients de fidélité interjuges pour une même grille. Par exemple, pour l’ES, les kappas fluctuent entre 0,97 (Barrileaux et Bauer, 1976) et 0,52 (Klein et al., 1986). Le coefficient a pu descendre à 0,22 lors de fortes différences dans la formation des juges (Auerbach et Luborsky, 1968). Le coefficient kappa de la GEVA associé à l’axe de tolérance de l’affect est de 0,74 dans l’étude de Lecours, Dymetryszyn et Bouchard (1995) et de 0,52 à 0,72 dans la recherche de Lecours (2000). Les coefficients de fidélité interjuges présentés ont souvent été calculés à partir des cotes macroscopiques, c’est-à-dire à partir de cotes globales attribuées à de grands extraits de discours (e.g., pour l’ES, voir Klein et al., 1986 ; pour la GAC, voir Dubé et Normandin, 1999). Il semblerait que les coefficients soient beaucoup plus faibles lorsqu’ils sont établis à partir de petits segments de discours (cote microscopique) (e.g., coefficient de 0,36 pour l’ES (Joyce, 1980)). D’une façon générale, les aspects méthodologiques des grilles ont été plus ou moins investigués. De nombreuses études métrologiques ont été conduites pour l’Experiencing Scale (pour une revue détaillée, voir Klein et al., 1986 ) ; elles sont quasi-inexistantes pour la GAC et en cours de réalisation pour la GEVA (Lecours, 2000). Aucun travail métrologique ne mentionne avoir étudié la validité de contenu reliée aux aspects techniques. En particulier, les liens entre les contextes de production, la nature des données et les cotes attribuées ne sont pas précisés. Klein et al. (1986 : 29) soutiennent, par exemple, que l’ES peut être appliquée à différents types de données sans réellement étayer cette affirmation par des recherches empiriques. Globalement, ces grilles sont rapidement mises au service des recherches empiriques. De même, la technique de construction des instruments n’est que brièvement présentée dans la littérature. Alors que les travaux psychométriques font état de nombreuses étapes et procédures (Anastasi, 1982; Bernier et Pietrulewicz, 1997; Falissard, 2001; Laveault et Grégoire, 1997), il semblerait que les instruments aient été bâtis majoritairement à partir des écrits théoriques. Un saut quasi direct semble avoir été opéré entre les conceptions issues des écoles de pensées et la mesure. En conclusion, il est possible d’avancer que l’opérationnalisation des concepts mesurés comporte des limites. En
effet, les manuels des grilles ne définissent que le concept et ses dimensions. Les indicateurs (langagier, en l’occurrence) en tant que manifestations objectivement repérables et mesurables des catégories conceptuelles ne sont pas explicités systématiquement. Pour que les formes linguistiques soient définies et que leurs liens avec les dimensions soient établis, il est nécessaire d’avoir recours à « une approche de type linguistique fonctionnelle » (voir typologie précédente). La grille GEVA (Lecours, 1999) qui s’intéresse à la forme de l’expression de l’affect semble se rapprocher d’une telle démarche. Actuellement, il n’existe aucun outil de type linguistique fonctionnel, assurant rigueur méthodologique et pertinence clinique, portant sur le concept de conscience réflexive. Cette étude se veut un premier pas vers la construction d’une grille d’analyse linguistique et transthéorique de la conscience réflexive du psychothérapeute. Elle vise à identifier des indicateurs langagiers de la conscience réflexive. Le travail d’analyse se fera à partir des grilles existantes qui sont, a priori, les formes les plus opérationnelles et les plus représentatives du concept de conscience réflexive. Il s’appuiera sur une théorie linguistique–pragmatique des états mentaux (pour une présentation de l’approche, voir typologie précédente ; pour une présentation détaillée de l’analyse pragmatique des états mentaux, voir annexe 1 et Lamboy, 1998).
4. Objectifs et hypothèses 4.1. Objectif de l’étude Construire des indicateurs langagiers de la conscience réflexive à partir des grilles d’analyse de discours existantes et les valider. 4.1.1. Sous-objectif 1 Extraire des indicateurs langagiers de la conscience réflexive des manuels des grilles : GAC, ES et GEVA. 4.1.2. Sous-objectif 2 Vérifier que les indicateurs langagiers de la conscience réflexive extraits des manuels sont effectivement présents dans des échantillons de discours réflexifs. 4.2. Hypothèse (associée au sous-objectif 2) La proportion de propositions possédant un indicateur langagier de la conscience réflexive devrait être plus importante dans les passages côtés réflexifs par les grilles que dans les passages côtés non réflexifs.
5. Méthode La démarche méthodologique utilisée s’inspire de celle proposée pour la construction d’instruments de mesure
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(Anastasi, 1982; Bernier et Pietrulewicz, 1997; Falissard, 2001; Laveault et Grégoire, 1987). Elle correspond de façon spécifique à l’étape 3 de la construction : la production des indicateurs (phase 1) et leur validation (phase 2). 5.1. Phase 1 : construction des indicateurs langagiers 5.1.1. Matériel Les indicateurs langagiers de la conscience réflexive ont été construits à partir des manuels de trois grilles d’analyse : la GAC, la GEVA et l’ ES. Le manuel de la GAC distingue trois principales catégories : le contre-transfert rationnel, le contre-transfert réactif, le contre-transfert réflexif. À l’intérieur de la catégorie réflexive, quatre sous-classes sont identifiées : émergence, immersion, élaboration et expression ; ces dernières sont encore subdivisées. Les « unités significatives » qui reçoivent une cote sont soit la phrase ou la proposition (cote microscopique), soit une section ou un paragraphe (cote macroscopique), soit un protocole entier (cote globale). Le manuel de la GEVA vise à attribuer une cote à chaque extrait de discours qui exprime un affect (« unité affective »). Chaque cote attribuée possède deux composantes qui correspondent aux deux axes de la grille : l’axe du canal de l’expression de l’affect avec quatre catégories (somatique, moteur, lié à l’imagerie, lié à la verbalisation) et l’axe de tolérance de l’affect avec cinq catégories (niveau 1 ou impulsion disruptive, niveau 2 ou impulsion assumée, niveau 3 ou extériorisation, niveau 4 ou appropriation de l’expérience affective, niveau 5 ou création de lien de signification). Les quatre modalités d’expression croisées aux cinq modalités de tolérance donnent 20 catégories différentes. La degré de réflexivité est associé à l’axe de la tolérance (Lecours, 1999). Les catégories dîtes réflexives correspondent aux niveaux de tolérance 4 et 5. Le manuel de l’ES présente sept catégories de niveau d’experiencing croissant : de 1 « external event ; refusal to participate » à 7 « full, easy presentation of experiencing ». L’unité de cotation de base correspond au tour de parole en entretien thérapeutique. Des cotes sont aussi attribuées à des segments de discours plus importants : le « modal rating » qui renvoie à la cote la plus représentative du passage et le « peak rating » qui est la cote la plus élevée attribuée dans le passage. L’axe d’experiencing représente un degré croissant de reflexivité, le concept d’experiencing ayant été défini comme une capacité à être conscient de sa propre subjectivité (Klein et al. 1969). Les cotes 5, 6 et 7 qui reflètent le niveau d’experiencing le plus élevé représentent donc les catégories réflexives. 5.1.2. Analyses Les parties des manuels définissant et illustrant chacune des catégories des grilles ont été soumises à une analyse de contenu (Van der Maren, 1996, 1999). Les passages qui portaient sur les états mentaux ou sur les formes langagières ont été sélectionnés comme unités d’analyse (étape 1). Les informations redondantes ont été éliminées. Les unités d’analyse ont été regroupées autour de deux rubriques prin-
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cipales (étape 2) : états mentaux (définition conceptuelle) et formes langagières renvoyant aux états mentaux (définitions et extraits de discours). Les mots critères discriminant les catégories des grilles ont été extraits des unités d’analyse (étape 3). Les mots critères des deux rubriques ont été transformés en indicateurs langagiers (étape 4). Cette réécriture de type linguistique a été réalisée à l’aide d’un modèle linguisticopragmatique des états mentaux dans le discours (voir, Lamboy, 1998). Ce modèle définit comment les états mentaux s’inscrivent dans le langage du point de vue des trois grandes fonctions du langage (Blanchet, 1991)2 : référentielle, modale, illocutoire (Annexe 1). Les mots critères ont ainsi été traduits en termes linguistiques qui ont été, selon les cas, associés à la référence, à la modalité ou à l’illocutoire. Une synthèse des indicateurs langagiers et des états mentaux correspondant a été réalisée pour chacune des grilles (étape 5). Cette synthèse définit en termes sémantiques et pragmatiques les catégories dites réflexives (GAC : réflexivité émergence, immersion, élaboration, intervention ; GEVA : niveaux de tolérance 4 et 5 ; ES : niveaux 5, 6 et 7) et les catégories dites non-réflexives (GAC: réactif et rationnel ; GEVA: niveaux de tolérance 1 et 2 ; ES : niveaux 1, 2, 3 et 4). Une liste d’indicateurs langagiers réflexifs a été établie pour chacune des trois grilles (étape 6) (Annexe 2). 5.2. Phase 2 : validation des indicateurs langagiers 5.2.1. Participants Il s’agit de trois psychologues cliniciennes senior, expérimentée et junior. La psychologue senior, âgée de 61 ans, de formation humaniste et psychanalytique, pratique la psychothérapie en cabinet privé depuis 33 ans. Elle est aussi formatrice et superviseure. La psychologue expérimentée, âgée de 43 ans, d’orientation humaniste, est psychothérapeute depuis neuf ans. Le sujet junior est une étudiante de 23 ans en 1re année de doctorat en psychologie à l’université de Montréal. Les trois sujets sont de nationalité canadienne ; ils exercent la psychothérapie au Québec. 5.2.2. Matériel Il s’agit de sept verbatims constituant un total de 1762 propositions. Cinq verbatims ont été produits par la psychologue senior. Ils sont de trois types : deux textes écrits libres, deux retranscriptions d’entretien de recherche et un texte rédigé face à une vignette clinique. Les textes écrits ont été produits à la suite de deux entretiens thérapeutiques : un entretien jugé facile par la psychologue et un entretien jugé difficile. La psychologue devait répondre à deux questions générales por2 La référence « permet aux signes linguistiques de renvoyer à la réalité extra-linguistique (Kleiber, 1981) » (Blanchet, 1991 : 37-38). «La modalité renvoie aux pensées concernant (les) objets (du monde) » (Blanchet (1991: 37). La fonction illocutoire (d’acte) renvoie au fait que le langage ne sert pas uniquement à représenter mais qu’il permet aussi d’agir et d’altérer l’état du locuteur.
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tant sur son vécu de l’entretien thérapeutique et sur son vécu actuel suite à l’entretien thérapeutique. Les entretiens de recherche ont été effectués, par la suite, par le chercheur principal. Il s’agissait d’entretiens standardisés, structurés autour de sept consignes et cinq relances. Ils portaient sur les deux mêmes entretiens thérapeutiques et étaient centrés sur le vécu et les pratiques de la psychologue au cours des deux entretiens thérapeutiques. La vignette clinique était constituée de cinq passages simulant une conversation thérapeutique. Pour chacun des passages, la psychologue devait répondre à un client fictif, simulant ainsi une interaction thérapeutique. À la suite de ces cinq interactions, elle devait répondre à une question générale portant sur son vécu de l’entretien simulé. Uniquement ces derniers passages de verbatims étaient retenus comme matériel. Les deux autres verbatims ont été recueillis auprès de la psychologue expérimentée et de la psychologue junior. Dans les deux cas, il s’agissait d’entretien de recherche portant sur un entretien thérapeutique jugé comme difficile. La structure des entretiens était identique à celle de l’entretien de recherche effectué auprès de la thérapeute senior. 5.2.3. Analyses Les verbatims ont été soumis à six cotations différentes. En premier lieu, ils ont été cotés à l’aide des trois grilles (GAC, GEVA et ES) par six juges expérimentés (2 juges par grille). Chaque juge devait segmenter le texte en fonction des plus petites unités des grilles, attribuer une cote à chacune des unités et souligner le(s) mot(s) sur le(s)quel(s) il se fondait pour choisir sa cote. Ensuite, les verbatims ont été soumis à une analyse de type « indices langagiers » par le chercheur principal (pour une présentation détaillée de l’approche, voir, Lamboy, 1998). Cette analyse étaient organisée en deux temps. Dans un premier temps, toutes les formes langagières renvoyant aux états mentaux étaient isolées. Dans un deuxième temps, les indicateurs langagiers de la réflexivité isolés en phase 1 étaient sélectionnés parmi l’ensemble des formes langagières renvoyant aux états mentaux. Rappelons qu’à chacune des trois grilles correspondait une
liste particulière d’indicateurs de la réflexivité. Trois analyses d’indicateurs de la réflexivité ont donc été conduites de façon indépendante. En dernier lieu, les verbatims ont été soumis à un découpage propositionnel à l’aide du logiciel Tropes. L’ensemble des cotations a été regroupé dans un tableau où pour chaque proposition il était identifié : la cote GAC, le nombre de mots sélectionnés GAC, le nombre d’indicateurs de la réflexivité associés à la GAC, la cote GEVA, le nombre de mots sélectionnés GEVA, le nombre d’indicateurs de la réflexivité associés à la GEVA, la cote ES, le nombre de mots sélectionnés ES, le nombre d’indicateurs de la réflexivité associés à l’ES.
6. Résultats 6.1. Étude de la fidélité interjuge (Tableau 1) Pour chacune des grilles, trois coefficients kappas d’accord interjuge ont été estimés. Le premier kappa k(a) a été calculé à partir des cotes des propositions ; il est donc spécifique à l’étude. Les deux autres correspondent aux kappas habituellement calculés par les grilles. Le kappa k(b) a été établi à partir des segments les plus petits (le terme pour la GEVA, une à plusieurs propositions pour la GAC et l’ES). Le kappa k(b′) se fonde sur des unités plus grandes pour la GAC et l’ES (les sous-parties des documents) et la moyenne des kappas de chaque document pour la GEVA. Les k(a), légèrement inférieur à 0,40, sont quasi identiques d’une grille à l’autre. Pour la GEVA, les coefficients sont encore plus faibles avec les méthodes habituelles de calculs (0,21 et 0,27). Le pourcentage d’accord sur les unités d’analyse est plus élevé (56 %). Cependant, comme les autres coefficients, il est largement inférieur aux scores de fidélité obtenus précédemment avec cette grille. Pour la GAC, les kappas restent très faibles avec les microcotes des juges (0,35). Sa valeur augmente fortement avec les macrocotes (0,61) et devient proche de celles obtenues antérieurement (Dubé et Normandin, 1999). Inversement, pour l’ES, le
Tableau 1 Coefficients kappas des trois grilles en fonction des unités d’analyse : les cotes des propositions ( ka), les microcotes des grilles ( kb), les macrocotes des grilles( kb′)
GEVA
Propositions k(a) 0,38
N 1740
Microcotes k(b) 0,21
N 407 (56 %)a
Macrocotes (b′) 0,27b
N –
GAC
0,37
1748
0,35
762c
0,61d
42
ES
0,39
1732
0,94
73 (26 %)
0,29e 0,43f
42 42
N, nombre brut d’unité d’analyse. a Pourcentage d’unités d’analyse communes aux deux juges (à partir desquelles ont été calculés les kappas). b Macrocotes GEVA : moyennes des kappas de chacun des documents (étendue de .06 à .64). c Absence de pourcentage d’unités d’analyse communes car les 2 juges GAC ont effectué un consensus sur les unités. d Macrocotes GAC : cotes attribuées aux sous-parties des documents. e Macrocotes ES : modes (la cote la plus représentative du passage) attribués aux sous-parties des documents. f Macrocotes ES : peaks (la cote la plus élevée du passage) attribués aux sous-parties des documents.
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kappa demeure faible dans le cas des cotes macroscopiques (0,29 et 0,43) et augmente très fortement avec les microcotes (0,94). Ce dernier se fonde cependant sur un nombre restreint de segments (73), l’accord interjuge d’identification des unités étant faible (26 %). Les coefficients de l’ES sont représentatifs des extrêmes obtenues dans les recherches précédentes. 6.2. Validation des indicateurs langagiers (Tableau 2) 7,3 % des propositions totales (soit 127 propositions) ont été identifiées comme totalement réflexives par la grille GEVA. Parmi elles, 78 % possèdent au moins un indicateur langagier. Comme p est très largement inférieur à 0,05 (et la valeur test au-delà de 1,65), il est possible de soutenir que la présence d’indices langagiers GEVA caractérise fortement les propositions réflexives. Cette sur-représentation des indices langagiers est aussi significative dans les propositions cotées réflexives par un seul juge. Inversement, les propositions sans indice langagier sont significativement surreprésentées dans le groupe des propositions non-réflexives (92 % des propositions non-réflexives). Ces résultats sont totalement en accord avec notre hypothèse. Parmi les 22 % de propositions totalement réflexives GAC (soit 385 propositions), 20,5 % possèdent un indice langagier ; cette proportion passe à 4,7 % au sein des propositions non-réflexives. Avec p = 0 dans les deux cas, il est possible de soutenir que les propositions avec indice langagier sont significativement sur-représentées dans les propositions réflexives et que les propositions sans indice sont significativement sur-représentées dans les propositions non-réflexives. Dans le prolongement, 48,2 % des propositions avec indice (soit 79 propositions) sont cotées totale-
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ment réflexives alors que 10,4 % (soit 17 propositions) sont cotés totalement non-réflexives. Ces résultats vont dans le sens de notre hypothèse. Cependant, les propositions partiellement réflexives présentent des résultats en contradiction avec nos attentes. Les propositions sans indice langagier caractérisent les propositions réflexives partielles 2. Il n’existe pas de modalité significativement caractéristique pour les propositions réflexives partielles 1. Malgré tout, les propositions avec indice sont plus importantes dans ces deux modalités que dans la modalité non réflexive (30 pour réflexif partiel 2 et 38 pour réflexif partiel 1 contre 17 pour nonréflexif) (Tableau 3). Les données obtenues avec la grille ES semblent difficilement exploitables. Uniquement 19 propositions sur 1734 ont été cotées réflexives par les deux juges. Seulement neuf propositions présentent un indice langagier. Cependant, il est possible de noter que les 2/3 de ces propositions avec indice sont cotées réflexives par un juge. La modalité avec indice langagier est ainsi significativement caractéristique de la classe propositions partiellement réflexives de type 1. La modalité sans indice langagier est, quant à elle, très significativement sur-représentée dans la classe propositions nonréflexives. Les classes de propositions réflexives et réflexives partielles de type 2 n’ont pas de modalité significativement caractéristique (Tableau 4). 6.3. Analyses supplémentaires : comparaisons intergrilles (Tableau 5) Plus de propositions sont cotées réflexives par la GAC que par la GEVA : 79,3 % (51,5 + 27,8) des propositions totales pour la GAC contre 22,9 % (7,9 + 15) pour la GEVA. En terme de cote réflexive, il y a plus d’accord entre les juges de
Tableau 2 Répartition des propositions en fonction de la cote GEVA et des indices langagiers GEVA, et le test de la loi hypergéométriquea,b Grille GEVA Non-réflexife Réflexifg Réflexif (partiel 2)h Réflexif (partiel 1)i TOTAL
Sansc Indice langagier (SI) 1228 (92 %)f 28 (22 %) 9 (64.3 %) 145 (54.9 %) 1410 (81 %)
Avecd Indice Langagier (AI) 107 (8 %) 99 (78 %) 5 (35.7 %) 119 (45.1 %) 330 (19 %)
TOTAL
p
Valeur Test
1335 (100 %) 127 (100 %) 14 (100 %) 264 (100 %) 1740 (100 %)
***
20.53
Modalité caractéristique SI
***
14.78
AI
n.s.
1.15
AI
***
10.22
AI
* p < 0,05 ; ** p < 0, 01 ; *** p < 0,001 a Exemple de proposition codée réflexive (GEVA) : « Elle a été un peu déçue de l’entretien. ». Exemple de proposition codée non réflexive (GEVA) : « Elle pense qu’ (elle n’aurait pas dû dire ça). ». b Pour une description de l’analyse se rapporter à l’annexe 3. c Proposition ne contenant pas d’indice langagier GEVA. d Proposition contenant au moins 1 indice langagier GEVA. e Propositions dites non réflexives par les 2 juges (cotes 1, 2 de la GEVA). f % par ligne : pourcentage de propositions avec et sans indice pour chacune des 4 modalités de la GEVA. g Propositions dites réflexives par les 2 juges (cotes 4 ou 5 de la GEVA). h Propositions cotées 4 ou 5 par les 2 juges et pas de mot souligné. i Propositions cotées 4 ou 5 par 1 juge.
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Tableau 3 Répartition des propositions en fonction de la cote GAC et des indices langagiers GAC, et le test de la loi hypergéométriquea Grille GAC
SI b
AI c
TOTAL
p
Valeur Test
Non-réflexif d
345 (95,3 %) 306 (79,5 %) 482 (94,1 %) 451 (92,2 %) 1584 (90,6 %)
17 (4,7 %) 79 (20,5 %) 30 (5,9 %) 38 (7,8 %) 164 (9,4 %)
362 (100 %) 385 (100 %) 512 (100 %) 489 (100 %) 1748 (100 %)
***
3,76
Modalité caractéristique SI
***
7,42
AI
***
3,54
SI
n,s,
1,63
SI
Réflexif e Réflexif (partiel 2) f Réflexif (partiel 1) g TOTAL
* p< 0,05 ; ** p < 0,01 ; *** p < 0,001 a Exemple de proposition codée réflexive (GAC) : « J’ai été perturbée par cette intervention ». Exemple de proposition codée non réflexive (GAC) : « Je crois que (j’ai fait une erreur) ». b Proposition ne contenant pas d’indice langagier GAC. c Proposition contenant au moins 1 indice langagier GAC. d Propositions cotées non réflexives par les 2 juges (cotes réactif et rationnel de la GAC). e Propositions cotées réflexivité par les 2 juges f Propositions cotées réflexivité par les 2 juges et pas de mot souligné. g Propositions cotées réflexivité par 1 juge. Tableau 4 Répartition des propositions en fonction de la cote ES et des indices langagiers ES, et le test de la loi hypergéométriquea Grille ES
SI b
AI c
TOTAL
p
Valeur Test
Non-réflexif d
1495e (99,8 %) 19 (100 %) 10 (100 %) 201 (97,1 %) 1725 (99,5 %)
3 (0,2 %) 0 (0 %) 0 (0 %) 6 (2,9 %) 9 (0,5 %)
1498 (100 %) 19 (100 %) 10 (100 %) 207 (100 %) 1734 (100 %)
***
3,24
Modalité caractéristique SI
n,s,
1,32
SI
n,s,
1,64
SI
***
3,61
AI
Réflexif f Réflexif (partiel 2) g Réflexif (partiel 1) h TOTAL
* p < 0,05 ; ** p < 0,01 ; *** p < 0,001 a Exemple de proposition codée réflexive (ES) : « Je suis heureuse de ce partage ; (cette satisfaction n’est pas fréquente pour moi.) ». Exemple de proposition codée non réflexive (ES) : « Ce travail est très satisfaisant ». b Proposition ne contenant pas d’indice langagier ES. c Proposition contenant au moins 1 indice langagier ES. d Propositions dites non réflexives par les 2 juges (cotes 1, 2, 3, 4 de l’ES). e Effectif brut f Propositions dites réflexives par les 2 juges (cotes 5, 6 et 7 de l’ES). g Propositions cotées 5, 6 ou 7 à l’ES par les 2 juges et pas de mot souligné. h Propositions cotées 5, 6 ou 7 à l’ES par 1 juge.
la GAC que ceux de la GEVA puisque environ 1/3 sont des cotes partiellement réflexives pour la GAC alors qu’elles sont de 2/3 pour la GEVA. La quasi-totalité des propositions cotées réflexives par la GEVA sont aussi cotées réflexives par la GAC : pour 22,9 % des propositions totales cotés réflexives par la GEVA, 19,2 % (4,6 + 2 + 9 + 3,6) des propositions totales sont aussi cotées réflexives par la GAC. Ces proportions se retrouvent de façon quasi identique avec les indices langagiers GEVA : 19,5 % des propositions totales ont un indice langagier GEVA et 16 % (11,8 + 4,2) des propositions totales ont un indice langagier GEVA et sont cotées réflexives par la GAC. Les proportions avec les indices GAC sont,
quant à elles, différentes : 9,6 % des propositions totales ont un indice GAC et 6 % (3,1 + 2,9) des propositions totales ont un indice GAC et sont cotées réflexives par la GEVA. La proportion de propositions avec indice GAC et cotées réflexives par la GEVA augmente quand on exclut les cotes partiellement réflexives : pour 7,3 % des propositions cotées totalement réflexives par la GEVA, 3,1 % des propositions totales ont un indice et 5 % n’en ont pas alors que pour 15,2 % des propositions totales cotées partiellement réflexives, 2,9 % des propositions totales ont un indice et 12,3 % n’en ont pas. Le nombre de propositions avec indice GEVA est donc plus important que le nombre de propositions avec indice GAC :
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Tableau 5 Répartition des propositions (en %) en fonction des cotes GEVA et des cotes GAC GAC GEVA Non-réflexif GEVA Réflexif GEVA Réfl,partielGEVA Total Sans Indice GEVA Avec Indice GEVA Total
Non-réflexif GAC 17 1,3 2,4 20,7 17,2 3,5 20,7
Réflexif a GAC 37,9 4,6 9 51,5 39,6 11,8 51,3
Réflexif partiel b Total GAC 22,2 77,1 2 7,9 3,6 15 27,8 100 c 23,7 80,5 4,2 19,5 28,0 100 e
Sans Indice GAC 73,2 5 12,3 90,4 78,1 12,2 90,3
Avec Indice GAC 3,6 3,1 2,9 9,6 2,1 7,6 9,7
Total 76,7 7,3 7,3 100 d 80,2 19,8 100 f
a
Propositions dites réflexives par les 2 juges (réflexif + réflexif partiel 2 des tableaux antérieurs) Propositions dites réflexives par 1 juge (réflexif partiel 1 des tableaux antérieurs). c N = 1726. d N = 1740. e N = 1749. f N = 1762. b
19,8 contre 9,7 %. La quasi-totalité des propositions qui ont un indice GAC possèdent aussi un indice GEVA (7,6 pour 9,7 %). Un moins grand nombre de propositions sont cotées réflexives par l’ES : 13,6 % des propositions totales. Parmi elles, un nombre minime de propositions sont cotées réflexives par les deux juges : 1,6 % des propositions totales soit 27 propositions. La quasi-totalité de ces propositions cotées réflexives par l’ES (13,6 %) sont aussi cotées réflexives par la GAC puisque seulement 0,6 % des propositions totales sont cotées non-réflexives par la GAC. Ces proportions sont encore plus extrêmes au niveau de l’indice langagier ES. Seulement 0,5 % des propositions totales soit neuf propositions ont un indice ES. Toutes ces propositions avec indice ES sont cotées réflexives par la GAC. Au niveau de l’indice GAC, une minorité de propositions avec indice sont aussi cotées réflexives par l’ES : 2,4 % pour 9,7 % des propositions totales. Le nombre de proposition avec indice GAC est largement supérieur au nombre de propositions avec indice ES : 9,7 contre 0,5 %. Les 2/3 des propositions qui ont un indice ES (soit 6 des 9 propositions ou 0,3 % des propositions totales) ont aussi un indice GAC (Tableau 6). Parmi les 13,8 % propositions réflexives de l’ES et les 23,2 % réflexives de la GEVA seulement 2,9 % des propositions totales sont cotées réflexives par les deux
grilles. Cette répartition se retrouve au niveau des indices langagiers. La totalité des propositions avec indice ES n’est pas cotée réflexive par la GEVA. Une grande majorité des propositions avec indice GEVA n’est pas cotée réflexive par l’ES (19,7 contre 17 % des propositions totales). Les 2/3 des propositions avec indice ES n’ont pas d’indice GEVA (6 des 9 propositions ou 0,3 % des propositions totales) (Tableau 7).
7. Discussion 7.1. Les grilles En se fondant sur les cotes des propositions, les coefficients d’accord interjuge des trois grilles deviennent très faibles. Certains retrouvent des valeurs satisfaisantes avec les unités d’analyse habituelles : les macrocotes pour la GAC et les microcotes pour l’ES. D’autres demeurent très largement en dessous de ceux présentés dans la littérature : tous les coefficients de la GEVA, les microcotes de la GAC et l’identification des unités et les macrocotes de l’ES. Les valeurs des coefficients semblent ainsi fluctuer en fonction des méthodes de calcul et des contextes d’analyse. En effet, nous avions vu que les coefficients étaient estimés la plupart du
Tableau 6 Répartition des propositions (en %) en fonction des cotes GAC et des cotes ES ES GAC Non-réflex, GAC Réflexif GAC Réflexif partiel GAC Total Sans Indice GAC Avec Indice GAC Total a
N = 1721. N = 1748. c N = 1734. d N = 1762. b
Non-réflexif ES 20,3 40,7 25,4
Réflexif ES 0 1,2 0,4
Réflexif partiel ES 6 9,5 1,9
Total
86,4 79,1 7,3 86,4
1,6 1,2 0,4 1,7
12,0 9,9 2,0 11,9
100 a 90,3 9,7 100 c
20,9 51,5 27,7
Sans Indice ES 20,7 50,9 27,8
Avec Indice ES 0 0,4 0,2
Total
99,5 90,1 9,4 99,5
0,5 ,2 0,3 ,5
100 b 90,3 9,7 100 d
20,7 51,3 28
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Tableau 7 Répartition des propositions (en %) en fonction des cotes GEVA et des cotes ES ES GEVA Non réflexif GEVA Réflexif GEVA Réfl, Partiel GEVA Total Sans Indice GEVA Avec Indice GEVA Total
Non-réflexif ES 65,9 7,5 12,8 86,2 69,4 17,0 86,4
Réflexif ES 0,9 0,1 0,7 1,7 1,1 0,6 1,7
Réflexif Partiel ES 10 ,6 1,5 12,1 9,8 2,1 11,9
temps à partir des cotes macroscopiques et que ces coefficients étaient d’autant plus faibles que l’unité de codage était petite. Dans notre cas, nous avons choisi la proposition comme unité afin de pouvoir effectuer des comparaisons entre les grilles et entre les indicateurs. Ce découpage extrêmement microscopique fondé sur la proposition a rendu les calculs interjuges plus sévères. La procédure de codage a aussi été plus dure qu’à l’accoutumé. En effet, les cotations effectuées avec ces grilles se déroulent ordinairement en plusieurs étapes (sélection des unités, codage no 1, codage no 2...). Celles-ci sont entrecoupées d’un travail de consensus entre les juges. Parfois, ces échanges entre juges se déroulent pendant la procédure de codage. En demandant à tous nos juges d’effectuer le codage de façon totalement indépendante et en calculant les accords interjuges sans avoir recours à un travail de consensus, notre méthode se révèle nettement plus exigeante. Ceci peu expliquer la faiblesse de certains coefficients malgré la prise en compte des unités d’analyse habituelles. Les disparités entre juges peuvent être aussi un facteur explicatif. En particulier pour la grille GEVA, les deux juges ont été formés avec la même personne mais à deux périodes différentes (note du formateur). La grille GAC est la grille qui a permis de dénombrer le plus de propositions réflexives. Environ 4/5 des propositions du matériel ont été associées à une cote réflexive par la GAC ; 2/5 par la GEVA et 1/5 par l’ES. Les propositions cotées réflexives par la GEVA de même que les propositions cotées réflexives par l’ES sont aussi majoritairement cotées réflexives par la GAC. En revanche, les cotes réflexives des grilles GEVA et ES ont tendance à être exclusives. Nous pourrions en déduire que les critères d’identification de la réflexivité ont une certaine variabilité entre les grilles. Les critères de la GAC seraient plus généraux et tendraient à englober ceux de la GEVA et de l’ES. Quant à ces derniers, ils sembleraient qu’ils aient des caractéristiques bien spécifiques. 7.2. Les indices langagiers En s’appuyant sur les indices langagiers pour identifier la réflexivité, il n’y a plus que 1/5 des propositions qui sont cotées réflexives par la GAC et presque aucune avec l’ES. Avec la GEVA, la proportion de propositions réflexives se maintient autour de 2/5. On retrouve ici un emboîtement des critères de la GEVA et de l’ES avec ceux de la GAC ainsi
Total 76,8 8,1 15,1 100 80,3 19,7 100
Sans Indice ES 76,2 8,1 15,2 99,5 79,9 19,6 99,5
Avec Indice ES 0,5 0 0 0,5 0,3 0,2 0,5
Total 76,7 8,1 15,2 100 80,2 19,8 100
qu’une tendance à l’exclusion entre les critères GEVA et ES. L’emboîtement entre la GEVA et la GAC apparaît cependant dans le sens contraire : les critères GAC semblent être contenus dans ceux de la GEVA. Ainsi, au niveau des définitions langagières de la réflexivité, il semble que ce soit les indices associés à la GEVA qui soient les plus généraux et qui englobent les indices plus spécifiques de la GAC et de l’ES. Même si les proportions entre les propositions réflexives et non réflexives sont différentes entre les indices et la grille GAC, la quasi-totalité des propositions avec indices GAC a aussi une cote réflexive GAC. Les indices langagiers GAC sont ainsi bien associés à la cote réflexivité de la grille. Le test de la loi hypergéométrique confirme cette observation. Ce constat se retrouve au niveau de la grille GEVA. Les propositions cotées réflexives par la GEVA sont significativement caractérisées par la présence d’indices langagiers GEVA. Ces résultats vont totalement dans le sens de nos hypothèses. Ils nous permettent de soutenir que les formes langagières sélectionnées représentent bien des indices de la réflexivité telle que définit par les grilles GAC et GEVA. Les données associées à la grille ES ne nous permettent pas d’aboutir à une conclusion précise. Les propositions qui sont dites réflexives sont en trop faible nombre : neuf propositions ont un indice langagier et 29 propositions sont cotés réflexives par les deux juges. L’identification de la réflexivité par la grille d’ES semble poser problème puisque parmi les 236 propositions dites réflexives par la grille seulement 29 propositions ont reçu cette cote de la part des deux juges. Au-delà des problèmes inhérents à la grille, il semble que les critères langagiers de la réflexivité soient plus restrictifs que les critères de la grille ES. En effet, ils permettent d’identifier seulement neuf propositions comme réflexives ; et même si celles-ci sont majoritairement associées à une cote réflexive de la grille, elles demeurent en très faible nombre comparativement aux 236 identifiées comme réflexives par au moins un juge de l’ES. De même, en ce qui concerne la GAC, le nombre de propositions dites réflexives par indice langagier est inférieur à celui des propositions dites réflexives par cote. Comme pour l’ES, la définition langagière de la réflexivité semble être plus étroite que la définition de la grille. Cette observation ne se retrouve pas au niveau de la GEVA puisque le pourcentage de propositions identifiées comme réflexives est quasiment le même (environ 20 %) avec l’analyse langagière et avec la grille GEVA.
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8. Conclusion Cette étude méthodologique propose une alternative aux grilles d’analyse de contenu habituelles. L’approche linguistique ainsi exposée cherche à palier aux limites des grilles catégorielles et particulièrement aux problèmes de fidélité interjuge. La fluctuation des coefficients en fonction des codeurs, des unités et des contextes d’analyse a pu être observée empiriquement dans notre étude. En prenant comme base d’analyse des indicateurs observables, l’analyse linguistique vise à réduire cette part d’interprétation et de variabilité. Les indicateurs de la réflexivité ont été construits à partir des définitions des grilles GAC, GEVA et ES. Ils ne couvrent qu’une partie des critères contenus dans les manuels. D’une part, par leur nature linguistique, ils donnent une place essentielle aux paramètres formels et observables du langage. D’autre part, en se centrant sur les états mentaux, ils deviennent encore plus spécifiques. Enfin, bon nombre des critères des grilles sont de type implicite ; ils prennent forme par les échanges et le consensus et sont difficilement identifiables par un observateur externe. Malgré ces limites, cette opérationnalisation de la réflexivité sous forme d’indices langagiers se révèle concluante. Des indicateurs langagiers ont pu être identifiés pour chacune des catégories réflexives des grilles. L’étude empirique de validation a pu montrer que les passages cotés réflexifs par les grilles sont bien caractérisés par la présence d’indices
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langagiers. Ces derniers peuvent ainsi être considérés comme des critères tangibles de la réflexivité. Notre projet de construction d’une grille d’analyse linguistique et transthéorique de la conscience réflexive du psychothérapeute peut donc se poursuivre en s’appuyant sur les résultats obtenus dans cette étude. La mise en forme du futur instrument devrait être réalisée à partir de trois éléments : • les indicateurs extraits et validés au cours de cette étude empirique (Annexe 2) ; • les données conceptuelles sur la conscience réflexive (issues des manuels des grilles utilisés dans cette étude et d’une revue de la littérature sur le concept) ; • un modèle linguistique–pragmatique des étatsmetnaux dans le discours (Annexe 1 ; Lamboy, 1998). Les trois listes d’indicateurs langagiers (Annexe 2) seront mises en commun. Les indicateurs communs seront ensuite associés aux différentes dimensions et variables du concept. Au final, ce travail devrait donner lieu à la construction de la grille d’analyse de la conscience réflexive du thérapeute (GACRT). Cette dernière devrait être constituée de trois parties : • le modèle opérationnel de la conscience réflexive précisant les différentes dimensions du concept et les mettant en lien avec les indicateurs langagiers ; • une procédure de codage ; • une feuille de codage. Tableaux 1–7.
Annexe 1. Les états mentaux dans le discours : un modèle linguisticopragmatique Les états mentaux du point de vue de la référence Formes linguistiques renvoyant aux états mentaux Les types de forme : – substantif d’attitude (E.g. : colère, idée...) – adjectif subjectif (E.g. : calme, conscient...) – adverbe subjectif (E.g. : amoureusement...) – verbe d’attitude (E.g. : croire, sentir...) – pronom démonstratif ou personnel (E.g. : ça, il...)
Analyse prédicative des états mentaux (Costermans, 1998 ; Hoc et Almalberti, 1999)a a. Découpage en proposition b. Le prédicat = la forme linguistique renvoyant au concept d’état mental (au sein de la proposition) c. Les arguments = les concepts associés au concept d’état mental (au sein de la proposition) – agent : le sujet qui vit l’état mental – lieu : l’endroit où se passe l’état mental – etc...
Les types d’états mentaux : – cognition – émotion – volition – impression–sensation – évaluation Les éléments associés : – références indicatives : indices d’ostension (ici...), déictiques temporels (maintenant...), déictiques de locution (je...) – temps verbal – modalisation d’intensité et de négation – discours rapporté – discours interrogatif a « En logique, une proposition est un agencement de deux ou plusieurs concepts dans lequel un seul joue le rôle de prédicat, et ou l’autre ou les autres jouent le rôle d’arguments (...) Le prédicat désigne une propriété (...) et l’argument représente alors l’entité à laquelle on assigne cette propriété » (Costermans, 1998 : 142). E.g. : jaune (prédicat) / canari (argument).
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Les états mentaux du point de vue de la modalité Les modalisateurs verbaux Définition : verbes d’attitude pouvant être conjugués à la 1re personne du singulier et subordonnant une proposition complétive ou infinitive. E.g. : je sentais que j’étais inquiète. Deux types d’états mentaux distingués : –l’attitude propositionnelle (je sentais que) –le contenu propositionnel : (j’étais en colère)
Le type de modalisateur 1. Modalisateurs d’assertion : verbes d’attitude qui visent à préciser la valeur de vérité de la proposition subordonnée et non pas à décrire un état mental. E.g. : je crois que... j’ai l’impression que... 2. Modalisateurs d’expression : verbes d’attitude décrivant un état mental. E.g. : j’ai rêvé que ...
Les états mentaux du point de vue de l’illocutoire Les types d’actes illocutoires dans lesquels s’inscrivent les état mentaux 1. Acte assertif –but illocutoire : engager la responsabilité du locuteur sur l’existence d’un état de chose qui est en l’occurrence un état mental. –l’état psychologique associé : la croyance E.g.. : au début de l’entretien, je pensais à mon client précédent. 2. Acte expressif –but illocutoire : exprimer un état mental. –l’état psychologique associé : celui qui est manifesté pas le but illocutoire E.g. : je sens de la colère monter en moi.
Annexe 2. Les indicateurs langagiers de la conscience réflexive Indicateurs réflexifs de la GAC Indicateurs langagiers d’états mentaux retenus Toutes les formes langagières renvoyant aux états mentaux (verbes, noms, adjectifs, adverbes référant explicitement aux cognitions, émotions, volitions, sensations ou impressions) et ayant comme argumenta agent le sujet locuteur. E.g. : j’ai du plaisir à la revoir. E.g. : j’ai été surprise mais j’ai quand même continué
Indicateurs langagiers d’états mentaux éliminés 1. État mental d’évaluation E.g. : C’est difficile... 2. Modalisateurs d’assertion E.g. : je pense que... ; je sens que... 3. Propositions négatives E.g. : je ne me sens pas en colère.
Indicateurs réflexifs de l’ES Indicateurs langagiers d’états mentaux retenus Toutes les formes langagières renvoyant aux états mentaux (idem GAC ) et ayant comme argument agent le sujet locuteur et étant reprises dans une des propositions suivantes et étant au sein d’un acte illocutoire expressif E.g. : je ressens de la satisfaction ; ce sentiment me redonne confiance en moi.
Indicateurs langagiers d’états mentaux éliminés 1. État mental d’évaluation 2. Modalisateurs d’assertion 3. Temps des verbes au passé 4. État mental de rêve (éveillé)
Indicateurs réflexifs de la GEVA Indicateurs langagiers d’états mentaux retenus Toutes les formes langagières renvoyant aux états mentaux (idem GAC ).
Indicateurs langagiers d’états mentaux éliminés 1. État mental d’évaluation 2. Modalisateurs d’assertion 3. État mental de cognition (sauf rêve et action mental) E.g. : imaginer, pensée, intellectuellement... 4. Formes génériques E.g. : affect, sensation... 5. Intensité très forte E.g. : triste à en mourir... Toutes les formes langagières renvoyant aux états mentaux de façon symbolique. E.g. : je suis en ébullition. a Il s’agit d’un codage de type argument-prédicat : « d’une façon générale, le prédicat est un concept de propriété ou de relation, et les arguments sont des entités du monde physique ou de l’univers cognitif auxquelles cette propriété ou cette relation sont appliquées » (Costermans, 1998 : 142). Dans notre cas, la propriété désigne (le terme renvoyant à ) l’état mental. Les arguments représentent les entités (ou temes) qui sont associées d’une façon ou d’une autre à cet état mental.
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Annexe 3. Le test de la loi hypergéométrique : l’identification des modalités caractéristiques d’une classe d’individus La méthode utilisée est celle qui est programmée dans le logiciel Spad (commande Demod). Par une suite de comparaisons deux à deux, elle identifie les modalités qui sont caractéristiques de la classe d’individus que l’on désire décrire. Pour ce faire, elle analyse la fréquence observée de chacune des modalités dans la classe étudiée en calculant la probabilité de retrouver une proportion identique ou plus élevée dans un échantillon aléatoire qui aurait la même taille que la classe étudiée et qui serait prélevé sans remise de la banque de données. Lorsque la probabilité obtenue est suffisamment faible, on peut conclure que la modalité est sur représentée dans la classe étudiée et qu’elle caractérise les individus qui la composent. Illustrons le principe par un exemple ; voyons pourquoi la modalité « avec » de la variable « indice langagier » peut être déclarée caractéristique des propositions qui sont cotées « réflexif » par la GEVA. En parcourant le tableau des données, on peut dénombrer : t = 1740 l’effectif total des propositions f = 127 l’effectif des propositions « réflexif » e = 330 l’effectif des propositions « avec indice langagier » ef = 44 l’effectif des propositions « réflexif », « avec indice langagier » On peut représenter ces résultats dans un tableau de contingence binaire : GEVA Non-réflexif Réflexif Réflexif (partiel 2) Réflexif (partiel 1) TOTAL
Ainsi, si e
=
330
ef f
=
SANS Indice langagier 1228 28 9 145 1410
99 127
AVEC Indice langagier 107 99 5 119 330
TOTAL 1335 127 14 264 1740
= 0,7795 est suffisamment éloigné de
= 0,1896, on peut considérer qu’il y a surabondance
t 1740 d’indices langagiers dans les propositions identifiées réflexives. Nous pourrions affirmer que les indices langagiers sont sur-représentés dans les propositions réflexives. Pour mesue ef et , nous calculons la probabilité rer la distance entre f t d’obtenir un résultat supérieur à f, si on extrait f éléments avec remise d’une population de taille t quand la proportion e de succès est de . Si cette probabilité est inférieure à une t probabilité préfixée (erreur de première espèce souvent posée à 0,05), on considère qu’il est peu probable qu’il y ait indépendance entre les deux modalités (proposition réflexive et présence d’indices langagiers).
Si X suit une loi hypergéométrique
冊
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冉
t = 1740;f =
e 330 127; = où X représente le nombre de succès obtenu t 1740 et si on tire sans remise 127 éléments d’une population de taille 1740, quand le nombre de succès dans la population est de 330, X peut prendre une valeur x comprise entre 0 et 127.
兵
其
127
P X ≥ 99 = 兺
x−99
冉 冊冉 冊 冉 冊 330
1740 − 330
x
127 − x
1740 127
兵
其
P X ≥ 99 < 0, 000000000000185 Comme 0,000000000000185 < 0,05 la présence d’indices langagiers caractérise les propositions réflexives. Pour simplifier l’interprétation, on peut remplacer P{X ≥ 99} par 14,78 que l’on appelle valeur test et qui est calculée de la façon suivante : si Z suit une loi Normale (0,1) P(Z > 14,78) = P (X > 99), on peut dire qu’une modalité est significative si sa valeur test est supérieure à 1,65 car P{Z > 1,65} = 0,05 (a = 0,05). Plus une modalité a une valeur test élevée (éloignée de 1,65), plus elle est caractéristique de la classe. De la même façon qu’une modalité peut être caractéristique d’une classe parce qu’elle y est sur-représentée, elle peut être caractéristique de la classe parce qu’elle y est sousreprésentée. Pour indiquer ce phénomène, la valeur test est précédée d’un signe négatif. Il faut cependant faire attention lors de l’interprétation de la valeur test. Il s’agit d’un indicateur descriptif et non d’un test d’hypothèse, cela même si le calcul est identique. Dans un test d’hypothèse, on compare les résultats d’un échantillon avec la valeur hypothétique d’un paramètre de la population. Dans le cas descriptif, on compare une classe de l’échantillon à l’échantillon complet.
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