Ostéomyélite infectieuse ou inflammatoire : démarche diagnostique en imagerie

Ostéomyélite infectieuse ou inflammatoire : démarche diagnostique en imagerie

Table ronde Ostéomyélite infectieuse ou inflammatoire : démarche diagnostique et prise en charge Ostéomyélite infectieuse ou inflammatoire : démarche ...

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Table ronde Ostéomyélite infectieuse ou inflammatoire : démarche diagnostique et prise en charge

Ostéomyélite infectieuse ou inflammatoire : démarche diagnostique en imagerie C. Adamsbauma, b, *, C. Falipb, S. Tammamb, V. Merzougb, F. Sariegob, S. Franchi-Abellab aUniversité bService

Paris Descartes, Faculté de Médecine, Paris, France d’Imagerie Pédiatrique, CHU Bicêtre, AP-HP, Paris, France

L

’approche en imagerie des infections ostéo-articulaires a évolué depuis une vingtaine d’années et l’IRM est devenue l’imagerie «  avancée  » de choix dans ce contexte d’ostéomyélite. En effet, le développement des séquences «  corps entier  », la fréquence des ostéomyélites à MRSA (methicilline resistant Staphylococcus aureus) très pourvoyeuses d’abcès des tissus mous et de thromboses veineuses [1] et enfin, la directive EURATOM 97/43 incitant à privilégier les méthodes non exposantes aux rayons X comme l’IRM et l’échographie, sont autant de raisons convergeant à utiliser l’IRM. Néanmoins, la stratégie diagnostique en imagerie, dans ce contexte, repose toujours, en premier lieu, sur des radiographies [2]. Dans les 2 cas, infectieux ou inflammatoire, le siège préférentiel de l’ostéomyélite est métaphysaire.

1. L’infection ostéo-articulaire L’imagerie a un intérêt majeur car les résultats des prélèvements sanguins ou osseux sont négatifs chez plus de la moitié des enfants. Le siège de l’ostéomyélite, qui, par définition est d’origine hématogène, est préférentiellement métaphysaire et concerne surtout les membres inférieurs (70  %) et le genou (environ 1/3 des cas). Les équivalents métaphysaires du squelette axial, comme le cartilage en Y de l’aile iliaque, peuvent être atteints. Ce tropisme métaphysaire est expliqué par la vascularisation riche, liée à l’activité métabolique importante, et par les particularités histologiques locales (veinules dépourvues de valve anti-reflux, endothélium discontinu) qui facilitent l’invasion bactérienne. À partir de l’os, l’infection s’étend à travers le cortex dans l’espace sous périosté et la rupture du périoste peut être responsable d’un abcès des parties molles. Après l’âge de 18 mois, la physe constitue une barrière relative à la diffusion de l’infection. Les formes typiques d’ostéomyélite aiguë, avec début brutal, fièvre élevée, impotence fonctionnelle et douleur métaphysaire provoquée, sont actuellement rares. Les radiographies (face et profil) sont systématiques et urgentes. Elles ne montrent

*Auteur correspondant. e-mail : [email protected]

72 © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Archives de Pédiatrie 2012;19:72-73

en général aucune anomalie mais sont nécessaires à exclure d’autres pathologies comme une tumeur. En pratique, il faut considérer qu’une radiographie normale dans un contexte de douleurs fébriles est un argument diagnostique en faveur de l’ostéomyélite aiguë [3]. L’IRM permet ensuite de répondre à 2 questions : • y a-t-il une infection osseuse versus cellulite ? • et si oui, existe-t-il un abcès pour lequel un drainage pourrait être discuté ? En IRM, le premier signe de l’infection est un œdème de la moelle osseuse et des tissus mous environnants (hypersignal en T2 et STIR), d’apparition très précoce. Une collection purulente se présente comme une image en cocarde, après injection de produit de contraste, avec rehaussement périphérique et centre en hyposignal [4]. La décision de drainage se prend à la fois sur le volume de la collection et la réponse clinique après quelques jours d’antibiothérapie. Le principal diagnostic différentiel concerne les variantes de la normale, car la moelle hématopoïétique est encore abondante chez les jeunes enfants [5]. La normalité des radiographies permet d’éliminer une tumeur. En cas de doute, la présence de « globules graisseux » correspondant à une nécrose du tissu adipeux intramédullaire est bien repérable sur les séquences pondérées en T1 et constitue un argument en faveur d’une ostéomyélite. L’échographie, simple et rapide en urgence, permet de montrer un œdème ou un abcès des parties molles juxta-corticales et/ou des appositions périostées. Il existe souvent une hyperhémie visible au doppler. La détection d’un épanchement intra-articulaire permet de localiser une articulation pathologique, surtout chez les jeunes enfants où l’examen clinique peut être difficile, mais la nature septique ou simplement réactionnelle ne peut pas être déterminée. Lorsque le siège de la douleur est imprécis ou douteux, une imagerie « corps entier » est indiquée. La scintigraphie au Technetium 99 est clairement en recul avec une sensibilité d’environ 80  %, une spécificité de 50  %. Le FDG PET est beaucoup plus sensible (95  %) et spécifique (87  %) mais n’est pas utilisé en routine en pédiatrie. Ces 2 techniques exposent aux rayons X et sont substituées, dès que possible par l’IRM corps entier. L’ostéomyélite subaiguë et chronique est actuellement la forme la plus fréquemment rencontrée, avec un tableau clinique abâtardi et un syndrome inflammatoire variable. Les radiographies, systématiques, montrent une ostéolyse plus ou moins étendue,

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entourée d’une condensation périphérique, avec parfois l’aspect classique d’abcès de Brodie. Il peut exister des appositions périostées et des anomalies épiphysaires. L’IRM permet là encore de préciser l’extension de la lésion intraosseuse et dans les parties molles. Dans l’ostéomyélite chronique, l’aspect peut être pseudotumoral. La présence d’un séquestre, caractéristique de l’infection chronique, peut bénéficier de quelques coupes sans injection au scanner du fait de son caractère calcifié. Le diagnostic de certitude se fait sur l’étude histologique et bactériologique de prélèvements locaux et un des principaux diagnostics différentiels est l’ostéomyélite chronique multifocale récurrente.

2. L’ostéomyélite chronique multifocale récurrente (OCMR) Il s’agit d’une maladie auto-inflammatoire, impliquant plusieurs segments osseux. L’OCMR peut débuter chez de jeunes enfants, à partir de l’âge de 3  ans et son diagnostic peut être difficile au début. Lorsque l’atteinte est monostotique, le diagnostic différentiel d’avec une infection bactérienne n’est pas possible en imagerie car aucun élément n’est spécifique. Sur les radiographies, il s’agit souvent d’une lésion mixte, lytique et condensante, juxtaphysaire, avec hyperostose et/ou appositions périostées. En phase initiale, l’élargissement de la physe peut être isolé, irrégulier et subtil. L’atteinte articulaire est possible. En IRM, l’œdème osseux périlésionnel est fréquent avec, parfois, présence d’une masse des parties molles et épaississement périosté. L’élément fondamental du diagnostic d’OCMR est le siège des lésions : métaphyses des os longs (environ 50 %), rachis (environ 20 %), bassin (environ 10 %) clavicule (moins de 10 %). L’atteinte bilatérale des métaphyses est très évocatrice  [6]. Certaines atteintes particulières doivent faire évoquer le diagnostic

d’OCMR : clavicule, mandibule, vertèbres avec aspect irrégulier du plateau vertébral et diminution de hauteur du corps vertébral, à ne pas confondre avec la vertebra plana observée dans l’histiocytose langerhansienne. Ainsi, la découverte de lésions infra-cliniques en imagerie est fondamentale et permet de surseoir à la biopsie. Il est recommandé de pratiquer une IRM corps entier dès que le diagnostic d’OCMR peut être cliniquement ou radiologiquement évoqué. En conclusion, l’approche en imagerie a considérablement évolué ces dernières années. L’IRM corps entier permet de détecter une atteinte multifocale parfois infraclinique, d’importance diagnostique capitale en faveur de l’OCMR. Lorsque le diagnostic d’ostéomyélite infectieuse ou inflammatoire est bien établi, la répétition des IRM n’est pas nécessaire si la réponse au traitement est satisfaisante.

Références [1] Bocchini CE, Hulten KG, Mason EO Jr, et al. Panton-Valentine leukocidin genes are associated with enhanced inflammatory response and local disease in acute hematogenous Staphylococcus aureus osteomyelitis in children. Pediatrics 2006;117:433-40. [2] Jaramillo D. Infection: musculoskeletal. Pediatr Radiol 2011;41(Suppl 1):S127-34. [3] Azoulay R, Chalard F, Sebag G. Infections ostéo-articulaires. In: C Adamsbaum. Imagerie pédiatrique et fœtale. Paris, Flammarion, Médecine-Sciences, 2007:357-72 [4] Browne LP, Guillerman RP, Orth RC, et al. Community-acquired staphylococcal musculoskeletal infection in infants and young children: necessity of contrast-enhanced MRI for the diagnosis of growth cartilage involvement. AJR Am J Roentgenol 2012;198:194-9. [5] Laor T, Jaramillo D. MR imaging insights into skeletal maturation: what is normal? Radiology 2009;250:28-38. [6] Wipff J, Adamsbaum C, Kahan A, et al. Chronic recurrent multifocal osteomyelitis. Joint Bone Spine 2011;78:555-60.

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