Parotidite bactérienne chez une patiente immunodéprimée en réanimation adulte

Parotidite bactérienne chez une patiente immunodéprimée en réanimation adulte

Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 32 (2013) 615–617 Cas clinique Parotidite bacte´rienne chez une patiente immunode´prime´e en re...

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Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 32 (2013) 615–617

Cas clinique

Parotidite bacte´rienne chez une patiente immunode´prime´e en re´animation adulte Bacterial parotitis in an immunocompromised patient in adult ICU O. Vassal *, C. Bernet, F. Wallet, A. Friggeri, V. Piriou Service d’anesthe´sie-re´animation, universite´ de Lyon, CHU Lyon-Sud, 415, chemin du grand-Revoyet, 69495 Pierre-Be´nite, France

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Historique de l’article : Rec¸u le 11 mai 2013 Accepte´ le 6 juin 2013

La parotidite bacte´rienne est une affection retrouve´e le plus souvent chez l’enfant. Elle est ge´ne´ralement due a` une infection a` Staphylococcus aureus. Son pronostic est habituellement favorable. Chez l’adulte, le tableau clinique est souvent atypique, chez des patients avec des comorbidite´s. Le diagnostic est de`s lors plus difficile notamment en re´animation. Les germes en cause sont diffe´rents de ceux retrouve´s en pe´diatrie et le pronostic est potentiellement plus se´ve`re. Nous rapportons ici un cas de parotidite bacte´rienne a` bacille a` Gram ne´gatif et en discuterons la prise en charge. ß 2013 Socie´te´ franc¸aise d’anesthe´sie et de re´animation (Sfar). Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

Mots cle´s : Parotidite bacte´rienne aigue¨ Pseudomonas aeruginosa Antibiothe´rapie

A B S T R A C T

Keywords: Bacterial parotitis Pseudomonas aeruginosa Antibiotherapy

Bacterial parotitis is a common childhood disease with a favorable outcome. Staphylococcus aureus is the most frequently involved pathogen. Clinical presentation in adult patients can be misleading, Onset occurs in patients with multiple comorbidities, making diagnosis difficult – particularly in ICU. Different pathogens are found in adults with worse outcomes observed. We report here the case of a critically ill patient and discuss diagnosis and management of bacterial parotitis. ß 2013 Socie´te´ franc¸aise d’anesthe´sie et de re´animation (Sfar). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

1. Introduction La parotidite bacte´rienne aigue¨ est une infection rencontre´e le plus souvent chez l’enfant [1] chez qui elle est ge´ne´ralement de bon pronostic. Staphylococcus aureus est le principal germe retrouve´. Nous rapportons ici le cas d’une patiente de re´animation dont l’e´tat s’est brutalement alte´re´ suite a` une parotidite aigue¨ a` Pseudomonas aeruginosa.

2. Observation Une patiente de 72 ans ayant be´ne´ficie´ re´cemment d’une deuxie`me greffe re´nale e´tait hospitalise´e en re´animation dans les suites de l’e´vacuation d’un he´matome pe´rire´nal secondaire a` une ponction-biopsie re´alise´e pour une dysfonction de greffon. Les ante´ce´dents de cette patiente e´taient marque´s par une insuffisance re´nale chronique terminale post-ne´phrectomie pour * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (O. Vassal).

hydrone´phrose. Elle be´ne´ficiait alors d’une premie`re transplantation re´nale. Quelques anne´es plus tard, devant la survenue d’un rejet chronique, une deuxie`me transplantation re´nale e´tait re´alise´e. Parmi ses autres ante´ce´dents, on notait : une hypertension arte´rielle, une dyslipide´mie, un diabe`te cortico-induit et une arythmie comple`te par fibrillation auriculaire. A` son arrive´e en re´animation, la patiente pre´sentait une confusion associe´e a` une hypertension arte´rielle se´ve`re. Devant ce tableau clinique et la prise d’un traitement immunosuppresseur par anticalcineurines (tacrolimus), le diagnostic de Post-Reversible Encephalopathy Syndrome (PRES) syndrome e´tait e´voque´. Ce dernier e´tait finalement infirme´ apre`s la re´alisation d’un e´lectroence´phalogramme et d’une imagerie par re´sonance magne´tique ce´re´brale. Cependant, le traitement par tacrolimus e´tait arreˆte´ pour du sirolimus et apre`s controˆle de la tension arte´rielle graˆce a` un traitement antihypertenseur et la correction des troubles me´taboliques par la mise en place d’une dialyse, l’e´tat neurologique de la patiente s’ame´liorait. Cependant, l’e´volution e´tait marque´e par la survenue d’une de´tresse respiratoire. On constatait dans le meˆme temps une masse de la joue gauche d’apparition rapidement progressive. Devant le risque d’intubation difficile, une

0750-7658/$ – see front matter ß 2013 Socie´te´ franc¸aise d’anesthe´sie et de re´animation (Sfar). Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.06.005

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Fig. 1. TDM cervical montrant une infiltration de la glande parotidite et des tissus sous-cutane´s de la re´gion cervico-faciale.

intubation sous fibroscopie e´tait de´cide´e. Lors du geste, on notait un œde`me larynge´. Une antibiothe´rapie probabiliste par pipe´racilline–tazobactam e´tait instaure´e. Une tomodensitome´trie cervicale injecte´e e´tait ensuite re´alise´e en urgence. Une infiltration de la glande parotide et des tissus sous-cutane´s de la re´gion cervicofaciale sans collection visible e´tait note´e (Fig. 1). Aucune indication chirurgicale n’e´tait retenue. Seul un pre´le`vement de liquide purulent issu du canal de Ste´non apre`s pression de la glande parotide e´tait re´alise´ en vue d’un examen bacte´riologique. Ce dernier mettait en e´vidence un P. aeruginosa multisensible. A` 48 heures, le scanner de controˆle montrait en plus des le´sions parotidiennes identiques, la pre´sence d’une thrombose de la veine jugulaire interne gauche. Le traitement consistait alors en une poursuite de l’antibiothe´rapie pour une dure´e totale de 15 jours et une anticoagulation par he´parine. L’e´volution sur le plan infectieux e´tait favorable. La patiente sortait de re´animation apre`s quelques jours de prise en charge. 3. Discussion La parotide est la glande salivaire la plus souvent implique´e dans les infections de la sphe`re ORL. Les causes en sont, d’une part, sa production de salive de´pourvue d’e´le´ments antiinfectieux et, d’autre part, la conformation du canal de Ste´non qui favorise la stase du flux salivaire [2]. Un flux re´trograde de la cavite´ buccale dans la parotide peut e´galement eˆtre retrouve´ dans un contexte de de´shydratation (diminution de la production de salive et stase) ou de modifications adaptatives de la conformation du canal de Ste´non (dilatation, obstruction ou variations du calibre du canal) [3]. L’infection peut se faire soit par contigue¨, soit par voie he´matoge`ne [4]. Si les parotidites bacte´riennes sont des infections rares chez les nouveau-ne´s et les pre´mature´s [5], elles le sont encore plus chez l’adulte. La parotidite suppure´e survient ge´ne´ralement chez les patients aˆge´s, de´shydrate´s, en pe´riode postope´ratoire [6,7] ou intube´s, [8] notamment apre`s une chirurgie abdominale majeure (par perte liquidienne importante, mise au repos du tube digestif et absence de stimulus se´cre´toire salivaire par la mastication) [9]. Les autres facteurs pre´disposants comprennent, la pre´sence d’affections me´dicales (insuffisance re´nale ou he´patique, de´nutrition, diabe`te, hypothyroı¨die, anorexie, immunode´pression), l’usage de me´dicaments anticholinergiques ou re´duisant le flux salivaire (antihistaminiques et diure´tiques) [10,11], la pre´sence d’un calcul salivaire lithiasique et les tumeurs de la cavite´ buccale [12].

La parotidite suppure´e bacte´rienne est caracte´rise´e par l’apparition soudaine d’une tume´faction douloureuse et e´rythe´mateuse des zones pre´- et re´tro-auriculaire. L’atteinte est ge´ne´ralement unilate´rale. Un trismus, une dysphagie et des signes ge´ne´raux marque´s peuvent eˆtre associe´s. A` l’examen, un e´coulement purulent issu du canal de Ste´non est pathognomonique de l’infection [13]. Il doit eˆtre pre´leve´ en vue d’une documentation bacte´riologique. L’aspiration a` l’aiguille dans la glande est une alternative a` prendre en compte [12]. Le diagnostic est principalement clinique, mais une e´le´vation de l’amylase se´rique en l’absence d’une pancre´atite est en faveur d’un proble`me parotidien. L’imagerie peut eˆtre utile pour faire la diffe´rence entre une parotidite suppure´e aigue¨ et un abce`s ou entre une collection et une tumeur solide. Les options d’imagerie comprennent l’e´chographie, la tomodensitome´trie, l’imagerie par re´sonance magne´tique et la sialographie. Notre patiente pre´sentait plusieurs facteurs favorisants pre´ˆ ne, de´shydratation, diure´tiques, insuffice´demment de´crits (jeu sance re´nale, chirurgie abdominale, hydroxyzine et diure´tiques) et e´tait de plus immunode´prime´e suite aux transplantations re´nales avec un traitement immunosuppresseur au long cours (anticalcineurines et corticoı¨des). D’un point de vue clinique, le tableau e´tait typique, mais devant la rarete´ de ce type d’infection, celle-ci n’e´tait e´voque´e que sur les donne´es de la tomodensitome´trie. L’analyse microbiologique des infections parotidiennes re´ve`le un spectre fre´quemment polymicrobien. S. aureus est de loin le pathoge`ne le plus fre´quemment isole´. Les bacte´ries anae´robies et les bacilles a` Gram ne´gatif sont e´galement retrouve´s [14]. Ces derniers sont de plus en plus fre´quents et principalement observe´s chez les patients hospitalise´s [5,12,14,15]. Le traitement est essentiellement symptomatique centre´ sur une antibiothe´rapie adapte´e. Chez les patients hospitalise´s ou immunode´prime´s, l’antibiothe´rapie doit cibler e´galement les ente´robacte´ries et P. aeruginosa [2]. La dure´e de l’antibiothe´rapie est mal codifie´e, ge´ne´ralement de dix a` 14 jours [2]. Un traitement me´dical est le plus souvent suffisant [15]. La diminution de l’œde`me survient de`s 24 a` 48 heures [5]. L’absence d’ame´lioration doit faire rechercher un abce`s. Dans le cas pre´sente´, l’e´volution a e´te´ favorable apre`s un traitement me´dical adapte´ par antibiotiques a` large spectre devant l’immunode´pression et les comorbidite´s de la patiente. Les diagnostics diffe´rentiels a` e´voquer sont les parotidites non bacte´riennes (oreillons, virus de la grippe, Coxsackie, EBV, HSV et CMV) [16]. 4. Conclusion Chez l’adulte, la parotidite aigue¨ bacte´rienne est retrouve´e chez des patients polypathologiques et se pre´sente souvent sous une forme clinique atypique potentiellement se´ve`re rendant son diagnostic difficile notamment en re´animation. Les germes retrouve´s sont diffe´rents de la forme pe´diatrique. Il faut penser a` e´voquer le diagnostic devant l’association de certains facteurs de risques, car l’e´volution est le plus souvent favorable apre`s un traitement me´dical adapte´. ˆ ts De´claration d’inte´re Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Decembrino L, Ruffinazzi G, Russo F, Manzoni P, Stronati M. Monolateral suppurative parotitis in a neonate and review of literature. Int J Pediatr Otorhinolaryngol 2012;76:930–3.

O. Vassal et al. / Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 32 (2013) 615–617 [2] Coutaz M, Morisod J. Parotidite bacte´rienne aigue¨ chez le sujet aˆge´. ORL. Med Hyg 2009;219:1942–5. [3] Schwab J, Baroody F. Neonatal suppurative parotitis: a case report. Clin Pediatr 2003;42:565–6. [4] Tan VES, Goh BS. Parotid abscess: a five-year review–clinical presentation, diagnosis and management. J Laryngol Otol 2007;121:872–9. [5] Spiegel R, Miron D, Sakran W, Horovitz Y. Acute neonatal suppurative parotitis: case reports and review. Pediatr Infect Dis J 2004;23:76–8. [6] Lamey PJ, Boyle MA, MacFarlane TW, Samaranayake LP. Acute suppurative parotitis in outpatients: microbiologic and posttreatment sialographic findings. Oral Surg Oral Med Oral Pathol 1987;63:37–41. [7] Raad II, Sabbagh MF, Caranasos GJ. Acute bacterial sialadenitis: a study of 29 cases and review. Rev Infect Dis 1990;12:591–601. [8] Brook I. The swollen neck. Cervical lymphadenitis, parotitis, thyroiditis, and infected cysts. Infect Dis Clin North Am 1988;2:221–36. [9] Rice DH. Salivary gland disorders: neoplastic and nonneoplastic. Med Clin North Am 1999;83:197–218.

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