Parce qu’il est possible de cicatriser… !

Parce qu’il est possible de cicatriser… !

Journal des Maladies Vasculaires (2016) 41, 305—306 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com ÉDITORIAL Parce qu’il est possible...

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Journal des Maladies Vasculaires (2016) 41, 305—306

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

ÉDITORIAL

Parce qu’il est possible de cicatriser. . . ! Because it is possible to heal. . .!

Ce numéro consacré à la cicatrisation des plaies d’origine vasculaire fait suite à l’organisation, lors du cinquantième congrès du Collège franc ¸ais de pathologie vasculaire, d’une séance intitulée « L’infirmière et la cicatrisation des plaies ». Il s’agissait de mettre l’accent non seulement sur les moyens techniques qui permettent la cicatrisation mais également sur la coordination des acteurs parmi lesquels les infirmières et infirmiers jouent un rôle central. L’optimisation du parcours du patient, toujours utile quelle que soit la pathologie traitée, revêt en effet ici une importance particulière. Encore fallait-il transformer les communications orales en articles didactiques. Tous les auteurs ont accepté de se prêter à l’exercice profitant de l’expression écrite pour enrichir leur propos, notamment sur le plan iconographique. Par ailleurs, il nous a paru logique d’inclure, dans ce numéro, un article original qui n’a pas fait l’objet d’une communication orale mais a été présenté sous forme de poster, lequel a rec ¸u le prix du meilleur poster lors de ce même congrès. Il s’agit du travail de Gaëlle Mouloise et de Caroline Fourgeaud — l’une infirmière, l’autre médecin vasculaire — consacré à l’apport de la greffe cutanée en pastilles pour réduire la douleur des ulcères hyperalgiques. L’importance du sujet contrastant avec le peu de publications dans la littérature internationale explique que l’article, une fois n’est pas coutume, soit proposé à nos lecteurs dans deux versions différentes : l’une en franc ¸ais et l’autre en anglais. Ainsi composé ce numéro, sans prétendre à l’exhaustivité, aborde les principales questions soulevées par la cicatrisation des plaies d’origine vasculaire [1,2]. C’est d’abord l’énoncé des raisons de s’inquiéter devant un ulcère de jambe au premier plan desquelles l’infection, surtout quand elle a les caractères d’une dermohypodermite bactérienne aiguë [3]. Mais la dégradation brutale d’un ulcère peut aussi s’expliquer par une intolérance à un produit appliqué lors des soins. La situation http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2016.08.003 e par Elsevier Masson SAS. 0398-0499/© 2016 Publi´

est plus préoccupante quand l’aggravation est liée à une artériopathie sous-jacente dont le retentissement hémodynamique doit être quantifié avec précision puisqu’il s’agit de déterminer si une revascularisation est ou non indispensable pour permettre la cicatrisation. Inquiétante par son aspect initial et l’intensité de la douleur qu’elle engendre, l’angiodermite nécrotique est pourtant souvent de bon pronostic dès lors que le diagnostic est porté précocement et qu’une greffe en pastilles est réalisée ne serait-ce que pour réduire la composante douloureuse. Quant aux carcinomes épidermoïdes, ils sont rares et tout l’enjeu est d’y penser devant un ulcère atypique et de porter l’indication d’une biopsie. La prise en charge infirmière d’un ulcère de jambe relève avant tout de gestes simples, aisément applicables à trois conditions : qu’ils aient été correctement enseignés, qu’ils soient prescrits avec suffisamment de détails et que le temps consacré à les réaliser soit suffisant [4]. Ainsi, le lavage de la plaie et de la jambe à l’eau et au savon, l’hydratation de la peau et la protection des zones fragiles ne requièrent pas un haut degré de spécialisation. En revanche, déterger efficacement la fibrine sans accentuer la douleur, poser correctement des bandes de compression ou réaliser au lit du malade des gestes de « petite chirurgie » pour éviter un passage au bloc opératoire supposent une expertise qui ne peut être acquise qu’après une formation adaptée. Mal réalisés ces gestes risquent de ne pas être efficaces ou pire, de contribuer à la dégradation de la plaie avec pour corollaire habituel l’accentuation de la douleur. La douleur est, en effet, la principale préoccupation des malades souffrant de plaies d’origine vasculaire et ce quelle que soit la cause de l’ulcère, y compris en l’absence de participation ischémique importante. Comprendre les mécanismes de la douleur et quantifier son intensité sont des préalables indispensables [5]. La stratégie est différente selon que la douleur est permanente ou n’intervient qu’au moment du soin. Les étapes les plus pénibles sont

306 le retrait du pansement et la détersion. Différents moyens existent pour réduire la composante douloureuse. Ils ne sont pas exclusivement médicamenteux à commencer par l’anesthésie locale. Ainsi, l’hypno-analgésie se développe mais nécessite une expérience qui est encore loin d’être largement partagée. Là encore, la qualité des échanges entre médecins et soignants non-médecins est primordiale. Quant à la greffe cutanée en pastilles, elle permet de réduire les délais de cicatrisation mais son intérêt est aujourd’hui démontré pour soulager la douleur des ulcères de jambe, qu’il s’agisse de la douleur permanente ou des pics douloureux [6]. Elle est efficace pour tous les types de plaies et particulièrement en cas d’angiodermite nécrotique. La compression, toujours indispensable en cas d’ulcère d’origine veineuse, est en fait indiquée dès lors qu’il existe un œdème. L’artériopathie des membres inférieurs n’est qu’une contre-indication relative mais le statut artériel du malade doit toujours être précisé. La mesure de l’index de pression systolique est ainsi obligatoire en cas d’ulcère de jambe. Le recours à une compression par bande est souvent indispensable en cas de plaie si le pansement est volumineux auquel cas la qualité de la mise en place du bandage conditionne l’efficacité de la compression. Les bandes élastiques simples, pourtant largement utilisées, n’ont en réalité aucune place en première intention en cas d’ulcère veineux ou à prédominance veineuse [7]. Bien des conditions sont aujourd’hui réunies qui devraient permettre d’améliorer la prise en charge des plaies chroniques d’origine vasculaire : l’éducation des patients indispensable pour prévenir les récidives, la formation des médecins et des soignants non-médecins, la création de consultations ou de centres experts dédiés à la cicatrisation [8], l’émergence d’un métier spécifique « l’infirmière pansement » sans oublier les outils numériques qui permettent notamment de suivre l’évolution des plaies sur les écrans des smartphones. Reste à réaliser l’évaluation médico-économique qui démontrera le bénéfice considérable pour le budget de la santé d’une telle démarche et

Éditorial l’impact positif de la qualité sur les coûts y compris quand des moyens supplémentaires sont nécessaires.

Déclaration de liens d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.

Références [1] Marola S, Ferrarese A, Solej M, Enrico S, Nano M, Martino V. Management of venous ulcers: state of the art. Int J Surg 2016, http://dx.doi.org/10.1016/j.ijsu.2016.06.015. [2] Vivas A, Lev-Tov H, Kirsner RS. Venous leg ulcers. Ann Intern Med 2016;165:ITC17—32. [3] Lazareth I. Quand s’inquiéter devant un ulcère de jambe d’origine vasculaire ? J Mal Vasc 2016, http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2016.07.008. [4] Goulet de Rugy C, Lazareth I, You C, Stansal A, Priollet P. Quels « petits » gestes infirmiers rendent de grands services en cas de plaies chroniques d’origine vasculaire ? J Mal Vasc 2016, http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2016.07.005. [5] Stansal A, Lazareth I, D’Ussel M, Priollet P. Comment réduire la douleur liée à un ulcère de jambe ? J Mal Vasc 2016, http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2016.07.004. [6] Fourgeaud C, Mouloise G, Michon-Pasturel U, Bonhomme S, Lazareth I, Meaume S, et al. Intérêt de la greffe cutanée en pastilles dans la prise en charge d’ulcères algiques. J Mal Vasc 2016, http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2016.08.002. [7] Senet P, Monfort JB, Debure C. Quelle compression veineuse utiliser en 2016 pour un ulcère de jambe ? J Mal Vasc 2016, http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2016.07.007. [8] Sfeir D, Lazareth I, Stansal A, Ghaffari P, Michon-Pasturel U, Bonhomme S, et al. Ulcères de jambe : une expertise hospitalière est-elle souhaitable ? J Mal Vasc 2016;41:18—25.

Pascal Priollet Service de médecine vasculaire, groupe hospitalier Paris Saint-Joseph, 185, rue Raymond-Losserand, 75674 Paris cedex 14, France Adresse e-mail : [email protected]