Rev. E.E.G. NeurophysioL, 1985, 15:267-278 © Elsevier, Paris
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NEUROPATHIE A TOMACULA. ETUDE ELECTROPHYSIOLOGIQUE A. LAGUENY*, M.M. DELIAC*, A. VITAL**, X. FERRER*, J.L. LARRIEU*, C. VITAL** et J. JULIEN* *Service de Neurologie, H6pital du Haut-L~v6que, Avenue de Magellan, F-33604 Pessac Cedex et **Service d~natomopathologie, H6pital Pellegrin, Place Am~lie-Raba-L6on F-33076 Bordeaux Cedex
SUMMARY
Tomaculus neuropathy: an electrophysioiogical study In two cases with recurrent palsies, the results o f electrophysiological studies led to nerve biopsy showing typical tomacula. The first case was an inherited neuropathy with liability to pressure palsies. The second case was an apparently sporadic painless recurrent brachial neuropathy. Electrophysiological alterations were diffuse and sensory fibres o f the median nerve between index and wrist were the most involved. Conduction blocks were observed without palsy in narrow anatomical passageways where nerve compressions are frequent (ulnar nerve at the elbow, peroneal nerve at the fibula). A compression by a neighbouring anatomical structure could make the prognosis worse and justify nerve decompression. The nerves with slowest conduction have the most important risk o f palsy and the patients should be given advice to avoid their compression.
RtSUM~ Dans 2 cas de paralysies r6cidivantes, les r6sultats des examens 61ectrophysiologiques firent pratiquer une biopsie nerveuse montrant des tomacula typiques. Le ler cas 6tait une neuropathie h6r6ditaire avec hypersensibilit~ fi la pression, le second une paralysie r6cidivante non douloureuse du plexus brachial en apparence sporadique. L'atteinte 61ectrophysiologique 6tait diffuse, les fibres sensitives du nerfm~dian entre l'index et le poignet les plus touch~es. Des blocs de conduction 6taient observ6s en l'absence de paralysie au niveau des d~fil6s anatomiques off les compression nerveuses sont les plus fr6quentes (neff cubital au coude, sciatique poplit6 externe an col du p6ron6). Une compression par une structure anatomique de voisinage peut aggraver le pronostic et justifier une d6compression chirurgicale. Le risque de paralysie est plus grand au niveau des nerfs o~ les vitesses de conduction sont les plus ralenties et des conseils doivent ~tre donn6s aux patients pour 6viter d'exposer ces nerfs fi la compression.
INTRODUCTION BEHSE et al. (1972) rapport6rent dans une 6tude 61ectrophysiologique et histopathologique de neuropathies h6r~ditaires avec hypersensibilit6 ~ la pression, une 16sion du nerf p6riph6rique d'un type particulier rdalisant sur la pr6paration des fibres dissocides (teasing) une dilatation focalis6e de la my61ine en forme de saucisse qu'ils d6nomm6rent <~. En 1975, MADRID et BRADLEY, /t propos de 4 observations, firent une 6tude d6taill6e de cette modification my61inique qu'ils appelarent tomaculum (en latin tomaculum signifie saucisse) d6finissant ainsi la <>. Enfin, la pr6sence de toma-
Tir6s-~-part: A. Lagueny A l'adresse ci-dessus. Texte regu le 7 mars 1985; accept6 le 16 septembre 1985.
cula correspond dans la classification descriptive des fibres dissocides de DYCK et al. (1984) /t ce que ces auteurs appellent la condition G. Nous rapportons une 6tude 61ectrophysiologique de 2 patients chez lesquels la biopsie nerveuse montrait la presence de tomacula typiques.
O B S E R V A T I O N S CLINIQUES Cas 1 : Monsieur C. Ph., n6 le 28.12.1965, pr6senta l'fige de 8 ans un d6ficit du membre sup6rieur gauche un matin au r6veil, r6gressif en une semaine environ. Un 6pisode identique survint fi l'fige de 12 ans. A l'gtge
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de 17 ans apparut sans cause pr6cise un d6ficit sensitivomoteur dans le territoire du nerf cubital droit. L'examen pratiqu6 trois mois apr6s le d6but mit en 6vidence une atrophic des muscles interosseux, un d6ficit des muscles de la main innerv6s par le cubital avec 6bauche de griffe cubitale, une hypoesth6sie du bord cubital de la main. Les r6flexes achill6ens ~taient abolis. On notait des pieds creux. L'6volution clinique et les r6sultats du bilan 61ectrophysiologique firent poser l'indication d'une neurolyse du nerf cubital au niveau du coude. ~Le nerf6tait comprim6 par un petit anneau de striction au niveau de l'arcade du cubital ant6rieur)r (Pr. Ag. DURANDEAU).Le d6ficit r6cup6ra en trois mois apr6s l'intervention. A l'fige de 18 ans, il pr6senta une paralysie des releveurs du pied droit apr~s atre rest6 endormi pendant une heure les jambes crois6es. Dans sa famille, sa m6re prdsenta un 6pisode de d6ficit transitoire de la ceinture scapulaire gauche, sans cause apparente. Son oncle maternel pr6senta un 6pisode identique apr~s ~
radiographique du rachis cervical: radiographies simples, tomographies, my61ographie par vole sous occipitaleomontraient une arthrose cervicale au niveau C5-C6, C6-C7 ~t droite, sans retentissement sur la mo~lle. Un premier examen ~lectrophysiologique 6tait effectu6 le 01.06.1983. Le patient 6tait revu deux mois plus tard, la r6cup6ration clinique 6tait presque compl6te avec seulement une discr6te diminution de la force de pr6hension au niveau de la main droite par rapport ~t gauche. Les ar6flexies pr6c6demment constat6es persistaient. Aucun membre de sa famille n'avait pr6sent6 d'6pisode de paralysie. Mais aucun n'a pu ~tre examin6 cliniquement et 61ectrophysiologiquement.
BILAN E L E C T R O P H Y S I O L O G I Q U E MOthode." Les bilans 61ectrophysiologiques ont 6t6 r6alis6s ~t l'aide d'un appareil Medelec mod61e MS6, des aiguilles coaxiales bifilaires utilis6es pour l'61ectromyographie. L'6tude des vitesses de conduction motrice (VCM) a comport6 la recherche de blocs de conduction en utilisant la m6thode de l'Index M propos6 par OLNEY et MII~I~ER (1984) et la vitesse proximale 6tudi6e par la technique de l'onde F. Les mesures de vitesses de conduction sensitive (VCS) ont 6t6 faites de fagon orthodromique avec recueil des potentiels d'action sensitifs (PAS) par 61ectrodes de surface. Chez le patient 1 ont ~t~ effectu~es l'6tude des rdflexes trijdmino-facial et masseterin, et celle des potentiels 6voqu6s du tronc c6r6bral (PEATC). Les examens 61ectrophysiologiques ont 6t6 effectu6s, pour le premier patient lors de la paralysie cubitale (23.02.83) et ~t distance d'un 6pisode d6ficitaire (28.01.85), et pour le deuxi~me patient, lors de la deuxi6me paralysie brachiale droite (01.06.83) et 7 semaines plus tard.
RESULTATS Patient 1 (Tableau I) ler examen - - 61ectromyogramme: Lors de l'effort maximum (EF-Max) les trac6s 6taient de type simple avec potentiels de fibrillation au repos dans les muscles ler interosseux dorsal et adducteur du V6me doigt droits, et interm6diaires dans les autres territoires explor6s. Les potentiels d'unit6 motrice (UM) 6taient de dur6e augment6e. Les VCM 6talent ralenties sur le nerf cubital droit au coude avec bloc partiel de conduction de 60~o et 6galement au niveau du SPE droit. Les latences distales 6taient augment6es. La VCS 6tait
NEUROPATHIE A TOMACULA ralentie au niveau du nerf sural droit. 26me examen: les trac6s 6taient interm6diaires dans tousles muscles explor6s (EF-Max). Les VCM 6taient ralenties sur le nerf cubital droit au coude et au niveau du membre inf6rieur droit. Les latences distales 6taient augment6es. Le ralentissement des VCS 6tait plus marqu6, surtout sur le nerf m6dian droit entre les doigts et le poignet. I1 n'y avait pas d'atteinte au niveau des nerfs cr~niens et du tronc c6r6bral sur les tests 61ectrophysiologiques effectu6s au niveau de la face. Patient2 (Tableau II) ler examen - - 61ectromyogramme (EF-Max). Les trac6s 6taient interm6diaires au niveau des membres sup6rieurs et simples au niveau des membres inf6rieurs. Les potentiels d ' U M 6talent de dur6e augment6e et certains de grande amplitude au niveau des membres inf6rieurs. I1 y avait un ralentissement des VCM sur les nerfs cubitaux aux coudes et au niveau des membres inf6rieurs. Les latences distales 6taient augment6es. I1 n'y avait pas de potentiel sensitif isolable sur le nerf m6dian droit au poignet. 26me examen: l'aspect 61ectromyographique 6tait comparable au pr6c6dent - les vitesses de conduction restaient ralenties avec un ralentissement de la vitesse motrice proximale (onde F). U n PAS 6tait obtenu sur la branche superficielle du neff radial 5 cm au dessus du poignet par stimulation de la face dorsale du pouce avec une VCS ralentie.
ETUDE HISTOPATHOLOGIQUE Chez les deux patients, la biopsie a port6 sur la branche superficielle du nerfmusculo-cutan6 et sur un fragment du muscle court p6ronier lat6ral au tiers inf6rieur de jambe. ler patient (07.06.83) - - microscopie optique: pas de modification des fibres musculaires ni de l'616ment interstitiel. Nerf: pas de modification de l'616ment interstitiel. -Fibres dissoci6es (Fig. 1): certaines fibres montrent l'absence compl6te de my61ine entre deux nmuds de Ranvier, r6alisant des images typiques de d6my61inisation segrnentaire (16sion C de la classification de DYCK et al., 1984), sur certaines fibres existent des images de segments de my61ine beaucoup trop 6pals, r6alisant des images typiques de tomacula (16sion G). - - Coupes ultra-fines: la rar6faction des fibres my61inis6es est discr6te et on rencontre assez fr6quemment des images d'hypermy61inisation r6alisant des aspects caract6ristiques de <> tels qu'on les rencontre dans les neuropathies par compression d'origine familiale (Pr. Ag. J.M.
VALLAT).
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FIG. 1 . - Illustration des aspects histologiques. En haut (cas 1): fibre dissoci6e montrant un tomaculum typique (16sion de type G) avec d6my61inisation segmentaire associ6e (16sion de type C). En bas (cas 2), ~tgauche: section semi-fine de 2 faseieules: certaines fibres my61inis6esont une gaine de my61ine anormalement 6paisse, d'autres ont une gaine de my61ine fine en faveur d'une remy61inisation; pr6sence de 2 corps de Renaut (fl~ches); ~t droite: Histogramme montrant la distribution des fibres my61inis6es en fonction du diam6tre en #m. Above (case 1): single teased fibre showing a typical tomaculum associated with segmental demyelination. Below (case 2), on left: semithin section of two fasciles: some myelinated ftbres have an abnormally thick myelin sheath, others have a thin myelin sheath infavour of remyelination. Presence of 2 Renaut's bodies (arrows); on right: histogram showing the distribution of myelinated fibre diameters (l~m).
2dmepatient ( 0 4 . 0 6 . 8 3 ) - microscopie optique: pas de modification des fibres musculaires ni de l'616ment interstitiel. Nerf: pas de modification de l'616ment interstitiel. - - C o u p e s semi-fines transversales: rar6faction des fibres my61inis6es avec perte en fibres de grande taille et gaines de my61ine parfois trop 6paisses par rapport au calibre de la fibre, on note la pr6sence de corps de Renaut dans l'endon6vre proche du p6rin6vre (Fig, 1). -Morphom6trie (Fig. 1): l'histogramme des fibres my61inis6es montre une perte de la distribution bimodale normale par diminution des fibres de diam6-
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FIG. 2. Microscopic 61eetronique: aspects caract~ristiques de tomacula. En haut (cas 2): epaississement asym&rique consid6rable par apposition excentrique de replis redondant de la gaine de my61ine. En bas, aspect de boucle redondante interne (barre horizontale 1 #m). -
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Above (ease 2): Enormous asymmetrical thickening by eccentric apposition of redundant foldings of myelin sheath. Below: aspect of internal redundant loop (horizontal bar 1 #rn).
tre 61ev6 avec un pic ~t 4 #, la densit6 des fibres my61inis6es est de 6483 fibres/ram 2, inf6rieure aux valeurs du t6moin 12670 fibres/ram 2. Coupes ultra-fines: les fibres my61inis6es sont fr6quemment modifi6es, parfois leur gaine de my61ine est beaucoup trop fine pour la taille de l'axone, ce qui correspond gt une remy61inisation. D'autres fois, la gaine de my61ine est nettement trop 6paisse. Les lamelles de my61ine sont alors soit dispos6es r6guli6rement et en de trop nombreux enroulements, soit forment des arrangements irr6guliers (Fig. 2). Certaines des fibres dont la my61ine est modifi6e sont entour6es par une ~ deux couches de prolongement schwanien aplati. De plus existent de rares images de clusters des fibres my61inis6es. Les fibres amy61ini-
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ques sont le plus souvent normales. L'616ment interstitiel n'est pas modifi6. Conclusion: ces anomalies correspondent ~t une ~tomaculus neuropathy)). COMMENTAIRE L'association: fragilit~ nerveuse ~ la pression, ralentissement des vitesses de conduction nerveuse, pr6sence de tomacula, pr6sent6e par nos 2 patients, est retrouv6e dans les descriptions faites ees derni6res ann6es coneernant la neuropathie h6r6ditaire avec hypersensibilit6 ~tla pression. La premi6re description est celle de DEJONG en 1947 et nous avons r6uni 28 publications comparables rapport6es parfois sous des
NEUROPATHIE A TOMACULA titres diffErents: DEJONG (1947), DAVIES (1954), WAHLE et TONNIS (1958), EARL et al. (1964), STAAL etal. (1965), MAYER et GARCIA-MULLIN (1968), MATIAR-VAHAR et ROHRER (1970), BEHSE etal. (1972), Ross et THYSGEN (1972), LHERMITTE et al. (1973), GROSSIORD etaL (1973), GORKE (1974), ATTAL et aL (1975), CASTAIGNE et aL (1976), CRUZ MARTINEZ et aL (1977), VAN VENSEN et aL (1977), R o u s SEAUX(1978 ), DUBI et aL (1979), HERLICOVIEZ et aL (1979), BOSCH et aL (1980), DEBRUYNE et aL (1980), EBNER et aL (1981), JEDREJOWSKA et HAUSMANOWA-PRETRUSEWICZ (1981), STRENGE etaL (1982), MEIER et MOLL (1982), TROCKEL et al. (1983 ), ROTH et MAGISTRIS (1984), WINDEBANK (1984). C'est une affection rare, la plupart des descriptions proviennent d'Europe. MEIER et MOLL en 1982 ne relevaient aucune observation australienne ou japonaise et nous n'en avons pas eu connaissance depuis. Les premieres paralysies apparaissent habituellement au cours de la deuxi~me ou troisiEme decade avec des extremes de 4 ans (Ross et THYSGEN, 1972) et 65 arts ( S T ~ L et aL, 1965); rappelons le debut prEcoce chez notre premier patient: 8 ans. Les nerfs les plus souvent atteints sont ceux les plus soumis aux compressions. L'atteinte du neff sciatique poplit6 externe est la plus frEquente, 40 ~o pour CRUZ MARTINEZ etal. (1977), 35~o pour MEIER et MOLL (1982). Celles du nerf cubital, du radial, du plexus brachial, du median, des nerfs digitaux, du tronc du sciatique viennent ensuite par ordre de frgquence. L'atteinte des nerfs crfi.niens est exceptionnelle, celle du V, apr~s compression 16g~re, la plus classique (DAVIES, 1954, STAALet al., 1965, GORKE, 1974). Des associations avec des atteintes du VI, du VII et du VIII ont 6tE rapportEes (STAALet aL, 1965; CASTAIGNE et aL, 1976; ROUSSEAUX, 1978; HERLICOVIEZ et al, 1979). La guErison sans sEquelle et la rEcidive sont deux caract+ristiques de cette affection, mais la rEpEtition d'un deficit dans le mSme territoire peut aboutir ~t des sEquelles permanentes. Les douleurs sont habitueUement absentes, mais elles ont 6t6 signalees (MEIERet MOLL,1982; R o s s et THYSGEN,1972); TROCKEL et al. (1983) ont rapport6 5 observations d'une mEme famille dont celles de 3 patients prEsentant des douleurs abdominales ~t l'effort. La constatation d'une arEflexie achiUEenne bilatErale n'est pas rare et tEmoigne du caractEre diffus de la neuropathie. Le tableau clinique peut Etre celui d'une neuropathie diffuse dans les formes les plus 6voluEes ou prendre l'aspect trompeur d'une neuropathie progressive des membres infErieurs comme chez 3 patients de plus de 50 ans rapportEs par EARL et a l e n 1964. La presence de pieds creux (patient 1) a 6t6 signalEe dans quelques
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cas et 5 patients sur 6 dans l'Etude de GORKE en 6taient porteurs. Le liquide cEphalo-rachidien est le plus souvent normal, cependant une hyperprotEinorachie peut Etre observEe ( D u m et al., 1979). Bien que Ross et THYSGEN (1972), dans une Etude portant sur 5 gEnErations aient envisage la possibilit6 d'une transmission liEe au chromosome X, le mode autosomique dominant est actuellement bien admis et notre premier patient entre dans ce cadre. Pour STAAL et al. (1965), la pEnEtrance serait plus faible chez la femme que chez l'homme. La possibilit6 d'une forme sporadique dEj~t envisagEe (MAYER, 1975; CASTAIGNE et al; 1976) peut Etre 6voquEe chez notre deuxiEme patient, mais l'absence d'examen clinique et 6lectrophysiologique d'autres membres de la famille, ne permet pas d'Etre affirmatif. Les ~tudes ~lectrophysiologiques
Les 61ectromyogrammes montraient chez nos 2 patients des traces neurogSnes dans les muscles dEficitaires et non dEficitaires. Les activitEs spontanEes de dEnervation semblent assez rares, cependant CRUZ MARTINEZ et al. (1977), trouvErent de la fibrillation dans des muscles cliniquement indemnes. La principale anomalie 61ectrophysiologique est le ralentissement des vitesses de conductions. EARL etal. (1964) montr+rent les premiers l'intEr& de l'Etude des vitesses de conduction chez ces patients et les membres indemnes de leur famille pour le dEpistage des formes purement 61ectrophysiologiques. L'Etude des VCM montre un ralentissement dans l'ensemble modErE. I1 prEdomine ~ la fois fi, la partie distale des nerfs avec augmentation des latences distales, au niveau des membres infErieurs, et au niveau des d6filEs anatomiques off on observe soit une simple dispersion temporelle de la conduction, soit un bloc partiel de conduction, mSme en l'absence de paralysie (Fig. 3). La conduction motrice proximale 6tudiEe par l'onde F) est le plus souvent normale (EBNER et al., 1981; MEIER et MOLL, 1982). Mais un ralentissement proximal 6tait observe par STRENGE et al. (1982) et mis en Evidence chez notre patient 2 (Tableau II, 26me examen). L'association d'une protEinorachie augmentEe et d'un ralenfissement proximal de la conduction peut Etre en faveur d'une dEmyElinisation proximale. Une compression par une structure anatomique peut Etre envisagEe sur l'aggravation clinique progressive et l'importance lors de l'examen 61ectrophysiologique de l'atteinte axonale au-dessous du bloc de conduction, comme chez le patient 1. Cette apprEciation peut &re difficile. La fibrillation au cours des blocs de conduction ne traduit pas toujours l'atteinte
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FIG. 3.--Blocs de conduction. En haut cas 2 (01.06.83): conduction motrice du nerf cubital droit; A: stimulation au poignet, A': au niveau de l'tpitrochlte. En bas cas 1 (28.01.85): conduction motrice au niveau du nerf sciatique poplit6 externe droit; B: stimulation ~ la cheville, B': au col du ptront. Darts les deux cas, la mesure de l'index M 6voque un bloc de conduction associ6 ~ une dispertion temporelle. Above case 2, 01.06.83: motor conduction along the right cubital nerve, A : stimulation at wrist, A ' : at medial epicondyle. Below case 1, 28.01.85: motor conduction along the right peroneal nerve; B : stimulation at ankle, B' : at fibula. In both cases, Index M measurement suggests a conduction block associated with temporal dispersion.
axonale (TROJABORG, 1978). EARL et al. (1964) rapportaient dans leur 6tude des dtficits sciatique polit6 externe et cubital bilattraux, en apparence progressifs, rgcuptrant au bout de deux ans en 6vitant pendant cette p6riode les gestes susceptibles de provoquer une compression de ces nerfs. Chez le patient 2, l'arthrose cervicale droite semble avoir favoris6 la paralysie car le dtficit apparut au niveau du membre sup6rieur droit, alors que le ralentissement des VCM 6tait comparable aux deux membres suptrieurs (Tableau II). Pour MEIER et MOLL (1982), l'~ge augmente le risque de paralysie. Ils constattrent des VCM plus ralenties chez des enfants n'ayant jamais prtsent6 de paralysie que chez des adultes ayant prgsent6 des dtficits. Le ralentissement des VCM est le plus souvent asymttrique, certaines VCM sont normales, ce qui ttmoigne de l'expression 61ectroclinique multifocale de l'affection et montre la ntcessit6 d'ttudier plusieurs nerfs. GORKE (1974)prgconise pour mettre ren 6vidence le ralentissement de mesurer les VCM au niveau des membres inftrieurs, plus la latence motrice du nerf mgdian. La survenue d'un dgficit dans un territoire nerveux off la VCM 6tait prgalablement ralentie a 6t6 rapportte par DEBRUYNE et al. (1980). Le patient 1 illustre ce fait avec l'installation d'une paralysie du sciatique poplit6 externe off la VCM 6tait ralentie trois mois auparavant (Tableau I, ler examen). On peut conseiller aux patients d'gviter les risques de compression des nerfs off les VCM sont les plus ralenties, comme on peut conseiller aux membres de leur famille porteurs de formes pfirement 61ectrophysiologiques, d'tviter les activitts physiques
ou les professions comportant des risques de compression nerveuse. Bien que l'ttude des VCM soit le plus souvent suffisante pour montrer les anomalies de conduction, l'ttude des VCS met en 6vidence des anomalies plus marqutes et plus prtcoces. L'atteinte sensitive prtdomine 6galement sur la partie distale des fibres. Dans l'ttude de BEHSE et al. (1972), le maximum de ralentissement des VCS et de diminution d'amplitude des PAS 6tait obtenu au niveau du mtdian par stimulation du 36me doigt. CRUZ MARTINEZ et al. (1977) notaient 6galement au niveau du mtdian un ralentissement de 39% de la VCS dans le trajet digitopalmaire, de 23% entre la paume de la main et le poignet et seulement de 10% au niveau de l'avant bras. Chez le ler patient, le ralentissement de la VCS 6tait le plus important au niveau du nerf mtdian entre l'index et le poignet (Fig. 4) (Tableau I, 2~me examen). Une compression relativement frtquente dans la vie quotidienne des nerfs interdigitaux au niveau des mains peut expliquer en partie cette prtdominan-
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FIG. 4. - - Conduction sensitive orthodromique au niveau du membre suptrieur droit, Cas 1,28.01.85. En bas, au niveau du nerf mtdian entre l'index et le poignet; au milieu, au niveau du nerf mtdian entre le pouce et le poignet; en haut, au niveau du nerf radial entre le pouce et 5 cm au dessus du poignet. Case 1, 28.01.85. Below, along median nerve from index to wrist; middle, along median nerve from thumb to wrist; above, along radial nerve from the thumb to 5 cm above wrist.
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NEUROPATHIE A TOMACULA
ce 6lectrophysiologique. Au niveau des membres inf6rieurs, les anomalies ne semblent pas plus importantes qu'aux membres sup6rieurs (CRuz MARTINEZ et al., 1977) mais permettent de faire des corr61ations avec l'bistopathologie. Trois types de 16sions histologiques coexistent: les tomacula &udi6es de fa~on d&aill6e par MADRID et BRADLEY(1975) et r6alisant des 6paississements de la gaine de my61ine de si6ge para- ou internodal - - la d6my61inisation segmentaire associ6e/t un processus de remy61inisation - - une striction axonale au niveau du tomaculum mise en 6vidence par BEHSE et al. en 1972. Les histogrammes des fibres my61inis6es montrent dans les formes les plus s6v+res une perte de distribution bimodale normale remplac6e par une distribution unimodale (patient 2, Fig. 1) par diminution du hombre des fibres my6linis6es de grand diam&re. Dans la litt6rature, sur certains histogrammes, quelques fibres de diam&re sup6rieur/t 20 # ont 6t6 isol6es, correspondant fi une section transversale au niveau d'un tomaculum. La comparaison des histogrammes des fibres my61inis6es avec la VCS (CRuz MARTINEZ et al., 1977) ou le potentiel d'action du nerf recueilli in vitro (BosCH et al., 1980) est plus en faveur d'une d6my61inisation que d'une diminution du nombre des fibres les plus larges fi l'origine du ralentissement des VCS. BEHSE et al. (1972), estiment que la striction axonale intervient 6galement darts ce ralentissement. Chez nos patients, la d6my61inisation segmentaire parait suffisante pour expliquer le ralentissement. D'autres facteurs non quantifiables sont 6galement susceptibles d'intervenir (BEHSE et BUCHTAL, 1978). I1 convient d'envisager la situation nosologique des observations que nous pr6sentons. Toutes les neuropathies avec hypersensibilit6 ~ la pression ne montrent pas la pr6sence de tomacula: (MAYER, 1975), et les tomacula ne sont pas sp6cifiques de la neuropathie h6r6ditaire avec hypersensibilit6 fi la pression. Ils ont 6t6 observ6s par BRADLEY et aL (1975) au cours de paralysies r6cidivantes familiales du plexus brachial, mais cependant n'ont pas 6t6 retrouv6s dans une observation identique de WINDEBANK (1984). La clinique de cette affection est diff6rente de celle de la neuropathie h6r6ditaire avec hypersensibilit6 /t la pression. Elle comporte des douleurs intenses et affecte surtout la femme pendant la grossesse et lors de l'accouchement. L'atteinte 61ectrophysiologique est de type axonal et limit6e aux membres sup6rieurs. Les cas de BRADLEYet al. (1975) pourraient repr6senter une forme de passage entre ces deux types de neuropathie ayant le marne mode de transmission et la mame pr6dominance g6ographique. Par contre, les
observations de neuropathies globulaires de DAYAN et al. (1968) peuvent &re consid6r6es comme une forme s6v6re progressive de neuropathie h6r6ditaire avec hypersensibilit6 ~t la pression. La pathog6nie reste inconnue, une insuffisance de la cellule de Schwann ~ synth&iser une gaine de my61ine normale parROt vraisemblable dans la formation des tomacula. La sensibilit6 particuli6re ~tl'isch6mie pourraR &re li6e ~ l'augmentation focale de la taiUe de la my61ine (DuBI et al., 1976). Des anomalies biocbimiques des lipides de la my61ine ont 6galement 6t6 mises en 6vidence (MADRID et BRADLEY, 1975; ROUSSEAUX, 1978; BARUALS et al., 1984). BIBLIOGRAPHIE ATTAL (CL.), ROBAIN(O.) and CHAPUIS (G.) Familial nerve trunk paralysis. Develop. Med. Child Neurol., 1975, 17: 787-792. BARUALS(J.K.), CLURY(G.), SULAIMAN(A.R.) and KINDER (D.) Hereditary sensory neuropathy liable to pressure palsies. Muscle Nerve., 1984, 7: 573-574. BEHSE (F.) and BUCHTAL(F.) Sensory action potentials and biopsy of the sural nerve in neuropathy. Brain, 1978, 101: 473-493. ]3EHSE (F.), BUCHTAL (F.), CARLSEN (F.) and KNAPPEIS (G.G.) Hereditary neuropathy with liability to pressure palsies. Electrophysiological and histopathological aspects. Brain, 1972, 95: 777-794. B o s c h (E.P.), CHUI (H.C.), MARTIN (M.A.) and CANCILLA (P.A.) Brachial plexus involvement in familial pressuresensitive neuropathy: electrophysiological and morphological findings. Ann. Neurol., 1980, 8: 620-624. BRADLEY(W.G.), MADRID (R.), THRUSH (D.C.) and CAMPBELL (M.J.) Recurrent brachial plexus neuropathy. Brain, 1975, 98: 381-398. CASTAIGNE(P.), CATHALA(H.P.), BRUNET(P.), HAUW(JJ.)
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