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ANNFAR-5185; No. of Pages 2 Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation xxx (2013) xxx–xxx
E´ditorial
Mal-eˆtre chez les anticoagulants directs oraux New oral anticoagulants and emergency procedures
I N F O A R T I C L E
Mots cle´s : Anticoagulants directs oraux Dabigatran Rivaroxaban Apixaban Anesthe´sie Urgence He´morragie Keywords: New oral anticoagulants Dabigatran Rivaroxaban Apixaban Anesthesia emergency Haemorrhage
Inhibiteurs directs de l’activite´ IIa (dabigatran) ou Xa (rivaroxaban, apixaban), les nouveaux anticoagulants oraux (Naco) ou anticoagulants oraux directs (Ado) le sont aussi, a` certains e´gards, de l’enthousiasme initial provoque´ par leur de´veloppement explosif re´cent. Destine´s a` remplacer les antivitamines K (AVK) dans leurs indications « cardiovasculaires », ils ont initialement e´te´ mis sur le marche´ dans la thromboprophylaxie en orthope´die pour la prothe`se totale de hanche et de genou. Les re´sultats obtenus dans la pre´vention des accidents ische´miques dans la fibrillation atriale non valvulaire (dabigatran, rivaroxaban, apixaban), la pre´vention apre`s syndrome coronarien aigue¨ (rivaroxaban) et le traitement curatif des thromboses veineuses et des embolies pulmonaires (rivaroxaban) ont emporte´ l’adhe´sion des prescripteurs me´dicaux. L’argumentaire de´veloppe´ face aux AVK paraissait solide : non infe´riorite´ ou supe´riorite´ en termes d’efficacite´ et de tole´rance, absence de controˆle de l’he´mostase ne´cessaire. Cependant, la description d’accidents he´morragiques graves faisant suite a` la mise sur le marche´ a freine´ l’enthousiasme initial et mis en exergue quelques questions qui auraient me´rite´ d’eˆtre anticipe´e telles que : comment appre´cier le niveau d’anticoagulation d’un patient en cas d’he´morragie ? Comment ge´rer ou pre´venir la survenue d’un accident he´morragique ? En avril 2012, l’Agence nationale de se´curite´ du me´dicament et des produits de sante´ (ANSM), confronte´e a` ces signalements d’accidents he´morragiques graves a e´dite´ un point d’information dont l’objectif e´tait de rappeler les pre´cautions d’emploi
s’attachant a` ces nouveaux me´dicaments [1]. Parmi les points souligne´s des facteurs de risque de surdosage tels que l’aˆge supe´rieur a` 75 ans, le petit poids et l’insuffisance re´nale, l’absence de test spe´cifique valide´, l’absence d’antidote ou de traitement correcteur en cas d’he´morragie ou d’acte interventionnel re´alise´ en urgence, les disparite´s de prescription entre les me´dicaments et leur dosage e´taient releve´es. La gestion pe´riope´ratoire des NACO ou ADO dans le cadre d’un acte interventionnel rejoint de`s lors la pre´occupation de celle des AVK. Elle s’en diffe´rencie ne´anmoins sensiblement dans le contexte de l’urgence, notamment car : le seuil he´mostatique n’est pas connu (contrairement au seuil d’INR < 1,5 compatible avec la chirurgie chez un patient sous AVK) ; les tests d’he´mostase classiques sont perturbe´s sans que l’on puisse e´tablir une corre´lation avec le degre´ d’anticoagulation et qu’il n’existe pas de dosages spe´cifiques permettant d’appre´hender le niveau d’impre´gnation du patient ; les agents de re´version teste´s (concentre´s de complexe prothrombinique active´ ou non active´, Facteur VII recombinant active´. . .) n’ont pas fait la preuve de leur efficacite´ chez l’homme [2,3]. La prise de conscience des difficulte´s inhe´rentes a` l’emploi de ces me´dicaments a rapidement mobilise´ le monde de l’anesthe´siere´animation et des experts de l’he´mostase, re´unis au sein de groupes d’experts tels le Groupe d’inte´reˆt en he´mostase pe´riope´ratoire (GIHP) pour proposer une strate´gie de prise en charge de ces patients dans un contexte interventionnel programme´ [4] et e´galement urgent comme de´taille´ par Pernod et al., dans ce nouveau nume´ro des Annales franc¸aises d’anesthe´sie et de re´animation [5]. Les propositions faites reposent sur les donne´es actuelles de la litte´rature en s’appuyant sur un principe de le´gitime prudence. Elles sont susceptibles d’eˆtre e´taye´es par des avance´es dans le domaine de l’exploration de l’he´mostase (tests spe´cifiques) et de la recherche d’agents de re´version rapide spe´cifique. Elles e´volueront e´galement a` la lumie`re des progre`s des connaissances cliniques e´valuant des parame`tres essentiels tels que la variabilite´ pharmacocine´tique et pharmacodynamique, les interactions me´dicamenteuses ou encore les effets secondaires dans des populations spe´cifiques pas ou peu concerne´s par les e´tudes cliniques ayant fonde´e le de´veloppement des indications de ces me´dicaments. Toutes ces questions n’ont rien de surprenant, car elles se posent ou se sont de´ja` pose´es pour de tre`s nombreux me´dicaments ˆt [6]. Cette recherche avance et n’est pas encore aboutie et son cou
0750-7658/$ – see front matter ß 2013 Socie´te´ franc¸aise d’anesthe´sie et de re´animation (Sfar). Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.07.795
Pour citer cet article : Mertes PM, Sirieix D. Mal-eˆtre chez les anticoagulants directs oraux. Ann Fr Anesth Reanim (2013), http:// dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.07.795
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n’est pas e´value´ [7,8]. Elle interpelle sur une politique de de´veloppement du me´dicament qui n’a pas anticipe´ la gestion de potentiels effets secondaires, et n’a pas mis en place de plan de surveillance post autorisation adapte´, alors que tant de questions restaient non re´solues. Il paraıˆt difficile de nos jours de concevoir que l’injonction de retarder « au maximum » l’acte envisage´ repre´sente la recommandation princeps e´nonce´e dans les propositions des groupes d’experts [9]. Cette situation renforce la ne´cessite´ de la de´finition de politiques structure´es de mise en œuvre des traitements anticoagulants au sein de nos e´tablissements, prenant en compte l’arrive´e de ces nouveaux me´dicaments [10]. Enfin, elle vient nous rappeler, s’il en e´tait besoin, l’importance de l’implication de tous dans une politique de pharmacovigilance dont la ne´cessite´ nous a encore e´te´ rappele´e dans une actualite´ tre`s re´cente. Ne´anmoins, le contenu de l’article publie´ dans ce nume´ro, devrait eˆtre de nature a` aider les anesthe´sistes-re´animateurs a` ge´rer la prise en charge de l’urgence chirurgicale des patients recevant ces traitements. Il e´tait important, pour ne pas dire « urgent », d’avancer sur le terrain de la gestion de nos Ados, ce premier pas est fait. De´claration d’inte´reˆts
[3] Siegal DM, Crowther MA. Acute management of bleeding in patients on novel oral anticoagulants. Eur Heart J 2013;34:489b–98b. [4] Sie P, Samama CM, Godier A, Rosencher N, Steib A, Llau JV, et al. Chirurgies et actes invasifs chez les patients traite´s au long cours par un anticoagulant oral anti-IIa ou anti-Xa direct : propositions du Groupe d’inte´reˆt en he´mostase pe´riope´ratoire (GIHP) et du Groupe d’e´tudes sur l’he´mostase et la thrombose (GEHT). Ann Fr Anesth Reanim 2011;30:645–50. [5] Pernod G, Albaladejo P, Godier A, Samama CM, Susen S, Gruel Y, et al. Prise en charge des complications he´morragiques graves et de la chirurgie en urgence chez les patients recevant un anticoagulant oral anti-IIa ou anti-Xa direct. Propositions du Groupe d’inte´reˆt en he´mostase pe´riope´ratoire (GIHP). Ann Fr Anesth Reanim 2013;32. http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.04.016. [6] Demoly P, Mertes M, Moneret-Vautrin AD, Michel FB. Contribution of epidemiology to the prevention of drug allergies. Bull Acad Natl Med 2011;195:1335–42 [discussion p. 1342–4]. [7] Lu G, DeGuzman FR, Hollenbach SJ, Karbarz MJ, Abe K, Lee G, et al. A specific antidote for reversal of anticoagulation by direct and indirect inhibitors of coagulation factor Xa. Nat Med 2013;19:446–51. [8] Schiele F, van Ryn J, Canada K, Newsome C, Sepulveda E, Park J, et al. A specific antidote for dabigatran: functional and structural characterization. Blood 2013;121:3554–62. [9] Heidbuchel H, Verhamme P, Alings M, Antz M, Hacke W, Oldgren J, et al. European Heart Rhythm Association Practical Guide on the use of new oral anticoagulants in patients with non-valvular atrial fibrillation. Europace 2013;15:625–51. [10] Smythe MA, Fanikos J, Gulseth MP, Wittkowsky AK, Spinler SA, Dager WE, et al. Rivaroxaban: practical considerations for ensuring safety and efficacy. Pharmacotherapy 2013;26. http://dx.doi.org/10.1002/phar.1289.
P.M. Mertesa,*b, D. Sirieixa,b Service d’anesthe´sie-re´animation chirurgicale, Nouvel hoˆpital civil, hoˆpitaux universitaires de Strasbourg, 1, place de l’Hoˆpital, BP 426, 67091 Strasbourg cedex, France b Groupe des anesthe´sistes-re´animateurs de l’hoˆpital prive´ d’Antony (GARHPA), 1, rue Velpeau, 92160 Antony, France a
Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Les nouveaux anticoagulants oraux dabigatran et rivaroxaban dans la fibrillation auriculaire ce qu’il faut savoir. Point d’information. Dernier acce`s 03-072013. www.ansm.sante.fr. [2] Miesbach W, Seifried E. New direct oral anticoagulants: current therapeutic options and treatment recommendations for bleeding complications. Thromb Haemost 2012;10:625–32.
*Auteur correspondant Adresse e-mail :
[email protected] (P.M. Mertes)
Pour citer cet article : Mertes PM, Sirieix D. Mal-eˆtre chez les anticoagulants directs oraux. Ann Fr Anesth Reanim (2013), http:// dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.07.795